« Pour réaliser une chose extraordinaire, commencez par la rêver. Ensuite, réveillez-vous calmement et allez jusqu'au bout de votre rêve sans jamais vous laisser décourager. » (Walt Disney)
I believe death is not a pain. I believe there is much worse
.
Raspoutine n'aurait jamais pensé qu'une telle sorcellerie s’abattrait sur lui. Et alors qu'il pensait cela, il ne se doutait même pas de l'ironie de cette phrase. Il avait fini par comprendre, faire les liens. Enfin, comprendre le plus gros. Parce qu'en réalité, tout lui était tombé violemment sur la tête. Il ne comprenait absolument rien.
Anastasia ne l'avait pas dit, mais il avait été clair que la disparition des Romanov avait été causée par lui même. Il était devenu assez puissant pour détruire la plus grande famille de Russie, assez noir d'esprit attenter à la vie de toutes ces personnes.
Comment ? Pourquoi ? C'était sans doute la pire des malédictions : se réveiller en apprenant que vous avez été emporté par la noirceur, si bien que vous avez détruit de nombreuses vies, et sans souvenir de tout cela, avec juste le monde qui vous regarde comme cette jeune loki (quoi que ça veuille dire) le faisait.
Converser avec l'Impératrice lui avait fait du bien, mais l'avait blessé un peu : elle était distante. S'il avait bien compris, elle avait toutes les raisons pour l'être encore plus. Quant à Anastasia... elle se montrait compréhensive également, il lui en était reconnaissant, puisqu'il ne lui était pas très compliqué de comprendre que cela n'était pas évident.
C'est ainsi qu'il découvrit Storybrooke, le nouveau monde des actuels Romanov, dont la porte avait été ouverte par un étrange artefact, une fois que les fantômes de la famille impériale s'en est allée, sans lui laisser le temps de prononcer quelques hommages... et excuses.
Storybrooke... si ce réveil bouleversant avait fait perdre ses repères, ce monde était tout aussi déstabilisant. C'était un paysage bien farfelu qui se dessinait là. Anastasia vivait dans un monde étrange. Ca en serait presque drôle.
Grigori ? La femme qui l'avait sauvé du froid à son réveil s'était approchée de lui. Venez avec moi. Nous allons aller à l'hôpital... Et je vais vous accueillir chez moi par la suite. J'ai toute la place disponible et puis... Être avec une personne familière, ça devrait vous aider.
Grigori la regarda d'un air étonné. Étonné et plein de gratitude à la fois. Après ce qu'il avait découvert de ce passé dérobé, il n'aurait pas parié sur une telle attention.
Alors qu'ils se dirigeaient vers ledit hôpital, il ne put s'empêcher de lui dire de nouveau :
Je vous remercie madame Anita pour votre offre, sincèrement. Anita. Pas Madame. Anita lui sourit. Et arrêtez de me remercier... C'est normal, je peux vous héberger sans souci...
Il lui rendit son sourire, sans ajouter davantage, relevant tout de même la force de l'attention. Raspoutine porta son attention de nouveau vers ce monde... étrange.
Pourquoi il y a tous ces fils noirs suspendus à côtés des voies ? Votre monde est surprenant !
J'imagine que pour vous qui venez du 20ème siècle, ça doit être étrange...Ces fils nous servent à transporter l'électricité dans nos foyers. Le confort s'est drôlement amélioré depuis votre époque. Mais ne vous en faites pas. Nous allons avoir le temps et je vous expliquerai tout ça
Tout ça l'intriguait beaucoup, si bien qu'il n'ajouta rien de plus, se contentant d'observer ce nouveau paysage, se demandant qu'elle genre de nouvelle vie l'attendait ici.
S’il y avait bien une chose que je détestais, c’était les sermons. Je n’en avais jamais vraiment eu besoin d’en ma vie – quoi que Vladimir ai pu en dire – et je ne considérais pas Aloysius comme quelqu’un qui m’en avait fait. Au contraire, il m’avait plutôt permis de trouver par moi-même une voie à emprunter… Même si elle n’avait pas du tout été bénéfique pour l’un comme pour l’autre. Au contraire, il avait tissé une toile de massacre dans cet esprit qui était le mien et je commençais à peine à émerger la tête hors de l’eau ; il me restait encore beaucoup de travail. Beaucoup de choses à mettre en ordre, à poser, à accepter ou même concevoir… Mais j’avais coupé ce lien qui était censé nous unir dans un monde aussi putride que détestable. J’avais mis fin à nos échanges et laissé les cauchemars revenir me hanter certaines nuits. C’était un mal pour un bien.
J’observai les personnes qui avaient participé à cette aventure s’éloigner les unes après les autres. Une bien étrange collaboration d’un temps, de quelques jours, s’égrainant sous la fraîcheur mordante de ce mois de décembre… Je jetai un coup d’œil à Abigaëlle, somnolant dans sa couverture et bercée par les bras d’Anastasia comme elle l’avait toujours été. Elle était vivante, en bonne santé et plus ou moins apaisée. Comme si toute cette histoire n’avait été qu’une maigre passade pour elle, qu’elle oublierait sans doute assez vite finalement. Les enfants avaient une de ces capacités folles à effacer de leur mémoire les évènements indésirables pour garder exclusivement les meilleurs ou les primaires… Quand la peur n’était pas inhérente à leur condition.
Pas fâché d’être de nouveau tranquilles – pas l’ombre d’une chauve-souris à l’horizon – je me baissai pour caresser la tête de Winston qui semblait des plus heureux de retrouver le bitume de Storybrooke, je me tournais vers l’autre problème de taille : ma mère. Kseniya avait eut un haut-le-cœur sous le coup de téléportation et s’était assise sur l’une des malles pour reprendre son souffle et ses esprits… Qu’est-ce qu’elle faisait là ? Qu’est-ce qui lui avait pris d’insister à ce point pour venir avec nous ? Certes, je devrais culpabiliser d’être parti dans une sorte d’autre monde par rapport à elle ; mais de là à la retrouver brutalement et accepter sa présence, il y avait encore beaucoup de travail à fournir.
Cette dernière remarqua que je l’observai et se releva, étirant ses mains au-dessus de sa tête avant de faire quelques pas pour observer la grande place. Nul doute qu’elle ne tarderait pas à explorer la ville à sa manière, s’extasiant sans doute du chic des américains mais les rabrouant de leur stupidité débordante et de leurs manières rustres.
« Qu’est-ce que tu vas faire, maintenant ? »
Demandai-je, plus par politesse qu’autre chose. J’avais déjà donné dans les invités surprises, avec Gringoire qui venait régulièrement nous rendre visite – que je sois là ou non – pour mettre son petit grain de sel ; il appréciait un peu trop Anya et de temps en temps, cela me tapait prodigieusement sur le système. Il était très simple d’esprit, trop, faisant rire aux éclats Abigaëlle dès qu’il s’approchait d’elle ou lui parlait… Peut-être qu’elle avait déjà compris qu’il était un tantinet stupide ? Mystère. Sans doute en saurons-nous plus le jour où elle parlera davantage que quelques mots et une ribambelle de syllabes.
Ma mère virevolta sur elle même et m’adressa un sourire amusé. Tout ceci n’était peut-être qu’un jeu pour elle au final…
« Je vais vivre, bien entendu. » Répondit-elle. « Nous pouvons de nouveau être une famille, autant commencer par là. Ton père aurait été fier de voir le jeune homme que tu es devenu… » Puis elle ajouta, plus bas : « Une Romanov, nous n’aurions pu espérer mieux pour toi ! »
Je levai les yeux au ciel. Si elles savaient… Elle n’ignorait pas avec quelle hargne et passion j’avais recherché la dernière fille du Tsar pour la rendre à sa grand-mère. Sans doute suspectait-elle l’appât du gain et elle n’avait pas vraiment tord sur le sujet ; mais les choses avaient bien changé depuis. Je poussai en soupir en la toisant, attendant qu’elle ne reprenne la parole.
« L’Amérique m’a toujours fasciné… On dit qu’on peut déguster ici un « hambourgé » ? Je suis impatiente de goûter ! » « On va déjà aller poser tes affaires à la maison. »
Ce n’était pas une question, mais elle secoua vivement la tête.
« Ne crois pas que je vais t’avoir sur le dos ! Je suis ta mère, je peux me débrouiller seule. Je le fais depuis toutes ces années maintenant… Une auberge fera l’affaire le temps que je trouve un logement. » « Tu ne vas pas avoir de quoi payer un hôtel. » « Tu ne sais pas de quoi je suis capable... » Déclara-t-elle dans un sourire hautain. « Je vois un « Granny’s » là-bas, se sera idéal ! »
Je fixai l’endroit qu’elle me désignait, n’ayant pas le souvenir qu’il y ai eu des histoires dans cette auberge… Et de me demander comment elle comptait régler la chambre. Ne vous fiez pas aux apparences, j’appréciai ma génitrice. A ma manière. Mais si j’avais l’occasion de ne pas me la coltiner de trop, le temps de réaliser un peu qu’elle était là, bien réelle et présente, ça m’arrangeait fortement. Je tournai la tête en direction d’Anastasia contre laquelle notre fille s’était finalement assoupie.
« Le pick-up a du rester dans une rue. Je vais le chercher. »
Winston jappa pour m’accompagner mais le bras de Kseniya m’intercepta au passage, affrontant son visage soudain sévère tandis qu’elle attrapait ma main pour l’observer de plus près. Pinçant ses lèvres avec agacement, elle se tourna vers la princesse et fit de même avant de me jeter un regard noir. Qu’est-ce que j’avais fais, encore ?
« Dimitri, tu n’as pas osé faire cela… » S’insurgea-t-elle. « Faire quoi ? » J’avais tué qui, cette fois ? « Anastasia Nicolaïevna ne porte pas d’alliance, et toi non plus. Pourtant, si j’en crois vos paroles, ce trésor est votre fille à tous les deux. Peux-tu m’expliquer pourquoi cette enfant ne peut même pas prétendre à la légitimité de son nom puisque ses parents ne semblent pas mariés ? »
Ah non, elle n’allait pas mettre cette histoire sur le tapis. Anya et moi avions été fiancés, je l’avais demandé en mariage sur un coup de tête mais après tous les évènements passés les mois précédents : sa grossesse, les séances de plus en plus difficile, le meurtre de Clarisse, la prison… Nous n’en avions jamais reparlé. C’était un projet enterré depuis longtemps. Alors pourquoi soudain nous revenait-il à la figure comme d’une évidence dans nos existences ? Nous nous en passions très bien jusque là.
Je me mordis l’intérieur de la joue sous le regard inquisiteur de ma mère, voyant Anastasia prendre un air gêné en se mordant la lèvre et triturant ses mains. Bien, au moins je n’étais pas le seul à qui ça convenait jusque-là… Du moins le croyais-je.
« J'ai tout de même une bague de fiançailles ! Il a fait sa demande. Et puis... disons que les choses de la vie se sont enchainées. Dans ce monde-ci de n'est plus si important d'être conventionnel, vous savez... » « Il a fait sa demande il y a combien de temps ? » Demanda Kseniya, dubitative. « En décembre 2014. Il y a deux ans. »
Je n’aurais peut-être pas du répondre ça, même si son visage valait le détour. Je connaissais bien ses valeurs et son attachement à la morale ou les mœurs ; les enfants illégitimes, surtout quand il s’agissait de la famille impériale, étaient très mal vus en Russie. Et bien qu’Abigaëlle porte mon nom et celui de sa mère, cela ne changerait absolument rien à sa vision des choses. Il fallait trouver le moyen de s’éloigner et très vite… !
« Deux ans… Deux ans ! Et qu’attends-tu ?! Qu’il neige près de la mer ? Que cette petite fille soit majeure ? Non, ça, pas question ! Quand on prend un engagement, on le tient. »
Je me mordis l’intérieur de la joue en jetant un nouveau regard vers la fiancée concernée. Peut-être avait-elle une idée pour changer de sujet ? Quelque chose de moins encombrant et de beaucoup moins embarrassant ? Anya haussa les épaules avant de murmurer :
« C'est vrai qu'on en a jamais reparlé... »
J’écarquillai les yeux de surprise. Pardon ? Fronçant les sourcils, je secouai la tête.
« On en a jamais reparlé parce que je pensais que ce n’était plus d’actualité. » « Bah… » Elle semblait un peu prise de court, et moi aussi pour tout avouer. « On aurait pu. Moi j'aurais dit oui. »
Est-ce qu’elle était sérieuse ? Elle avait gardé ça pour elle depuis tout ce temps sans m’en parler ?! Enfin, effectivement j’aurais pu y songer tout seul ; après tout je lui avais offert une bague de fiançailles. Mais quand elle était tombée enceinte, tout s’était tellement effondré autour de nous que la priorité était passée au second plan ; de même avec les évènements de cette fin d’année. Alors me retrouver face à elle me fit l’effet d’une sacrée claque pour le coup. Je n’avais jamais eu la moindre idée qu’elle voudrait encore se marier après tout ça !
« Tu... » « Bien, voilà qui est mieux ! Nous avons donc un mariage à organiser dans les plus brefs délais pour tenter de pallier à ton incivisme, mon fils. Un mariage dans toute la tradition russe ! Ah, dommage qu’il ne reste plus personne de la famille… Ca aurait été un beau mariage ! Mais nous devons bien pouvoir trouver de quoi combler les sièges vides et… »
Je l’écoutai d’une oreille distraite, focalisé sur Anastasia et notre fille endormie. Ma mère obtenait toujours ce qu’elle voulait – ou presque – mais elle ? Je savais que je l’avais faite beaucoup souffrir et pourtant elle était toujours là. A bien y réfléchir, rien ne l’obligeait à faire ça. Rien ne l’a forçait à rester à mes côtés depuis tout ce temps puisqu’aucun sermon ne l’y contraignait. Alors… Pourquoi ?
« C’est vraiment ce que tu… Ca te manque qu’on ne soient pas mariés ? » « Je... J'en sais rien si ça me manque ! Je dis juste que... je suis... J'ai besoin de le dire ou t'as deviné ? Je t'aime et... les gens qui s'aiment le font. J'aurais encore dit oui. Toujours. »
Et elle avait l’air de croire ce qu’elle disait en plus ! Etait-elle folle ? De s’attacher après tout ça ? De vouloir, après tout… Après… Je tendis le bras pour serrer ma main dans la sienne. Un peu plus fortement que d’habitue, silencieux. J’avais besoin de temps, comme toutes les décisions que nous prenions. Je faisais parfois des coups de tête mais la plupart du temps, il me fallait un moment de réflexion. Retourner la situation dans tous les sens avant de me mettre d’accord avec moi-même. Anya le savait et sa patience était donc encore plus impressionnante…
« Tu sais que tu es folle, mademoiselle Romanov ? » « TU me rends folle, c'est pas tout à fait la même chose. »
Elle ne savait pas si bien dire…
« Puisque vous semblez d’accord… Le printemps, ça vous va comme saison ? »
Pouf, d'un coup de baguette magique ou presque notre monde s'envolait. Et si personne n'osait l'admettre, ça me torturait. Tatiana, même Olga, la grande Tsarine ou encore son célèbre époux, tout s'envolait dans des souvenirs pour se loger dans les encadrés de manuels d'histoire. Et ça semblait tout gâcher. Comme si leurs traits n'étaient de nouveau plus que figés dans les photographies abîmées ou dans le regard inconsolable d'Anastasia. La magie s'envolait, et je n'avais plus qu'à me souvenir du sourire fantomatique d'esprits russes assassinés, de leurs mains dans mes cheveux, dans leurs doigts contre mon corset, de leurs yeux sur mes joues qui s'enflammaient de timidité. Comme un flocon de neige qui allait fondre dans ma mémoire, je préservais ce coin féerique dans les méandres de mon esprit, incapable de chasser la gentillesse par laquelle j'avais été accueillie. Revenir à Storybrooke ne me faisait pas autant de bien que je l'espérai. Certes, mes bras, mes jambes, et mon petit nez rougi avaient moins froid, mais mon coeur lui ne se reposait pas de toutes ses émotions qui m'avaient envahi. Alors que Raspoutine s'éloignait au bras d'une Anita rassurante et responsable, je louchais brièvement sur Dimitri, sa mère et sa fiancée, certainement, en train de discuter dans un flot continu familial que je ne pouvais m'empêcher de soudainement jalouser. Si seulement, j'avais un monde dans lequel me réconforter et trouver une famille. Peut-être la réalité. Je passais une main sur mon front fiévreux, je n'avais décidément plus la tête à ça. Je voulais poser sur une toile, fermer les yeux, et me laisser emporter dans la valse des rêves. Je ne voulais plus penser, plus réfléchir à des plans ou à des idées farfelues. Loki s'était rapidement échappée, avec Victoire, me laissant seule avec le trio Chostakovich. J'entendais vaguement l'histoire d'un mariage à préparer, mais n'osant pas aventurer mes oreilles curieuses au débat, je me tenais à l'écart en examinant les alentours. Pour vérifier que nous étions bien à Storybrooke, que nous avions été rattrapés par la réalité, que maintenant, c'était bel et bien fini. Je n'arrivais à définir si cette idée de conclusion me plaisait ou non, mais le tout m'avait assez fatigué pour que je réussisse à souffler, épuisée, le regard presque anéanti face à ces bâtiments qui se dessinaient à perte de vue, les épaules affaissées, la dégaine molle. Cependant, alors que mes yeux s'égaraient dans les horizons que je pensais déjà déserts, à quelques mètres se tenait debout Bartok de son air toujours maladroit, gaffeur mais aussi amusant. Je le dévisageai et aussitôt qu'il le perçut, il se tourna vers moi en haussant un sourcil par interrogation. Je m'approchai sans grande conviction de l'importance de la chose, et lui offrant une moue contrite, je me lançais en baissant honteusement le regard vers mes pieds qui se balançaient:
« Désolée de t'avoir menacé, Bartok. Bon, bah... Joyeux Noël. A bientôt, peut-être?»
Il resta planté là, en silence. Comme s'il y avait eu arrêt sur image. Un bug, quoi. Je remuai les lèvres, l'air de lui demander ce qui se tramait dans sa tête, mais cela me semblait bien trop fou pour que j'ose y croire. De toute façon, il se tut. Et Anastasia se retira finalement de la discussion entre Dimitri et sa mère dont je ne pouvais retrouver le prénom. A quoi bon... Je ne voyais guère l'utilité de les saluer que d'un signe las de la main. Je faisais demi-tour pour m'avancer, d'une démarche paresseuse jusqu'à la jeune rousse aux yeux scintillants. Ce fut alors qu'enfin, la voix de Bartok retentit derrière moi, plusieurs instants après que j'eus détourné le regard:
« Euh-oui, Joyeux Noël à toi aussi. »
Je lui accordais un bref coup d'oeil attendri, semblant ravie de savoir qu'il me souhaitait un bon réveillon. Qu'est-ce que cela changerait bien? J'imaginais que Doug retrouverait ses proches, ou sinon, nous aurions passé la soirée à s'échanger compliments, et remerciements, s'esclaffant pour oublier les douleurs passées. Noël me paraissait alors si injuste. Tout les enfants avaient eu le droit aux pétillements, et aux étoiles qui brillaient dans leurs yeux. Moi, je devais confronter mon regard au ciel pour avoir le reflet de ces comètes. En quelques pas, j'avais donc rejoint Anastasia. Je penchai légèrement la tête sur le côté pour approcher pour mon oreille de mon épaule, d'un air encore et toujours désolé. Enfin, je me lançais d'un ton confus:
« Merci pour ton courage, Anastasia. J'aurais sûrement dû t'en faire part plus tôt mais..., déglutissant, J'ai suivi ton conseil. Je suis partie de chez moi, et je... Je savais bien que ce n'était pas urgent par rapport à toute cette histoire, mais je te suis tellement reconnaissante. Alors merci, pour ça. Je ferais mieux de ne pas tarder, alors. »
Aussitôt, la traductrice m'offrit un hochement de tête, une expression satisfaite et entendue rayonnait sur son visage. Elle aimait savoir qu'elle avait eu raison. Et même si j'avais peut-être eu raison de lui faire croire le contraire, désormais je l'admettais avec gêne. Elle ne dit rien, mais cela emplissait mon coeur, le comblant de tout son manque. Je n'avais pas besoin de mot, le fait d'être comprise me suffisait alors amplement. Comme je me l'étais dit, j'effectuai un bref mouvement de la main à au grand brun bouclé et sa mère, la nourrice puis me retournai. Direction maison, en quelque sorte. Direction, sommeil en tout cas. Pour être bercée par le doux Sebastian dont j'imaginai encore la poupée au bout de mes doigts. Parfois, j'aimais même à la voir sur mon épaule à me soutenir. Cette fois, elle se formait un passage entre mes pieds qui s'enfonçaient contre le sol, le nez levé vers le ciel avec admiration. La voix d'Anastasia brisa donc le silence qui me servait de mélodie, elle m'interpellait. Je me retournai immédiatement, soucieuse. Si Raspoutine revenait armé de chauves souris et de sa lampe fluorescente verte et magique, je me ferais cette fois un plaisir de lui coudre la bouche. Elle s'exclama de sa voix cristalline:
« Sally ! Merci à toi. Tu n'as qu'à passer un de ces jours... Ou demain si tu ne sais pas quoi faire au réveillon.»
J'hochai de la tête en lui affichant un immense sourire, presque trop grand pour mes petites joues. Lui souriant de toutes mes dents, en riant comme une enfant gâtée, je continuai de reculer en me plongeant dans le bleu translucide de ses prunelles. Le réveillon avec Anastasia. Si elle n'était pas ma famille, elle était l'une de mes plus proches amies. Je ne l'avais vu que deux fois mais cela semblait assez pour qu'elle me serve de fidèle modèle. Je lui disais, en sentant mon regard s'emplir d'étoiles, sans n'y croire:
« Oui, merci. »
Je me retournai, en enfonçant fermement ma chapka sur ma tête. Et je partais de mon habituel air rêveur, rejoindre mon monde d'ailleurs. Rejoindre un Jack qui n'était pas là, et une lune qui brillait pourtant encore. Rejoindre des étoiles qui brillaient haut dans le ciel. Et chacune illuminait les visages bienveillants des Romanov dont l'histoire était désormais marquée dans le ciel. Et si pour tous, le ciel n'avait pas changé. Le reflet de celui-ci dans mes prunelles, lui oui.
Vie: 80%
Anastasia Romanov
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| Conte : Anastasia | Dans le monde des contes, je suis : : Anastasia Romanov
You have to say these tings ... while you still can
Jamais Anastasia n'aurait cru que retrouver la banalité de Storybrooke lui ferait autant de bien. Elle s'était laissée guider par une intuition et continuait de se laisser porter par les événements, un peu à côté de ses chaussures, il fallait bien l'admettre. Il s'était passé et dit tellement de choses qu'elle avait encore du mal à faire le tri. Ainsi donc Loki était chanteuse ? Au fond, ça ne l'étonnait pas spécialement. Elle serait ravie de la revoir un de ces jours, dans un contexte un peu plus normal, de préférence. Ce qui l'étonnait plus, en revanche, c'était la sollicitude d'Anita - non qu'Anastasia ait un jour douté que l'ancienne lionne soit effectivement quelqu'un de très bien. Lui demander d'emmener Raspoutine à l'hôpital lui avait déjà paru énorme, Anita ayant sans doute bien mieux à faire, alors jamais elle n'aurait imaginé qu'elle acceptât non seulement mais aussi qu'elle proposerait de l'héberger. Est-ce que ce n'était pas un peu surréaliste ? Héberger Grigori Raspoutine comme si tout ceci ne s'était jamais passé ? Peu à peu, tout le monde s'en était allé dans des au revoir plus ou moins grandiloquents, comme si la joyeuse bande rentrait d'un voyage groupé. Ce qui était le cas, d'une certaine façon. Anastasia s'était contentée d'un hochement de tête entendu quand Victoire l'avait saluée, ne réalisant pas encore tout à fait qu'elle s'adressait à une divinité et qu'en plus de cela elle lui était reconnaissante de s'être occupée de son enfant. Cela ferait des choses à raconter, un jour. Ou peut-être pas. "Un jour, quand tu étais toute petite, c'est la déesse Héra en personne qui s'est occupée de toi". La prendrait-elle pour une folle ? C'était là encore une question qu'Anastasia avait remise à plus tard, tout comme cette affaire de mariage avant que Ksenyia la leur renvoie en pleine figure de la manière la plus gênante qui soit. S'il y avait bien une chose qu'Anastasia détestait, c'était d'étaler sa vie privée au grand jour. Au fond, cependant, elle devait bien reconnaître que la perspective d'épouser l'homme de sa vie l'avait séduite à l'époque et qu'elle la séduisait encore aujourd'hui. Sinon elle ne serait pas restée, pas vrai ? Dimitri lui avait fait du mal et il était trop intelligent pour l'ignorer. Il ignorait simplement à quel point elle avait eu mal parce qu'elle ne le lui avait jamais clairement dit et n'était même pas sûre de le faire un jour. Pour autant, elle n'en avait jamais oublié la bague de fiançailles à ses doigts et quand Ksenyia avait tendu la perche, elle l'avait saisie, ses sentiments prenant, une fois n'est pas coutume, le pas sur son orgueil démesuré. De là à envisager une date, cependant... C'était tellement soudain que la jeune femme était bien contente de se trouver appuyée contre le rebord de la patinoire tout comme elle se trouva bien contente que Sally vienne lui dire au revoir - faites qu'elle n'ait rien entendu de cette conversation gênante ! Anya n'en aurait certainement jamais confirmation. Elle ne pouvait que se montrer reconnaissante que Sally n'ait rien dit. Peut-être que c'était pour cela qu'elle l'avait invitée pour Noël ? Sans même demander son avis à Dimitri ! Mais... il serait forcément d'accord. Une aventure de cette trempe ne pouvait que créer des liens. Forte de cette réflexion, la rouquine se laissait bercer par les événements tout en berçant son propre enfant contre elle. Il n'y avait plus qu'elle et Dimitri, à présent. Même Bartok s'en était allé d'un pas léger sans demander son reste. - Rentrons ? suggéra-t-elle en glissant à nouveau ses doigts dans les siens, son pouce caressant doucement le dos de la main abîmée de Dimitri. Il va falloir que tu la soignes, fit remarquer Anya. Jolie droite, à propos, ajouta nonchalamment la rouquine. Dimitri opina : - Je vais chercher le pick-up. Reste là. Il n'attendit pas de réponse, laissant Winston derrière lui, au cas où. Chercher la voiture était une résolution qu'il avait prise quelques instants plus tôt et il allait s'y tenir. Anya et son dos endolori n'allaient certainement pas s'en plaindre. Ksenyia attendit également et le silence s'installa de nouveau. Finalement, Anya s'essaya à faire la conversation à sa belle-mère à la présence de laquelle il faudrait s'habituer. Et dire qu'elle avait aussi été sa précieuse nourrice sauveuse de poupées ! C'était tellement bizarre... - C'est très sympa le Granny's. Vous y serez bien, affirma-t-elle, un geste de tête en direction de l'établissement. Ksenyia sourit. Si elle aussi sentait le malaise, elle avait la bonne idée de ne pas le pointer du doigt. -Je n’en doute pas. Tout comme je ne doutais pas que Dimitri ne voudrait pas de moi avec lui. Ne vous en faites pas, je vais m’habituer à cet endroit. - Dimitri veut de vous ici. Il n'en a juste pas encore pris conscience. Typique des hommes, répliqua Anya. Vous savez... ça n'a pas été évident pour lui toujours... Ca lui fera beaucoup de bien. - Nous étions proches avant qu’il ne se mette en tête de retrouver la prin… vous retrouver, raconta Ksenyia, se reprenant de justesse. Il vous a cherchée pendant tellement de temps. J’ignorais qu’il avait enfin réussi. - Moi aussi j'ignorais beaucoup de choses, approuva Anya, pensive. Dimitri n'avait jamais parlé de sa mère avant cette drôle d'aventure mais la jeune femme préféra ne pas le mentionner. Ils avaient à présent plus de temps devant eux qu'ils ne pouvaient l'espérer pour rattraper celui qu'ils avaient perdu. Une autre fois, cependant. Dimitri venait de revenir avec la voiture. L'heure des au revoir avait de nouveau sonné. Ksenyia le prit dans ses bras avant de faire de même avec une Anya surprise mais heureuse. Puis elle déclara encore : - Nous nous reverrons vite. La conviction dans sa voix le laissait en effet présager. Anastasia opina avant de suivre Dimitri dans la voiture. Ils roulaient depuis quelques instants quand Anastasia, le regard tourné vers le paysage qui défilait, déclara : - Ils me manquent déjà. Sa famille, évidemment. Un temps passa, insuffisant pour qu'il ait pu parler, puis elle reprit, les yeux toujours rivés sur la vitre et le paysage : - Dimitri ? est-ce qu'on pourrait pas, juste de temps de temps, oublier que nous sommes deux incorrigibles orgueilleux qui ne disent jamais ce qu'ils ressentent et juste... se dire les choses ? Juste... des fois ? Un ange passa. Dimitri lui jeta un regard en biais qu'elle ne put apercevoir et serra la mâchoire sans lui répondre. Jusqu'à là, rien de surprenant. Il réfléchissait toujours avant de parler. Ou de se taire, d'ailleurs. Le silence dura, à peine perturber par le bruit du moteur, quand il le rompit enfin : - Qu’as-tu besoin d’entendre ? questionna-t-il finalement pour se taire à nouveau. Que je t’aime, même si je te le dis peu ? devina-t-il cependant tout seul. - C'est... plutôt bien comme début. Moi aussi, je t'aime.