Anastasia avait écouté les révélations divines de Teresa d'une oreille attentive. La gouvernante n'en avait certes pas rencontré mais elle était clairement plus au fait de leur quotidien que la rouquine ! Il y avait donc douze dieux. C'était assez peu, en fin de compte. Mais largement suffisant dans une aussi petite ville. Autant de pouvoir, ça suscitait forcément des jalousies et des histoires mais Anya n'en demanda pas plus. Ce n'était pas ses affaires. Et si elle appréciait qu'on ne se mêle pas des siennes, elle faisait de même concernant celles des autres. Qu'est-ce que cela pourrait bien changer à sa vie de savoir qui avec assassiné Zeus et pourquoi ? Elle ne voulait rien aux dieux et ils n'avaient pas l'air de lui vouloir quelque chose non plus. Alors ils pouvaient bien mener leur vie tel qu'ils le désiraient.
- Il s'est passé trop de choses, commenta Teresa sans avoir besoin d'épiloguer.
Anastasia avait le sentiment de ne pas être au courant de la moitié de ces choses - et grand bien lui faisait - mais elle ne put que vivement opiner à cette affirmation. Il se passait effectivement trop de choses dans cette petite ville qui aurait dû être tranquille.
Tranquille et ordinaire, ajouta mentalement la jeune femme quand la sonnerie de Teresa les tira de leur conversation. Elle était étrange, cette sonnerie, mais Anastasia aimait trop avoir ses secrets pour chercher à connaître ceux des autres spontanément. Même si elle s'intéressait sincèrement à Teresa.
Cette dernière expliqua bientôt, un peu plus précipitamment peut-être que le ton employé par les dames en général, qu'elle devait y aller, ajoutant que la nuit arrivait. Aussitôt la jeune femme tourna la tête vers le dehors. Oui, le ciel s'assombrissait doucement et avec l'hiver, la nuit aurait tôt fait de tomber totalement.
La jeune femme lui adressa alors un sourire entendu. Elle aussi, de toute façon, ne comptait pas s'attarder davantage en ville. Abigaëlle ne serait pas mécontente de rentrer et les boissons étaient de toute façon finies. Dimitri lui ferait peut-être remarquer qu'elle avait été longue, ce à quoi elle répondrait qu'elle avait croisé Teresa, une amie, évitant peut-être de mentionner Gringoire. Dimitri ne se rappellerait peut-être pas d'avoir entendu parler de Teresa et ils passeraient probablement à autre chose comme un débat sur les cadeaux qu'elle avait choisis pour leur fille.
- Je me ferai un plaisir de vous rendre visite, répondit Gringoire, sourire aux lèvres.
- Je viendrai également, ajouta Anastasia, son portefeuilles à demi sorti.
Mais elle put rapidement le ranger, Teresa ne lui laissant pas le temps de régler la note, pas même celle qui lui était due. Gringoire s'en étonna, c'était clairement visible sur son visage même s'il ne disait rien, tout en l'observant jusqu'à ce qu'elle soit hors de portée.
- Je vous raccompagne ? offrit-il quelques instants plus tard quand la petite troupe fut parée à affronter le froid.
- Ma foi, répliqua Anastasia.
Comme à son habitude, Gringoire lui offrit son bras qu'elle accepta sans plus hésiter - ce qui n'avait pas été le cas les premiers temps. Cela semblait le rendre particulièrement heureux d'escorter Anastasia et Abigaëlle chez elles mais Anya s'arrangea pour que Dimitri ne l'aperçoive pas. Pure précaution. Les deux hommes ne parvenaient pas à accorder leurs violons et Anastasia préférait éviter les prises de tête. Et puis... Dimitri savait bien qu'il était le seul qu'elle aimait, non ?

Fin