« Pour réaliser une chose extraordinaire, commencez par la rêver. Ensuite, réveillez-vous calmement et allez jusqu'au bout de votre rêve sans jamais vous laisser décourager. » (Walt Disney)
La détonation sembla me percuter. La balle fila si vite que j'esquissai un geste pour la retenir, mais j'étais bien trop loin.
Je retins mon souffle en entendant Judah pousser un grognement de douleur. Lorsqu'il ouvrit sa main tendue, la balle tomba en cendres. Je soupirai de soulagement. Devais-je le remercier d'avoir sauvé Lily ? Non, surtout que ses intentions étaient loin d'être louables.
Aryana baissa son arme tout en décochant un regard perçant à Judah qui s'approchait de moi nonchalamment. Je serrai les poings, méfiant. Il me prenait pour un magicien, mais j'avais plus d'un tour dans mon sac...
Il me prit par surprise en posant sa main sur mon torse. Aussitôt, je sentis une chaleur d'une intensité inouïe me saisir. J'avais l'impression d'être devenu un steak qu'on viendrait de jeter sur un grill. Ma peau cuisait et crépitait. En l'espace de quelques secondes, ce ne fut plus la chaleur d'un brasier mais d'un volcan. Je sentais mon corps crier grâce tandis que je hurlais...
Puis plus rien. Je n'étais plus rien. Une poignée de cendres sur le sol. C'était vraiment étrange. Jamais encore je n'étais mort de cette façon. J'avais à peine suffisamment de conscience pour me pencher sur le problème. En revanche, j'avais suffisamment de détermination pour revenir. A travers le temps et l'espace. Entre la glace et le feu, la tempête et la foudre, au coeur du temps : j'étais là.
Je me tenais devant Judah qui me tournait le dos et qui tentait de convaincre ma mère de ne pas réduire Lily en cendres. Le regard fermé, je tapotai sur l'épaule du dieu des enfers.
Il pivota sur lui-même et m'offrit un regard tellement incrédule que je regrettais de ne pas avoir d'appareil photo sur moi. C'était infiniment jouissif.
Ne perdant pas de temps, je projetai un jet d'eau sur lui -digne d'un Karcher- qui le propulsa dix mètres plus loin et lui fit faire la rencontre à un mur en bois qui s'écroula sur son passage.
Je me tournai ensuite vers ma mère qui -avec toute son ingéniosité- avait passé son bras autour de la gorge de Lily pour menacer de l'étrangler.
"Tout doux mon joli." m'intima-t-elle de sa voix envoûtante. "Je suis sûre que tu ne veux pas qu'il lui arrive quoi que ce soit."
Je tiquai, jetai un coup d'oeil à Lily qui ouvrait de grands yeux dans ma direction. Puis je posai mon regard assuré sur ma "mère".
"Il faut arrêter de prendre les gens pour des jouets. Ca vous fait vraiment passer pour une..."
Je laissai la fin de ma phrase en suspens, même si j'avais esquissé le début du dernier mot qui commençait par un "co..." Comme je m'y attendais, Aphrodite, offensée par le juron, relâcha légèrement la pression sur la gorge de Lily. J'en profitai pour donner un petit coup de foudre à "Maman" qui s'envola et alla rejoindre Judah dans le tas de planches. Ce dernier était en train de se relever, en plus. Il s'affaissa pitoyablement, ses cheveux trempés, en recevant Aphrodite sur lui.
"Strike !" commentai-je, éberlué d'avoir maîtrisé mes parents.
C'était trop bizarre de leur avoir fait leur fête de cette façon. Pour Judah, c'était habituel de le combattre, mais maman... ça me perturbait. Jamais encore je ne l'avais "frappée". Et encore moins insultée.
Je m'ébrouai légèrement avant de saisir Lily par la taille et de disparaître. Direction : le présent ! Il fallait faire une pause. C'était bien trop éprouvant de voyager dans le temps sans calculer vraiment ce qu'on faisait.
Nous réapparûmes dans le centre ville de Storybrooke. Aussitôt, une pluie battante nous saisit. Je frissonnai et plaquai Lily contre moi, dans l'espoir dérisoire de la protéger des trombes d'eau. Puis je jetai un coup d'oeil à la ville. Tout avait l'air d'être normal.
Le coeur battant à tout rompre, je l'écartai légèrement de moi pour encadrer son visage de mes mains et l'observer.
"Tu vas bien ? Maman ne t'a pas fait mal ?"
Je regardai son cou qui ne gardait aucune marque. Puis j'esquissai une moue amère.
"Mes parents étaient de vrais co... enfin... tu vois ce que je veux dire. Heureusement que maman a changé. Un peu. Elle ne prend plus les gens pour des marionnettes. Par contre Judah a encore des progrès à faire..."
Je dévisageai brusquement Lily, me souvenant d'une chose qu'elle m'avait dite par le passé.
"Attends... tu apprécies Judah, et pourtant il te draguait carrément au far west ! Il se comporte de la même façon dans le présent ?"
Je plissai des yeux, méfiant. Elle avait intérêt à me fournir une réponse satisfaisante, sinon je lui aplatirais la tête. A Judah, pas à Lily. Je me sentais capable de le faire tant il m'avait énervé.
"Tiens, tiens, mes amoureux préférés !" fit une voix douce dans mon dos.
Je sursautai et me retournai pour découvrir ma mère, abritée sous un élégant parapluie, et qui nous observait avec gentillesse. Je déglutis avec peine et me souvenant des évènements "récents" je me plaçai devant Lily pour la protéger au cas où. Ma mère fronça les sourcils.
"Tout va bien, Elliot ?"
"Yep, c'est cool !" fis-je en hochant la tête frénétiquement avec un sourire forcé. "C'est super cool !"
"Qu'est-ce que vous fabriquez sous la pluie ? Tu sais que tu peux faire apparaître ce que tu veux."
Aussitôt, elle fit apparaître un autre parapluie qu'elle me tendit. Je le saisis mollement et le brandis par-dessus la tête de Lily.
"On a... on était..."
Ma mère me coupa avec son rire mélodieux. Puis elle s'approcha juste assez pour dire :
"Vous êtes libre de faire ce que vous voulez, tu n'as aucun compte à me rendre. Du moment que vous ne faites pas de bêtises."
Elle soutint mon regard un instant, comme pour me mettre en garde -il faut dire que j'avais dérayé plusieurs fois- avant de se détourner et de s'éloigner.
Je restai avec Lily sous la pluie. Il fallait que je me calme. Nous étions de retour dans le présent, ma mère n'essayait plus de tuer ma fiancée, tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes.