« Pour réaliser une chose extraordinaire, commencez par la rêver. Ensuite, réveillez-vous calmement et allez jusqu'au bout de votre rêve sans jamais vous laisser décourager. » (Walt Disney)
Octobre 2024, La Grande Catastrophe / La fin de Storybrooke
La Magic League n’était pas assez nombreuse. Parce que nous n’étions pas préparés. Personne n’était préparé au plus horrible des scénarii. Sans doute fallait-il que ça arrive un jour. Après tout, nous n’étions pas naturels dans ce monde. Cette Terre ne nous appartenait pas, c’est vrai… mais aucun d’entre nous ne s’attendait à ce que ce monde nous chasse à ce point. Au point de nous détruire…
C’était arrivé sans prévenir, sans avant-garde, sans signe prévisible. Ni par les dieux, ni par les scientifiques, ni par tous les radars installés par la ligue pour surveiller le monde. Apollon m’avait chargé de protéger le monde des retombées magiques de Storybrooke, et, naïvement, je n’avais pas pensé à surveiller notre propre ville. Alors, d’un coup, toute la ville avait commencé à se détruire, à imploser et exploser, tuant des centaines de victimes dès les premiers instants. Surplus de magie, ce n’était plus compatible avec ce monde.
Nous n’avions donc pas d’ennemis à combattre. Ce qui était pire, puisque la seule solution, était de fuir. Et nous n’étions pas assez pour évacuer tout le monde avant que la catastrophe ne nous tue tous. Nous n’étions pas seul évidemment. La Magic League, les pompiers et la police s’affairaient pour évacuer les innocents, quand les dieux, les sorciers et les créatures divines essayaient tant bien que mal de nous donner du temps en ralentissant comme ils le pouvaient la catastrophe. Plus mal que bien, à vrai dire.
Très vite, alors que le soleil se couchait, il ne restait plus rien de la ville. Quiconque venait dans cette région du Maine ne serait témoin que d’une superficie tristement importante de forêt incendiée dont le feu commençait seulement à s’éteindre sous quelques gouttes de pluie. Nous étions tous à la limite de la ville, silencieux, graves. Certains pleuraient, beaucoup pleuraient. Ceux qui étaient avec leurs voitures se débrouillaient pour faire monter un maximum de personnes, pour essayer de trouver un abri quelque part ailleurs dans ce monde qui paraissait aujourd’hui si hostile. Il n’y avait eu que le quart de la ville qui avait survécu. Rien à faire… C’était arrivé, c’était fini, et aucune solution ne réglerait le souci. Même du côté des dieux, Ellie ou Neil ne pouvaient pas remonter le temps, Chronos aka Elliot encore moins.
Tous les survivants devaient la vie à tous les héros qui s’étaient débrouillés pour évacuer tout le monde. Super-héros, policiers, pompiers, sorciers, créatures, dieux. Pourtant, aucun d’entre nous ne se sentait réellement héros. Avec un tel bilan, comment en tirer un quelconque mérite de héros ? La suite ne m’épargnerait encore moins.
Dyson ! Hurlait une voix alors que j’avais totalement retiré l’habit de Spider-Man, amèrement, sans aucun désir de le remettre à nouveau un jour après tout ça. Je m’étais retourné, pour voir un pompier bien amoché, mais qui courait vers moi sans se préoccuper d’aucune de ses blessures. Son air était affolé, inquiet, tout autant qu’essoufflé. Si bien que lorsqu’il s’arrêta devant moi, il dût prendre un instant pour reprendre son souffle pour être capable de me parler. Je fronçais les sourcils, alors qu’il commençait à lever le bras pour pointer le doigts vers le bout de la route que toutes les voitures empruntaient déjà pour s’en aller. Monsieur Solano… il a… il s’arrêta de nouveau, pour reprendre ses esprits encore une fois.
Mon inquiétude redoublait. Posant mes mains sur ses épaules, je commençais à le presser. Il venait de prononcer le nom de mon copain, alors que je ne l’avais toujours pas vu. J’étais certain qu’ils avaient survécu, Milo et lui, puisque c’étaient les premières personnes que j’avais emmené à la limite de la ville. Mattéo était certes pompier, mais je ne voulais pas qu’il risque davantage, et qu’il soit capable de protéger son fils. Notre fils.
Notre fils. Je ne me rendais pas compte à cet instant, mais ça n’était déjà plus mon fils.
De quoi ?! Hurlai-je en le secouant par les épaules. Qu’est-il arrivé à Mattéo ?!
Monsieur Solano a appris pour votre relation… Il a profité du chaos pour kidnapper son fils et son petit-fils… Dyson, Mattéo et Milo sont partis avec lui, il les a pris en otage… tenta-t-il de prononcer, encore essoufflé.
Mai 2026, France, Paris, Plateau de Le Cercle à Canal+
Avoir tout un public tourné vers moi avec attention et excitation, autant que des caméras françaises, ne me donnait pas encore très envie, même si j’étais bien content de l’accueil mondial du film. Simplement, encore après tout ce temps, la perte de Mattéo et de Milo m’affectait toujours. J’avais exploré le monde pendant un an pour les retrouver, en vain. Pour finalement n’avoir d’autres choix que d’écouter Adrien, avec qui je travaillais pour le cinéma avant qu’on ne devienne amis, qui m’a incité à cesser de me torturer l’esprit, d’essayer d’avancer. Je n’avais pas voulu ignorer ses conseils même alors que je le voulais, parce que, alors qu’il me disait tout ça, je devais bien me souvenir que lui aussi, avait perdu ses proches avec la Grande Catastrophe.
Nous voilà alors, deux amis souffrants qui essayaient de se relever, se suivant sur les tournages de cinéma. Moi en réalisateur/scénariste, lui comme mon acteur principal, qui me suivrait maintenant sur tous tournages que je dirigeais. Est-ce que le monde ressentait la sincérité de nos émotions, qui se transmettaient dans ces films ? Peut-être, je ne savais pas vraiment… comment auraient-ils pu savoir alors qu’ils ne savaient rien de Storybrooke ? Quoiqu’il en soit, il fallait le voir, nos films fonctionnaient, et nous voilà en France, le pays d’Adrien, qui nous avait invité pour faire la promotion de Night Thunderbolt, notre film qui sortirait la semaine d’après ici.
Un film nippo-américain de super-héros, c’est une grande nouveauté pour le cinéma international commença Nadja Chamack, la présentatrice actuelle du Cercle, une émission de débat sur l’actualité du cinéma et de la télévision, mais avec un acteur français dans le rôle principal, c’est une agréable surprise de plus. Night Thunderbolt, c’est donc l’histoire d’un jeune homme français, qui vit au Japon depuis la chute des pays occidentaux, devenu héros de la nuit pour combattre la corruption et le crime qui se soulèvent dans l’espoir de gouverner les nouvelles puissances et le nouveau régime mondiaux. Un film né des inspirations de Nolan, et du grand détective-justicier Batman, mais on y sent de grandes signatures personnelles, car, comme le personnage de Night Thunderbolt aka Lucas Lioncourt, vous deux, Dyson Walters, réalisateur du film, et Adrien Agreste, l’acteur principal, habitez aussi au Japon, après avoir vécu aux Etats-Unis. Quelle est donc la connexion entre vous, et l’histoire sombre du grand Night Thunderbolt ?
Je retenais un soupir. Que cette question vienne, d’un média ou d’un autre, un jour ou l’autre, était assez évident, et attendu, autant par Adrien que par moi-même, pour les ressemblances en effet entre notre histoire et celle de l’alter-ego civil de Night Thunderbolt. Mais nous n’étions pas réellement motivés à parler des souffrances de notre passé. Heureusement, puisqu’il s’agissait de Storybrooke et de sa magie, nous ne pouvions pas en parler entièrement.
Ainsi, à la place d’un soupir, j’avais esquissé un léger sourire, comme pour lui montrer qu’elle avait parfaitement cerné la chose, en bonne journaliste qu’elle était. Une tragédie. Adrien et moi avions tous les deux fait face à la perte de nos proches. Notre famille, nos amis… c’était dur, et soudain. Déménager pour écrire ailleurs, c’était le seul moyen qu’on voyait pour essayer de s’en échapper, dans les tréfonds de la fiction, en reportant tout ça autour de Night Thunderbolt. J’haussai alors les épaules. C’est la beauté et l’essentiel du cinéma. Comme de n’importe quel art d’ailleurs. Ecrire avec le cœur, faire des œuvres le reflet de nos identités. Un peu de nous dans ce qu’on fait. Tout ce qui fonctionne dans le monde, c’est parce que son auteur l’a fait comme ça.
Juillet 2027, Japon, Tokyo, appartement de Dyson et Adrien
Même si nous vivions en collocation, j’avais l’habitude qu’Adrien ne soit pas là de temps en temps. Je ne savais pas pourquoi, mais je n’avais pas l’intention de le fliquer. Il avait le droit de vivre, tout comme moi. Il me le disait d’ailleurs, moi aussi je devrais sortir de temps en temps. Mais lorsqu’il n’était pas là, je ne sortais pas pour autant. Ma vie se résumait à l’appartement et au studio. Broyer du noir, ne pas arriver à passer à autre chose ? Oui totalement. J’avais mes raisons, je n’avais même pas envie, de passer à autre chose.
Je ne m’attendais cependant pas à ce que ce jour là s’agite malgré tout, alors que j’étais seul à l’appartement. Seul… peut-être pas justement. Puisque le sentiment de ne plus l’être allait s’avérer.
Ça a d'abord commencé par un simple papillon, qui n'avait rien de naturel. Entièrement noir, il semblait chargé d'une mauvaise énergie, que je ne connaissais certes pas, mais j'avais vécu assez de choses dans ma vie pour savoir que je devais m'en méfier. Alors que je me relevais, sur mes gardes, le papillon ne fit rien d'autres que voler dans la pièce, comme s'il cherchait quelque chose.
Et alors, une voix retentit juste derrière moi, dans un coin de la pièce.
Où est-il ?
Je me retournais alors aussitôt vers lui, pris au vif, pour voir un homme, une canne entre ses mains, habillé de façon peu commune. Méfiant, je me mis sur la défensive. J’avais certes laissé le costume de Spider-Man depuis 8 ans, mais je savais encore me défendre. Ou me battre.
Je ne sais pas qui vous êtes, ni qui vous cherchez, mais je n’en ai rien à faire. Vous n’avez pas le droit d’entrer ici, sortez de chez moi, immédiatement, ordonnai-je d’un ton sec.
Derrière son étrange masque en forme de papillon, l'homme plissa les yeux. Il garda un long silence, avant de rétorquer d'un ton grave, en avançant vers moi, qui tenais toujours mes positions défensives, prêt à attaquer.
Personne ne me dit ce que je dois faire. Je ne me répéterais pas... Où est Adrien Agreste, il vit ici je le sais !
Je fronçais les sourcils. C’était moi, d’habitude, que ce genre d’individu cherchait, à cause de ce que j’avais été. Pourquoi un type comme ça cherchait Adrien ? Je n’en savais rien, mais j’étais encore plus prêt à le frapper maintenant que je savais qu’il voulait du mal à mon ami.
Il n’est pas disponible pour le moment, veuillez laissez un message avant le bip sonore que vous entendrez après mon poing dans votre figure.
L'homme-papillon ricana d'un sourire mauvais. C'est très drôle. Dommage que je ne sois pas venu ici pour rire ! Et sans attendre davantage, il engagea le combat en lançant sa canne dans ma direction, en rajoutant : J'avais prévu d'attirer Adrien par le biais d'un vilain mais il semble que je doive me salir les mains moi-même pour qu'il vienne à ton secours !
J’esquivais la canne, avant de l’attraper avant qu’elle ne tombe. Je sautais alors sur lui, canne en main, pour le frapper au visage.
Il se prit le coup que je lui assénais, avant de me sauter au-dessus, témoignant de capacités surnaturelles. Il reprit sa canne pour la mettre sous mon cou, avant de serrer l'étreinte, pas loin de m'étrangler.
J’ai l’avantage depuis le début. Tu ne te bats pour rien... Maintenant dis-moi où il est.
Je n’eus pas le temps de réagir, qu’une silhouette noire fendit les airs pour me libérer de son emprise. Le Chat Noir.
Je fis les gros yeux en faisant la connexion. Adrien ? Manifestement, cet homme, le Papillon, avait bien fait la connexion avant moi, entre le déménagement d’Adrien et des apparitions héros au Japon.
Aout 2028, Japon, Tokyo, brasserie française, l’équipe fête le tournage de Night Thunderbolt 2
Après avoir empêché le Papillon de nuire à Adrien et son identité secrète l’année dernière, Adrien et moi avions rapidement repris les tournages. Et qui disait tournage, disait fête, régulièrement, pour célébrer les petites victoires d’une vie de cinéma. En l’occurrence, ici, fêter la fin d’un tournage, même si je n’avais jamais la tête à la fête.
A Lucas Lioncourt, et son merveilleux créateur fit la voix de Nathan Kennedy, le régisseur absolument compétent, qui avait absolument géré sur les tournages des deux films. J’appréciais bien Nathan. Il était agréable, devenu très bon ami avec la préparation des Night Thunderbolt 1 et 2, drôle, sympa… beau garçon ? Nathan Kennedy ne voulait pas trop le dire, de peur de se prendre des râteaux, mais je voyais bien qu’il avait quelques sentiments pour moi. Ce soir, peut être porté par le courage d’un verre de bière, il semblait être prêt à s’ouvrir.
Il m’avait alors rejoint au bar où j’étais assis seul, pendant que les autres s’amusaient dans la brasserie qui nous avait été réservée par Nathan lui-même. Je pris alors mon verre pour trinquer avec lui, le laissant s’asseoir à mes côtés.
C’est gentil Nathan, mais c’est plutôt le talent d’Adrien, qui fait vivre le personnage de Lucas, tu sais, répondis-je alors après une gorgée, en faisant un signe de tête pour désigner l’acteur un peu plus loin.
Nathan esquissa un sourire. Et il est plutôt bon ! Mais Adrien est acteur, il fallait bien l’auteur, pour donner l’essence du personnage. Je ne répondais pas, le remerciant silencieusement d’un sourire, qu’il me rendit en plongeant son regard dans le mien. Il s’éclaircit la gorge. Je voulais te demander… comme on s’entend bien, qu’on se connait depuis 3 ans maintenant, et que j’aimerais qu’on se voie… tu sais, en dehors des tournages, plus en ami qu’en collègue. Ou peut-être… plus. Enfin, je m’égare. Il s’éclaircit de nouveau la gorge pour se reprendre. Enfin, voilà, est-ce que tu serais d’accord, si je t’invitais à boire un verre, juste tous les deux ?
Je baissais les yeux. J’avais encore tellement Mattéo en tête, même après toutes ces années… et je pourrais donner tellement cher pour boire un verre avec lui. Juste le voir un instant. Le pauvre Nathan… il était absolument adorable. Etait-ce vraiment une mauvaise chose que d’accepter ses avances ? Je ne sais pas. Je ne savais vraiment pas.
Je… tu veux bien me laisser y réfléchir, Nathan ? Fis-je sans relever les yeux, mais sur un ton sincèrement désolé.
Celui-ci eut un sourire légèrement peiné mais tout aussi compréhensif. Bien sûr Dyson. Je ne veux vraiment pas te brusquer. Tu peux m’appeler quand tu veux, tu sais.
Je levais enfin les yeux vers lui, pour lui sourire, reconnaissant. Merci, Nathan, le laissant alors s’éloigner.
Adrien pendant ce temps, discutait encore avec les autres en souriant, passant une bonne soirée mais qu'il trouvait encore assez répétitive, face aux questions qu'on lui posait toujours sur sa situation, ou sa relation avec moi. Soupirant, il posa d'ailleurs son regard sur moi juste au moment où Nathan s'était éloigné après avoir essuyé une réponse vague et très peu positive de ma part. Adrien afficha une petite moue avant de se rapprocher de moi, tapoter doucement mon épaule avant de s'asseoir à côté de moi.
Allons, ça fait un moment qu'ils ne font plus partie de notre vie, tu le sais ? Il marqua un temps de pause. Tu devrais accepter, Nathan est gentil et puis ça fait un moment qu'il te tourne autour. Tu as besoin de compagnie regarde toi. Tu n'arrives même pas à te réjouir de la fin d'un tournage.
Je soupirais. Nathan est… très charmant. J’eus un petit rire désespéré. J’aimerais bien tomber amoureux comme lui, de nouveau. Je marquais une pause avant de reprendre. J’ai juste… perdre ceux que j’aime est un amer refrain dans ma vie. Et si je sors avec Nathan ? Que je lui donne une chance, que… que je tombe amoureux de lui aussi ? Pour le reperdre ? C’est injuste, je ne veux plus de ça. Je posais mon regard sur celui d’Adrien, trahissant toutes les tristes pensées qui s’agitaient dans ma tête. Il m’arrive de penser à Nathan. Mais je repense toujours à Mattéo derrière.
Je le remarquais jouer nerveusement avec son verre. Lui aussi avait quelques soucis pour tourner la page, je le savais. Je connais Matteo tu sais. Je posais pour sa femme de temps en temps. Assez pour savoir qu'il ne veut que ton bonheur. Et puis ça fait partie de l'amour de souffrir. Il vaut mieux souffrir que ne rien ressentir crois moi alors tu devrais accepter. Il est mignon en plus ! Et ce compliment vient d'un hétéro.
J’eus les larmes aux yeux, lorsqu’il parlait de Mattéo, et de ce qu’il voudrait pour moi. Parce qu’il avait raison. Mais que jamais j’aurais voulu devoir me reconstruire un bonheur après lui. Il me manque tellement… soufflai-je lentement, alors que je me mordais la langue pour ne pas pleurer davantage.
Adrien passa délicatement sa main sur mon dos avant de poser délicatement sa joue contre mon épaule. Ils me manquent tous aussi. Je suis quand même content de ne pas être seul. Enfin essaye un rendez vous, juste pour voir. Okay ? Et il avait raison. On était là l’un pour l’autre, seuls dans ce monde pour comprendre réellement ce que l’autre vivait. J’esquissais un petit sourire.
Merci Adrien, fis-je dans un murmure.
Septembre 2029, Japon, Tokyo, appartement de Dyson et Adrien
Je rangeais alors le costume de Nightwing dans son placard - bien gardé évidemment - aux côtés de celui du Chat Noir. J’avais laissé le costume de Spider-Man après la catastrophe de Storybrooke, parce que je ne voulais plus y penser. Et après avoir découvert que mon ami et colocataire n’était autre qu’Adrien, Nightwing est venu petit à petit, inspiré par lui-même. Je devais avouer que je m’y sentais mieux.
Ce n’était pas pour autant que je me sentais bien globalement. Encore tourmenté par… par tout. Je soupirais, en me posant sur le canapé, lassé d’avoir encore tout ça en tête, n’importe quand. Je sortais alors mon téléphone de ma poche, pour y lire quelques nouveaux messages de Nathan. Toujours des messages bienveillants, qui voulaient s’assurer que j’aille bien après ne pas avoir répondu à son appel quelques heures plus tôt, où j’étais encore dans la peau de l’Aile de la Nuit.
Je me mordais la lèvre inférieure. Est-ce que je devrais l’appeler ? Depuis l’année dernière, j’avais écouté les conseils d’Adrien. J’étais sorti avec Nathan quelques fois. On s’était embrassé, quelques fois. Mais j’avais fini par lui dire que je n’étais toujours pas prêt à vivre une nouvelle relation. Etait-ce stupide de ma part ? Sans doute… mais l’embrasser avait le gout amer de la mélancolie.
J’hésitais encore à lui envoyer un message, j’hésitais à chaque fois. Je voulais juste arrêter de me sentir seul, je ne sais pas vraiment si c’était juste vis-à-vis de Nathan, de ne servir qu’à combler le manque de compagnie que j’avais, quand lui voulait vraiment sortir avec moi.
Mais alors que ces quelques tourmentes me passaient en tête, on sonna à la porte. Comme si quelqu’un l’avait entendu, que je me sentais seul. Je savais qu’il ne s’agissait pas d’Adrien, qui n’avait pas prévu de rentrer maintenant. Fronçant les sourcils, en ayant l’habitude de rester sur mes gardes, alors que je m’approchais de la porte. A travers le judas, je ne voyais rien, ce qui n’avait rien pour me rassénérer. J’ouvrais alors prudemment la porte… pour y voir un garçon, âgé de 10 ans, au teint halé. Un frisson intense et puissant parcourut ton mon corps. Qu’importe son âge, je pourrais reconnaître ses yeux n’importe où, alors que les miens s’imbibaient de larmes.
Bonjour papa, fit-il simplement, d’une petite voix et d’un grand sourire.
Je n’avais pas pu retenir mes larmes alors que je m’étais baissé immédiatement pour le prendre dans mes bras, aussitôt. Milo ! Mon dieu Milo je… je croyais que jamais… Je ne savais même plus quoi dire. Je ne voulais pas parler, juste rester là, le serrer dans mes bras, sentir les battements de son cœur et la chaleur de ses petits bras. Il était bien plus grand qu’il y a 5 ans, c’est vrai. Mais tout était pareil.
Octobre 2029, Japon, ville maudite de Rekishi-Toshi
Je conduisais avec un mélange d’excitation et de peur. L’excitation de retrouver Mattéo, guidé par les indications de Milo vers cette mystérieuse ville, et la peur de ce qu’avait pu faire la malédiction qui l’avait créé. Le schéma se répétait. Une malédiction, un enfant qui retrouvait ses parents pour la défaire. Et l’espoir qui renaissait. Je retrouvais celui que j’ai toujours aimé comme mon fils, je pouvais enfin retrouver son père.
Je m’étais bien trompé. Saloperie d’espoir.
Rekishi-Toshi était une ville parfaitement moderne du Japon, comme il semblait ordinaire d’en voir aujourd’hui, bien qu’elle n’eût pas les traces du passé japonais dans son architecture, comme on pouvait en voir ailleurs. Tout ici semblait récent de quelques années seulement, et si c’était magnifique, l’ambiance était étrange. A cette heure tardive, Rekishi-Toshi était totalement calme, ce qui n’avait rien à voir avec Tokyo, avec ses rues désertes, tout l’inverse de là où je vivais avec Adrien.
Tu crois qu’il me reconnaitra ? Demandai-je, anxieux, au garçon. J’apprendrai alors plus tard que l’espoir d’un enfant, aussi beau soit-il, était bien naïf. Mais ce qu’il répondit me rendait optimiste.
Bien sûr ! Tu es son véritable amour, on reconnaît toujours celui qu’on aime le plus, confia-t-il avec assurance.
J’arrivais alors devant la maison qu’il m’indiquait. Grande, moderne comme tout le reste, riche, magnifique, aux allures américaines. A la sortie de la voiture, Milo plongea sa main dans la mienne, me tirant rapidement, avec bonheur, vers la porte d’entrée.
La suite n’avait rien de ce que nous attendions. Mattéo était marié. Il ne me connaissait pas. Et était bien énervé de voir son fils avec un inconnu. Je m’étais retrouvé rapidement ici seul, sans copain, sans fils, sans espoir. Les larmes aux yeux, les poings serrés.
Non. J’allais faire demi-tour pour trouver Adrien, et revenir ici. On va briser cette malédiction, quoiqu’il nous en couterait.