Le 27 novembre était sans nul le jour préféré d'Anastasia Romanov pour la simple et bonne raison qu'il marquait la naissance de son trésor le plus cher : Abigaëlle. Et pourtant, dieu savait si cette naissance et le mois qui s'en était suivi n'avaient pas été chaotiques au possible. L'absence de Dimitri quand elle avait eu le plus besoin de lui. L'accouchement douloureux. La police. La prison. La dépression. La solitude. Mais un beau bébé aux grands yeux clairs qui babillait de plaisir dès qu'elle apercevait un autre être vivant. Une petite Abigaëlle qui avait fait le plaisir à sa maman de faire ses nuits dans le mois qui avait aujourd'hui déjà un an parce que sa maman, contre toute attente, avait réussi à la mettre au monde pour le pire mais surtout le meilleur. Encore maintenant, il n'était pas rare qu'Anya s'étonnât d'avoir créer un être aussi innocent et adorable, elle qui était tellement butée et franche. Cependant, au fil des jours et des mois qui passaient, elle voyait le caractère d'Abigaëlle s'affiner, s'affirmer, aussi, et retrouvait certaines de ses qualités ou certains de ses défauts en elle. Abigaëlle avait beau être adorable aux yeux de sa mère, cette dernière ne pouvait qu'admettre que la petite fille était aussi pleine d'une volonté apparemment commune à la mère et à l'enfant.
- Tu sais quel jour on est ? susurra Anastasia en levant sa fille, ce matin-là. Aujourd'hui c'est ton premier anniversaire, mon bébé. Tu as déjà un an, ma grande ! C'est fou, hein ?
- Nanniversaiiiiiiire ! s'enthousiasma la petite fille en battant de ses petites mains potelées.
Anastasia rit, embrassa son front tout chaud et l'emmena petit-déjeuner. Elle avait invité Anita à se joindre à la célébration sans prétention au courant de l'après-midi. En sa qualité de marraine, c'était bien la moindre des choses !
Les deux femmes ne se connaissaient certes que depuis quelques années, quand Puka en avait fait la rencontre à Storybrooke, mais avaient rapidement su s'apprécier mutuellement et s'accorder leur confiance. Le choix de la marraine s'était donc tout naturellement porté sur l'ancienne lionne qui, comme la tradition russe le voulait, ferait une excellente "seconde mère" pour Abigaëlle. Même si Anastasia, sa première et unique maman au sens propre du terme, ne comptait pas disparaître de si tôt. Anita, plusieurs fois maman déjà, demeurait un choix sûr que Dimitri n'avait pas tardé à approuver bien qu'il ne connaissait pas réellement la jeune femme. Il aurait tout le temps d'apprendre à la connaître, leur famille avait encore de belles années devant elle.

La matinée s'écoula tranquillement. Entourée de Hoover, son papa, sa maman et ses cadeaux, Abigaëlle rayonna, quoiqu'elle accordait plus d'attention aux emballages scintillants qu'à ses nouveaux jouets. Anastasia avait pris soin de filmer ce premier anniversaire avec un caméscope qu'elle avait acheté la semaine précédente. L'image tanguait de temps en temps quand la jeune femme riait des attitudes très marquées de son enfant mais le film promettait de constituer un souvenir de qualité première.
La mère et la fille étaient justement assises dans le salon en train de jouets avec du papier brillant et des peluches quand on sonna à la porte. Anita sans doute. Qui d'autre cela aurait-il pu être ? Ce n'était pas comme si Dimitri et Anastasia avaient énormément d'amis dans ce monde. En dehors d'Anita, personne ne manquait à l'appel. Marie, la grand-mère d'Anya était venue pour le déjeuner, dans une belle robe de soie vert émeraude, et tricotait à présent à côté de la cheminée. Quant à Dimitri, il s'affairait dans la cuisine. Non, il ne manquait qu'Anita des personnes retrouvées chères à leur vie.
Anastasia prit donc sa fille et le papier doré avec lequel elle jouait et fila ouvrir pour découvrir, sans surprise qu'Anita était là.
Les deux femmes échangèrent un sourire avant qu'Anya ne s'efface pour la laisser entrer et Abigaëlle, apparemment très heureuse en cette journée, l'accueillit en lançant son morceau de papier cadeau doré dans la direction de la blonde.
- Salut ! Entre vite avant d'attraper la mort. Et merci d'être venue, Abigaëlle a l'air ravi. J'espère que tu lui as rapporté des emballages cadeau, c'est ce qu'elle a préféré, apparemment. Tu veux boire quelque chose ? Ou manger ? J'ai acheté un super gâteau chez une pâtissière ancienne lionne, il a l'air divin. On allait justement le manger !

La lionne avait été très surprise quand Anastasia lui avait demandé d’être la marraine de sa fille, Abigaëlle. Après tout, elles ne se connaissaient pas tant que cela et la blonde aurait cru que la rousse aurait choisi quelqu’un d’autre. Ceci dit, l’offre lui avait fait très plaisir et elle avait accepté. D’autant plus que cela atténuait un peu sa perte… Entre William et sa fausse couche, le Noël précédent n’avait pas été des plus joyeux. Anita se remettait doucement, mais elle craignait assez la période qui s’annonçait.

Heureusement, grâce à Anya et Iris, son emploi du temps n’était pas assez léger pour qu’elle se mette à penser à ce qu’elle avait perdu. Sa fille adoptive avait eu des jumeaux et aujourd’hui, c’était l’anniversaire de sa filleule. La lionne s’était fait un devoir de gâter Abigaëlle pour ce premier anniversaire. Peluches, lego en forme d’animaux… Bref, il y avait plein de choses, emballées avec soin dans du papier cadeau aux couleurs lumineuses, comme la petite l’était pour elle.

Une fois prête, Anita s’était dirigée vers sa voiture mais avait dû faire face à un imprévu : sa voiture refusait de démarrer. La lionne s’échina un moment puis décida d’aller à pied jusque chez son amie. Elle n’avait déjà perdu que trop de temps. La blonde mit le temps, mais elle finit par arriver à destination. En sonnant, elle fut accueillie par Anya et par une Abigaëlle guillerette.

- Désolée du retard, ma voiture a fait des siennes. S’excusa-t-elle en pénétrant à l’intérieur. Ne me remercie pas voyons, ça me fait autant plaisir à elle qu’à moi ! Assura-t-elle à la rousse. Tu crois que ça suffira ? Demanda-t-elle avec un sourire à Anya en lui montrant le sac plein de cadeaux. Un thé ne serait pas de refus. Avoua-t-elle avant de rire. Je la connais ! C’est Amelia, l’une de mes amies. Je ne peux pas louper l’occasion alors, il faut y goûter ! Déclara-t-elle avec enthousiasme.

Anita s’était débarrassée de son manteau et l’avait accroché dans le couloir aussi suivit-elle Anya jusqu’au salon où se trouvait déjà Dimitri et une vieille dame que la lionne supposait être Marie Romanov.

- Dimitri. Le salua-t-elle. Mme Romanov. Anya m’a beaucoup parlé de vous, c’est un plaisir de vous rencontrer. Assura-t-elle à la vieille dame avec un sourire.

Puis avisant Abigaëlle qui attendait ses cadeaux, Anita s’assit tout près d’elle, au sol.

- Dis donc princesse et mon bisou ? Réclama-t-elle. Abigaëlle sourit et se fit une joie de satisfaire sa marraine. Bon anniversaire ma puce. Ajouta Anita en donnant ses cadeaux à la petite.

Comme l’avait dit Anya, la petite s’intéressa plus aux emballages qu’aux cadeaux, mais Anita ne se vexa pas. Elle avait eu la même chose avec Nathan…

Anastasia avait balayé les excuses d'Anita avec un sourire compatissant et un geste de la main pour lui indiquer que ce n'était pas grave. L'important c'était qu'elle soit venue, peu importe à quelle heure ou par quel moyen. Anastasia était bien trop contente de la compter parmi ses proches et de savoir qu'elle avait accepté avec plaisir son rôle dans la vie d'Abigaëlle. Pour celle qui n'avait plus de famille c'était on ne peut plus important. Bien sûr, comme elle n'avait pas le permis, Anastasia ne connaissait ni les joies de la conduite ni le bonheur des imprévus tels qu'un moteur récalcitrant. Et pour une fois elle en était bien contente.
Une fois Anita débarrassée de son manteau, la rouquine avait eu tout le loisir d'observer le sac plein de cadeaux d'anniversaire en se disant qu'ils avaient atteint un point de non-retour : Abigaëlle serait définitivement une enfant pourrie gâtée et par sa mère et par sa marraine et par à peu près tous les adultes dans sa vie.
Au fond, cela l'amusait qu'Abigaëlle soit une petite princesse puisque sa mère était la Grande Duchesse de Russie et que, de toute façon, elle aimait trop son trésor pour ne pas la pourrir comme il se doit. Le regretterait-elle quand la demoiselle commencerait à faire des caprices ? Sans doute un peu. Ce n'était pas évident de refuser quelque chose à une petite bouille aussi adorable qu'Abigaëlle. Et tandis que la fille apprenait à marcher et parler, la mère apprenait à être mère en donnant un cadre à son enfant, ce qui imposait des limites mais aussi de l'amour et le don du meilleur de soi.
Mais tout ça, ce serait demain, quand la demoiselle ne fêterait plus ses un ans. Pour l'heure, elle était la princesse de la fête et méritait d'être gâtée.
- Ca suffira, chuchota Anya d'un air entendu. Je ne vais pas te cacher qu'on a dû lui en offrir autant, avoua-t-elle toujours sur le même ton. Va pour le thé ! reprit-elle d'une voix normale et enjouée en reposant Abigaëlle par terre où elle fila retrouver sa grande copine Hoover.
Entre les chiens, Marie et Abigaëlle, le salon était suffisamment peuplé pour qu'Anita ne se sente pas délaissée.
- Ca tombe bien, j'en avais aussi envie, reprit la jeune femme déjà sur le pas de la porte, parée pour tout préparer.
Anita, pendant ce temps, expliqua qu'elle connaissait la pâtissière anciennement lionne. Si c'était surprenant ? Pas réellement. Tous les lions devaient se connaître et venir du même monde, après tout.
- Oui, Amelia, c'est son prénom, ça me revient, acquiesça Anya. Elle a l'air gentille. Et le gâteau a l'air délicieux, on a tous hâte de goûter. Moi la première.
Sur ces mots, Anastasia disparut dans la cuisine. La jeune femme devait bien admettre qu'elle était gourmande. Ce gâteau lui faisait les yeux doux depuis qu'elle l'avait ramené la veille. Le glaçage était sublime et ils en auraient sans doute pour la semaine vu sa taille.
Pendant ce temps, au salon, elle entendait les banalités sociales qui allaient bon train.
- Anita, entendit-elle Dimitri en réponse à la salutation de l'ancienne lionne.
Sa fiancée pouvait parfaitement imaginer le signe du menton qui accompagnait la salutation du jeune homme qu'elle n'entendit plus par la suite. Il avait dû s'en aller. Dimitri n'aimait pas les mondanités. Anya se doutait bien qu'il ne resterait pas manger de la pâtisserie et boire du thé en compagnie de la matriarche Romanov et d'Anita. Elle l'entendit d'ailleurs pénétrer dans la cuisine l'instant d'après, comme pour confirmer ses dires.
- Alors ? Ne me dis pas que la perspective d'une après-midi mondaine ne te séduit pas, le taquina Anya avec un regard complice. Ceci dit je ne te retiens pas, tu peux disparaître. Mais prends au moins une part du premier gâteau d'anniversaire de ta fille, ajouta Anya en lui tendant une assiette et une cuillère.
- Garde-m’en une part alors, mais je vais vous laisser à votre salon de thé, répondit Dimitri en se penchant vers elle avec un sourire.
Comme Anya s'y attendait, il était visiblement, peu décidé à y être plus présent mais avait su faire bonne figure auprès de Marie et avait attendu l'arrivée d'Anita pour s'en aller.
- Je serai dehors si tu as besoin de moi, reprit-il avant de se pencher pour déposer un baiser sur sa joue. Profite de ton après-midi. 
Sur ces mots, Dimitri tourna les talons et Anastasia reposa l'assiette et la cuillère pour s'occuper du thé.
Pendant ce temps, au salon, Marie et Anita faisait connaissance. La vieille dame sourit tendrement en apprenant que sa petite-fille parlait d'elle au monde.
- J'ai aussi entendu parler de vous. Rien de privé, rassurez-vous. Anastasia est une jeune femme secrète. Elle n'a dit que du bien de la marraine de mon arrière-petite-fille. Je suis ravie d'enfin vous rencontrer.
Le ravissement de Marie se trouva renforcer quand elle vit Anita et Abigaëlle si complices l'instant d'après. Elle observait la scène avec une satisfaction non dissimulée qu'Anastasia nota en ramenant le thé et le gâteau décoré d'une grosse bougie qu'elle venait d'allumer. Les petites mains potelées d'Abigaëlle avaient commencé à déchirer les emballages dans le sac d'Anita. La petite fille les observait avec un vif intérêt, froissant les papiers et secouant les boîtes qu'elle était en mesure de soulever.
Quant à Anya, la jeune femme avançait précautionneusement pour ne pas renverser son chargement qu'elle s'empressa de poser sur la table basse.
- Je vois qu'une certaine demoiselle a été gâtée ! Je crois même qu'Anita mérite un deuxième bisou, qu'en dis-tu, Abigaëlle ?
Tandis que la petite s'exécutait armée d'un gros morceau d'emballage, Anastasia poursuivit :
- Merci encore une fois, cette enfant est vraiment trop gâtée... Et sinon, je nous ai fait du thé ! Dimitri s'excuse de ne pas rester, il nous laisse à notre après-midi entre filles, ajouta Anastasia en servant la boisson chaude.
C'était plus ou moins vrai, après tout.
- On devrait s'occuper de ce bon gâteau avant qu'il ne fonde, qu'est-ce que tu en dis, Abigaëlle ? Tu montreras ensuite à maman toutes les belles choses qu'Anita t'a apportées.
La petite fille battit des mains en répétant le mot clé : gâteau tandis que Hoover jappait de contentement. Anastasia prit sa fille sur ses genoux pour la placer à hauteur de son gâteau joliment glacé d'un Happy Birthday Abigaëlle.
- On chante pour faire les choses en règle ? suggéra-t-elle.
L'instant d'après, Anastasia entonnait Joyeux anniversaire pendant qu'Abigaëlle trépignait sur ses genoux, décidément très intéressée par le gâteau au point qu'elle lâcha le papier qu'elle avait en mains. Il voleta quelques instants avant de finir sa course sur la truffe d'une des chiennes de Dimitri qui dormait près de la cheminée.

La lionne eut un sourire quand Anya lui assura que la tonne de cadeaux suffirait. Elle ne put s’empêcher de pouffer, complice, quand la mère lui avoua qu’ils avaient sans doute offert autant de cadeaux voir plus encore à Abigaëlle. Un an, c’était important dans la vie d’un enfant, ça se fêtait ! Même si elle ne s’en rappellerait plus par la suite…

- Je ferais attention l’année prochaine, promis ! Dit-elle avec un air sérieux que son sourire en coin démentait.

Abigaëlle était sa seule filleule… Alors elle serait gâtée, c’était obligé. La lionne sourit quand Anya lui assura que son envie de thé tombait à pic. Puis elles parlèrent gâteau et la blonde apprit ainsi que son amie avait acheté l’un des gâteaux d’Amelia ! Comme quoi, on avait parfois l’impression du contraire, mais Storybrooke était assez petite au final.

- Elle l’est. Assura-t-elle. Et c’est une experte en pâtisserie, tu verras.

Anita ne pouvait que le confirmer, puisqu’elle se fournissait exclusivement chez Amelia pour ses pâtisseries et ses douceurs… Les deux femmes se séparèrent dans le couloir et la secrétaire médicale alla dans le salon. Elle salua Dimitri et la grand-mère d’Anya puis s’installa au sol, à côté d’Abigaëlle.

- Oh vraiment ? Et qu’est-ce qu’elle vous a raconté ? Demanda-t-elle avec un sourire.

Il fallait avouer que ça n’était pas tous les jours qu’on apprenait qu’une Impératrice de Russie s’était légèrement intéressée à vous… Anita était flattée au fond. Puis elle donna ses cadeaux à Abigaëlle et sourit au retour d’Anastasia dans le salon avec le thé et le gâteau. Encouragée par sa mère, la petite se rua sur la lionne pour l’embrasser à nouveau, lui mettant son papier cadeau dans la tête au passage, ce qui fit rire la lionne.

- Bien sûr ! S’exclama-t-elle, ravie.

Alors elle entonna la chanson, en cœur avec Anya. Puis quand ce fut fini et qu’Abigaëlle eut soufflé ses bougies, la lionne prit la petite sur ses genoux.

- Viens là ma puce, que Maman puisse couper le gâteau correctement. Dit-elle avec un sourire avant de regarder Anya faire.

Il était évident qu'Abigaëlle serait gâtée toute sa vie et par ses parents et par sa marraine. Une vraie princesse mais sans la couronne et les responsabilités qui vont avec. C'était probablement mieux ainsi. Du peu qu'Anastasia pouvait se rappeler de son enfance, elle avait le souvenir que son père, Nicolas II, n'avait pas aimé régner, préférant la quiétude des moments en famille au bord de la mer ou dans le palais d'été de Tsarskoie Selo aux impératifs de la vie politique et de la gestion d'un pays. Sa mère, en revanche, avait aimé ce rôle qu'elle avait parfois assumé en outrepassant ses attributions de tsarines. Abigaëlle, pour sa part, ne portait pas le lourd nom Romanov, pas plus qu'elle ne portait de couronne ou de titre. Elle était simplement Abigaëlle, une enfant comme les autres, qu'on gâtait non pas parce qu'elle était de sang royal - même si c'était effectivement le cas - mais parce qu'elle était aimée.
Anastasia en était satisfaite. Elle était partie préparer le thé en toute sérénité, entendant sans le comprendre l'échange entre sa grand-mère et Anita.
La vieille dame, comme à son habitude, était assise dans un fauteuil près de la cheminée et vêtue d'une longue robe de soie foncée. Elle observait chaque détail, chaque aller et venue mais parlait peu, réservant son jugement.
- Anastasia m'a raconté que vous étiez une ancienne lionne très proche de sa famille et que vous travaillez dans le médical, expliqua-t-elle quand Anita le lui demanda, avant le retour de sa fougueuse petite-fille.
Marie Romanov ne prit pas la peine de préciser qu'elle aussi était très attachée à sa famille, tout comme elle n'avait pas pris la peine de revenir sur le soutien qu'Anita avait pu être pour Anya dans les périodes les plus sombres, question de délicatesse.
Au final, la conversation avait rapidement été déviée d'Anita pour se recentrer sur le principal : l'anniversaire et le gâteau. Anastasia ne chantait pas souvent. Elle n'était pas de ces princesses qui fredonnent sans cesse quand elles cuisinent ou ouvrent les volets le matin. Elle chantonnait principalement des berceuses pour Abigaëlle ou des airs qu'elle aimait bien quand elle rêvassait, livrée à elle-même et son imagination. Elle n'avait aussi pas la prétention de particulièrement bien chanter. Mais elle mit tout son cœur pour faire honneur aux un an de sa fille avant de laisser la petite tête rousse prendre place sur les genoux d'Anita.
- C'est presque dommage de couper dans un si joli gâteau, commenta-t-elle pourtant armée d'un couteau. Mais bon, j'ai faim, reprit-elle en tranchant dans le vif sans autre forme de procès.
Anya coupa trois belles part qu'elle distribua à sa grand-mère, Anita et elle-même. Elle coupa ensuite une plus petite part pour Abigaëlle, prenant soin de lui attribuer le morceau avec son prénom en massepain dessus.
- Pour la reine de la journée, commenta-t-elle. Bien, reprit la rouquine quand tout le monde fut servi. Je propose qu'on n'attende plus et qu'on goûte ce gâteau !
Aussitôt dit, aussitôt fait. La jeune femme enfourna une grande bouchée du gâteau chocolaté d'Amelia Peters. Marie Romanov fit de même avec une plus petite bouchée et un coup de mâchoire plus élégant. Sa petite-fille, décidément, n'aimait pas avoir des manières de dames. Elle avait été et serait toujours comme ça. Quelques instants plus tard, cette dernière déclara :
- Tu pourras dire à ta copine Amelia que c'est vraiment délicieux ! Et sinon... Quoi de neuf, Anita ? En dehors de toutes ces dépenses pour couvrir ma fille de présents.

La blonde eut un sourire et hocha la tête pour confirmer les propos de l’ancienne Impératrice. Anya l’avait bien décrite, c’était un fait. Une lionne proche des siens. C’était tout ce qui la définissait en vérité. Même si cela pouvait aussi être pris pour définir April. Quoi qu’il en soit, comme Marie Romanov, Anita se garda bien d’ajouter quoi que ce soit là-dessus. Ça n’était pas le moment, elles étaient ici pour fêter l’anniversaire d’Abigaëlle.

Il y eut le traditionnel chant pour fêter un joyeux anniversaire à la petite et les bougies qu’Abigaëlle eut un peu de mal à toutes éteindre à cause de son souffle qui n’était pas assez puissant. Mais Anya et Anita s’empressèrent de l’aider, riant quand elles soufflaient en même temps sur la même bougie. C’était un agréable moment et la lionne ne regrettait pas d’être venue et encore moins d’avoir accepté la proposition de la rouquine quand elle lui avait demandé d’être la marraine de sa fille.

- Tu t’en voudras moins que tu auras goûté ! Dit-elle en riant quand Anya regretta de devoir découper un aussi joli gâteau.

Abigaëlle, sur les genoux de sa marraine, battait des mains en voyant le beau gâteau être découpé. Rapidement, elles se retrouvèrent toutes avec une part de gâteau et dégustèrent la merveille d’Amelia. La lionne eut un sourire en coin en voyant la différence entre son amie et la grand-mère de celle-ci. Anya était très nature, tandis que l’on sentait dans chacun de ses gestes, l’éducation et le cérémonial qui avaient fait partie de la vie de l’Impératrice douairière.

- Je le lui dirais. Promit-elle avec un sourire. Oh, pas grand-chose tu sais… Quoi que. Iris, ma fille de cœur, a accouché de ses jumeaux. On m’a déclaré grand-mère… À mon âge, tu te rends compte ? Dit-elle en riant. Et pour les cadeaux, je fais ce que je veux. Taquina-t-elle son amie. Je n’ai plus grand monde à gâter en dehors de Nathan, des jumeaux et de ma filleule donc profite !

Anita ne parla pas de William ou de Sasha. Pas besoin. Et surtout, ça n’était pas le moment. Tout ceci lui était déjà revenu en pleine tête lors de l’accouchement d’Iris, aussi la lionne faisait-elle tout pour tourner la page et avancer.

- On m’a déclarée grand-mère… À mon âge, tu te rends compte ? rit Anita en évoquant l'accouchement récent de sa fille de cœur, Iris.
Anya se rappelait en avoir entendu parler de cette même bouche quelques temps plus tôt. Elle ne pouvait qu'espérer que l'accouchement d'Iris avait été moins dramatique que le sien mais chassa rapidement cette pensée. Vivre dans le passé n'était jamais une bonne chose, et d'autant plus quand le passé était moins réjouissant que le présent. Anastasia engloutit donc une cuillerée supplémentaire du gâteau, engloutissant, par là même, cette réflexion mentale. Anita ne savait pas grand chose à ce propos et Anya ne tenait pas spécialement à ce que les choses changent - surtout pas un tel jour. Et puis Anita avait probablement aussi des secrets qu'elle taisait. N'était-ce pas ainsi que tournait le monde ?
- Tu pourras toujours prétendre que tu es sa tante ou sa grande sœur, reprit-elle d'un ton léger. Ou alors tu miseras sur le côté jeune et dynamique du statut et tu seras la mamie la plus tendance au monde, ajouta-t-elle avec un regard en direction de sa propre grand-mère qui, il est vrai, avait plus l'allure traditionnelle qui incombait à la fonction.
Mais malgré ses cheveux blanchis par les ans et les rides sur son visage, Marie demeurait une très belle femme dont l'élégance n'était plus à prouver. Elle suivait posément la conversation, s'étant contenté d'un sourire en coin à la réflexion d'Anita.
- C'est probablement difficile à croire aujourd'hui, très chère, mais ma première petite-fille est née quand je n'étais pas beaucoup plus âgée que vous, déclara-t-elle solennellement.
Ce à quoi Anya s'empressa d'ajouter :
- Olga me manque mais c'était une vraie chipie, elle se moquait de mes dons de dessinatrices !
Le sourire de Marie s'étendit alors mais sans que d'autres paroles ne sortent de sa bouche. Marie parlait peu mais parlait bien. Anya, pour sa part, roula ostensiblement des yeux et termina sa part de gâteaux.
- Qui en veut encore une part ?
Il y aurait bien quelqu'un pour l'accompagner, pas vrai ? Abigaëlle était barbouillée de gâteau jusqu'aux oreilles, signe qu'elle aussi appréciait le déroulé de son premier anniversaire. Néanmoins, sa mère se pencha dans sa direction pour essuyer les mains, le nez et les joues de l'enfant avant qu'elle ne tâche les beaux vêtements d'Anita. Ou autre chose. D'après Dimitri les chiens ne devaient pas manger de sucre. Autant le garder pour les humains, dans ce cas.

Puisqu’elle avait dû parler des derniers événements de sa vie, Anita avait raconté que sa fille de cœur avait accouché de jumeaux et qu’on l’appelait donc à présent Grand-Mère alors qu’elle n’avait que 38 ans. Ce qui était encore un peu jeune pour être appelée ainsi… Même si, il fallait bien l’admettre, les jumeaux ne parleraient pas avant un moment encore, ce qui lui laissait le temps de se rapprocher des quarante ans, ce qui serait bien plus raisonnable pour se faire appeler Grand-Mère. En attendant, Anastasia lui avait proposé une solution qui lui arracha un petit rire.

- C’est bien trouvé. Mais personne ne me laissera oublier que je suis la grand-mère des jumeaux, crois-moi. Dit-elle avec un sourire avant de se tourner vers l’Impératrice. C’est moins difficile à croire que ce que vous pensez Madame. Après tout… On se mariait très jeune avant, il n’est donc pas compliqué de croire que cela vous est arrivé aussi. C’est juste que… Ma foi, je n’étais pas totalement préparée je crois. Ajouta-t-elle avec un petit sourire en coin. Je ne t’ai jamais vu dessiné, il faudra me montrer un jour. Taquina-t-elle son amie.

L’Impératrice douairière n’ajouta rien d’autre, mais au vu de son petit sourire, elle n’en pensait pas moins. Anita admirait cette force tranquille qui se dégageait de la vieille dame. Elle espérait être en aussi bon état le jour où elle aurait son âge !

- Je te suis. Dit-elle avec un clin d’œil. Les pâtisseries d’Amelia sont trop bonnes pour qu’on ne se laisse pas aller à la gourmandise. Déclara-t-elle avec sérieux.

Et puis… Cela ne lui ferait pas de mal de jouer à la gourmande pour une fois.

Anastasia voulait bien la croire. Elle connaissait peu de lions mais avait le sentiment - de par ses conversations avec Anita, notamment - qu'ils formaient un clan très soudé où tout le monde était au courant de tout (ou presque). Il devait bien y avoir deux ou trois taquins dans le lot pour se charger de rappeler à Anita ce qu'elle était à présent aux yeux des jumeaux de sa fille d'adoption. Alors elle n'avait qu'une solution : prendre l'affaire avec le sourire et devenir la grand-mère la plus tendance - et probablement la plus jeune - que Storybrooke ait connu.
Marie Romanov, de son côté, se contentait d'un hochement de tête approbateur en écoutant la réponse plus sérieuse qui lui était adressée. Elle appréciait les connaissances et la déférence d'Anita, c'était certain. Quoiqu'ancienne lionne, Anita lui paraissait moins impertinente que Dimitri, qu'elle avait pourtant accepté dans la famille - sachant de toute façon que personne ne pouvait faire changer Anastasia d'avis. Et puis Marie l'appréciait, d'une certaine façon.
Peu bavarde, la vieille dame se contenta d'un sourire complice et entendu adressé à Anita. Toutes deux le savaient : on était jamais prêtes à ce type de changement.
- On est jamais totalement préparées à être maman, fit remarquer Anastasia sans entrer dans les détails.
Sa grossesse avait été chaotique : elles le savaient toutes. Les premiers temps sans Dimitri avaient été tout aussi joyeux et elles le savaient toutes également. Inutile de ressasser ou de rappeler à Marie que sa petite-fille n'avait pas choisi un homme parfait. Mais avec ou sans cela, il était vraiment que personne n'était préparé à la maternité quand même, que cela se passe bien ou mal.
- Heureusement que j'ai de bons modèles sur lesquels m'appuyer, poursuivit la jeune femme. Et je suis sûre qu'Iris trouvera en toi un solide exemple. Toi, en revanche, tu n'es pas prête de voir mes dessins !
Anastasia s'était retenue pour ne pas tirer la langue. Pas devant Marie. Tout de même, à 23 ans, la jeune femme savait se tenir.
Anita ne lui tint pas rigueur de ce refus et accepta volontiers une autre part de gâteau. Marie, en revanche, fit un signe de refus de la main, se contentant d'une seconde tasse de thé, cependant. Anastasia coupa ainsi deux généreuses parts ainsi qu'une plus petite pour Abigaëlle qui semblait ravie de pouvoir continuer de se mettre de la crème sur le visage.
- Si ton amie Amelia s'occupe aussi des mariages j'irai lui demander un bon dessert le jour où... on se sera décidés à concrétiser les choses, commenta Anastasia en agitant sa main gauche où briller une bague de fiançailles depuis plus d'un an.
Autant dire qu'ils n'étaient pas pressés. A moins que ce ne soit l'enchaînement des événements qui les ait forcés à revoir leurs priorités.
- C'est vraiment délicieux, on aurait dû prendre deux gâteaux, ajouta-t-elle avant d'engloutir une immense bouchée. Désolée, je suis tellement ennuyeuse que je ne parle que de bouffe...
- De nourriture, corrigea machinalement Marie, faisant lever les yeux au ciel à sa petite-fille.
Bouffe, nourriture... c'était synonyme de toute façon ! C'était simplement une question de registre. Mais tout ceci amusait Anastasia qui se contenta d'un commentaire bon enfant :
- Je n'ai rien de la princesse de conte de fées qu'on s'imagine, pas vrai ? Ceci dit... tu es moins poilue qu'une lionne, a priori...

Tout en souriant, Anita avait donné les dernières grandes nouvelles à son amie, notamment le fait qu’elle était à présent grand-mère, puisqu’Iris avait accouché de ses jumeaux. Même si aucun lien de sang ne reliait les deux femmes, l’affection qu’elles avaient l’une pour l’autre valait tout de même le fait que la lionne considérait la jeune mère comme sa fille. Elles avaient vécu trop de choses l’une et l’autre, parfois ensemble, pour qu’il en soit autrement.

- Certes… Acquiesça Anita. Mais crois-moi, être grand-mère n’est pas un événement auquel nous pouvons réellement nous préparer… Ajouta-t-elle. Sauf peut-être à partir de la seconde fois. Précisa-t-elle, songeuse. Mais je n’ai pas hâte que ma fille, Even, ait un enfant… Il faudrait déjà que le possible père grandisse un peu. Dit-elle avec un sourire pour détendre un peu l’atmosphère.

Car Anita savait parfaitement ce qu’avait vécu Anastasia tout au long de sa grossesse puis par la suite. Elle se rappelait encore de son amie qui lui racontait que Dimitri avait failli commettre l’irréparable alors qu’Abigaëlle venait juste de naître. La lionne était alors enceinte et recherchait William qui avait disparu… Depuis, les choses s’étaient arrangées pour la rousse, un peu moins pour elle. Mais la blonde ne voulait pas y penser, sachant parfaitement que ça n’était pas le moment et connaissant aussi l’état dans lequel elle pourrait se mettre si les souvenirs se faisaient trop présents.

- J’espère que tu as raison. Je n’ai pas toujours été un modèle, hélas… Dit-elle en pensant à sa dépression après la levée de la Malédiction. Oh, mais quel dommage ! Répondit-elle avec un sourire quand Anya la taquina à propos de ses dessins.

Puis sans s’attarder d’avantage sur sa grande déception de ne pas pouvoir voir les dessins de la russe, Anita reprit une part de gâteau, souriant en apercevant Abigaëlle qui s’en mettait partout sur le visage.

- Elle s’en occupe oui. Elle fait même traiteur aussi maintenant. Raconta Anita. D’ailleurs en ce moment, elle prépare son remariage… Dit-elle sur le ton de la confidence.

Puis Anastasia regretta de ne pas avoir pris deux gâteaux et fit une remarque en utilisant le mot « bouffe », ce qui fit réagir l’Impératrice douairière qui corrigea automatiquement sa petite fille, faisant sourire celle-ci ainsi qu’Anita.

- Heureusement ! Tu imagines un peu ? Dit-elle en riant. Non, nous ne retrouvons pas nos poils… Mais certains d’entre nous récupérons des capacités propres à notre nature de lions. Par exemple, ma meilleure amie a retrouvé son rugissement. Et moi mes griffes. Expliqua-t-elle avec un petit sourire sur la fin.