Il y avait des journées, comme ça, où vous aviez l’impression de faire les bonnes choses au bon moment. Ce genre de matins où vous saviez que, quoi qu’il se passe aujourd’hui, vous essayerez de faire de votre mieux pour que ça bénéficie à quelqu’un d’autre. En positif. Au possible. À chaque fois que Sebastian partait rejoindre les bénévoles d’associations, il avait cette sensation de faire quelque chose de bien. Peut-être était-ce égoïste de sa part, mais ça ne serait vrai que s’il ressentait une fierté à le crier sur tous les toits. Mais non, Sab se contentait d’être discret, prévenant, motivé et le moins intrusif possible. Il avait côtoyé tant de beauté dans l’imaginaire qu’il essayait tant bien que mal de l’insuffler dans la fatalité de l’ordinaire nécessité.
Serrant les pans de sa chemise correctement, il s’assura d’être présentable avant de toquer à la porte de l’assistant social. La voix de Garrett résonna derrière le carreau et lorsque Sab ouvrit, un sourire gratifia son entrée.
Ah, parfait ! S’exclama l’homme, ravi.
Tu tombes super bien !Sebastian hocha la tête pour le saluer, refermant derrière lui pars oucis d’intimité. Garrett était l’un des référents associatifs de l’hôpital de Storybrooke, en plus d’être un assistant social des plus compétent, et aussi un ami de longue date du Marchand de Sable. Il l’avait connu peu après la levée de la malédiction et ils avaient traversés beaucoup d’épreuves… Aujourd’hui, l’homme devant lui menait une vie paisible avec sa compagne et leur deuxième fils en cours de route ; il avait même cessé de s’inquiéter à tout bout de champ sous prétexte qu’elle était narcoleptique le jour où Sab lui avait promis de garder un œil sur ses rêves et ses endormissements. Il fallait bien avoir un avantage d’être ami avec le gardien des rêves !
Mais ils n’étaient pas là pour parler de la vie de Garrett et, tandis qu’il prenait place, ce dernier extirpa des dossiers de la piles et les fit tomber devant lui. Sebastian haussa un sourcil intrigué.
T’inquiète, ils ne sont pas tous pour toi ! Un petit soupir soulagé résonna, ce qui les fit rire. L’homme posa ses mains à plat sur l’un des dossiers et attendit quelques secondes avant de l’ouvrir doucement.
Écoute, je sais que tu va plutôt dans le service de pédiatrie ou à l’orphelinat ces derniers temps, mais une association aurait besoin d’un peu d’aide. Ou plutôt, une personne : tu te rappelles de Maisie Charleson ?Sab leva les yeux quelques instants pour réfléchir et le visage de la jeune fille lui revint rapidement en mémoire : grande pour son âge, très fine, un carré roux coupé avec une frange très courte à la mode et des vêtements souvent trop amples. Elle avait été à l’orphelinat de Storybrooke pendant des années, avant de passer au foyer d’accueil des adolescents et d’être placées dans une famille d’accueil. Sab ne l’avait pas revue depuis quelques années… Depuis qu’elle avait cessé de réclamer sa présence le soir, en réalité.
Depuis qu’elle avait oublié sa part d’enfance pour se tourner vers les désillusions adultes.
Il hocha la tête, signe qu’il remettait la personne dans la bonne case de son esprit.
Récemment, elle a causé un accident de voiture et a été jugée, elle est sortie de détention pour mineur il y a une quinzaine de jours et, depuis, elle a pas mal de soucis. Son agent de probation m’a appelé et, puisqu’elle est connue des services sociaux, ils m’ont demandé de trouver quoi faire pour l’aider. J’ai pensé faire appel à Jessica Quartz, tu la connais ? Sab fit non de la tête.
Elle a organisé le banquet de l’orphelinat à noël, une jeune femme brune à peu près grande comme ça. Plus petite que toi mais presque comme moi.
Il mima dans le vide une hauteur, ce qui fit rire son ami. Quasiment personne ne dépassait Sab en taille. Néanmoins, le marchand de sable haussa les épaules… Avant de finalement ouvrir les yeux et de hocher vivement la tête. Il remettait le visage de Jessica !
Parfait, tu vois qui c’est ? Elle gère une association qui s’appelle « Seconde Chance ». Je l’ai contacté par téléphone hier et, comme tu connais Maisie, je me suis que ça serait sympa que tu lui apportes le dossier et que vous vous occupiez de son cas. Qu’est-ce que t’en dis ?Devant le silence réflectif du gardien, Garrett ajouta :
Je sais que ça va te prendre un peu de temps, si tu ne peux pas je comprendrai et demanderai à quelqu’un d’autre… Jessica est très douée dans ce qu’elle apporte aux plus jeunes.« Ça ne me dérange pas. »
Tu es sûr ? Garrett paru néanmoins soulagé de sa réponse.
Je ne voudrais pas t’imposer une mission sur la longueur…
Sebastian hocha le menton, sûr de lui et balaya ses doutes d'un geste de la main.
Tu sais que Maisie n’est plus la petite fille que tu as connue ? Forcément, si elle était adolescente et qu’en plus elle sortait d’un centre de détention… Ça n’allait pas être la gamine qui s’amusait à rêver de licornes et d’autres joyeusetés innocentes de l’époque.
Mais j’espère qu’elle te reconnaîtra assez pour te faire confiance. Elle a besoin d’aide même si elle refuse de l’admettre… Je ne sais pas dans quoi elle s’est fourrée cette fois, mais j’espère que Jessica et toi l’aiderez à s’en sortir avant qu’il ne soit trop tard. Il tendit le dossier à Sebastian, qui le prit avec soin. Échangeant encore quelques paroles plus légères, le marchand de sable quitta le bureau avec une adresse écrite sur un post-it : celle du bureau de Jessica.
En espérant ne pas tomber mal, il rejoignit à pied l’endroit pour profiter encore un peu de la chaleur qui s’installait en ville… Le soleil réchauffait autant les cœurs que le ciel. Ce n’était pas de refus en cette période terriblement creuse de sa vie, que de rebooster un peu sa self-confidence de la sorte. Inspirant un coup, il passa une main pour repousser ses cheveux un peu trop longs en arrière et franchit la dernière porte le menant à destination. Au bas de l’immeuble, une secrétaire (ou une concierge ?) lui indiqua la bonne porte.
Il toqua, patienta, attendit, attendit encore et… N’entendant pas de réponse – ou n’était pas très sûr si on lui avait dit d’entrer ou non – il abaissa la poignée et jeta un coup d’œil à l’intérieur : personne. Oups, forcément ça n’avait pas dû parler ! Zut alors, où était-elle passée ? Est-ce qu’elle allait se fâcher de voir qu’il avait ouvert sans son accord ? Peut-être qu’il devrait refermer ? Oui, ça serait plus sage. Voilà.
Ouf, ni vu ni connu. Maintenant, plus qu’à attendre cette… Jessica Quartz !