« Pour réaliser une chose extraordinaire, commencez par la rêver. Ensuite, réveillez-vous calmement et allez jusqu'au bout de votre rêve sans jamais vous laisser décourager. » (Walt Disney)
L'appartement était comme dans mes souvenirs. Etrange, pour une fille qui n'était pas censée en avoir. Du moins pas des réels. Simplement des implantés. Ma mère, lors de l'une de ses escapades avec mon père, dans un monde des contes pas comme les autres, avait opté pour un échange. La petite moi - réelle - était devenue une grande moi - imaginaire. Une version alternative mais conçue de la même manière que la première. Heureusement, la petite avait été retrouvée après que mes parents aient passés un temps fou à remplir une multitude de formulaires. Depuis, épuisés, ils s'étaient affalés tous les deux sur le grand lit de Desmond, en attendant le retour de ce dernier.
C'est fou, parce que je le connaissais. Enfin, je savais qui était Desmond. Mais j'appréhendais de me retrouver face à lui. Petite, je le vénérais. Grande... je le vénérais sans doute toujours autant. Il était Le chien des Enfers, le seul, l'Unique ! Mais il était avant tout mon protecteur, et ce, depuis toute petite.
Mes pas dans son appartement, m'avaient conduits jusqu'à la cuisine. Coincidence ? Là, accroché sur le frigo, j'y avais trouvé un dessin. Celui d'une créature à trois têtes - effrayante - et d'une enfant. J'avais souris en le découvrant. Je me souvenais de l'avoir dessiné, mais je ne l'avais jamais vue de mes propres yeux. C'était des nouveaux souvenirs qui se créaient, mais cette fois ci ils étaient bel et bien réels !
« Toutou... » murmurais-je en me remémorant comment la petite fille l'appelait.
...ou alors tout simplement en l'appelant moi même. Car je venais de sentir la présence de quelqu'un juste derrière moi. Une respiration ou je ne sais quoi qui m'indiquait qu'il était là, lui cet étranger dont j'allais faire la connaissance. Me tournant, je lui avais adressé un bref sourire, le détaillant de haut en bas. C'est vrai qu'il était grand, et que même sous cette apparence plutôt frêle, il était extrêment puissant !
« Le mieux est de commencer par les présentations. » lui dis-je en faisant des gestes de la main pour lui indiquer d'y aller doucement.
Je ne voulais pas qu'il me brusque, ou même le brusquer moi même. Je sentais que ça n'allait pas lui plaire que quelqu'un - une intrus - soit chez lui. Mais il allait me reconnaitre, n'est ce pas ? M'accepter ? Papa et maman y étaient bien arrivés eux.
« Papa, Maman... ils ont voyagé dans le monde des contes à bord d'une maison volante. Avec plein de ballons ! » achevais-je en ouvrant bien grand les yeux, toujours émerveillée par ce spectacle qu'elle avait vue. « Et me voilà ! »
Cette fois ci, j'avais ouvert grand les bras pour me montrer de toute ma largeur. J'étais là, devant lui, Autumn Bowman. Je lui avais pas précisé mon nom, car il le connaissait déjà. Ce qu'il ignorait c'était la manière dont j'étais arrivée et la raison de ma présence ici.
« Pas d'inquiétudes, ce n'est pas une Cassandre. » lui précisais-je. « La petite va bien. Elle est avec monsieur Fredericksen qui a accepté de la garder - plutôt sous la contrainte - le temps que je sois ici pour faire les présentations et pour em-mé-nager. » articulais lentement en tentant d'y mettre le plus de conviction possible.
Il allait falloir être plus convaincante. Et un câlin ? songeais-je en penchant la tête légèrement sur le côté. J'y perdrais un bras, peut-être même deux... fallait que je m'y résigne. Pour le moment en tout cas.
« Je ne dérangerais rien, c'est promis. » enchainais-je. « Rien du tout. Surtout pas toi. Je ne te dérangerais pas. Je me ferais toute petite. Comme à l'époque. » achevais-je avec un petit sourire.
A l'époque... mon dieu que c'était bizarre de dire cela.
« C'est l'affaire de quelque nuits. » laissa échapper papa qui venait d'arriver.
Vive les Enfers ! Papa était là, pile au bon moment. J'avais peur de continuer cette discussion toute seule. Lui il pourrait le convaincre, l'amadouer, le forcer... non, pas le forcer. Fallait qu'il en ait envie. Mais parfois... l'envie ne venait pas quand il le fallait ou quand c'était nécessaire.
« Juste quelque nuits. Rien de plus. » répétais-je. « Et je peux prendre le canapé. Je ferais même les courses. Tu manges pas que de la viande, n'est ce pas ? Pourquoi j'ai des souvenirs de toi uniquement avec une cotelette en main ou un nonos quelconque ? »
C'était vraiment étrange ce qu'il avait fait voir à ma petite personne. Fallait que je me rappelle qu'il était une créature - un chien qui plus est - et qu'il... allait sans doute se montrer très gentil et accueillant, n'est ce pas ? Est ce que je devais sourire une nouvelle fois ? Voir jusqu'à m'en décrocher la mâchoire ? Ca me ferait souffrir - ça lui ferait plaisir - ça pourrait le convaincre. Mais à peine j'avais commencé à sourire, que Papa avait une nouvelle fois ouvert la bouche et que par conséquent, je m'étais résignée à aller plus loin dans ma démarcher - merci !
« Je pense pas qu'elle ait besoin de beaucoup d'affaires, mais de toute façon tu t'occuperas de lui acheter tout ce qu'il lui faut. Je pense que c'est mieux ainsi. Parce qu'à la maison, avec deux Autumn ça serait un peu compliqué. Faut surtout que la petite accepte l'idée qu'il y a une grande maintenant. Enfin provisoirement. Ou pas. On verra bien. » acheva t'il en m'observant.
Je haussais les épaules. J'étais autant dans l'ignorance que lui. En tout cas cela signifiait que lui m'acceptais. J'aimais bien cette idée de vivre ici, avec eux. Après tout, je ne voyais pas où retourner, vue que je venais de nulle part...
« Bref, mieux vaut qu'elle prenne ta chambre. Le lit est plus confortable et y'a la piscine. D'ailleurs, faudrait que tu investisses dans des boxer Stranger Things. C'est une série télé sur Netflix. Je t'en ai déjà parlé je crois. J'en ai pas trouvé dans ta commode. Je voulais prendre une douche, mais j'attendrais la maison du coup. »
Papa avait vraiment fouillé dans les affaires de Desmond ?
« Tu sais qu'avant de fouiller, on peut demander ? »
« Je n'ai pas fouillé. J'ai regardé si y'avait un boxer qui me convenait. »
Papa avait une drôle de façon de voir les choses, mais bon. En tout cas, j'adressais un grand sourire à Desmond. Il allait m'accueillir les bras ouverts, n'est ce pas ?
« Il n'a que des boxer noirs. » lui assurais-je pour l'inciter à ne pas reprendre ses fouilles.
Comment je savais ça ? Je me souvenais avoir farfouillé dans ses affaires quand j'étais petite, mais... pourquoi je savais pour ses boxers ? Ah oui, il gardait aussi des biscuits au miel dans son tiroir à vêtements. Ce qui était étrange. Sans doute pour en avoir toujours sous la main.
« Je sais cuisiner. » lui dis-je pour tenter de le convaincre, même si ce n'était pas vrai. « Je fais d'excellents gâteaux. » - encore un mensonge - « Et... je t'en ferais un au miel. Enrobé de miel. Plein de miel à l'intérieur. » ajoutais-je en hochant plusieurs fois la tête même si je venais de prononcer à voix haute le plus cruel des mensonges...
CODAGE PAR AMATIS
Desmond Blake
« I am the perfect devil. Tell me how bad I am. It makes me feel so good. »
| Avatar : Rami Malek *o*
Let's talk of graves, of worms, and epitaphs. “Because I'm evil, my middle name is misery.
Well, I'm evil, so don't you
mess around with me.”
| Conte : Intrigue divine sauce titanesque avec soupçon de mal de crâne | Dans le monde des contes, je suis : : Cerbère, le fidèle et redoutable chien à trois têtes
L'Enfer, c'est les Autres. (Sartre)L’Enfer, c’est les autres.
Desmond appréciait cette citation de Sartre, sans lui prêter le sens que l’auteur du vingtième siècle lui avait accordée. Il convenait que la majorité des gens sont en enfer puisqu’ils dépendent du jugement d’autrui - ce qu’il trouvait des plus pathétiques - mais il préférait en simplifier la signification. Pour le Chien à trois têtes, l’Enfer c’était les autres. Littéralement. L’humanité dans son intégralité. Les gens n’avaient aucun intérêt à ses yeux, exceptés lorsqu’il souhaitait s’en mettre un sous la dent. Ou un moment de plaisir. Il les considérait comme une denrée utile. Il s’amusait avec eux, puisqu’ils se montraient tellement bêtes et crédules. Cependant, il ne sourcillerait pas si une apocalypse rayait les humains de la surface de la terre. Dans ce cas, il se remettrait à chasser les animaux, comme cela lui arrivait de le faire de temps à autre, afin de varier les plaisirs. Il possédait un côté très épicurien.
A cet instant précis, il apprenait à un homme à voir le monde à l’envers. Il avait pendu l’importun par les pieds, à la branche haute d’un arbre, de sorte à ce que la tête de l’individu soit à hauteur de ses jambes. L’homme, pieds et poings liés dans le dos, se débattait. Desmond l’observait avec un mélange de désillusion et d’ennui. Jusqu’au bout, cette personne se révèlerait inintéressante.
— Vous allez le regretter ! lança-t-il en désespoir de cause.
Cerbère laissa échapper un soupir appuyé. Pourquoi les mortels se sentaient-ils obligés de menacer lorsqu’ils se trouvaient dans une situation périlleuse ? Cela ne faisait que renforcer l’impression qu’ils étaient apeurés.
La suite, il pouvait aisément la prédire. Lorsqu’il fit jaillir la lame du rasoir dans un glissement bref et doux à l’oreille, l’homme changea immédiatement de ligne directrice.
— J’ai... prenez mon portefeuille. Dedans, il y a ma carte bancaire. Je vous laisse l’utiliser autant que vous voulez si vous... si vous me détachez. Je vous en prie... Je ne porterai pas plainte. Je vous le jure !
Un tressautement cynique agita le coin des lèvres de Desmond. Que valent les promesses d’un individu aussi abject ? Tranquillement, Cerbère s’agenouilla devant l’homme, de sorte à ce que leurs visages se retrouvent proches l’un de l’autre. Il grimaça en constatant que le front du mortel suait à grosses gouttes, qui dégoulinaient jusqu’en haut de son crâne. Il articula d’un ton laconique :
— Vous souhaitez probablement savoir pour quelle raison je m’apprête à vous saigner comme le porc que vous êtes.
Il n’estimait pas que l’autre méritait des explications avant de mourir. Néanmoins, il trouvait stimulant de le “préparer” pour son dernier voyage. Par ce biais, il percevait son angoisse se décupler. L’humain dispensait une odeur nettement plus appétissante, mélange de peur-panique savoureuse.
— Je... je... Je vous jure que je ne dirai rien à la police ! Laissez-moi partir ! s'écria l’homme, sa voix se perdant dans les aigus. AU SECOURS ! A L’AIDE !
Desmond secoua la tête lentement.
— Vous n’avez toujours pas compris que nul ne peut vous entendre, ici ?
Levant les yeux au ciel, Desmond fit glisser la lame du rasoir sur la gorge du mortel. Le sang éclaboussa le sol. La terre humide absorba l’offrande écarlate, si abondante qu’elle forma bientôt une mare sous le pendu qui ne remuait plus. Satisfait, Cerbère se releva. Au bout du rasoir qu’il tenait toujours gouttait le liquide rouge. Il contempla le cadavre accroché à l’arbre d’une forêt verdoyante et grimaça. Cet homme, avec ses remarques cupides, lui avait coupé l’appétit. Il préférait le laisser ainsi. Cela ferait le bonheur du journal local, et occuperait les policiers du coin pendant un petit moment.
Un petit jappement lui fit tourner la tête. Il adressa un léger sourire au chien qui était assis quelques mètres plus loin et l’observait avec des yeux humides. Vivement, Desmond s’approcha de lui. Ce faisant, il fit disparaître le rasoir dans sa main. Puis, il s’agenouilla pour débarrasser le chien de sa laisse. Il la jeta dans les buissons dans un grognement mauvais. Attacher un chien... connaît-on une infamie pire que celle-ci ? Ce n’était pas pour cette raison que Desmond avait puni l’humain. Non, s’il avait décidé de jouer les justiciers, c’était pour avoir surpris l’homme en train de maltraiter cet adorable animal. Il lui donnait des coups de pied et tirait sur la laisse au point de l’étrangler. Desmond n’avait pu le supporter. Depuis toujours, il était un défenseur de son espèce. Tous les canidés lui vouaient un respect sans faille. En retour, il s’était promis de les protéger.
— Il ne te fera jamais plus le moindre mal, promit-il au petit chien noir tout en le caressant. Personne ne t’en fera.
Le chien aboya d’un air enthousiaste et se redressant, agita la queue. Desmond sourit, le souleva de terre puis se releva tout en le gardant contre lui. Il comprenait son langage. Logique.
— Comment t’appelles-tu ?
Le chien jappa de plus belle. Il lui expliqua que son “maître” l’avait nommé Nonos et qu’il ne supportait pas ce sobriquet. Desmond esquissa une moue. La rage battait à ses tempes. Il songea qu’il aurait dû faire souffrir davantage le mortel avant de le tuer. Il réfléchit quelques instants avant de proposer :
— Que dirais-tu de Mephisto ?
Il lui fallait un nom imposant pour guérir de sa honte. Extatique, le petit chien aboya :
— Ça signifie que je suis votre assistant ?
Desmond eut un petit rire et le gratta derrière les oreilles sans répondre. Il l’aimait beaucoup. Le courant passait bien entre eux. Une idée germa dans son esprit : peut-être pouvait-il le garder ? Il appréciait la solitude mais la compagnie d’un de ses pairs serait bienvenue en ces temps troublés.
Il s’accorda le temps de réfléchir et prit le chemin de son appartement. Il apparut dans la cuisine, le chien dans les bras, et sentit immédiatement une présence à la fois étrangère et familière. Rigidement, il pivota vers la jeune femme qui portait l’aura d’Autumn. Tout en la fixant, il inspira son odeur à plein poumons. Aucun doute, c’était bel et bien elle. Elle transportait l’aura d’Hadès ainsi qu’une fragrance qui rappelait celle de sa mère, à la fois acidulée et humide, comme le parfum de l’humus après une pluie ensoleillée.
Il fronça les sourcils, attendant une explication. Mephisto, sentant son trouble, dressa les oreilles et fixa la jeune femme à son tour. Cette dernière fournit un récit ampoulé et imprécis, qui agaça Cerbère au lieu de l’apaiser.
Pour une imitation, elle est sacrément réussie. Elle a la même odeur que la petite.
Malgré tout, en se concentrant bien, il nota une infime différence dans la composition de son aura. Un détail qui rendait le mélange un peu aigre. La note de contrefaçon.
Le regard de Desmond s’assombrit. Mephisto grogna dans ses bras. L’attaquerait-il s’il le lui ordonnait ? L’idée lui semblait tentante, mais il ne la mit pas à exécution. Tout d’abord, il souhaitait davantage d’éclaircissements. D’après “Autumn”, la petite, la “vraie”, allait bien.
Hadès surgit alors, confirmant que la contrefaçon ne resterait que quelques nuits. Desmond plissa des yeux et se raidit davantage en sentant son Maître tapoter son épaule. Rester où ? Il n’avait pas en tête de... ? Le visage de Cerbère perdit toute couleur. Hadès proposa qu’elle prenne sa chambre. Desmond n’écouta pas le reste. Le sang battait si follement à ses tempes qu’il le rendait presque sourd. Il se contentait de fixer la jeune fille si intensément qu’il aurait voulu faire un trou au laser dans sa peau.
La seule information réjouissante fut d’apprendre que son Maître avait fouillé dans ses tiroirs. Curieusement, cela réchauffa quelque peu le cœur du chien des Enfers. Hadès avait cherché à se rapprocher de lui en portant un boxer lui appartenant. Le fait que la Contrefaçon sache qu’il ne portait que des noirs lui fit froncer les sourcils. Avait-elle fouillé, elle aussi ? En revanche, il se sentit aussitôt révulsé. Elle n’avait aucun droit sur ses sous-vêtements. Seuls son Maître et ses conquêtes en avaient.
“Autumn” essaya de l’acheter en lui promettant des gâteaux au miel. Très mauvaise idée... Cela lui confirma qu’elle n’était pas celle qu’elle prétendait, car si elle l’avait bien connu, elle aurait su que la corruption ne fonctionnait pas avec lui. Il voyait cela comme une preuve de faiblesse. Il n’avait aucune considération pour ce genre de bassesse mortelle.
Il attendit qu’Hadès soit parti pour articuler d’un ton plein de fiel :
— Parasite...
Son regard acrimonieux se planta dans celui de la jeune fille.
— Tu prendras le canapé, poursuivit-il d’une voix mielleuse. Je ne te lâcherai pas d’une semelle jusqu’à ce que ta sentence soit prononcée. Tu ne sortiras pas d’ici.
Jamais.
En son for intérieur, il espérait que son Maître ne se montre pas trop lent à choisir un châtiment adapté. Car, en toute logique, il ne pouvait garder une fille qui n’était qu’une vulgaire copie – plus âgée - de l’autre. Tôt ou tard, il donnerait l’ordre à Cerbère de s’en débarrasser. Il sourit à cette perspective. D’ailleurs, peut-être était-ce pour cette raison qu’il lui avait demandé de la garder ?
Mephisto s’agita dans ses bras et il le posa enfin à terre. Il s’empressa de trottiner vers Autumn, renifler ses chaussures puis aboyer dans sa direction. Au lieu de se montrer agressif, il réclamait des caresses ! Indigné, Desmond émit un grognement rauque tout en gardant la bouche fermée. Le petit chien tourna la tête vers lui puis dit :
— Je sympathise avec l’ennemie pour mieux la duper. Toi, tu seras le méchant flic.
Desmond aimait mieux ça. Sans rien laisser paraître, il replongea un regard acéré dans celui d’Autumn. Pendant ce temps, Mephisto appuyait ses pattes avant contre l’une des jambes de la Contrefaçon, comme pour la presser de le câliner. Tellement intelligent, ce Mephisto... Cerbère se félicita de l’avoir pris comme assistant.
Cerbère a des habitudes bizarres. Depuis quelque jours, je tiens un petit carnet où je note ce qu'il fait. C'est pas ce qu'il y a de plus passionnant comme occupation, mais quand vous êtes coincée en majeur partie dans un appartement, vous trouvez toutes les occupations possibles pour passer le temps. la première a été de jouer avec Méphisto. C'est bien pour un temps, mais ça n'occupe pas toute une journée.
Je sors parfois, même si c'est pratiquement toujours escorté du toutou - le grand et le petit - mais la plupart de mon temps se passe dans cet appartement. Papa est venu me voir deux fois. Maman m'a proposé une sortie entre filles. Je ne suis pas mise de côté. Mais je sens que je ne suis pas non plus considérée réellement comme la véritable Autumn. Surtout que Desmond ne manque pas de me le faire remarquer dès qu'il en a l'occasion.
J'essaye au maximum de prendre le moins de place possible. Je n'ai pas touché à la décoration de l'appartement, et je range chaque matin mes draps de sur le canapé jusque dans une armoire, afin de ne pas donner cette impression de désordre. Qui plus est, je n'ai pas encore osé entrer dans la piscine qui se trouve à l'étage. C'est pas que j'en ai pas envie, bien au contraire, mais c'est chez Desmond, donc j'essaye d'y aller doucement.
« Je sais que la cohabitation n'est pas facile. Et que de vivre avec quelqu'un, c'est pas ton fort. Mais je te ferais remarquer que je fais de très grands efforts afin de passer totalement inaperçue et ne pas déranger tes habitudes. »
Fallait qu'il le sache. C'était important.
Quand on sortait dehors, je marchais pas loin de lui, mais pas trop près non plus. Je lui avais proposé à plusieurs reprises de sortir seule, avec Méphisto, mais il avait refusé. Tout compte fait on était bien plus souvent ensemble qu'il l'aimerait. Mais il obéissait à papa. c'est fou à quel point il était toujours dans l'optique de plaire un maximum à mon père. Quand j'étais petite je le voyais comme quelqu'un de totalement maître de lui même. Mais à dire vrai, il a besoin d'un guide, d'un exemple, d'un mentor. Du moins c'est ainsi que j'ai la sensation qu'il voit mon père. Tout l'inverse de ma mère. C'est peut-être qu'une impression, mais quand on s'est retrouvé tous les quatre ensemble et que maman s'est mise à parler, je l'ai entendu légèrement grogner. Parfois je me dis que si il pouvait, il la dévorerait. Il ne doit y avoir que Hadès qui compte à ses yeux. Hadès et... peut-être la petite moi. Il a un regard différent avec elle.
En parlant de la petite moi, elle va bien. Très bien même. On a très peu discuter tous les deux. Je l'intrigue, mais elle m'accepte. Sans doute qu'elle est la seule à véritablement comprendre ce que je ressens, vue qu'elle ressentirait pareil si elle était dans mon cas. Pour information, j'ai tous ses souvenirs. Tous ceux d'elle petite. D'ailleurs c'est un peu dérangeant parfois, car j'ai non seulement ses souvenirs, mais aussi ses désirs. Par exemple, la dernière fois quand on a fait une après midi shopping avec maman, on est passé devant un magasin de jouets et j'ai eu la folle envie d'entrer dedans. Je suis d’ailleurs revenu avec une petite peluche Sully. C'est fou comme il est adorable ce petit monstre !
« Ca me dérange pas si tu amènes quelqu'un à la maison. On pourrait même se faire une soirée film tous les trois. »
Est-ce qu'il avait besoin de ma permission ? Et j'espérais que par amener quelqu'un, il comprenait bien par là que je faisais allusion à une amie, une connaissance. J'avais pas envie de l'entendre ou le surprendre avec une fille. Ca pourrait totalement choqué la version demi enfantine, demi adulte qui se tenait juste là face à lui.
« Après si tu veux, on peut même organiser une fête. On ferait venir marraine que je n'ai pas encore réellement vue. Maman, papa, mes grands parents et mes tontons. Ca pourrait être cool ! Norbert pourrait nous amener ces excellents sandwich au humus qu'il m'a fait goûter hier. »
J'étais pas sûre que l'idée de faire une grande fête pourrait l'intéresser. Soupirant, j'avais penché la tête vers Méphisto qui m'écoutait depuis le début.
« Ok. Ca ne va pas marcher, c'est ça ? » lui dis-je en posant mes mains sur mes hanches à la manière de Peter Pan. « On va recommencer du début. » ajoutais-je. « Là sur la table, y'a le gâteau au miel. Je suis sûre de l'avoir réussi. Y'a le frigo plein. J'ai rangé le salon. Et j'ai mis ces petites billes dans sa piscine afin de lui donner diverses couleurs. Il sera ravis en se rendant dans sa chambre ce soir. »
J'espérais que ça lui plairait. J'avais absolument tout fait pour que la soirée se passe bien et qu'il soit très heureux de m'avoir chez lui. Me passant une main sur le front, j'avais observé la pièce. Jusqu'à présent, j'avais répété mon pitch de ce que j'allais lui dire. Ca faisait déjà tout pile sept jours qu'on cohabitait ensemble. Fallait fêter ça ! Et je m'ennuyais...
« Y'a à boire dans le frigo. Et les bougies Hadès c'est pour créer une ambiance. »
J'en fixais une. Puis, je baissais la tête en direction de Méphisto tout en faisant une moue.
« Pourquoi papa s'est lancé dans ça ? C'est un tantinet ridicule, n'est ce pas ? Et puis... ça le fait fondre. Petit à petit. Ca ressemble à une torture ou je ne sais quoi. Bref... ça devrait plaire à notre Cerbichou. » dis-je à Méphisto avant de m'asseoir sur le canapé, puis de le regarder. « Ce surnom ça reste entre nous, mon beau. On est d'accord ? »
Restait plus qu'à attendre son arrivée. Et pile à ce moment là, j'entendis un petit bruit provenir de l'étage. Levant les yeux en direction de la chambre, je me demandais ce qui pouvait bien s'y passer. Etait-il entré directement par en haut ? Allait-il voir ma surprise avant que j'ai le temps de lui parler de tout ça ? Je soupirais.
« Bon, j'aurais essayé d'y mettre les formes. » laissais-je échapper à l'intention de Méphisto, avant d'entreprendre de monter les marches. « Desmond ? Avant toute chose, je veux te dire que... »
J'avais commencé à parler avant d'arriver dans sa chambre et quand j'avais ouvert la porte, je m'étais stoppé. J'aurais peut-être du frapper avant d'entrer... Ca aurait été mieux.
« Euh... » débutais-je, avant de laisser échapper un petit rire nerveux. « ...salut ! »
Elle était là, comme ça. Je ne voulais pas critiquer, mais j'étais un peu surprise. Je n'avais pas entendu Cerbère entrer, ni la présence de cette femme. Ils étaient là depuis longtemps ?
« J'ai été téléporté de chez moi à ici. Saluuuut ! » dit-il avec un grand sourire.
Elle semblait très... heureuse de la situation. Enfin du fait d'être attachée non plus à son lit, mais au lit de mon toutou. Je toussotais, essayant de faire passer le fou rire qui allait arriver.
« Moi c'est Bianca ! » s'exclama t'elle. « Tu dois être Autumn ? »
J'ouvris la bouche sans savoir quoi dire. Comment ça je dois être Autumn ? Elle savait qui j'étais ?
« Mon choubidou parle de toi tout le temps. Enfin, on se connaît que depuis une petite heure, mais il n'a pas arrêté de dire que tu étais chez lui, que tu étais toujours là, que tu prenais de la place... Enfin je crois que c'est dans le bon sens. » me dit-elle en me faisant un clin d'oeil.
J'en étais pas certaine... je tentais de sourire au minimum. Cette situation était trop perturbante et tordante en même temps. A première vue, elle portait toujours une petite culotte, et un sous-tif. Si j'étais un homme, j'aurais détourné le regard, mais étant une femme, ce qu'elle avait, je connaissais déjà. Enfin sauf cette position et ce que ça entraînait. Elle n'avait pas mal à force de garder les mains en l'air et attachées ?
« Tu veux que je te.... ? » ...détache ? Lui proposais-je.
« Ah non, je préfère que ce soit lui. Il fait de ses trucs avec sa langue, c'est incroyable ! »
Hein ? Je voulais pas entendre ça... Je souriais une nouvelle fois, très nerveusement, en détournant cette fois ci le regard d'elle. Je remarquais enfin la présence de Desmond. Ce dernier était débout, bien droit, le dos tourné à nous, en train de regarder sa piscine. Cette dernière était devenue très... multicolore. J'avais peut-être un peu abusé sur les billes.
« Oh... » laissais-je échapper.
C'était... un peu embêtant. Je voyais pas cela comme ça. Après, ça lui donnait un petit quelque chose de plus. Mais je pensais pas que ça serait à ce point.
« Alors... déjà... Surprise ! » m'exclamais-je. « Enfin, c'était pas une surprise comme ça. De base ça disait que ça ferait quelques couleurs sympas. Pas que tout se mélangerait... bref... j'ai fait les courses. J'ai préparé un gâteau au miel et j'ai acheté à boire. On va pouvoir faire la fête. Enfin, je te laisse d'abord finir ici. Et je t'attends en bas. » dis-je en déglutissant.
Je ne savais plus quoi dire. Cette situation était totalement imprévu. La fille. Les boules de couleurs... rien allait. En tout cas je voulais pas le déranger.
« Je vais vous laisser finir. Mais après, t'as qu'à descendre avec nous. » dis-je le plus sympathiquement possible à Bianca.
« Ca sera avec joie ma poupette ! »
Poupette ? C'était quoi cette fille ? J'aimais pas trop ce surnom. Mais je souriais. Après tout, je l'avais dérangé en plein... bref...
]« On fini vite choubidou ? » dit-elle tandis que je fermais la porte de la chambre et que je descendais les marches sur la pointe des pieds pour déranger le moins possible.
Une fois en bas, je m'étais affalé sur le canapé et j'avais attrapé le paquet de Monster Munch. Tant pis si j'allais avoir mal au ventre, je comptais bien le finir en entier pour tenter de tout oublier.
CODAGE PAR AMATIS
Desmond Blake
« I am the perfect devil. Tell me how bad I am. It makes me feel so good. »
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Well, I'm evil, so don't you
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| Conte : Intrigue divine sauce titanesque avec soupçon de mal de crâne | Dans le monde des contes, je suis : : Cerbère, le fidèle et redoutable chien à trois têtes
L'Enfer, c'est les Autres. (Sartre)Pendant son absence, l’eau de la piscine avait pris une teinte verdâtre. Des paillettes brillaient à la surface, là où des amas de mousse ne débordaient pas. Desmond fixait l’onde d’un œil oblique, puis il porta son regard sur la Contrefaçon. Lentement, il avait pivoté vers elle, minéral et inquiétant. La Parasite d’un mètre soixante-cinq énonça tout ce qu’elle avait fait “pour lui”. Il retint à peine l’évocation du gâteau au miel, qui aurait de toute manière un goût bien amer au vu du constat de son appartement.
Il plissa des yeux tandis que la Contrefaçon descendait l’escalier. Elle était pour le moins étrange. Elle prétendait le laisser “finir”. Comme s’il avait besoin de sa permission... Le seul à qui il devait allégeance était Hadès.
Il ferma brièvement les paupières en entendant les caquètements agaçants de la blonde attachée. Il regretta de ne pas l’avoir dévorée avant de l’amener. Il avait agi par instinct, ayant pour habitude, de temps à autre, de prendre de la nourriture à emporter. Il jouait avec et mangeait ensuite. Il avait oublié la présence de la Parasite chez lui.
A présent, il se retrouvait avec deux indésirables. La blonde sans cervelle continuait de parler. Il ne l’écoutait plus - déjà qu’il ne l’avait pas fait durant leur rencontre, quelques minutes plus tôt. Peu farouche, inconsciente, la peau tendre : exactement son genre de friandise. Hélas, son goût serait gâté par la présence de la Contrefaçon, sans parler du parfum agressif des multiples boules de bain qui terminaient de se dissoudre dans la piscine. Desmond fronça le nez. Rien n’était plus intolérable que des odeurs indésirables. Son odorat surdéveloppé était mis à rude épreuve.
— Alors Choubidou ? Reste pas planté comme ça ! Viens m’embrasser ! gloussa la blonde.
La mine sombre, il s’approcha et coupa les entraves de la fille d’un coup de griffe. Libérée, elle lui lança un regard interrogateur tout en se massant les poignets.
— On joue plus ? demanda-t-elle, déçue.
— C’est ton jour de chance, on dirait, articula-t-il.
Il saisit brusquement son bras mais au lieu de l’embrasser, il la téléporta dans une rue de Pasadena, afin d’avoir la satisfaction de lui faire passer une mauvaise journée. Elle allait drôlement galérer pour rentrer jusqu’à la ville dans laquelle il l’avait trouvée, située à l’autre bout des Etats-Unis.
Il reparut près d’Autumn, qui était affalée dans le canapé. Mephisto quitta aussitôt son panier près du réfrigérateur pour faire la fête à Cerbère. Ce dernier appréciait cette marque de respect, et ne manqua pas de se pencher pour lui faire une caresse. Puis, le petit chien retourna dans son panier.
Dès que Desmond se redressa, il devint presque minéral. Son visage perdit le peu de couleur qu’il avait tandis qu’il articulait dans un filet de voix :
— Qu’est-ce que tu n’as pas compris dans la phrase “ne touche à rien” ?
Était-ce vraiment utile de discuter ? La Contrefaçon n’en était pas à son premier forfait. Elle semblait prendre un plaisir vicieux à détruire ce qu’il appréciait. Le confort de son appartement, pour commencer. Ça ne pouvait pas continuer ainsi. Il ne pouvait tolérer un tel manque de respect, surtout de la part d’un vulgaire Parasite.
Lentement, il s’abîma dans une sorte de transe. Il se réfugia dans un espace secret et introuvable, dans lequel il pouvait se rendre à loisir : sa propre tête. Quand l’Âme le laissait en paix, c’était un lieu adéquat pour méditer de délicieux crimes et des plans machiavéliques. Il inspira profondément. Les minutes s’écoulèrent. Il sentit qu’il était presque sur le point de trouver un moyen de se débarrasser de la Contrefaçon sans que Hadès en soit irrité. Ce serait ardu, long et pénible, mais possible. Quand, soudain...
Un clapotement discret le fit frémir. Du coin de l’œil, il vit de la mousse dégouliner le long de l’escalier. Les bombes de bain avaient fait leur œuvre, et le courroux du chien des Enfers n’en serait que plus effroyable.
Et elle allait regretter toutes ses folies. Oh oui, elle allait le regretter.