Les beaux jours en ce printemps et avec eux son lot de festivités propres à la saison. C’était une saison de réjouissance et de renouveau. C’était une saison de bonheur et de joie. On pensait baptêmes et on pensait mariage. C’était en somme une belle saison et les clients se bousculaient à la porte de mon agence d’évènements. Cela me faisait très plaisir et naturellement je faisais de mon mieux pour satisfaire les envies de chacun d’entre eux. Bien sûr, fidèle à ma marque de fabrique, je faisais toujours en sorte des les imprégner d’une ambiance un tantinet macabre. C’était en somme un phénomène assez naturel chez moi. Je ne pouvais oublier ce qu’avait donné le Noël que j’avais organisé dans le monde des contes. Le lugubre et l’épouvante faisait partie de moi et en aucune circonstance je ne pouvais totalement les écarter de ma vie. Je l’avais compris justement le jour où j’avais voulu détourner Noël à mes dépends. Je rêvais d’offrir à tous une fête incroyable qu’ils n’oublieraient jamais. J’étais tellement impatient de mettre en route ce projet. Pourtant, j’avais rapidement compris que cela me serait impossible. Je n’étais pas fait pour les paillettes et ce monde de Bisounours qui allaient de paire avec cette fête. Non, moi j’avais besoin de faire peur et d’inspirer chez eux de l’angoisse et peut-être un profond sentiment de mélancolie. Cette aventure m’avais d’ailleurs appris une leçon essentielle qui me servirait toute monde existence. Au lieu de renier ma nature profonde, je devais au contraire jouer avec elle et tenter de l’apprivoiser pour en faire quelque chose de créatif et de très satisfaisant pour les clients qui faisaient appel à mes services.
Et cela fonctionnait ! Cela fonctionnait même si bien que je devais parfois décommander des fêtes que l’on me demandait de préparer. Je n’étais jamais à court d’idées nouvelles. Pourtant ce n’était pas réellement du gâteau. Organisant plus d’une centaine de célébrations chaque année et faire en sorte qu’elles soient toutes aussi unique que magnifiques, n’était réellement pas une mince affaire. Mon inspiration, je la puisais bien évidemment dans l’imagination de mes clients. Chacun de leurs désirs étant des ordres, je faisais mon possible pour que leurs rêves puissent se réaliser. Mais parfois, c’était beaucoup plus facile à dire qu’à faire. Parmi toutes les personnes que je rencontrais quotidiennement, une bonne partie d’entre elles ne savaient pas réellement ce qu’elles désiraient au plus profond d’elles-mêmes. Elles faisaient souvent appel à un professionnel dans l’idée que ses propres expériences pourraient lui permettre de leur offrir ce dont ils avaient besoin sans même en avoir conscience. Ceux-là étaient sans nul doute mes clients préférés. Car ce n’était plus leur imagination que je devais solliciter mais bel et bien la mienne. Je déployais alors des trésors de créativité qui les faisaient sourire jusqu’aux oreilles. Leurs rires, mais également leurs effrois, étaient tout ce que je désirais voir et entendre. Il n’y avait pas plus belles récompenses que de les voir être satisfait par mon génie créatif.
Mais il pouvait arriver même aux plus grands génies de tomber en panne sèche d’inspiration ! Dans ces moments-là, ma vie devenait réellement infernale. Je me creusais la tête à en détacher ma boite crânienne, je ne parvenais plus à trouver le sommeil et pouvais rester enfermer durant des jours dans une profonde solitude. Ces pannes d’inspiration étaient ce que je détestais par-dessus tout. J’avais toujours eu de la peine à accepter l’échec et je refusais que mes clients puissent s’en retrouver malheureux. Ils méritaient tous ce qu’il y avait de meilleur et je me devais de le leur offrir.
Voilà pourquoi, au moment où la famille Lutz étaient venus me voir la toute première fois, je m’étais senti aussi mal à l’aise. Ils désiraient plus que tout organiser le mariage de leur rêve. Tous les deux avaient attendus de nombreuses années avant de pouvoir convoler en justes noces. Norman, mais également son épouse Rebecca, voulaient surprendre leurs invités par un déploiement de faste digne de leur amour. Cependant ils avaient chacun leur propre conception du mariage. Ils avaient chacun des désirs différents et qui n’était pas forcément compatibles. Norman lui voulait par-dessus tout que ses épousailles témoignent de son attachement à la culture gothique. Il raffolait depuis toujours des histoires de fantômes et de mariages d’outre-tombe. A ses yeux, le mariage se devait d’être éternel et la célébration devait le démontrer dans tous ces aspects. Il m’en avait parlé durant des heures et semblait véritablement passionné par ce goût du macabre qui représentaient si bien ses valeurs. Mais Rébecca ne le voyait pas du tout de cet œil. Pour elle, ce qui comptait le plus était d’avoir un mariage très chic qui démontrerait leur statut social à tous leurs invités. Elle rêvait de verres en cristal, de décors en or et en paillettes. Selon elle, sa famille aurait eu beaucoup de mal à accepter un mariage lugubre. Ils n’avaient déjà aucun respect pour leur futur beau-fils. Elle voulait donc qu’il leur fasse une très bonne impression le jour le plus important de toute leur vie. Ces deux visions très difficiles à concilier.
Très joueurs, ils avaient donc décider de prendre des paris entre eux. Consultant chacun un organisateur de mariage personnel, ils s’étaient mis au défi de choisir le plus beau des mariages qui leur seraient proposés. C’était donc la chance pour moi de briller face à la concurrence. Je ne pouvais pas passer à côté d’une si belle occasion de démontrer mes talents à toute la ville. Si je parvenais à remporter ce petit concours, plus personne ne pourrait me décrédibiliser dans ma vision du mariage parfait. Pourtant, la tâche s’avéra bien plus ardue qu’il n’y paraissait de prime abord.
Le premier obstacle que j’eus beaucoup de mal à franchir était celui de l’inspiration ! C’était une merveilleuse occasion pour moi de briller, certes. Mais le problème était que je n’arrivais pas à me mettre d’accord avec moi-même. Durant des semaines, j’avais tracé dans ma tête les projets les plus farfelus qui soient. Mais aucun ne parvenaient réellement à me satisfaire. J’étais quelqu’un de terriblement perfectionniste. Si un projet ne parvenait pas à répondre à toutes mes attentes, je le balançais simplement à la poubelle pour plancher sur un tout nouveau. Mais là rien ne parvenait réellement m’inspirer. Je commençais à perdre patience alors que l’échéance se rapprochait à grands pas. La chose que je craignais le plus était de voir Norman s’éloigner de moi pour rejoindre le projet de sa femme. Je ne pouvais pas me permettre d’échouer.
Et puis un soir mon imagination s’enflamma littéralement. J’eus l’heureuse surprise de vivre une aventure dont très peu de gens pourraient rêver. Mais nous étions à Storybrooke, la ville de tous les possibles ! Et ce soir-là j’avais reçus la visite d’une mariée fantomatique qui avait réalisé tous mes rêves. C’était réellement une folle aventure. Je me rappelais encore le bal organisé en l’honneur du futur couple. Ce cauchemar tellement grisant qui mêlait si habilement une tuerie de masse avec un magnifique incendie. Cette chasse à l’homme qui nous avait conduit à nous entretuer entre tous les membres d’une même famille. Comment oublier une telle expérience ? C’était tout bonnement impossible. Oh bien sûr, il y avait eu quelques ombres au tableau. La perte de mes pouvoirs m’avait donné l’impression d’être plus vulnérable que jamais. Je regrettais également d’avoir fait le voyage avec Annabelle. Ma pauvre petite poupée-démon, elle ne méritait certes pas d’avoir été prise pour cible d’un mari totalement psychopathe. Pourtant, cette soirée m’avait drôlement inspiré et j’étais revenu dans ma petite vie de tous les jours avec des idées bien en tête.
Pourtant, il y avait une chose à laquelle je ne m’étais certes pas attendu. Comme toutes les semaines, j’avais reçu la visite de Norman. Mais le jeune homme semblait bien moins féroce et combattif que lors de nos rencontres précédentes. Je ne sais pas réellement ce qui s’était produit dans sa vie. J’ignorais les propos qu’il avait pu tenir avec sa future femme. Il avait cependant fini par admettre que ce plan n’était pas ce qu’il souhaitait. Ce petit défi lancé entre amoureux avait fini par les diviser plus que de les rassembler. Ils ne voulaient pas qu’une chose aussi futile que la préparation de leur mariage les forces à s’entre-déchirer. Après tout, ce mariage ils allaient le faire à deux. Alors pourquoi se battre pour cette raison ?
Ayant déjà eu l’occasion de travailler avec Emmaline, je leur proposais alors de couper la poire en deux. Plutôt que d’annuler un de nos projets, nous allions allier nos forces afin que ce mariage puisse se faire en mariant également les deux styles. Ils avaient été littéralement fous de joie et ma consœur d’activité était toute prête à partir sur cet accord. Je lui avais donc proposer de nous voir pour discuter des différents aspects de cet évènement que nous pourrions organiser.
Rencontre en terrain neutre, je lui avais même proposer que nous puissions nous rencontrer directement à mon appartement. J’avais réellement envie que tout se passe dans une ambiance conviviale et bon enfant. Après tout, j’appréciais beaucoup la jeune femme. Il n’y avait aucune raison pour qu’aucun de nous ne puisse y trouver son compte.
C’est pourquoi, deux jours plus tard, je l’attendais chez moi de pied ferme. Mes dossiers et mon ordinateur tous prêts posés sur mon bureau, j’avais même pris soin d’organiser un petit apéritif avant de passer aux choses sérieuses. Et lorsque l’heure arrive enfin de nous revoir, j’ouvris la porte de mon humble demeure. Un immense sourire satisfait s’affichait alors sur mon visage.
« Emmaline ! Quelle joie de te revoir. Mais je t’en prie entre. Fais comme chez toi ! »Bien sûr, comme tout hôte convenable, je ne manquais pas de lui proposer de la débarrasser de ses affaires que je rangeais avec grand soin au fond de mon placard. Je la conduisis alors jusqu’au salon où des bols remplis de petits amuse-bouche salés et sucrés nous attendaient. Naturellement, ces différentes friandises ressemblaient davantage à un grand bol que préparait les familles pour les enfants qui venaient leur rendre une petite visite à Halloween. Mais je ne voyais pas réellement ce qui pouvait poser un problème. J’étais toujours le premier à admettre qu’il n’y avait rien de meilleur que ces petites douceurs. Mon médecin nourrissait toujours quelques réserves à cet égard. Ayant malheureusement été diagnostiqué comme diabétique à mon arrivée dans cette ville, les bonbons n’étaient pas des plus recommandables. Mais bon, il fallait bien admettre que ce genre d’occasions se faisaient très rares ! Il n’y avait pas autant de concurrents qui pouvaient se targuer de s’entendre aussi bien dans les affaires. Alors pourquoi ne pas tout faire pour en profiter ? C’était une devise si chère à mon vieux cœur tout décharné.
« Je dois admettre que je suis réellement content de te revoir. Notre dernière rencontre remonte à si longtemps ! Je ne me rappelle plus la dernière fois que nous avons eu le temps d’avoir une véritable discussion. Tous les deux. »Puis, je me dirigeais vers le bar où toutes sortes de flacons étaient déposés. Bien sûr, l’alcool étant un véritable démon pour moi, j’avais fait une croix totale sur cette boisson que je craignais pratiquement plus que la peste noire elle-même. Cela dit, j’aimais beaucoup confectionner toutes sortes de cocktails non alcoolisé. Il y avait tellement de bonnes choses que nous pouvions faire dans les boissons non alcoolisées.
« Alors dis-moi qu’est-ce qui te ferais plaisir de boire ? Un pink lemonade Margarita ? Un mojito sans alcool ? Ou encore un Chaï Bubble Tea ? Je peux absolument tout faire. J’essaie de créer mes propres boissons ces temps-ci. Je sais que d’ordinaire on fait plutôt appel à un barman pour le faire lors de soirées, mais j’avais réellement envie de mettre la main à la pâte. C’est une activité tellement relaxante et bien sûr rafraichissante. »Après avoir préparé nos boissons, je retournais à ses côtés avec deux verres de cocktails. Lui tendant le sien, je levais le mien devant moi pour porter un toast.
« Je propose un toast. Au mariage le plus fabuleux que nous allons créer ensemble. »Je bus alors une gorgée avant de reprendre mon discours. Je trouvais que c’était une bonne idée de lui faire part de mes impressions vis-à-vis du projet des mariés.
« Tu sais, à un moment j’ai vraiment eu peur que les mariés annulent leur projet de mariage. C’est vrai, je m’étais tellement creusé la tête à propos de ce mariage. Ca aurait été dommage de tout devoir abandonner en cours de route. Du coup, c’est super de pouvoir travailler ensemble. On va pouvoir à nouveau faires des étincelles. Tu n’es pas de cet avis ? »acidbrain