« Pour réaliser une chose extraordinaire, commencez par la rêver. Ensuite, réveillez-vous calmement et allez jusqu'au bout de votre rêve sans jamais vous laisser décourager. » (Walt Disney)
Plongé dans la couleur ambrée de sa bière, Áron se demandait encore ce qu’il faisait ici, bien sagement assis sur le tabouret, au bar, sans plus bouger depuis une bonne heure. C’était à peine s’il regardait les autres, s’il les entendait rire, derrière lui, remuer et vivre, pendant qu’il restait accroché à son bout de comptoir, ses yeux clairs fixés sur la boisson, sans même la boire. De temps en temps, il levait le verre à ses lèvres, en prenait une gorgée et le reposait sur son sous-verre rond, au nom du bar qu’il squattait ce soir.
Cette vie, qui était la sienne, lui semblait parfois étrangère, comme celle d’un autre qui se déroulerait devant lui, en première personne, un film un peu naze qui enchaînait les clichés et les dénouements pourris. Il naviguait entre les scènes, qu’il regardait à peine, et se précipitait, lui-même, vers une fin inéluctable, un destin auquel il ne pourrait pas échapper. Auquel il n’avait, au fond, peut-être pas envie d’échapper. Il se demandait, seulement, ce qui le faucherait en premier : les policiers censés être ses alliés ou les criminels trompés par son double-jeu ?
La question, posée, là, sur le comptoir, le fit grimacer. Il reprit une grande gorgée de bière, finit son verre et en commanda un autre, d’un claquement de doigts autoritaire. Il n’aimait pas ce genre, qu’il devait se donner, ces airs de chien méchant qui s’accrochaient à ses épaules et repoussaient les autres, loin de lui, même à cette heure de la nuit. Le tabouret, à ses côtés, était vide depuis qu’il s’était posé là et on évitait soigneusement de passer derrière, par peur de le toucher. Les gars comme lui, tout le monde sait que ça réagit au quart de tour, que ça n’attend qu’une excuse pour exploser.
C’était peut-être vrai, au fond.
Áron avait, parfois, un excédent de frustration à faire parler, comme autrefois, dans un autre genre d’endroit, à écraser ses poings contre les visages d’adolescents à peine plus vieux que lui. La prison évitée de peu, pour le délinquant en bonne voie de devenir le plus gros caïd de coin. Sauf qu’il avait choisi une autre vie, rangée, dans l’espoir, d’un jour, pouvoir parader dans son uniforme, à arrêter tous ceux qu’il ne voulait plus voir sévir, dans les rues de la ville.
Et voilà qu’il se rangeait de l’autre côté de la ligne, accoudé à son bar, une veste en cuir passée sur ses épaules larges, à tenir tout le monde en respect par un simple regard autoritaire. Ou presque tout le monde. Alors que son second verre venait se poser devant lui, un homme se planta à ses côtés et le fixa intensément. Áron se redressa avec une lenteur exagérée, fit exprès de remuer les épaules pour se donner plus de carrure, et glissa ses yeux clairs sur l’intrus.
À cette heure de la nuit, l’alcool aidait à se défaire de ses limites, à se donner le courage d’affronter celui que personne ne voulait affronter. Alors l’autre ne détourna pas le regard. Il ouvrit la bouche sur des insultes qu’il n’avait aucune raison de proférer. Par jalousie, peut-être, alors que sa demoiselle, plus loin dans le bar, les dévorait tous les deux des yeux. Áron, lui, s’en balançait sévère, de la bonne femme. Il ne lui donnerait pas ce qu’elle voulait. Les combats de coq pour une nuit accompagnée, trop peu pour lui. Il préférait sa tranquillité.
Une tranquillité qui vola en éclats à l’instant où l’autre osa poser une main sur son bras. L’infiltré eut un tic nerveux qui releva la lèvre sur ses dents. S’il avait été flic, s’il avait pu porter l’uniforme dont il avait tant rêvé, Áron se serait tenu à carreaux, il aurait trouvé les mots pour envoyer chier l’autre, pour lui faire comprendre qu’il s’attaquait à beaucoup plus gros que lui.
Sauf qu’on lui avait retiré le droit de devenir policier.
Alors, Áron se leva de son tabouret, retira la main de l’autre de son bras et parcourut la salle du regard. Une bagarre de bar… voilà qui était intéressant, qui gonflerait les rumeurs sur son dos, en ville, et lui attirerait les bons regards. Les criminels comme lui, ou comme celui qu’il devait être aux yeux de tous, ne se laissent pas marcher sur les pieds sans réagir. Et il n’était pas le genre à s’étendre en mots, non plus.
– Tu veux jouer ?
La menace à peine dissimulée dans ses mots, Áron n’attendit pas la réponse de l’autre. Il s’empara de son col, tira l’adversaire à lui et écrasa son front juste au creux de son nez. Le choc fut rude, l’os explosa à son contact et il relâcha le grand gaillard qui recula précipitamment, la gueule en sang. Très vite, ses acolytes se placèrent tout autour de lui. Il y eut quelques cris apeurés, des fuites précipités. Áron, lui, leva les poings et se tint prêt à frapper. S’ils pensaient pouvoir lui résister, ils s’étaient attaqués au mauvais homme.
Un bar presque vide, une légère odeur de transpiration, qui avec le temps pouvait devenir désagréable. Des rires, des discussions, des voix bien trop élevées à certains moments, et pourtant Judith n’en participait à aucune. Pourquoi faire ? Certaines personnes avaient bien trop bu pour leurs petits corps, d’autres tenaient encore sur les jambes, sans doute pour très peu de temps. La discussion serait sans doute remplie de bégaiement ou encore, de mot incompréhensif. Alors, elle préférait rester sur son tabouret et regardait ce qui l’entourait.
Elle observait, son verre tournant entre ses doigts, assise loin de tous ses hommes. Et femmes. Elle observait les corps, les mimiques de leurs visages, leur façon de bouger. Elle avait toujours fait ça, surtout dans son ancienne ville. Observait était un point très important, et maintenant, elle ne pouvait plus faire que ça. Elle, qui n’était pas encore dans la police de Storybrooke. Elle commençait à s'ennuyer, ne plus porter l’uniforme lui manquait, ces anciens collègues lui manquait.
C’était pour ça qu’elle était venue ici, pour pouvoir souffler un peu. Elle était contente d’avoir retrouvé sa famille, mais elle commençait doucement à étouffer. Elle avait vécu pendant de longues années seule, pour seule compagnie les disputes de ses voisins le soir. Ou bien, ces sorties dans la ville jusqu’à tard dans la nuit. Parce que New-York ne dormait presque jamais. Et pour oublier une enquête difficile, les bars de cette ville accompagner d’amis étaient la solution miracle.
Ici, c’était différent, quand elle sortait, ses parents lui posaient bien trop de questions. C’était pour ça, qu’elle avait attendu que tout le monde dorme pour pouvoir sauter de la fenêtre et partir. Elle n’aimait pas faire le mur, mais elle était en train d'étouffer dans cette maison qui l’avait vue grandir. Ces frères et sœurs ne la lâchaient pas, malgré qu’elle les aimait de tout son cœur, elle avait besoin de son espace vital. Alors, elle avait marché jusqu’à tomber sur ce bar. Elle n’avait pas hésité longtemps avant de rentrer dedans.
Apportant son verre à ses lèvres, elle but une gorgée de sa bière, avant de la reposer. Elle ne buvait jamais à ce mettre la tête à l’envers. Elle savait que dans ce genre d’endroit, les choses pouvaient déraper bien trop vite. Judith avait tendance à ne pas se mêler des histoires, mais il ne fallait surtout pas qu’un des coups viennent la toucher. Elle pouvait paraître fragile, il était vrai, qu’elle était assez fine et pas très grande. Mais elle savait se défendre.
Elle avait souvent atterri, au grand désarroi de ses parents dans le bureau du directeur. Juste parce qu’elle se défendait, bon, elle avait souvent fait saigner ses camarades. Puis quand sa famille avait rejoint l’école, les choses avaient dérapé encore plus. Mais elle s’en fichait, avec le temps, elle avait appris à faire attention, évitant les points sensibles et surtout laissant simplement des bleus. Et la vie avait fait qu’elle avait eu le retour de flamme dans un sens. Les bleus qui avaient marqué son corps après de nombreuses enquêtes en étaient la preuve. Souvent, en rentrant le soir chez elle, elle découvrait son corps marqué, douloureux. Le pire, c’est qu’elle aimait ça, avoir mal, dans ces moments-là, elle se sentait tellement vivante, elle se sentait présente.
Sortant de ses pensées quand elle entendit du bruit, elle ne put que lever les yeux au ciel. La tension était montée d’un cran et à tout moment, les choses allaient déraper. Judith avait vue juste, elle vit le font d’un jeune homme s'écraser contre un nez. Bien vite, des personnes prit la fuite, sans doute de peur. Elle, elle resta là, regardant la scène, alors que d’autres hommes se mettaient autour du brun. Secouant la tête, elle prit son verre avant de prendre une gorgée.
“Ce n’est pas très loyal. Tous contre un… C’est peut-être un manque de confiance de votre part ou bien, vous vous sentez sans doute minable, c’est pour ça que vous avez besoin de vos larbins. Puis, vous allez sans doute sortir avec des bleus, peut-être quelques côtes cassées. Vous pensez que ça en vaut vraiment la peine de se battre ?”
Elle avait parlé, elle n’aurait peut-être pas dû, mais elle s’en fichait. Si, elle pouvait éviter une bagarre, elle serait bien contente, surtout que le barman n’avait pas bronché d’un orteil. Vraiment une fiche molle. Judith ne voulait pas se mêler de la bagarre, loin de là, mais elle était venue passer un moment de détente, et les choses ne se passaient pas comme prévu.
“Sinon, vous pouvez aller dehors, et laisser les autres personnes profiter. On vit vraiment dans un monde égoïste."
Si, la bagarre venait vraiment à voler en éclats, ils vaudraient mieux pour ces hommes que la petite Judith ne se prenne pas un coup. Sinon, elle allait participer avec joie à la bagarre, même si, il avait de fortes chances qu’elle ne fasse pas le poids face à ces derniers.
“Puis, l’homme qui se trouve en face de vous n’a pas l’air très commode, alors à votre place, j’irais m’asseoir gentiment et irais boire une bonne bière.”
Judith n’avait jamais vu Aron, sans doute un nouveau, elle ne savait pas vraiment. Elle était partie depuis bien trop d'années pour savoir qui étaient les personnes qui résidaient encore à Storybrooke. Elle ne savait même pas si ces anciens camarades étaient toujours ici. Elle n’avait pas vraiment cherché, elle le ferait dans les jours à venir. Puis, elle savait que ce genre d’endroit n’était pas vraiment un endroit pour se faire de nouveaux amis ou encore de nouvelles rencontres. Il fallait dire que les personnes présentes ici devaient être des personnes avec une mauvaise fréquentation. Elle n’avait pas choisi le meilleur bar, en même temps, elle n’avait pas cherché bien loin, le premier bar que son gps lui avait donné était celui-là. Elle aurait dû faire plus de recherche, et peut être que sa soirée se passerait autrement qu’avec une bagarre. C’était sûrement mal vu, surtout si, la police devait pointer son bout du nez. Ils la refuseraient directement, elle en était sûre. Et ce n’était pas son but numéro un.
Une bagarre, rien de mieux pour détendre ses muscles crispés et ses nerfs à vif, sans doute. C’était, du moins, ce qu’on attendait d’un homme comme lui, avec une dégaine comme la sienne, un regard de tueur braqué sur ses adversaires. Áron collait à son personnage, la mine sombre, les lèvres tendues sur un sourire en coin qui en disait bien plus long que ses poings. Il n’en était pas à sa première embrouille. Elle ne serait pas, non plus, sa dernière. Il était rôdé, expérimenté, capable de les mettre au tapis en une poignée de secondes. Que ce soit dans ce monde ou dans l’autre, le capitaine avait été entraîné pour ça, pour réduire ses adversaires à néant en moins de temps qu’il n’en fallait pour l’écrire. Après tout, il était un corsaire, un pirate, le criminel le plus recherché de la galaxie. Pas un moins-que-rien qui n’a que ça a faire de le titiller le mauvais jour.
Pourtant, il n’en avait pas vraiment envie. Même s’il sentait un poids considérable lui barrer le dos, tirer sur ses épaules, Áron ne voulait pas se battre, ce soir. Pas plus qu’il n’en avait eu envie les autres fois. Et il savait qu’il n’en aurait, sûrement, jamais envie. Sauf si la vie de ses proches était en jeu. Une chose qu’il ne valait mieux pas tenter de faire devant lui. Pour l’heure, il n’y avait que lui, debout près du bar, le regard baissé sur celui qui se tenait le nez, la bouche pleine de son propre sang. Une douleur sourde résonnait dans le crâne du capitaine, à cause du choc monumental avec le crâne de l’autre, mais il faisait mine de rien, pour se donner des airs indestructibles. Ne pas montrer de faiblesse, c’était la première étape pour faire reculer les abrutis.
Sauf quand ils étaient plusieurs, apparemment. Áron soupira, en glissant ses yeux clairs sur chacun d’eux. Les chiens venaient voler au secours de leur maître, la bouche ouverte sur les insultes qu’il n’écoutait pas. Il pouvait les deviner sans avoir besoin de les entendre. Ça faisait bobo à l’ego de voir leur chef se faire étaler en deux secondes, sans aucun doute. Un chef qui, d’ailleurs, eut la bêtise de lever la tête pour que le saignement de son nez cesse. Ce qui était à la fois idiot et inutile, au vu de la quantité de sang qu’il perdait. Et tout à fait dangereux. Toujours baisser la tête, ne pas la lever, c’était la règle. Mais Áron n’eut même pas envie de lui dire. Dans sa conception bien à lui de la vie, parfois un peu trop extrême, frôlant les limites du raisonnable, il était prêt à ce sacrifice pour garder sa place dans ce monde de fous. Un criminel n’irait pas sauver un abruti. Il se contentait de le regarder crever d’agonie.
Toujours son petit sourire aux lèvres, tout à fait forcé pour l’occasion, le brun remua les épaules, sous sa veste en cuir et se frotta les poings, pour appeler les autres à l’attaquer. Il débordait de confiance en lui et il savait pertinemment que c’était, justement, le genre de choses qui gonflait les hommes comme eux. Il voyait brûler, dans leurs regards, l’envie de lui apprendre la vie, de cesser d’être si imbu de lui-même. Ils pouvaient toujours essayer. Áron n’était pas né de la dernière pluie, il en avait vu d’autres, des plus coriaces. Il avait été maudit, devenu immortel, il s’était fait tirer dessus à plusieurs reprises et rien, jamais, ne l’avait tué. Ils pouvaient toujours essayer. Il savait que ce n’était pas eux qui auraient raison de lui.
Puis la fête fut, soudain, interrompue par une petite voix qui s’éleva de plus loin, dans la salle. Áron glissa le regard le long du comptoir et tomba sur une main de femme qui tenait un verre de bière. Ses yeux clairs remontèrent jusqu’à son jeune visage et l’apparente… déception ? lassitude ? qui déformait ses traits doux. Quelque chose, dans sa façon de se tenir, dans la façon de s’interposer aussi, peut-être, indiquait à l’infiltré qu’elle n’était pas si innocente que son apparence pouvait le laisser penser. En tant que loup caché dans la bergerie, il savait, lui, qu’il ne fallait jamais s’arrêter au physique des autres, toujours essayer de creuser plus profond. Il ne doutait pas qu’elle soit redoutable et il n’était, lui, pas du genre à la sous-estimer sous prétexte qu’elle était une fille. Ce qui ne serait, sans doute, pas le cas des autres.
Ses mots, aussi, avaient quelque chose de redoutable. Áron échappa un sourire amusé et croisa les bras sur le torse, en toisant les autres, comme pour attendre une réponse à la question qui venait d’être posée. La seule réponse valable était un beau non et quelques couinements de chiens battus pour repartir la queue entre les jambes emmerder un autre gars, ailleurs en ville. C’était, du moins, ce qu’il essaya de leur faire comprendre dans sa façon de se tenir, de les toiser, de les défier de continuer ce qu’ils venaient de commencer. L’inconnue avait raison, de toute façon, ils étaient minables et ils ne faisaient pas le poids contre lui.
La suite laissa Áron un peu plus perplexe et il fronça les sourcils, sur ses yeux clairs. Aller dehors régler ce problème ? C’était une idée, oui, mais ce n’était pas ainsi que faisaient les abrutis comme eux ou les criminels comme lui. Tout casser à l’intérieur, c’était plus amusant, un challenge plus intéressant. Surtout avec un débile comme le barman qui les regardait sans broncher et s’était, sans doute, déjà pissé dessus. Évidemment, si ça ne tenait qu’à l’infiltré, il serait déjà allé dehors, entraînant les autres dans son sillage, mais personne ne pouvait lui jurer que, dans les quelques têtes qui restaient encore dans le bar, quelques unes n’appartenaient pas à la mafia locale. Pour le bien de sa couverture, il resta donc muet et n’approuva ni ne désapprouva ce que l’inconnue disait.
– La petite dame a raison, siffla-t-il, avec un sourire mauvais. Je suis pas très commode.
Ce qui souffla autant de haine, dans le cœur de ses adversaires, que d’envie de le faire taire et de lui prouver qu’il ferait mieux d’arrêter de se la péter autant. Ils pouvaient toujours essayer. Leur bonne action de la journée serait de donner du travail à l’hôpital du coin, à la pharmacie, aussi. Et à à peu près tout ce qui touchait de près ou de loin au médical, voire à l’alcool, pour noyer leur défaite et leur ego brisé en morceaux. Áron, lui, pourrait tirer de cette belle bagarre de grosses rumeurs à ajouter à la panoplie qu’il traînait déjà derrière lui, dans l’espoir d’attirer les regards et les bons. Enfin… les « bons »…
– Rentrez chez vos mères, les enfants, vous en avez assez fait.
Sauf que tout ceci ne sembla pas plaire aux quatre gorilles. L’un d’eux se retourna vers la jeune femme et tendit le bras, en l’insultant de noms peu respectueux, dans l’intention de l’attraper à l’épaule. Ce qui fit diversion, alors que les autres tournaient le regard vers cette tête brûlée qui n’avait, apparemment, que ça à faire de prouver qu’il était un bonhomme prêt à s’en prendre à une femme, sans la moindre seconde d’hésitation. Áron, non plus, n’eut pas la moindre hésitation. Il profita de la diversion pour envoyer une bonne droite dans la tête du premier qu’il eut devant lui et enchaîna sans attendre sur le deuxième, de la main gauche. Les deux adversaires reculèrent, pris par surprise. Il en restait un troisième, devant lui, qui s’empressa de lui enfoncer un poing dans le ventre. Áron accusa le coup et agrippa le bras de son adversaire qui ouvrit des yeux ronds, conscient du danger.
Le quatrième, le brun ne s’y intéressait pas, concentré sur les trois qui étaient à lui, et ne jeta qu’un rapide coup d’œil à l’inconnue pour constater comment elle s’en sortait. Une déconcentration d’une dizaine de secondes qui suffit à son adversaire pour reprendre du poil de la bête et tenter une contre-attaque… qui échoua. Áron tenait toujours son bras droit et le lui plia dans le dos, avant qu’il n’ait pu lui envoyer son bras libre au visage. L’homme poussa un râle de douleur, alors qu’il lui tordait le membre et eut à peine le temps d’un hoquet de surprise quand l’infiltré lui écrasa la tête contre le comptoir du bar. À nouveau, l’os craqua sous le choc et l’adversaire tomba au sol, visiblement inconscient.
Cette fois, ils reculèrent, prêts à abandonner leurs blessés là pour se préserver eux-mêmes. Au moins, ils avaient dû dessaouler un bon coup, maintenant.
– La prochaine fois, vous emmerderez quelqu’un d’autre.
Trois des hommes partir en courant, en pestant, laissant l’inconscient derrière eux, et Áron se tourna vers l’inconnue pour savoir ce qu’elle avait fait de celui qui avait voulu la frapper.
Judith aurait dû sans doute se taire, laisser la bagarre se faire, laisser ses babouins se taper dessus. Mais non, ces lèvres s’étaient séparées, laissant des mots filtrer entre ses dernières. Dans le fond, elle voulait juste passer un moment tranquille, boire à sans doute en perdre la tête. Puis rentrer chez elle sans se faire prendre par ses parents. Bon, connaissant ces derniers, autant qu’elle dorme dans sa voiture, elle aurait moins de problèmes. De plus, la plupart des personnes avaient quitté le bar, que des fiches molles. Ils auraient pu faire en sorte que la bagarre ne se produise pas. Peut-être que cet homme avait quelque chose à régler avec le grand brun. Elle ne savait pas, et dans le fond, elle s’en fichait grandement. Ce n’étaient pas ces histoires, mais elle n’avait pas changé. Elle prenait toujours la défense de la personne qui n’avait rien demandé. Déjà à l’école, elle parlait trop, puis, quand on la cherchait bien trop, elle frappait.
Elle aurait dû se douter que ces grands gaillards n’allaient pas l’écouter. Pourquoi écouter une femme ? C’était une bonne question. Pourtant, elle n’avait rien dit de bête. Elle aurait préféré qu’ils se tapent en dehors du bar, surtout pour éviter au pauvre barman une crise cardiaque. Ce dernier était blanc comme neige, et c’était reculer bien loin des hommes. Pourquoi tenir un bar alors qu’on sait que ce genre de chose pouvait arriver ? C’était comme faire policier et ne pas défendre ceux qui ne pouvaient pas le faire tout seuls. Elle espérait seulement qu’il ne prenne pas son téléphone pour appeler la police. Elle se sentirait bien mal pour expliquer ce qu’il se passait. Puis, si elle se retrouvait en garde à vue, elle n’avait pas fini d'entendre à la maison. Ces petites oreilles valaient mieux pour elle que tout ce passe bien.
Mais c’était sans compter sur un homme avec sans doute deux petits-pois en guise de neurones. Homme qui s’approchait d’elle dangereusement et dont les mots qui sortaient de sa bouche avaient le don de l’énerver. Qu’on l’insulte, il n’y avait aucun problème, mais elle détestait qu’on insulte sa famille. Qu’on lui manque autant de respect. De plus, elle n’avait rien fait dans l’histoire. Pourquoi venir s’en prendre à elle ? Il devait sans doute se sentir bien plus fort face à une femme. Mais c’étaient les faibles qui s’en prenaient à plus faible que soit et surtout à une femme. La main que ce dernier tendait se posa sur son épaule, la serrant, la faisant grimacer. Judith n’aimait pas donner le premier coup, elle se sentait bien trop coupable après ça. Enfin, la plupart du temps, elle préférait prévenir. Au moins, il saurait à quoi s’attendre.
“Vous avez deux secondes pour enlever votre main de sur mon épaule. Et deux secondes pour vous excuser des injures qui sont sorties de votre bouche sale.”
Elle espérait qu’il ferait le bon choix, qu’il allait prouver qu’il était bien plus intelligent qu’il ne le montrait. La jeune femme pouvait entendre ce qui se passait de l’autre côté du bar. Tournant la tête, elle put remarquer que le jeune homme s’en sortait très bien. Mais un rire lui fit tourner la tête vers la personne qui venait de rire. Ce grand gaillard venait de lever le poing, poing qui s’écrassa sur le menton de Judith. Serrant des dents, il était hors de question qu’un cri de douleur ne sorte pas de sa bouche. Il prendrait un trop grand plaisir, elle le voyait déjà dans ses yeux.
Judith ne mit pas longtemps avant de réagir, il était hors de question qu’elle se prenne un nouveau coup. Déjà qu’elle aurait un bon bleu demain matin. Sa main ne mit pas longtemps avant d'atterrir sur le paquet du jeune homme, la serrant. Un des points faibles des hommes. Mais, elle en n’avait pas fini avec lui. Loin de là. Puis, elle n’hésita pas une seule seconde avant de taper à son tour. Son poing atterrit dans la mâchoire de cet abruti. Puis, elle tapa dans le ventre, le laissant tomber à genoux.
“Alors, faut vraiment être un abruti de première pour frapper une femme. Vous aimez vous en prendre à plus faible que vous ? C’est parce que vous en avez une petite ? Enfin, ce n’est plus vraiment une question, vue que j’ai eu la réponse. C’est bien la dernière fois que vous frappez une femme, parce que sinon, je prendrais un grand plaisir à vous mettre une nouvelle correction.”
Elle soupira avant de le regarder se lever et rejoindre ses amis. Enfin, elle ne pouvait pas vraiment appeler ça des amis. Elle espérait vraiment ne pas s’en être prise à un gang ou autre. La brunette savait qu’ils avaient tendance à vouloir se venger. Et ils ne s'en prenaient pas forcément aux personnes qu’ils avaient insultées ou frapper la première fois. Mais plutôt aux personnes proches. Mais pour eux, ils valaient mieux qu’ils ne s’en prennent pas à sa famille. Car, si c’était le cas, elle rentrerait dans une colère noire. S’installant de nouveau sur son tabouret, elle passa la main sur son menton, grimaçant sous la douleur. Il ne l’avait pas loupé, mais elle n’ont plus. Regardant le barman, qui n’avait toujours pas bouger, elle soupira.
“Vous comptez nous donner des glaçons, ou vous préférez aller changer votre caleçon avant ? - Elle haussa un sourcil avant de tourner la tête vers Aron.- Bien joué, vous avez de très bons réflexes."
Souriant au barman qui venait de lui donner des glaçons, qu’elle plaça sur sa mâchoire. Elle espérait vraiment que la soirée allait bien se terminer. Bien mieux qu’elle avait commencé. Sans bagarre ou de personnes qui n’avaient pas tout leur cerveau à cause de l’alcool. Au moins, elle aurait une bonne chose à raconter dans ses lettres qu’elle écrivait à Chiara. Pas sûr que cette dernière soit bien contente de savoir que Judith s’était battue. Bon, elle pouvait peut-être éviter de tout lui dire. Elle pouvait minimiser les choses comme elle le ferait avec ses parents demain matin.
Se bagarrer, au plein milieu de la soirée, ne faisait pas franchement partie de son plan. Áron aurait préféré une nuit calme, à siroter sa bière sans arriver à en avoir envie, le regard perdu dans le vague, les pensées dirigées ailleurs, loin, très loin de ce monde-là. Il aurait pu sortir de la ville, rejoindre les hauteurs, se poser dans un coin, allongé sur l’herbe, pour contempler les étoiles de ce début de printemps. Ses yeux clairs fixés sur les scintillements, à s’interroger sur tout ce qu’il avait perdu, avec cette malédiction à la con. À celle qu’il avait perdue, parce qu’il était un abruti et qu’il lui avait demandé de se sacrifier pour lui, pour une Terre qui n’était même pas la sienne, un combat qui ne la concernait pas. Et elle l’avait fait, disparaissant dans l’air. Il sentait, encore, entre ses doigts, le contact doux de ses longs cheveux, alors qu’elle lui échappait et qu’il était trop tard pour lui dire de rester à ses côtés.
Au fond, il méritait tous les coups qu’il prenait, toutes les attaques, les blessures qu’il devait supporter, affronter, desquelles il guérissait toujours. Il n’était plus immortel depuis longtemps, le brun, mais il agissait toujours comme tel, prêt à mettre le monde au défi de le tuer une bonne fois pour toutes, de débarrasser la Terre de celui qui allait la détruire. D’un claquement de doigts, parce qu’il était trop têtu pour écouter les protestations de celle qui aurait pu l’empêcher d’agir ainsi. Il ne savait plus lui-même pourquoi il agissait ainsi, pourquoi il volait au devant des coups, prêt à protéger ceux qu’il devait mettre derrière les barreaux, comme une punition qu’il s’infligeait à lui-même, pour expier ses fautes, demander un pardon qui n’arrivera jamais.
Pourtant, il ne voulait pas se battre et il fut bien content, Áron de les voir fuir avant qu’il ne soit trop tard, avant que tout ceci n’aille trop loin. Il préférait les regarder partir que de leur courir après, en croisant les doigts pour qu’ils ne reviennent pas, dans quelques minutes, suivis par une bande entière de voyous. Ce qu’il ne pensait pas vrai. Quelque chose lui disait que ça n’arriverait pas, qu’il pourrait, enfin, avoir la paix pour le reste de la soirée. Ou presque la paix. Il restait, dans l’équation, deux variables inconnues qu’il devait d’abord gérer.
Face au combat de la jeune femme, l’infiltré resta sans voix, les cils battants sur ses yeux clairs, incapable de réagir ou de dire quoi que ce soit. Elle s’était emparée de son adversaire sans la moindre hésitation et il grimaça, bien malgré lui, à imaginer la douleur que ce devait être, pour l’autre. Il dut même se racler la gorge et remuer un peu les épaules pour se débarrasser d’un frisson désagréable, dans son dos. C’était presque pire que de péter le nez de deux de ses adversaires, il n’en doutait pas une seconde.
Les mots qu’elle cracha à la tête du lascar arrachèrent, bien malgré lui, un petit sourire en coin à Áron. Il n’était pas bien sûr, lui, qu’elle puisse être rangée dans les « plus faible que ces débiles », mais il se garda bien de le dire. Elle avait, après tout, maîtrisé son adversaire en un tour de main et il se doutait que ça n’avait rien à voir avec un coup de chance. À la première occasion donnée, elle pourrait réitérer l’exploit, il n’en doutait pas. L’attaque sur la virilité de l’homme, elle, tombait au bon moment. L’ego maltraité de l’autre ne pourrait pas s’en remettre, c’était certain. Puis, de toute façon, maintenant que le brun s’était débarrassé de ses adversaires, il ne laisserait pas le dernier oser lever, une seconde fois, la main sur l’inconnue.
Heureusement pour tout le monde, l’homme se contenta de ramasser les morceaux de son ego et de s’enfuir avec les autres. Il ne resta plus que Áron, l’inconnue et le barman qui s’était réfugié plus loin, derrière son comptoir, pour ne pas être mêlé à cette bagarre. L’infiltré ne comprenait pas vraiment comment l’homme avait pu les laisser se battre sans réagir et se doutait que, dès le lendemain, il serait sûrement mis à la porte par le patron. Le brun s’en voulut un peu, mais il ne pouvait rien faire pour lui.
La jeune femme se remit sur son tabouret, l’air de rien, ce qui suffit à titiller la curiosité d’Áron. Qui était-elle pour faire preuve d’un calme pareil, même dans une situation comme celle-ci ? Il regrettait, tout de même, de l’avoir embarquée là-dedans et la marque rouge, sur son menton, lui rappelait qu’il était le seul fautif. S’il n’avait pas attaqué l’homme saoul, peut-être que les choses n’en seraient pas venues à cette extrême. Il en doutait fortement, habitué à attirer la colère des autres, mais il ne pouvait pas jurer, à 100 %, que la bagarre était inévitable.
Cette fois-ci, elle s’en prit directement au barman, qui restait comme un con derrière son bar, incapable de savoir s’il devait approcher ou garder ses distances avec eux. Après tout, ils ne devaient pas inspirer beaucoup de confiance aux derniers témoins de leur baston. En quelques minutes, ils avaient fait fuir leurs adversaires et l’un d’eux gisait toujours au sol, le nez explosé par le contact forcé avec le comptoir du bar. Puis l’attention de la jeune femme se tourna vers Áron qui n’avait pas quitté son petit sourire amusé.
– Et vous avez… une bonne poigne, se moqua-t-il un peu, au souvenir du premier coup porté.
Sans le moindre regard pour celui qui était K.O. à terre, Áron s’empara de sa bière, en bout de bar, et la poussa jusqu’à la brune. Il enjamba finalement le corps de l’autre et vint s’asseoir juste à côté d’elle. Au fond, le brun avait du mal à ne pas s’agenouiller auprès du blessé pour s’inquiéter de son état et s’assurer que les choses n’iraient pas trop loin, ce soir. Sauf que personne n’attendait d’un homme comme lui qu’il s’inquiète de sa victime. Il devait prendre sur lui et s’empêcher de compatir au sort de l’ennemi.
– Voulez-vous que je… jette un œil ?
D’un doigt, Áron désigna son propre menton, en tournant ses yeux clairs vers la jeune femme. Elle semblait avoir pris un vilain coup, à cause de lui, alors qu’il s’en sortirait, lui, avec un hématome sur le ventre, ce qui ne se verrait même pas. Il s’en voulait un peu, mais il se para d’une poker face expérimentée, pour ne rien en laisser paraître. Même s’il pouvait se permettre un peu plus de compassion pour elle que pour les lascars qu’ils avaient malmenés ce soir, il devait faire attention au moindre de ses gestes. Les yeux indiscrets couraient les rues, dans une ville comme celle-ci.
– Vous n’êtes pas plus faible qu’eux, vous savez.
Un abruti. Il était un gros abruti de première et il se demandait bien pourquoi il lui avait fallu autant d’années pour s’en rendre compte. Un peu gêné par les mots qui lui échappaient, Áron détourna le regard de la jeune femme et claqua des doigts, à l’attention du barman, pou le forcer à se concentrer sur lui. Il indiqua, ensuite, le verre de bière vide de la demoiselle et lui fit signe d’en servir deux, alors qu’il vidait la sienne d’une traite.
– Áron, se présenta-t-il, en tendant la main à l’inconnue. Je ne m’attendais pas à ce que les choses partent si loin, je suis… navré. (Servi, il leva sa bière pour la claquer doucement sur le verre de la brune.) C’est peu, mais j’espère que vous accepterez de… songer, disons, à me pardonner.
Il n’était franchement pas doué et il s’en rendait bien compte lui-même. Mais il ne savait pas quoi faire ou dire pour que la jeune femme essaie de comprendre ce qu’il n’avait pas le droit de dire trop haut, de peur que les mauvaises oreilles traînent dans la discussion. Sauf qu’il aurait l’air de quoi, maintenant, si on l’entendait ? Il préféra ne pas se poser la question et, plutôt, baisser les yeux sur la bière qu’il leva à ses lèvres pour boire un coup.
Le calme était revenu dans le bar, le calme après la tempête qui venait de s’abattre. Judith n’avait pas été tendre avec l’homme, mais elle s’en fichait. Ici, elle était loin d’être l’agent de police. Non, elle était seulement une jeune femme qui savait se défendre. Elle devait avouer que ça faisait plutôt du bien de se défouler sur une personne qui le méritait. Maintenant, elle pouvait retourner à ses pensées, du moins reprendre le cours de ses pensées. Elle sentait encore l'adrénaline dans ses veines. Elle pourrait aller courir un marathon tout de suite, afin de tout évacuer. Mais non, elle s’installa à sa place, comme si, tout ce qui venait de se passer n’était jamais arrivé. Elle essayait souvent de prendre du recul sur les événements. Car sinon, elle serait bien capable de sortir et d’aller soigner les personnes blessées ou encore de s’excuser. Pourtant, elle n’avait rien fait de mal, elle s’était juste défendu contre des personnes qui étaient vraiment malhonnêtes. Elle n'oublierait jamais leur visage, et si, un jour, elle devait l'arrêter, elle le ferait avec plaisir. Elle n’était pas quelqu’un de rancunier dans le fond, mais elle aimait que justice soit faite correctement.
C’était ce qu’elle avait fait dans son monde, quand les prédateurs n’avaient pas vraiment leur place. Alors, que pour elle, toute personne avait sa place au sein de son monde. Il y avait juste des personnes plus méchantes que d'autres. Elle avait même changé son regard sur Nick, le renard avec qui, elle faisait équipe. Équipe qui n’était plus là. Elle n’aurait jamais pensé qu’il pourrait lui manquer autant. Ces petits regards en coin, qui voulait tout dire. Son sourire, souvent moqueur, mais surtout sa gentillesse. Elle se demandait souvent si, lui aussi avait été emporté par la malédiction, car le revoir ici, lui donnerait du baume au cœur. Et si, il aurait été là dans le bar avec eux, il aurait été le premier à foncer dans le tas. C’était souvent compliqué de devoir gérer le manque de quelqu’un, mais ici, ils ne pouvaient pas faire autrement. Ils devaient continuer à vivre comme les personnes de leur monde. Souvent, elle se demandait comme la vie là-bas se passer sans elle. Sans doute très bien, les animaux vivent ensemble, dans le plus grand bonheur.
Portant de nouveau son regard sur le jeune homme, elle lui adressa un signe de la tête avant de le voir se déplacer pour s’installer à côté d’elle. En même temps, il ne restait plus qu’eux deux dans le bar. Les autres avaient fui bien trop vite à son goût. Enfin, il restait tout de même le barman, qui n’avait toujours pas bouger et un homme a terre sans grande importance. Il allait sans doute ce souvenir pendant bien longtemps le coup qu’il avait pris à son nez. Peut-être que ça le calmerait pour les prochaines bagarres. Ou bien, c’était le genre de personne qui ne pouvait pas s’en empêcher.
Judith porta doucement sa main à son menton avant d’appuyer dessus. Son visage se tordit dans une grimace. Il ne l’avait pas loupé, elle aurait un beau bleu demain matin. Comment expliquer ça à ses parents. Elle inventerait une bonne excuse. Comme elle le faisait souvent au téléphone pour ne pas les inquiéter. Mais ce n’était pas la même chose, ici, ils pouvaient voir son visage et voir si elle ne mentait pas. Tant pis, de toute façon, ils avaient l’habitude, ce n’était pas la première fois, ni la dernière fois que la jeune femme se battait. Le bleu ne serait rien comparé aux autres blessures qu’elle avait pu avoir.
C’est si moche que ça ? Un peu trop voyant ?”
La brunette regarda le brun, avant de reporter son regard sur son verre. Fixer les personnes pendant de longues minutes n'était pas forcément son fort. Surtout quand elle ne connaissait pas la personne. Et que cette personne venait de causer une bagarre. Mais ça, ce n’était qu’un petit détail sans grande importance. Ca aurait pu être quelqu’un d’autre ou même elle. Puis, elle savait qu’à cause de l’alcool les esprits avaient tendance à s’échauffer bien plus vite. Il fallait juste réussir à calmer les choses ou bien simplement foncer dans le tas.
Elle eut un petit sourire, c’était rare qu’un homme puisse faire ce genre de commentaire à une femme. Souvent, la femme était vue comme une chose bien trop fragile pour pouvoir se défendre comme elle le pouvait. C’était sans doute pour ça que pendant des années les femmes ne faisaient pas partie de la police. Et encore moins, les femmes menues sans grande force. Mais Judith aimait casser ses codes-là, elle était loin d’avoir des gros muscles, et on ne pouvait pas dire qu’elle était en chair. Mais sa rapidité et sa légèreté faisaient en sorte qu’elle était plutôt bonne en bagarre de corps-à-corps.
Un nouveau verre atterrit devant elle, et elle remercia le barman qui s’éloignait déjà d’eux. Ils ne faisaient pourtant pas aussi peur que ça ? Si. Elle ne savait pas, mais le barman pouvait se dire qu’il était en sécurité avec eux. Ou peut-être pas. Elle tourna la tête vers le jeune homme qui venait de se présenter. Elle tendit sa main vers ce dernier.
“Judith. Oh, vous êtes déjà pardonné, vous n’avez rien fait de mal. Vous avez juste répondu à une provocation. Je pense qu’ils se pensaient bien plus forts à plusieurs. Où avez-vous appris à vous battre comme ça ?”
Judith attrapa son verre avant de boire une gorgée. Il avait dû prendre des cours, ou chez certaines personnes s’étaient tout à fait naturelles. Elle se demandait bien quels genres de travail, il pouvait bien faire. Peut-être des choses illégales. Si, c’était le cas, Judith ne disait rien sur le faite d’être une policière, les choses pouvaient bien mal se passer. Et, encore pire si, des personnes entendaient qu’une policière se trouvait dans le bar. Mais elle ne mentirait pas, elle pourrait juste éviter le métier principal de sa vie. De toute façon, elle ne le disait pas forcément à tout le monde, tout le monde n'aimait pas la police. Mais elle s'en fichait, son métier, elle ne vivait que pour lui. Elle devait juste arriver à prendre du recul sur certaines enquêtes pour son bien.
"Je ne vous ai jamais vue. Ça fait longtemps que vous vivez ici ?"
Il n’aurait jamais pensé que les choses finiraient ainsi : assis au bar, à côté d’une inconnue, à siroter une bière comme s’ils se connaissaient depuis longtemps ou qu’ils se tournaient un peu autour. En oubliant, évidemment, le corps de l’inconscient, à terre, et les quelques gouttes de sang qui avaient giclé sur les vêtements d’Áron, ainsi que l’hématome qui ne tarderait pas de naître, sur le menton de la brunette. L’infiltré n’était pas fier de lui. Il n’aimait pas se battre, mais le faisait sans rechigner quand on le lui demandait ou le lui imposait. Défendre la peau des autres, de son équipage perdu, était inscrit dans ses veines plus sûrement que défendre sa propre vie. Qui prend le temps de se protéger, quand on est immortel ? L’énergie noire qui dansait sur ses épaules pour vibrer avec son vaisseau.
La jolie brune, à ses côtés, avait le corps aussi fluet que Kei. C’était peut-être pour cette raison que l’ancien capitaine ne se laissait pas avoir par son apparence et était prêt à parier qu’elle pouvait faire pire que ce soir, si on la titillait un peu. Au sein de son équipage, la blonde était l’une des plus redoutables de par sa rapidité et sa souplesse, il ne doutait pas que la brune, à ses côtés, fut du même acabit. Les hommes, surtout les criminels, sont trop prompts à juger l’apparence et oublient de prendre quelques secondes pour observer. Certains signes ne trompent pas : les prédateurs ne ressemblent pas aux proies, ils ont une façon de se tenir, de regarder, de bouger, qui les trahit. Tout comme un œil aguerri pourrait, parfois, déceler les traces de la police, dans les gestes du brun.
Áron prit une nouvelle gorgée de bière et glissa ses yeux clairs sur l’inconnue qui lui répondait. Moche n’était pas le mot qu’il aurait utilisé pour décrire ni sa blessure, ni la femme qui la portait, mais il ne sut pas, sur le coup, ce qu’il pouvait bien lui répondre. Pour sûr, ça se verrait. Elle ne pourrait pas la cacher derrière une tonne de fond de teint et devrait, sûrement, commencer à songer à une excuse du tonnerre, si elle ne voulait pas que sa petite aventure du bar finisse par apparaître au grand jour. En revanche, il n’était pas certain de savoir quelle excuse conviendrait le mieux pour cette blessure. Il valait mieux éviter de parler d’escalier ou de porte, trop souvent associés au mensonge.
– Je ne suis pas certain qu’on puisse parler de beauté ou de laideur pour une blessure, tenta-t-il, un peu maladroit. Voyant, en revanche… c’est le risque, oui. Vous aurez du mal à le cacher. Il vaut mieux songer tout de suite à une bonne excuse à donner.
Que pourrait-elle dire qui ne passe pas pour suspect ? Ils s’étaient battus sans raison, lui encore plus qu’elle, mais Áron n’avait besoin d’aucune excuse. Il ne s’était pas fait toucher au visage et personne ne verrait l’ecchymose sur son ventre. Il pouvait, de toute façon, crier haut et fort, ce qu’il avait fait ce soir. Qui lui en voudrait de s’être battu ? Il était un criminel, il avait la bagarre dans le sang, le besoin idiot d’assouvir sa supériorité et d’étendre son territoire. Des chiens errants, voilà ce qu’ils étaient. Des chiots tarés rejetés dans la rue et abandonnés à leur sort.
– Vous pouvez dire que je vous ai poussée, si ça peut vous éviter des ennuis. Les hommes du coin ne sont pas hyper connus pour leur délicatesse et j’imagine que le barman n’osera pas dire le contraire.
Il jeta un coup d’œil à l’homme qui s’était mis le plus loin possible pour essuyer des verres, ranger des bouteilles, faire semblant de s’occuper pour ne pas avoir à gérer les deux derniers clients de la soirée. Áron lui souhaitait bien du courage pour expliquer à son patron ce qu’il s’était passé. En attendant, il avait d’autres préoccupations et il se pencha un peu sur l’inconnue pour regarder cette blessure, sans la toucher.
– Ça n’a pas l’air si grave, ce n’est pas ouvert. Vous pourrez peut-être dire que vous vous êtes cognée en tombant. Évitez de parler d’escalier, c’est trop cliché. (Il esquissa un sourire, pour alléger le sujet.) Enfin… à votre place, j’en profiterais peut-être pour me vanter un peu de ce qu’il s’est passé.
Ce qui n’était pas vrai, mais Áron se devait de garder les apparences de celui qui se sait dangereux et n’attend qu’une bonne occasion de le prouver au monde entier. Les criminels aiment se vanter de leurs méfaits, même d’une petite bagarre dans un bar, alors que l’alcool avait déjà coulé à flots pour la soirée et que les veines saturaient de tout ce poison. Faire partie du mauvais côté de la loi ne l’empêchait pas, pour autant, d’être amical avec Judith. Il s’empara de sa main quand elle la lui tendit et la serra fermement, sans lui faire mal, mais avec assez de force pour lui signifier qu’il la jaugeait à sa juste valeur.
– Ne mentons pas, je les ai plus ou moins provoqués en premier, précisa-t-il, sans arriver à retenir une grimace. En tout cas, le premier coup venait de moi.
D’ailleurs, la douleur, sur son front, ne l’avait pas quitté, même s’il avait réussi à la mettre de côté jusque là. En parler lui redonna conscience de la bosse qui risquait de naître, sur son visage, et il comprit qu’il ne s’en sortait pas forcément mieux que la jeune femme. Sauf que lui, personne ne lui demanderait de se justifier. Il lui suffisait d’un regard noir et de tourner les talons pour échapper à ce genre de questions. Les hommes comme lui, tout le monde sait qu’ils passent leur temps à jouer des muscles et prouver au monde qu’ils ne se laissent pas marcher sur les pieds.
– À l’école de police, avoua-t-il, avec un sourire en coin. Étonnant, hein ? C’est pourtant la vérité, même si la rue m’a, plus ou moins, appris le reste. Et vous ? Vous n’êtes pas une femme de la rue.
Il pouvait le dire à sa façon de se défendre, aux mots échangés avec les lascars qui devaient regretter, maintenant, de s’en être pris à eux. Áron ne pouvait pas en être certain à cent pour cent, mais il était prêt à parier, tout de même, que son assurance ne venait pas d’une enfance dans les rues des villes, à faire parler les poings pour se frayer un chemin. Lui non plus n’avait pas été jeté dans la rue, mais il avait côtoyé la rue toute son enfance, à cracher sur les autres pour se faire entendre. Il avait commencé dans la délinquance, pour se relever face à la police et replonger, à leur demande, dans un monde qu’il avait voulu quitter, mais qui ne relâchait jamais ceux qu’il avait attrapés. Son passage à l’école, ainsi avoué, n’était pas un problème. Au fond, ce n’était un secret pour personne. Áron avait été, officiellement, viré pour insubordination et coups et blessures sur un supérieur. Ce qui avait de quoi intéresser ses patrons. Ce qu’il avait fait pour coller au mensonge qu’on lui avait collé sur le dos.
– J’ai toujours vécu dans cette ville. Mais c’est mieux, pour vous, que vous ne m’ayez jamais vu avant. Certains mondes ne sont pas faits pour se croiser. Vous avez dû comprendre, maintenant, que je ne suis pas quelqu’un de… fréquentable.
Áron préférait être honnête avec la jeune femme, justement parce qu’elle lui était sympathique et qu’il aurait peut-être apprécié, en d’autres circonstances, d’en apprendre davantage sur elle et, peut-être, de pouvoir la compter parmi ses amies. Mais il était trop tard, désormais. Áron était plongé dans les emmerdes jusqu’au cou et il ne pouvait pas se permettre d’embarquer des innocents dans ses histoires. Il préférait garder ses distances avec le monde. Ce qu’il n’arrivait pas toujours à faire, malheureusement.
– Et toi, tu as toujours vécu ici ? Désolé, je me permets de te tutoyer. Après une bagarre et une bière, on peut laisser tomber les politesses d’usage, j’imagine. Qu’est-ce que t’en dis ? Je t’aurais bien proposé une autre bière, mais je veux pas que tu crois que j’essaie de te rendre saoule.
Ou comment se rendre suspect en trois secondes chrono. Áron était vraiment un gros abruti.
Toujours utiliser la violence en dernier recours. Judith le savait et pourtant, bien trop souvent elle l’avait utilisé. Souvent pour se défendre ou défendre les autres. Ce n’était pas de sa faute si elle aimait sentir la colère monter en elle. Ou encore l’adrénaline de savoir qu’elle allait taper quelqu’un. C’était sans doute son mauvais côté, le côté qu’elle essayait de montrer à personne. Parce qu’elle était la douce Judith, la gentille Judith, celle qui était toujours là pour faire sourire les personnes. Celle qui faisait le bien et seulement le bien. Pourtant, ses parents savaient que ce n’était pas forcément le cas. Sans doute les seuls, et maintenant Aron aussi. Mais, il ne savait pas qu’elle était policière aussi. C’était peut-être une bonne chose. Dans le fond, elle savait qu’il verrait aussi l’autre partie d’elle. De toute façon, elle n’était pas vraiment méchante, sauf quand elle en voulait longtemps à la personne. Là, c’était une autre histoire. Elle ne lâchait pas la personne avant de se venger. Elle savait que ce n’était pas bien, mais c’était bien plus fort qu’elle.
Elle n’avait jamais été comme ça dans son monde. Non, elle avait plutôt du genre à protéger les autres. Se lancer dans une enquête quitte à perdre son travail, chose qui était arrivée. Mais malgré ça, elle avait continué, reprenant au passage son uniforme. Elle s’était tenue à carreaux suite à ça. Mais, dans ce monde-là, elle avait été une autre Judith. Sans doute bien plus de possibilités. Plus de liberté aussi, elle ne pouvait pas dire le contraire. Elle n’était pas partie de son petit village pour Zootopie, non, elle était partie de Storybrooke pour New-York. Elle pouvait dire que c’était presque la même chose. Mais, à Zootopie, elle était partie pour faire son travail, elle ne s’était pas vraiment amusée ou faite de grandes rencontres. New-York avait été la ville des premières fois. Première cuite. Première soirée. Premier baiser. Première fois avec un homme. Première fois avec une femme. Elle ne s’était jamais pris la tête. Non. Première fois aussi, qu’elle volait. Enfin, voler était un grand mot. Elle avait traversé New-York pour récupérer un canapé d’une amie qu’elle avait laissé chez son ex. Ça avait été sans doute la meilleure soirée de sa vie.
Reportant son regard sur le jeune homme qui se trouvait à côté d’elle. Il y avait certainement plus à tendre comme rencontre. Mais Judith aimait les rencontres qui sortaient de l’ordinaire. Puis, elle savait que ça serait sans doute marrant à raconter. Enfin, sans doute pas pour les personnes qui écouteraient, mais la jeune femme savait d’avance qu’elle en rigolerait. Parce qu’elle aimait ça, elle aimait montrer au monde qu’elle n’était pas que la fragile Judith qu’on avait forcément besoin de protéger. Non, elle était une femme forte, qui n’avait besoin de personne ou presque pour prendre soin d’elle.
“Oh.. Mes parents ont l’habitude de me voir avec des bleus. Enfin, un peu, moins maintenant que je suis adulte. - Elle haussa les épaules. - Ça fera peut-être fuir les personnes."
Judith rigola légèrement, ses parents avaient vu plus d’un bleu sur elle. Plus d’une cicatrice. Elle avait encore certaines marques. Mais ils n’étaient pas au courant de tout, non, elle avait caché beaucoup de choses quand elle était partie. Non, elle ne leur avait pas dit quand elle s’était retrouvée avec une côte cassée, ou encore à l’hôpital, car elle avait eu une légère commotion cérébrale. Elle ne voulait jamais les inquiéter, elle ne voulait pas qu’ils sachent tout. Comme ses foutues peurs. Elle avait souvent peur de ne jamais pouvoir revenir d’une mission.
“C’est vrai. Même si, on ne risque pas de me croire. On me connaît trop bien. Du moins, on me connaissait trop bien. Les personnes qui tiennent à moi ne viendront jamais ici. Ce n’est pas vraiment leur truc les bars malfamés."
Judith savait que Chiara ne mettrait jamais les pieds dedans. Elle devrait peut-être le faire, l'emmener ici pour qu’elle puisse se détendre ou encore être une jeune femme comme les autres. Mais ce n’était pas une partie gagnée. Sauf, si la jeune femme ne lui disait rien. C’était une autre solution. Secouant la tête, elle ne voulait pas penser à tout ça. Non, elle préférait encore penser à boire une bonne gorgée de sa bière, ou encore parler avec le jeune homme. Elle ne voulait pas paraître malpolie en restant dans ses pensées.
“L’escalier peut-être une bonne excuse quand on est maladroite. Bon, ce n’est pas mon cas, et cette excuse ne fonctionne absolument pas. Même si, je la sors à chaque fois. - Elle lui adressa un sourire. - Je ne suis pas du genre à me vanter d’avoir tapé un gros dur. Je ne veux pas qu’on pense que je suis une jeune femme violente.”
Elle lui adressa un nouveau sourire, en papillonnant des yeux, faisant sans doute une tête d’ange. Tout le contraire de ce qu’elle était, du moins en partie. Elle pouvait très bien être un ange, comme le diable en personne. Mais elle cachait bien cette facette. Parce que ça n’allait pas forcément avec sa personnalité. Mais toutes personnes avaient une partie d’elle qui aimait faire le mal et une autre qui aimait faire le bien. Comme Sirius Black l’avait dit : “Dans le monde, il n'y a pas d'un côté le bien et le mal, il y a une part de lumière et d'ombre en chacun de nous. “Dans le monde, il n'y a pas d'un côté le bien et le mal, il y a une part de lumière et d'ombre en chacun de nous.” Judith avait fait une sorte de montrer dans ses actes que le bon côté. Enfin, Aron avait surtout vu un mauvais acte pour le moment.
“C’est vrai. Mais il est venu vous provoquer. - Elle le regarda en coin. - Puis, ils étaient vraiment idiots de vouloir s’en prendre à une seule personne. Je veux dire, il ne faut vraiment pas avoir confiance en soi ou encore avoir un petit pois à la place du cerveau. Peut-être qu’ils aimaient vraiment la bagarre."
Avoir un bleu n’était pas vraiment une chose qui pouvait déranger la jeune femme. Mais plutôt de la couleur qui pourrait prendre au fil des jours. Elle se voyait mal se promener avec un bleu violet sur le menton. Quoique, ça lui irait peut-être au teint. Elle verrait ça bientôt. De toute façon, elle risquerait de mettre une bonne couche de fond de teint, alors qu’elle avait tendance à éviter tout ça. Le naturel, voilà comment Judith sortait dehors. Avec seulement rien du tout sur le visage. Puis, dans le fond, ce n’était qu’un bleu. Elle tourna rapidement le visage vers Aron. Avait-elle bien entendu ? L’école de police. Pourtant, elle ne l’avait pas vue au poste. Il avait peut-être quitté cette dernière.
“Vraiment ? Je vais dire la même chose que vous. Je ne suis absolument pas une fille de la rue. L’école de police m’a beaucoup appris, puis après, c’est sur le terrain et beaucoup d'entraînement."
Judith n’avait jamais mis les pieds dans les rues pendant les nuits lors de sa jeunesse. Non, elle avait passé ses soirées avec ses parents. Souvent dans la grange où elle faisait des pyjamas party avec ses frères et sœurs. Et ses journées, elle les avait passé à faire ces cours ou aider ses parents. Rien de bien passionnant dans le fond. Mais elle avait aimé cette vie-là, cette vie tranquille où la seule chose qui pouvait l'inquiéter était d’être sûr qu’il n’arrive rien aux récoltes lors des tempêtes. Maintenant, elle se faisait du souci pour tout et rien. Pour sa famille, pour ses enquêtes, pour ses amis. Elle allait finir avec ulcère avant la fin de l’année à cause du stress.
“Je veux bien qu’on se tutoie. J’ai vécu une grande partie de ma vie ici aussi. Puis, je suis partie pendant deux à New-York. L'expérience la plus belle pour moi. La liberté absolue. Une personne peu fréquentable ? Parce que tu te bats ? Il y a pire. Et il en faut beaucoup pour me soûler.”
Elle lui adressa un petit sourire. Judith avait fini plus du fois soûle, mais après un bien trop grand nombre de litres d’alcool dans le sang. Mais elle n’était pas forcément obligée de le lui dire. Ça pouvait rester entre elle et ses amis d’avant. Enfin, amies d’avant, elle était toujours en contact avec elle. Elle leur avait même promis de leur rendre bientôt visite.
“Alors si j’ai bien compris. Tu as fait une école de police, mais tu te bats dans les bars ? Un CV très intéressant."