Le destin. Pouvais-je véritablement blamer la destinée en tant que pure et dure humaine du monde ordinaire ? Ma meilleure amie avait bercée mon enfance à ses débuts en tant que toon, toutes les personnes qui m’entouraient à Storybrooke étaient des personnages que j’avais découvert dans mes livres d’enfants, dans les films que j’avais pu voir à la télé ou tout simplement dans les contes de fées. Je vivais dans une ville qui ne devait pas exister aux yeux du monde. Je croyais à la destinée mais j’avais plutôt envisagée une fin heureuse qu’un malheur qui me tombe encore dessus. La destinée, une histoire d’espoir et de fins heureuses. Depuis que je me trouvais à Storybrooke, nombreux étaient ceux qui me rabattait les oreilles avec ça. Du moins, jusqu’à ce que je retrouve James. Il était revenu dans ma vie et mon frère n’était plus là. C’était une bonne chose non ? Peut être que même si je n’étais pas originaire de leur monde, je pouvais avoir le droit à ma fin heureuse ?

Cependant, il faut croire que non. Pourtant la journée avait bien commencée. C’était une journée d’hiver comme les autres. Cependant, il s’était mis à neiger tôt dans la matinée ce jour là. Ce n’était pas une petite neige de rien du tout mais bien une jolie tempête qui te refroidie véritablement. Je m’étais habillée en conséquence, simplement mais joliment et j’avais enfilé une écharpe bien chaude autour de mon cou et un bonnet de laine sur ma chevelure brune. J’étais au huitième mois de grossesse, mon bébé arriverait bientôt et j’étais heureuse de pouvoir partager ce bonheur avec mes proches. Cependant, j’aurais dû faire attention. J’aurais dû ralentir dans le virage, j’aurais dû me méfier du destin.

Un cerf sorti de nulle part est apparu en plein milieu de la route alors que je contournais la forêt. Voulant l’éviter, je n’ai pas pu empêcher la plaque de verglas et j’ai perdu le contrôle de ma voiture. Une voiture qui arrivait en sens inverse…Je me la suis prise de plein fouet. Plusieurs tête à queue plus tard, la voiture terminait son chemin contre un arbre. La vision troublée, le sang qui coule le long de ma tempe, les air-bags qui ne se sont pas déclenchés. L’obscurité tout autour de moi alors que mes yeux se referment.

Quelques heures plus tard - Hopital de Storybrooke.

Des voix me parviennent de très loin. Ma tête tambourine comme un tam-tam alors que j’ouvre les yeux et que ma vision commence à reprendre des formes. Je sens une main qui se referme sur la mienne tandis que j’entends des bip incessant à mes côtés. Je finis par me rendre compte que je suis dans une chambre d’hôpital. Les souvenirs troubles, je papillonne plusieurs fois des yeux avant de m’adapter à la lumière blanche de la chambre. Je tourne le regard et croise celui de James.

« Salut… » énonçais-je, doucement.

Je sentais qu’on me transmettait de l’oxygène par le nez, j’avais des électrodes sur la poitrine et une transfusion au niveau du coude. Mes souvenirs commençaient petits à petits à se remettre en place. Cependant, je voyais que James n’allait pas bien.

« Qu’est-ce-qui se passe ? » demandais-je alors.

Je n’avais pas encore remarqué mon changement physique…mon ventre avait repris son apparence ordinaire.

Avez-vous déjà eu cette sensation de perdre pied ? De vous sentir chuter dans le vide alors que vous êtes bien assis sur votre chaise ? Une sensation de vide immense, comme si tout ce qui se trouvait autour de vous vous échapper, que vous n’étiez plus raccroché à rien et que tout ce que vous pensiez connaître n’était en réalité que foutaises et fumée se dissipant à chaque seconde un peu plus. A l’instant même où ses paroles sont venues se répercutées dans mon esprit, tout est devenu clair. Mon accident de voiture, le choc avec la voiture d’en face et…la perte de mon bébé.

Perdre un enfant alors qu’il n’est même pas encore venu au monde est sans doute l’un des plus gros chocs qu’une femme puisse connaître. J’étais prête à devenir maman, j’aurais donné ma vie pour cette enfant, j’aurais fait tout ce qui est en mon pouvoir pour pouvoir la protéger et lui offrir une vie fabuleuse mais le destin avait choisi de m’ôter cette chance, ce bonheur de pouvoir partager ce que je sais avec ma fille. De moi s’échapper des larmes alors que je ne disais mots, blottie dans les bras de James, pleurant en silence. Tremblante, je tentais de me calmer mais sans succès. Mon coeur battait si fort que j’avais l’impression qu’il allait me sortir de la poitrine, mes larmes était si brulantes que j’avais l’impression que des flammes me léchaient la peau.

Tout. Tout m’avait été enlevé à la seconde où il avait énoncé la perte de notre enfant. Relevant, son visage, j’avais posé mes lèvres sur les siennes. Un baiser humide mais chaud à la fois comme un moyen de se rassurer, peut être un besoin de croire que tout n’es que cauchemar et qu’en réalité, l’avenir sera beau. Puis retour à la réalité que tout est vrai. La perte d’un amour si profond donné à un être encore absent de notre vie. Je n’arrivais même pas à dire un seul mot, l’idée peut être que de parler rendrait cela beaucoup trop vrai. Mes doigts mêlés à ceux de James, je plonge mes yeux bleus dans les siens, tandis que de nouvelles larmes perlent sur mon visage. Tristesse, colère contre moi-même de ne pas avoir pu éviter l’inévitable.

J’avais besoin de trouver un coupable et dans mon coeur, je ne pouvais être que la seule coupable. Plus rien n’avait de sens, tout me semblait si sombre, si irréel, improbable, impossible et pourtant, tout était si vrai. Les lèvres pincées, les larmes qui coulent encore comme un torrent infini. Le visage pâle, les lèvres rosés par le pincement, ce besoin d’apporter une main au niveau de mon ventre pour constater l’absence de celle à qui je me confiais. Mon bébé connaissait sans doute tous mes moindres secrets, tellement de choses que je ne pouvais dire à personne d’autre. Plat. Plus de rondeurs, plus de vie à l’intérieur. La tête qui retombe sur le coussin tandis que mon regard croise le sien. Main qui caresse doucement son visage tandis que trois mots parviennent à rompre les larmes et le silence.

« Je suis désolée. »

Pureté de propos, vérité qui raisonne dans la blancheur de la chambre. Des excuses, une mise en avant d’une culpabilité naissante au creux du coeur. L’impression d’avoir perdu une part de moi-même, une partie de ce que j’étais m’a été enlevée sans doute à la seconde où ma fille a perdue la vie avant même d’avoir poussé son premier soupir. Je me blottie dans ses bras, j’ai besoin de son amour, j’ai besoin de sa tendresse. Besoin peut être aussi de sentir qu’il m’aime et que je ne suis pas seule tandis que son absence créé un vide immense au fond de mon âme. Comme un torrent d’eau froide qui s’abat sur la flamme crépitant au fond de mon être.

« Je suis tellement désolée. »

Mots qui raisonnent tandis que ma tête est contre son torse. J’ai besoin de sentir sa chaleur, sa protection. Besoin d’accepter l’absence, le malheur et l’impression d’avoir été brisée dans toutes mes certitudes. Accepter la perte de ce bébé que j’aurais tant aimé.

Quelques heures plus tôt, j’étais heureuse. J’allais devenir maman, j’étais si heureuse. Puis il y avait eu l’accident et le noir. L’obscurité. Son absence. Mon esprit me jouait des tours au point où j’avais encore l’impression de la sentir bouger à l’intérieur de moi. Mon coeur me brûlait, mon corps me brûlait. Mon regard croise le sien tandis que je m’excuse, encore et encore d’avoir eu cet accident. C’était de ma faute si notre fille était disparue aujourd’hui.

« J’aurais pas dû prendre la voiture… » soufflais-je.

Nous pleurâmes de longs, très longs moments. Au fond de mon coeur, je me sentais rassurée de ne pas être toute seule face à ça. James était là et je sentais qu’il serait encore là longtemps. Hurlant de rage, de colère, de souffrance, j’essayais de stopper cette sensation cruelle de ressenti profond jusque dans mes entrailles. Réussissant enfin à me calmer, je croise le regard de James avant que ma main ne rencontre la sienne pour que mes doigts s’enlacent avec les siens. Les lèvres tremblantes, les yeux rougis par les larmes, je respire longuement avant de reprendre contenance, aussi facilement que je le pouvais bien que cela était tout ce qu’il y a de plus compliqué.

« Oui… » soufflais-je avant de reprendre « je voulais l’appeler Gabriella. C’est un nom que j’ai toujours aimé. » expliquais-je à mon amoureux.

Réussissant à calmer mes sanglots pour de bon, je respire profondément et lève le visage de Sam avec mon index avant de poser mes lèvres sur les siennes. Séchant ses larmes, je reprends rapidement la parole.

« Ça te va de l’appeler Gabriella ? » demandais-je à ce dernier.

Je regarde James dans les yeux tandis que de nouvelles larmes perlent sur mes joues. Je me sentais tellement fautive que mon coeur en brûlait. Ma fille me manquait atrocement mais James avait raison sur un point, je ne pouvais pas m’en vouloir, je ne devais pas m’en vouloir parce que même si j’avais marché, j’aurais pu la perdre, me faire renverser par une voiture ou n’importe quoi d’autre. Caressant sa joue avec ma main, je pose mes lèvres sur les siennes.

« C’est tellement horrible James, j’ai cette culpabilité au fond de moi qui brûle, qui me détruit le coeur à chaque secondes. » avouais-je à ce dernier.

Nous pleurâmes longtemps, nous partageâmes notre douleur tous les deux, ensembles. Je n’étais pas seule, je n’étais plus seule au monde mais j’avais peur, j’avais peur de ne pouvoir me remettre de la perte de ce bébé. Je me sentais fautive et c’était horrible mais je ne serais pas seule pour surmonter ça, je ne serais plus seule. Je savais que James ne m’abandonnerait pas, qu’il serait toujours là pour moi mais je ne pouvais m’empêcher d’avoir cette tristesse au fond de mon coeur. Cependant, je me fis une promesse en donnant à James le nom de notre fille, je finirais par me relever et reprendre les choses en main.

« D’accord. » énonçais-je avec un sourire léger.

- quelques semaines plus tard -

J’étais assise en tailleur sur mon lit, je fixais le mur blanc en face de moi. Mes cheveux bruns regroupés en un chignon haut, j’avais mon portable dans ma main. Levant le regard vers James quand il entre, je fais un tout petit sourire avant de faire un signe de tête positif tout en répondant à son baiser. Me levant de mon lit, j’enfile mes chaussures avant de prendre ma veste et de quitter les lieux, accompagnée de James. Je voulais juste rentrer à la maison, c’est tout ce que je souhaitais. Une bonne demi-heure plus tard, nous voilà arrivés chez nous. Je pousse la porte avant d’entrer et d’aller m’asseoir sur le sofa.

Les genoux repliés à ma poitrine, le regard rivé sur les grandes fenêtres qui donnaient sur Storybrooke. Le ciel était gris, il faisait froid mais peut m’importait. Je restais là, assise sans bouger, sans dire un mot.

J’étais fatiguée. Fatiguée de mon hospitalisation. Fatiguée d’avoir perdue ma fille. Fatiguée de cette culpabilité grandissante au fond de mon coeur. Cependant, je gardais pour moi. Je ne voulais pas inquiéter James. Cependant, être en couple avec l’homme de notre vie et ne pas lui dire ce que l’on ressent, ça demeurait compliqué et surtout mauvais. Assise sur le sofa, je fixais l’horizon sans rien dire. Depuis notre retour de l’hôpital, j’étais restée muette, assise, couverte d’un plaid. Buvant à peine, ne mangeant que très peu, j’étais épuisée. Epuisée de faire semblant. C’est la voix de James qui me fait sortir de ma torpeur alors que sa douceur parvient jusqu’à mes oreilles.

« James… » murmurais-je alors que je prenais sa main dans la mienne.

Enlaçant mes doigts avec les siens, je lève le regard vers lui et approche mon visage du sien, si proche que je pouvais sentir sa respiration. Me blottissant dans ses bras, je blottis ma tête dans sa nuque avant de reprendre la parole.

« Non, reste avec moi. » énonçais-je « je veux pas être toute seule… » soufflais-je alors que je me blottissais un peu plus contre lui, mes doigts enlacés avec les siens « c’est juste que…elle me manque James. Elle me manque trop. Je m’en veux…Je m’en veux tellement. » énonçais-je alors que de nouvelles larmes perlaient sur mon visage, une tristesse absente de mon âme depuis plusieurs jours. Cela me faisait du bien de pleurer mais mon coeur était embrumé par la douleur, par l’absence, par la tristesse. Je m’en voulais tellement, beaucoup trop atrocement.