« Pour réaliser une chose extraordinaire, commencez par la rêver. Ensuite, réveillez-vous calmement et allez jusqu'au bout de votre rêve sans jamais vous laisser décourager. » (Walt Disney)
L'aventure forme la jeunesse ... ou plutôt les couples !!
Revenir dans le monde des géants laissait un goût doux amer dans la bouche du chat. La dernière fois, il espérait trouver la poule aux oeufs d’or. Il était avec son ami d’enfance et une belle chatte qu’il avait rencontré. Kitty était comme lui. Une aventurière que la vie n’avait pas gâté. Cette expérience avait été superbe, même quand ils avaient volé le poussin, pensant qu’il pourrait donner des oeufs d’or. Potté n’avait fait ça uniquement dans le but de se racheter du braquage qu’avait commis Humpty. Les habitants de San Ricardo n’avaient pas à payer pour les rêves de grandeurs de cet imbécile. Il avait pensé, qu’en plus de redorer son image, faisant éclater la vérité, il pourrait les rembourser. Il n’avait été qu’un pauvre fou. Humpty l’avait encore une fois trahi vu qu’il était de mèche avec Jack et Jill. Néanmoins, il avait pu montrer finalement, qu’il n’était pas un œuf si pourri que ça en se sacrifiant pour lui, vu que la maman était revenue chercher son poussin, qui n’était rien d’autre que Betty, qui avait elle-même aujourd’hui des poussins. Tandis qu’ils marchaient sur l’immense table des géants, Alejandro pensa qu’il s’agissait peut-être d’un cycle. Il allait sans doute devoir clôturer ce chapitre alors qu’il pensait qu’il l’avait fait. Une fois la mort d’Humpty acté, il était parti à l’aventure en tant que chat libre, mais sa réputation était toujours présente. Il n’était pas devenu un chasseur de prime et surtout un assassin royal pour rien. Tout le monde faisait appel à ses services, même les plus grands. Il n’avait plus rien à faire de son passé. Pourquoi ressurgissait-il aujourd’hui avec une telle violence ? Mais en parlant de violence, l’esprit d’Alejandro se focalisa sur quelque chose de bien plus grave que sa petite introspection. Depuis une dizaine de minutes, il entendait des bruits énormes. Il l’avait fait part à ses camarades mais ces derniers n’avaient pas écouté. Puis le bruit s’était rapproché et l’origine en avait été dévoilée. Les géants. Les géants étaient de retour et Alejandro sentit une vague de peur lui serrer la poitrine. Tout le monde s’était caché, attendent avec fébrilité la suite de cet évènement tragique. Le regard d’Alejandro se posa sur Rémi. Qu’avait il fait ? Pourquoi diable l'avait-il mis en danger de la sorte ?
“Hors de question !”
Il l’avait mis en danger, mais le plus grand danger résidait dans sa bonté et Alejandro aurait du s’en douter. Il avait feulé en son encontre, le regardant durement. Il était véritablement hors de question qu’il aille sauver Jack et Jill junior. Ils étaient là pour les éliminer et tant mieux quelqu’un allait s’en charger à leurs places. Certes, même ses ennemis ne méritaient pas d’être mangé comme des cochons de lait mais il était résolument opposé à ce que Rémi y aille. Hors c’était sans compter sur son coté têtu. C’était déjà ce côté têtu qui le faisait être dans cette situation précise.
“No ! Je te l’interdis ! Rémi !”
Son ton dur trahissait son angoisse. Oui il était peut être petit et rapide mais Alejandro ne voulait pas prendre ce risque. Rémi ne l’écoutait pas et le chat feula de tout son saoul quand il le vit partir en courant. Il était devenu gros tant son pelage s’était hérissé de colère.
“Hiro de mierda !”
Rémi ne se rendait-il pas compte du danger ? Vraiment Alejandro se demandait s’il n’était pas suicidaire, cela pourrait expliquer beaucoup de choses. Essayant de se calmer, il ne pouvait décemment pas le laisser seul. Sortant de sa cachette au moment où le géant sortit de la cuisine, Alejandro courut aussi rapidement qu’il put pour rejoindre Dulcinéa, cachée derrière l’énorme vasque de fruits.
“Mais pourquoi il fait ça ?” “Parce qu’il estime qu’il faut les sauver …”
Clairement, Alejandro n’était pas content et cela s’entendait dans sa voix. Quand tout ceci serait fini, s’ils s’en sortaient vivants, il passerait à Rémi un savon comme jamais auparavant. Ici, il n’était pas sa cuisine ou dans son Paris natal. Ici, il risquait sa vie et il devait le comprendre. Pour une fois, Alejandro lui demandait d’être égoïste. Si encore les gens dans la cage étaient leurs alliés. Oui, bien sûr qu’il les aurait sauvé mais là ! En plus, il avait un très mauvais pressentiment.
“C’est très noble de sa part.”
Alejandro envoya un regard noir à Dulcinéa. Il préféra ne rien dire, faisant un signe de tête à Brant pour qu’il s’avance vers la cage. Doucement, petit à petit, ils arrivèrent à quelques mètres mais les géants aussi et la cage fut emportée au loin. Alejandro s’étouffa à moitié, serrant fortement la main de Dulcinéa en voyant Rémi dans le cadena. C’était lui qui allait le tuer quand ils le retrouveraient pour lui montrer toute l’angoisse qu’il lui donnait. Cependant, il devait faire le vide dans sa tête. Les émotions aussi fortes soient elles n’étaient pas bonnes dans une situation pareille.
“Il faut descendre de la table et rejoindre la cuisine. Rapidement.”
Mais tout avait une dimension si gigantesque que même la notion du temps n’était pas la même qu’en bas. Heureusement les géants étaient occupés à préparer leur futur souper, si bien qu’ils ne se préoccupèrent pas de ce qui se passait sur la table. Alejandro avait, avec ses griffes, découpé une bout de nappe pour en tirer un fil. Il l’attacha à Brant, le plus lourd qui allait passer en premier. Dulcinéa se mit au milieu et lui en dernier. Ils descendirent en rappel le long du pied de la table qui faisait bien la taille d’un immeuble. Une fois au sol, ils se mirent à courir pour aller dans la cuisine. Ils se cachèrent parfois derrière une chaise, derrière un meuble, pour éviter au maximum. Même s’ils ressemblaient plus à des insectes qu’à autre chose, Alejandro ne préférait pas tenter le diable. Quand ils arrivèrent au niveau de la porte de la cuisine, ils entendirent des cris, des insultes et le silence. Se faufilant en dessous de la porte, crapahutant comme s’ils faisaient un parcours d’obstacle, il laissa Dulcinéa s’occuper de Brant, dont le ventre avait du mal à passer pour se précipiter vers le plan de travail. La cage était là mais vide. Cela voulait dire que Jack et Jill jr avaient été libérés par Rémi. L’insulte était donc celle du géant. Reniflant pour se fier à l’odeur, il sut qu’ils étaient toujours là. Ils se cachaient. Ils n’avaient pas dû aller bien loin alors Alejandro, se fichant des risques, commença à grimper en s’aidant des appuis des placards. Alors qu’il montait bien, il sentit d’un coup qu’on le tirait en arrière.
“Mierda !”
Le géant venait de l’attraper par la peau du cou pour regarder ce qu’il avait attrapé justement. Alejandro se débattit comme il pouvait, feulant, toutes griffes dehors avant de se stopper. Il avait repéré le trio sur une des étagères qui le fixait. Jack arbora un sourire machiavélique tandis que Jill se mit à pousser Rémi de l’étagère pour le faire tomber alors qu’il le fixait, désemparé. Alejandro sentit pousser un grand cri de désespoir. Il se retourna vers le geant qui l’observait sous toutes les coutures. Alejandro le mordit au doigt et le géant poussa un petit cri, surpris, le lâchant même. Il allait devoir prouver lui aussi que les chats retombaient toujours sur ses pattes. Il y arriva mais la chute fut très dure. Heureusement qu’il avait ses bottes. Pendant quelques secondes, il resta au sol avant de se relever, s’ébrouant pour reprendre ses esprits. Il remarqua alors que le géant venait d’attraper Rémi par la queue. Le rat ne bougeait pas et Alejandro devait essayer de faire taire la peur qui noyait son cerveau. Le géant fit quelques pas et jeta Rémi à travers une sorte de trappe. Le vide ordure ! Alejandro esquiva les pieds, allant vers Dulcinéa et Brant qui eux aussi, avaient assisté à la scène, totalement impuissant.
“Occupez vous de ces enflures. Je vais chercher Rémi.”
À la vue du ton qu’il avait envoyé, ce n’était pas négociable.
“Dans le cas où le géant vous attrape. Faites les morts. Nous avons la chance d’être des animaux, ils ne nous mangeront pas. Enfin peut être Brant mais essayez ça vaudra toujours le coup.”
D’ordinaire, Alejandro était assez diplomate mais là, il n’avait pas le temps. Sans attendre de réponses, il se dirigea vers le vide ordure. Il observa son environnement avant de grimper encore une fois. Il entendit du bruit plus loin. Jack et Jill n’étaient pas très discrets. Ils avaient fait tomber une salière dans leur fuite et le géant s’était mis à leur poursuite. Bien cela faisait une bonne diversion autant pour lui que pour son équipe d’attaque. Une fois à la hauteur, il arriva à se faufiler dans un trou, remerciant le fait que la fermeture ne soit pas totalement étanche. Et là. Le plus grand toboggan qu’il n'ait jamais fait de sa vie. Pourtant, il adorait les sensations fortes et les sports extrêmes mais là, c’était, même pour lui, trop extrême. Il hurla de la puissance de toutes ses cordes vocales alors qu’il glissait de plus en plus vite, totalement dans le noir. Il essayait de se freiner avec ses griffes, laissant des marques mais rien n’y fait. Il contracta tout son corps, se préparant sans arrêt à la chute qui n’arriva qu’au bout de longues minutes. Le choc fut encore plus violent que quand le géant l’avait laché. Il sentit des bouts de verre lui entailla le pelage et des détruis se mêler directement. Il gémit en se relevant car sa douleur physique n’était rien comparée à ce que son mental était entrain de lui faire vivre.
“Rémi ! Rémi ! Rémiiiiiiiii !”
Son appel resta sans réponse. Il essaya de humer son odeur mais la puanteur des lieux lui donnait juste envie de vomir. Heureusement que ses yeux de félins lui permettaient de voir plus ou moins dans l’obscurité. Il se mit à le chercher, fouillant dans toutes les poubelles, les minutes passant. Alejandro avait perdu la notion du temps quand il s’assit sur des dechets, se mettant à hoqueter. Il savait que ça finirait mal ! Il avait essayé de le prévenir. Il savait que Jack et Jill junior étaient comme leurs parents. Des pourritures. C'étaient eux qui auraient dû finir ici. Qu'avait-il fait bon sang ! Jamais il n’aurait dû amener Rémi ici. Colette avait eu raison et très certainement qu’elle le tuerait. Il se laisserait faire. Il le méritait. Tandis qu’il pleurait sur son sort et surtout sur la perte de Rémi, la seule personne pour laquelle il ait eu un sentiment plus fort que de l’amitié, il ne fit pas attention aux bruits alentour. Quand il s’en aperçut, une dizaine de rats, assez gros vu qu’ils faisaient sa taille l’entourait.
"Suis-nous."
Il leva la tête, ravalant ses sanglots avant de se lever. Il attrapa son chapeau qui était tombé plus loin dans sa chute et suivit les rats en silence. Il n’avait rien à leur dire et de toute façon, il fallait qu’il sorte d’ici. Il les suivit à travers le vide ordure, empruntant la faille dans le mur pour ensuite rentrer dans un système de canalisation. Ils marchèrent longtemps, grimpant avant de sortir, où plutôt d’entrer dans les combles. Alejandro se retrouva ainsi face à une colonie entière de rats, qui s’activaient à leurs tâches quotidiennes. Un gros rat brun lui fit un signe de tête pour l’amener encore un peu plus loin, dans un recoin, derrière une sorte de double rideau.
“Betty nous a dit que vous seriez là. On vous tenez à l’oeil grâce à nos espions et on l’a vu se faire jeter dans le vide ordure. Même si de base nous ne voulions pas nous aider, on n’abandonne pas l’un des nôtres."
Le rat tira la teinture et là, allongé, couverts de bandages, se trouvait Rémi. Alejandro écarquilla les yeux de stupeur et de soulagement.
“Il était dans un sale état quand on l'a récupéré mais il ne devrait pas tarder à se réveiller. Rory, notre spécialiste, s'est bien occupé de lui.”
Alejandro hocha doucement la tête avant de pousser un soupir de soulagement.
“Merci mi amigo.”
Le rat lui répondit aussi par un hochement de la tête avant de sortir de là, le laissant seul. Alejandro s’approcha du lit sur lequel était étendu Rémi. Il s’assit sur la chaise, enfin à sa hauteur tout en lui prenant sa patte. Il avait vraiment une bonne étoile, et il irait poser un cierge à la vierge marie en rentrant. Quelques minutes passèrent et Rémi commença à papillonner des cils.
“Rémi ! Por el amor de Dios !”
Alejandro sauta de sa chaise pour le prendre dans ses bras tandis qu’il se relevait doucement. Il le serra fortement, enfouissant sa grosse tête de chat dans son petit cou. On aurait pu croire qu’il était en train de le dévorer mais non.
“J’ai eu si peur pour toi !”
Il se détacha un peu, mettant ses grosses pupilles vertes dans celle marron de Rémi. Il avait clairement envie de lui faire la leçon. De lui dire tout ce qu’il avait sur le coeur, de l’engueuler mais il ne le fit pas. Ce n’était pas le moment. Il préféra le serrer à nouveau dans ses bras.
“C’est bien la première fois que je vois un chat ami avec un rat.”
Alejandro se tourna pour voir un rat, plus maigre que le premier, d’une couleur de pelage ressemblant à celui de Rémi venir vers eux. Il avait l’air plus enjoué aussi que le premier rat.
“Rory, enchanté. C’est moi qui t’ai soigné.”
Il s’était penché pour entrapercevoir Rémi, lui faisant un petit geste de la main.
“Alejandro. Ici on m’appelle Potté. Et ça c’est Rémi.”
Rory fronça les sourcils tout en se grattant le menton.
“Potté ? Comme dans le Chat Potté ?”
Alejandro hocha la tête, secouant ses pattes pour montrer ses bottes. Rory eut alors un grand sourire en tapant dans ses mains.
“Tu sais que tu es connu ? J’ai lu un livre de légende sur toi ! Et Betty n’a pas arrêté de nous parler de toi. Je comprends mieux pourquoi Leda a fait la gueule tout à l’heure. Faut dire que la dernière fois, t’as mis un sacré bordel et j’ai comme l’impression que tu fais pareil là.”
Alejandro fussila le rat du regard. Ce n’était pas parce que Rémi en était un qui n’allait pas bouffer cet insolent. Le rat du le ressentir car il se déplaça pour examiner plus en détail Rémi.
“Ce n’était pas prévu que je revienne. Nous essayons de stopper deux criminels.” “Je sais. Très courageux de ta part de vouloir les aider Rémi. Con mais courageux. Peu aurait fait ce que tu as fais.”
Finalement, il n’allait peut-être pas le bouffer si vite, surtout s’il lui évitait de dire ce qu’il pensait à Rémi pour ne pas qu’il se vexe.
“Tu n’es pas d’ici n’est ce pas ? Sinon tu aurais su qu’on n’aide que ses alliés.”
Alejandro ne pouvait s’empêcher de faire une moue consentante.
“Rémi est généreux. Il ne pouvait pas se douter que Jack et Jill Jr sont pourris jusqu’à la moëlle.”
Il lui lança un petit regard. Si. Bien sur qu’il aurait pu s’en douter. Ils étaient les enfants de monstres et en général ce genre de personnes ne pouvaient devenir des saints.
“Mais c’est vrai que son courage peut lui faire transporter des montagnes.”
Rory ne répondit rien, terminant son inspection avant d’avoir un petit sourire.
“Oui. C’est sans doute pour ça que Leda veut que ce soit lui qui conduise l’armée.”
Alejandro écarquilla les yeux, croisant les pattes sur sa poitrine.
“L’armée ?” “Leda a juré à Betty de vous aider. Je ne sais pas vraiment le plan, je ne suis que le médecin mais j’ai entendu tout à l’heure qu’il allait vous passer des hommes. Bien sûr il est hors de question qu’un …. un chat soit aux commandes. Si je ne m'abuse, il y en a un autre, et un cochon. Heureusement pour vous que vous avez ce petit gaillard sinon Leda aurait du trouver une autre solution. Il pourra prendre sa revanche comme ça vu qu’il est si gentil qu’il n’a pas envie que les géants les mange.” “D’ailleurs en parlant de géants ….ils n’étaient pas là la dernière fois.”
Rory eut un petit rire avant de prendre une mine plus grave.
“Le royaume des géants n’est pas uniquement que ce château. Il est aussi vaste que lui. Il y a des clans. Des amitiés. Des ennemis. Comme dans le monde d’en bas. Ce ne sont pas les géants originaires de ce château mais ceux qui les ont tués.”
Ah. Bien. Il ne manquait plus que ça. Être pris dans une guerre de géants.
“Leda vous attend dans ses quartiers. Vous pouvez prendre du temps. Je lui ai dit que Rémi avait quand même besoin de repos.”
Rory parti, laissa ainsi les deux tous seuls. Alejandro s’assit sur le rebord du lit, attrapant son chapeau qu’il n’y avait pas loin, sur la chaise, commençant à jouer avec.
