La recherche des souvenirs était une activité fort difficile et prenante d'énergie. Depuis qu'il était revenu, que ses "deux soeurs" l'avaient cherché dans cet hopital pour le ramener "chez lui", Nathanaël n'avait pas cessé d'essayer de chercher qui, il était. On lui avait expliqué cette histoire du monde des contes mais il n'arrivait pas à y croire. C'était trop irréelle. Certes, il avait bien vu Evangeline faire de la magie, mais tout de même. Venir du 19e Siècle c'était incroyable. Il essayait de faire travailler ses méninges, de savoir, de connaître, de se souvenir, mais rien. Il n'avait absolument rien qui remontait et c'était autant épuisant que frustrant. Claude, autre personne dont il avait été proche, tellement proche qui l'hébergeait -pour ne pas avoir à le laisser seul- lui disait que seul le temps pouvait guérir sa mémoire, qu'il ne devait pas s'énerver contre lui même et que tout le monde était là pour lui. Nath' lui faisait souvent des sourires réconfortants. C'était gentil, extrêmement gentil même et heureusement qu'ils étaient tous là mais ça n'arrivait pas à faire partir la colère qui commençait à poindre dans sa poitrine. Colère qui avait éclaté quand son "travail" lui avait dit qu'il était mis en arrêt. Quand il avait appris qu'il était chirurgien traumatique et orthopédique, il avait ressenti de la fierté. Il aidait les gens, notamment les enfants ! C'était bien, très bien et pour le coup, ça il n'avait pas oublié, dans le sens où quand il lu un manuel d'anatomie, sa mémoire manuelle répondit correctement. Il savait le nom des maladies, des blessures, il n'avait pas oublié comment soigner. Or non, ses supérieurs estimaient qu'il était malade d'une certaine manière et que pour l'instant il n'était pas apte à aider les autres. Cela l'avait mis dans une grande colère, puis dans une immense mélancolie. Il ne servait à rien. Il comprenait pourquoi il avait essayé de se supprimer. Il l'avait entendu au détour d'une conversation entre Emeliane et Claude, la raison de pourquoi il n'avait plus rien dans son putain de cerveau. Parce qu'il avait tout simplement essayé de s'ôter la vie. Même ça il n'avait pas réussi. Il devait être très nul pour même réussir sa mort, renforcement le sentiment qu'il ne servait à rien. Il avait réfléchit, à ces mots qu'il avait entendu. S'il avait voulu se suicider, c'était sans doute parce qu'il ne servait à rien. Alors s'il ne servait à rien avec sa mémoire, sans, il comprenait qu'il était pire. Inutile. Un déchet. Il avait ruminé ça pendant toute la semaine, tout en faisant croire aux filles qu'il n'y pensait pas. Il était épuisé. Triste. Au 4e sous sol. La musique qui résonnait dans la caravane en ce samedi après midi ne l'aidait pas à se sentir mieux. Nath' poussait souvent à intervalles réguliers de longs soupirs mélancoliques, allongés, les bras en croix, regardant le détail du plafond comme si ce dernier lui donnerait les réponses à toutes ses questions.

Ce qui le sorti de sa contemplation fut trois coups portés à la fenêtre de la caravane. Tournant la tête, il distingua une petite silhouette en ombre derrière le rideau. Poli, ne voulant pas laisser la personne attendre, il se leva avec le plus grand mal pour aller voir ce qui se passait. Parfois, c'était des erreurs, des jeunes hommes toquaient par inadvertance pour chercher Claude. Ils étaient toujours gentil avec lui, lui demandant s'il avait besoin de quoi que ce soit. Certains disaient même le connaître mais que c'était trop tôt pour tout raconter. Claude avait dit qu'il ne fallait pas le brusquer. Nath' avait compris que c'était une sorte de foyers pour jeunes perdu. Il y avait aussi un bar le soir, mais il n'avait jamais osé y aller depuis qu'il était revenu. Trop de bruits émanaient de là, il avait peur de faire une crise d'angoisse. Dans tous les cas, cela voulait dire qu'il était passé ici, un temps. Emy le lui avait dit aussi, et vu qu'elle était sa soeur, en soit ce n'était pas étonnant. Ouvrant la porte, il se trouva nez à nez avec Heidi, toujours vetu de sa veste en jean et de sa casquette. Si tout le monde était gentil avec lui, Heidi l'était encore plus. Sa voix fluette lui donnait souvent le sourire et il arrivait même, à l'aide de ses grimaces, à le faire esquisser un rire.

"Nathou ! J'ai entendu depuis l'entrée ta musique d'enterrement, je me suis dis que je devais passer !"
"Le classique est très apaisant."

Le jeune homme leva les yeux au ciel avant de lui faire signe de venir avec lui au niveau du petit jardin aménagé. Nath' aimait bien cet endroit coloré, très confortable. Il regrettait parfois que ce dernier soit ouvert à tout le monde mais il n'avait pas son mot à dire, après tout, il n'était pas chez lui. Suivant Heidi, il attendit qu'il s'assoit pour faire de même. Un silence se fit avant que le plus petit ne le brise.

"Bon, alors ! Comment ça va ?"

Pour toute réponse, Nath' haussa les épaules et essaya de faire une tête le plus neutre possible, pour ne pas l'inquiéter.

"C'est bien ce que je pensais. Toujours à ruminer n'est ce pas ?"
"Toujours à chercher des réponses plutôt."
"Tu sais, y a longtemps, j'ai eu une période comme ça. J'étais pas amnésique mais j'étais dépressif. Rester dans son coin, à réfléchir aux mêmes choses, c'est pas bon. C'est un cercle vicieux qui t'entraîne vers le fond. Encore plus quand tu ne sais rien de toi même."

Heidi n'avait pas tord dans un sens. Il le sentait bien que plus il s'enfermait, plus il allait mal. Souvent Claude, les filles ou même l'homme qui se faisait appeler Lucifer essayaient de le sortir de sa morosité. Sauf que ce n'était pas aussi simple. Cette chose était gluante, si bien qu'il avait l'impression d'être comme un animal pris au piège, d'être comme l'un de ses oiseaux pris dans une marée noire affreuse et dont il ne pourrait jamais se débarrasser de ce liquide noir qui lui recouvrait le corps.

"Sors ! Bouge quand il fait beau ! Rencontres des gens pour te stimuler la mémoire ! Tu as tout le temps de réfléchir la nuit alors la journée essaie de vivre ! Même si tu as toujours été mélancolique, tu avais trouvé un juste équilibre. Tu ne t'en souviens pas mais ton corps doit avoir gardé une mémoire. Essaie de la raviver !"

Ça ... on le lui avait dit, qu'il était une personne mélancolique. Ces idées noires n'étaient pas venus du jour au lendemain. Il les avait toujours eu, et elle venait aux grès des vents. Parfois, une tempête explosait, et les dégâts étaient incommensurables, comme cette fois ci.

"Hum. Oui."
"Belle réponse ça ... bravo ... pourquoi tu n'irais pas te balader cet après midi ! Il fait bon, l'automne arrive, je suis persuadé que tu seras mieux dehors qu'à te morfondre dans ton lit !"
"Heidi ! Où es tu ?"

Nath' tourna la tête rapidement vers l'entrée pour voir qui venait. Parfois, sa mémoire lui jouait des tours aussi quand il s'agissait des prénoms. Il plissa les yeux en voyant l'autre homme arriver avec un grand sourire. Il savait comment il s'appelait, il l'avait sur le bout de la langue.

"Ah ! Tu es là ! En soit, je ne suis pas étonné !"
"Bonjour."
"Nath', tu as encore oublié mon prénom n'est ce pas ?"

Nath' sentit ses joues rougir de honte, baissant la tête alors qu'il entendait Heide s'offusquer en se levant rapidement, allant même donner une tape sur le bras de l'autre.

"Jackie ! Comme Jackie Kennedy ! Mais ce n'est rien trésor, je ne t'en veux pas. Bon Heidie, par contre si tu ne te dépeches pas, je t'en voudrais, on va être en retard ..."

Nath' fit une petite moue, quand même gêné. Il s'était fait pourtant un cahier avec le nom de toutes les personnes qui seraient susceptibles d'être là, mettant à coté des signes distinctifs. Il releva la tête rapidement quand il sentit Heidi à coté de lui, lui claquant une grosse bise sous le regard hilare de Jackie. Surpris, il se raidit immédiatement, ne sachant pas vraiment quoi faire. Rien faire était le mieux, il leva au final juste la main pour leur dire aurevoir alors qu'ils partaient rapidement, le laissant à nouveau seul. Il les regarda partir, la musique toujours en fond, le silence revenant sur le jardin. Un chat noir passa entre les caravanes pour aller se mettre dans le grand fauteuil de Claude sans même faire attention à lui. Heidi avait sans doute raison. Il devrait sortir d'ici, aller se balader au parc. Peut être qu'il y trouverait un morceau de son puzzle. Attrapant sa veste rapidement, il mit ses lunettes de soleil et parti en directement du centre ville, soupirant et remettant en question cette décision de sortie. Il envoya rapidement un sms à Claude pour lui dire qu'il allait marcher. Il n'avait pas envie que ce dernier s'inquiète s'il venait aux caravanes et qu'il ne le trouvait pas. Heidi avait raison. Il faisait doux pour un début de mois d'Octobre. L'air était frais mais pas trop, il y avait juste une petite brise qui faisait danser les nuages. C'était agréable et Nath' arriva rapidement à destination. Forcément, il y avait quand même du monde, or ce n'était pas si désagréable que ça. Les cris des enfants jouant ne le dérangeaient pas. Il n'écoutait pas vraiment les gens parler, avançant doucement dans l'allée. Il pensa s'assoir sur le banc, en face du lac artificiel mais son regard fut attiré par autre chose. Par une enseigne. Celle du magasin de glaces. Est ce qu'il aimait les glaces ? Il savait ce que c'était, bien entendu, mais il ne se souvenait plus du goût. Il n'avait pas de souvenirs de lui en mangeant et comme souvent, avec un plat, il devait regoutter pour dire s'il était sur à 100%. Et là, il avait bien envie d'une glace. Cette idée d'ailleurs lui fit esquisser un petit sourire. Une glace. Il se demandait bien depuis quand, il n'en avait pas mangeait. Peut être même, qu'il était déjà venu dans cette boutique ! La perspective de la découverte lui donna un boost d'adrenaline. Il s'arrêta devant, regardant pendant quelques secondes sa main tremblante avant de la poser sur la poignée pour ouvrir la porte. L'intérieur était très chaleureux -ce qui était drôle pour un magasin vendant des choses froides-. Il y avait quelques personnes assises qui dégustaient des coupes de glaces mais Nath' se rendit directement au comptoir où une multitude de parfums était présentée. Que de choix ! Un homme, sans doute le serveur sortit de derrière un rideau pour venir le voir. Nath' répondit poliment à son sourire.

"Bonjour. Vous avez beaucoup de choix."

À s'entendre, Nath' se trouva totalement stupide. Heureusement qu'il avait du choix, sinon personne ne viendrait acheter des glaces. Il regarda pendant de longues minutes, n'arrivant pas vraiment à se décider.

"Est ce que vous pouvez me conseiller un parfum ? À vrai dire, je ne sais plus vraiment ce que j'aime. Je suis amnésique et j'essaie de réapprendre alors .... si vous pouvez m'aider sur les glaces !"

Le medecin lui avait dit de le dire rapidement. Si une personne le connaissait au moins cela pourrait désamorcer bon nombres de quiproquo et de disputes, Nath' ne snobant pas volontairement.

️Pando

Olaf était en train de passer d’un côté et de l’autre… de courir plus exactement. Il traversait la pièce avec son sourire, son plateau, des glaces … et surtout un Jackson qui lui disait de prendre une pause depuis au moins vingt minutes … il y avait toujours un nouveau client, il ne pouvait pas prendre de pause tout de suite. Jackson lui prit de force le plateau pour lui montrer la caisse.

- Au moins, arrête de courir !

Mais … Olaf releva ses grands yeux tout mignons pour lui faire une tête de chien battu. Jackson n’en démordait pas et le renvoya de la main vers la caisse à nouveau. Olaf était reparti en cuisine après plusieurs minutes quand tout était en train de se calmer. Jackson l’observait. Il montrait rapidement le calendrier. Il lui manquait plusieurs jours de pause…

Quand il entendit quelqu’un rentrait, Olaf attrapa Jackson pour le mettre sur la chaise en lui disant de faire une pause lui. Lui il allait servir un client de plus. Quand il sortit, il se figea sur le nouveau client. Il le connaissait … bien sur … et il savait qu’il avait eu un accident … la voix de Nath le ramena rapidement sur terre.

- Toujours ! Le plus plus de choix que partout comme ça tout le monde est content ! On en fait même de saison ! Bientôt on va faire celles aux citrouilles, et c’est vachement bon ! Mais je ne suis pas objectif il paraît … mais c’est une recette de mon employé et c’est vachement bon !

Jackson, en plus d’être un ami, était un employé modèle, gentil, agréable, adorable, et qui savait bien cuisiner, la perle qui lui fallait pour l’aider à tenir la barque depuis qu’il avait repris la boutique. Olaf ne disait rien en attendant … il savait qu’il n’avait pas le droit de sauter sur les clients … non … pas le droit ! Il se mit devant lui en passant le comptoir. Il lui présenta rapidement toutes les glaces, puis il se tut.

- Tu ne te souviens pas de moi alors ? Cela signifie que si je te demande un câlin, tu vas pas aimer ? Même si la dernière fois je ne suis pas sûr d’avoir demandé la permission… peut être pas … mais un câlin c’est toujours bien ! Et oui, on se connait, je suis Olaf, ou Axel, on m’appelle des deux manières.

Il allait lui tendre les bras… il tendit carrément les bras pour commencer un câlin alors qu’il finit par lui tendre la main … pour une poignée de main ? C’était étrange mais c’était peut être le mieux.

- Si tu ne te souviens pas des goûts que tu aimes, une seule solution, tout goûter et checker ensuite sur la liste pour dire ce que tu aimes ou pas ! Et payer par la maison ! Pas le droit de dire non, c’est moi le patron et je fais absolument tout ce que je veux, pas vrai Jackson ?

Jackson au loin remit sa charlotte pour aller débarrasser une table… il baragouina quelque chose qui signifier « ce n’est pas une pause » mais ne dit rien de plus en partant faire ce qu’il avait à faire.

- Tu veux commencer par quoi ? Les plus vendus, l’ordre alphabétique, ou l’ordre de saison ? Sachant que je peux te faire des glaces qui ne sont plus de saisons, si ce n’est qu’une je suis sur de pouvoir aussi !

️Pando