Le musée est un endroit que je ne connaissais que trop bien. C'était ici que mes faux géniteurs m'emmenaient afin de parfaire mon éducation, et ma sensibilité aux Arts. Il s'agit de la seule chose que je souhaites conserver d'Eugene Richardson, mais pour la première fois de ma vie, je ne pouvais pas entrer dans le musée. J'avais raté la période gratuite qui avait pris fin il y a quelques jours. Sans téléphone, ni Internet, la tâche était ardue pour se renseigner sur des détails aussi simples. Mais je ne regrettais pas d'avoir jeté tout l'argent d'Eugène Richardson. Au moins, j'ai rencontré des gens formidables aux quatre coins des États-Unis et j'ai découvert la vraie vie. Je contemple la bâtisse du musée, et décide de trouver un autre moyen d'entrer (une fenêtre ouverte, ou je ne sais quoi). Une porte de service est restée ouverte à l'arrière de la bâtisse. C'est donc tout naturellement que je me glisse à l'intérieur, en esquivant l'équipe du musée, affairée à déballer des oeuvres d'arts de toutes sortes.

Ma séance d'infiltration abouti au bout de cinq minutes. J'ai pris un ascenseur me donnant accès aux peintures du XIXème siècle. Eugene Richardson aimait beaucoup cette période, et je le comprends. L'impressionnisme est un des mouvement que je préfère de par sa richesse, par cette vision instable des choses et non réglée. Je tête ma cicatrice à cette pensée. Depuis que je suis parti, je ne me suis que très rarement rasé, tant et si bien que personne ne pouvait la voir. Je riais jaune en pensant à tous les efforts que j'avais fait pour démontrer l'hypocrisie de ma fausse génitrice. Je me suis assis sur un banc, en profitant de la magnifique vue sur La Seine au point du jour d'Alfred Sisley. Je tentais tant bien que mal de ne pas laisser submerger par des pensées négatives, en appliquant la métaphore du ballon de plage. Une psychologue me l'avait expliqué une fois : se concentrer sur des pensées négatives est semblable à tenter d'enfoncer un ballon de plage dans l'eau. Plutôt que de faire autant d'efforts, il faut les laisser voguer sans en tenir compte.

- Madame Cunningham ! Merci pour votre réponses positive. Voici une des acquisitions que nous souhaiterions restaurer.

Deux femmes se présentèrent devant le tableau. Une envie de les dégager me vint mais je m'aperçu qu'il s'agissait surtout d'Eugene Richardson. Pas de moi. Je ne les vois que de dos, mais celle aux cheveux dorés m'est familier. "La fille miracle..." Je ne veux pas croire que Raiponce soit sous mes yeux comme ça, alors que j'ai cherché trois ans. Mais il faut bien que j'en ai le coeur net. Même habillé comme un clochard. Je me suis levé de mon banc, laissant tomber mon sac de voyage, et je tente de l'aborder, en tremblant.

- Euh... Raiponce ?

La Princesse et le Vagabond

Eliana & Eugène

Qui l'aurait cru ?

Elle avait été appelée par le musée ! Eliana était aux anges en recevant cet appel qui pourrait marquer un tournant dans sa carrière de restauratrice de tableaux. En effet, quelques jours auparavant, la jeune femme avait eu l’une des collaboratrices du conservateur du musée pour prendre rendez-vous afin de restaurer l’une de leurs œuvres. Manifestement, son métier n’était pas très commun dans cette ville, ce qui faisait de la princesse quelqu’un de demandé une fois qu’on savait qu’elle existait.

Aussi c’était elle préparée avec entrain pour ce rendez-vous matinal. Si tout se passait correctement et surtout si son travail leur plaisait, la jeune femme espérait bien devenir l’une de leurs collaboratrices privilégiées ! En tout cas, c’était le rêve de n’importe quelle restauratrice. Eliana avait donc rencontré la femme qui l’avait contacté et après qu’elles aient discuté un moment histoire de se jauger l’une l’autre, elles étaient allées dans la galerie des peintures du XIXème siècle. Là, l’employée du musée lui montra la peinture concernée par leur demande et la jeune femme l’observa un moment, triturant ses cheveux châtains coupés aussi courts que lorsqu’Eugène lui avait fait cette coupe dans le monde des contes.

- Eh bien, vu l’état et la taille… Je dirais que…

Puis quelqu’un l’appela. Une voix qu’elle n’aurait pas cru entendre de nouveau un jour ! Eugène. Il était là, devant elle. Et Eliana ne savait pas trop comment réagir. Dans un sens, elle était ravie de le voir. Et en même temps, elle était un peu perdue, leur relation s’étant arrêtée durant plus de 30 ans ! La restauratrice de peinture regarda avec un air gêné la collaboratrice du conservateur qui lui fit un sourire compréhensif et qui s’éclipsa, non sans lui dire de venir la voir par la suite pour mettre le contrat au point.

- Eugène… Souffla-t-elle alors en regardant avec un sourire son premier amour. Ça alors ! Je ne pensais pas te voir ici ! Ni… Dans cet état. Que t’est-il arrivé ? Demanda-t-elle.

Il fallait avouer qu’elle l’avait toujours vu tirer à quatre épingles et il avait toujours pris soin de lui. Alors le voir aussi mal habillé, mal coiffé… Eliana se dit qu’il avait l’allure d’un sans-abri et elle se demandait si ça n’était pas ce qu’était exactement Eugène… Ce qui serait bien triste, et pour le coup, elle en voulut à Regina d’avoir fait subir quelque chose comme ça à l’ancien voleur.

(c) princessecapricieuse

C'était bien elle. Mon petit miracle... Je ne peux pas arrêter les quelques larmes qui viennent, sans tenir compte des personnes autour de moi. Deux petites larmes coulent sur mes joues et je n'ai pas pu m'empêcher de la prendre dans mes bras. Je la serre très fort dans mes bras, et je repense alors au moment de ma résurrection. En un sens, je me sens revivre juste en la voyant. Elle est en vie, elle a l'air d'avoir repris sa vie en main en mon absence, et rien que tout ça me rend heureux. Je l'invite à s'asseoir sur le banc, en dégageant la place prise par mon sac de voyage. Je ne sais pas par quoi commencer. Eugene Richardson a été un traumatisme des plus importants, et je ne vois pas comment lui expliquer sans passer pour un malandrin. Plus de 30 ans ont passé.. 30 longues années sans pouvoir l'avoir près de moi.

- Une très longue histoire... J'étais devenu... un peu fou après la Malédiction. J'ai voulu tout oublier en passant la barrière... mais j'ai pensé à toi." dis-je en lui caressant le visage. J'ai dû m'infliger des années en tant qu'avocat, et la barrière s'est envolée. Du coup... J'ai donné toute ma fortune et je suis parti voyager. Et me voilà... cinq ans plus tard.

J'évite de donner plus de détails sur les raisons de mon départ. C'est beaucoup trop dur pour moi d'en parler pour le moment. J'ai honte de mon ancien comportement, et surtout, mes faux géniteurs étaient loins d'être des anges. Je me demande jusqu'à quel point Regina avait recopié ma vie du monde des conte. Mais bon, il vaut mieux éviter de se concentrer sur ce genre de choses, je risque de faire encore une crise de panique.

- Je t'ai cherchée pendant trois ans avant de partir... Et te voir devant moi comme ça... Ça valait la peine de patienter."

Contrairement à moi, Raiponce est propre, bien coiffée, et rayonnante. Ceci veut dire qu'elle a réussi à persévérer, comme elle savait si bien le faire dans le monde des contes. Mais en soi, ce monde de perfection ne me convient plus. Je ne changerais pas grand chose une fois un logement trouvé. Les apparences ne servent à rien, à par cacher ce que l'on est. Raiponce est la parfaite exception, car elle sait être honnête et sincère.

- Mais assez parlé de moi ! Franchement, regarde-toi ? Tu es... rayonnante ! Je suis heureux de voir que la Malédiction ne t'as pas empêché de rester toi-même !"

Des regards se tournent vers moi. L'ancien Eugene n'aurait jamais, au grand jamais crié au sein d'un musée. Mais moi si. La femme de tout à l'heure nous fit signe de partir dans un coin moins bondé.

- Euh... Si jamais on rencontre un vigile, fais attention, il se peut que je sois entré ici illégalement."

La Princesse et le Vagabond

Eliana & Eugène

Qui l'aurait cru ?

C’était plus fort qu’elle. En voyant Eugène avec des larmes plein les yeux, Eliana avait commencé à pleurer. Les pleurs s’étaient accentués quand il l’avait pris dans ses bras. Au fond, même si toute cette histoire de mariage lui avait fait peur, qu’elle voulait prendre le temps de redécouvrir celle qu’elle était aujourd’hui, l’ancienne blonde était plus que ravie de le retrouver. Eugène et elle, quoi qu’il arrive, c’était une histoire qui était gravée dans son cœur et qu’elle n’oublierait jamais.

Aussi, une fois ses pleurs oubliés, la jeune femme prit place près de lui alors qu’il lui racontait sa vie. Eliana se mordilla la lèvre en l’entendant raconter cette triste histoire. Pour le coup, elle avait eu de la chance. Gothel l’avait peut-être kidnappée, au moins avait-elle pris soin d’elle, à sa façon un peu trop abusive, mais la tendresse maternelle, la peintre l’avait connu. C’était beaucoup mieux que ce que lui avait eu durant la Malédiction…

- Tu n’as pas eu beaucoup de chance durant toutes ses années… Soupira-t-elle avant de rougir. Je ne t’ai pas cherché… Avoua-t-elle, honteuse.

Elle n’avait même pas cherché ses parents biologiques. Quand la Malédiction avait été rompue, Eliana avait pensé plusieurs fois à tout oublier, à faire complètement table rase du passé. Quelque chose l’avait retenu et puis au final, la barrière était tombée et elle était partie le plus rapidement possible de cette ville, loin de Gothel.

- J’ai eu beaucoup de chance durant la Malédiction dans un certain sens. Opina-t-elle tout en souriant. C’est encore Gothel qui a tenu le rôle de ma mère, mais cette fois au moins, je n’étais pas complètement enfermée. Quand la Malédiction a été rompue, j’ai été comme toi, très encline à passer la barrière pour oublier mon passé de princesse perdue… Mais je ne l’ai jamais fait, comme si quelque chose en moi m’en empêchait… Et puis quand la barrière est tombée, j’en ai profité pour mettre beaucoup de distances entre Gothel et moi. J’ai vécu à New-York où j’ai appris mon métier de restauratrice de tableau. Lui raconta-t-elle sans perdre son beau sourire.

Puis la collaboratrice du conservateur leur fit signe de s’éloigner un peu, sans doute parce qu’ils faisaient trop de bruits. Cela fit doucement rire Eliana, rire qui s’accentua par la remarque d’Eugène. Décidément, certaines choses ne changeaient pas. Et bizarrement, c’était réconfortant de s’en rendre compte.

- On fuira si on se fait repérer. Se contenta-t-elle de répondre en haussant les épaules. On a l’habitude non ? Ajouta-t-elle en souriant. Si tu as tout abandonné, tu n’as plus de toit ? En tout cas, sache que je serais ravie de t’accueillir dans ma maison. Lui proposa-t-elle, sincère.

Eliana ne comptait pas laisser son ancien amoureux dans les problèmes…

(c) princessecapricieuse

J'ai eu un petit pincement au coeur en entendant Raiponce dire qu'elle ne m'avait pas cherché. Mais le fait qu'elle aille bien me suffit pour le moment. Nous avons tous eu des problèmes et un vécu difficile, et je ne veux surtout pas lui en tenir rigueur. Après tout, c'est moi qui suis parti pendant cinq ans, sans donner de nouvelles à personne. Elle m'a expliqué le déroulement de sa vie pendant les 28 ans. Elle a été plutôt douce, bien qu'ennuyeuse. J'hésite à lui montrer ma cicatrice qui est restée après la malédiction, car je sens qu'elle va encore pleurer. Et elle me ferait pleurer encore plus.

- Écoute, ce n'est pas grave si tu ne m'as pas cherché. Je suis déjà content que tu sois pas enfermée quelque part par ta folle de belle-mère.

Raiponce se mit à rire à la dernière remarque de la conservatrice, et aussi celle sur ma fraude. Sa réponse me rappelle le bon vieux temps, quand on fuyait la garde, aux côtés de Pascal et de Maximus. Elle me rappelle son swing élégant avec les poêles à frire. Mais elle me rappelle surtout les nombreux moments où j'ai pu évoluer en tant qu'être humain. Mais ceci retombe lorsqu'elle me parle du logement que je n'ai pas. Mon sourire s'efface. Je n'ai nullement envie de l'inquiéter pour le moment. Et surtout pas d'être un fardeau alors que sa carrière commence à décoller.

- Euh... Est-ce qu'on peut aller autre part ?

Nous nous dirigeons vers un endroit plus calme, où je pourrais éviter de lui infliger la honte de gérer un sans-abri. Nous sommes dans une pièce où sont entreposé du matériel de nettoyage, et d'autres objets d'entretiens.

- C'est gentil de proposer, mais je ne veux surtout pas être un poids pour toi. Je veux dire... Tu commences à peine à faire le boulot qui te plait et... je veux pas être une préoccupation pour toi.

La Princesse et le Vagabond

Eliana & Eugène

Qui l'aurait cru ?

Eliana s’en voulait de ne pas avoir cherché Eugène. Manifestement, il n’avait pas eu une vie facile sous la Malédiction et elle aurait dû être là pour lui. Mais la jeune femme avait préféré partir dès que possible, ne supportant plus Gothel et surtout voulant prendre son envol et découvrir le monde à sa façon, à son rythme. Puis, il fallait avouer que se souvenir brusquement que l’on était mariée depuis plus de 28 ans à un homme qu’on avait pas revu depuis, c’était légèrement angoissant…

- J’aurais quand même dû le faire, pardonne-moi… S’excusa-t-elle en soupirant. Quant à Gothel… Ici aussi c’était ma mère adoptive. Expliqua-t-elle en grimaçant.

Non décidément, elle n’arrivait pas à tourner la page là-dessus. Pourtant, elle travaillait avec Regina, la connaissait à présent. Mais rien ne lui expliquait le pourquoi de la Malédiction et surtout pourquoi elle avait dû se coltiner encore une mère complètement folle… Enfin, c’était sans doute stupide de rester coincée là-dessus. Un de ces jours, elle poserait directement la question à sa patronne, ça irait plus vite.

- Viens. Se contenta-t-elle répondre lorsqu’il lui demanda d’aller ailleurs.

Elle pouvait comprendre qu’il n’ait pas envie d’être dévisagé par des idiots qui iraient tout de suite le cataloguer comme un bon à rien pour être SDF. Si elle en entendait un dire cela d’Eugène devant elle, l’ancienne blonde ne savait pas comme elle réagirait… Elle emmena son compagnon dans une pièce de stockage, là où personne ne viendrait les déranger a priori.

- N’importe quoi. Répondit-elle en balayant son objection de la main. Tu ne me gêneras pas du tout et c’est normal pour moi de te le proposer. Si tu as l’impression que c’est de la charité, détrompe-toi. Mais pour te rassurer, tu pourrais faire le ménage dans la maison en échange. Proposa-t-elle avant d’ajouter, songeuse : Enfin, pas dans l’atelier, je range tout d’une certaine façon, je préfère que personne n’y touche… Alors, c’est oui ? En plus, ça nous permettra de rattraper le temps perdu !

Ce qui ne serait pas du luxe parce qu’ils avaient tous les deux apparemment vécu pas mal de choses. Puis ça serait mieux si Eugène vivait à la maison, ainsi, peut-être qu’elle parviendrait un jour à aborder avec lui le sujet de leur mariage dans le monde des contes…

(c) princessecapricieuse

Je me rendis compte de ma bêtise dès que Raiponce a balayé mon objection. En un sens, elle a raison. Elle m'aime, et elle ne veut surtout pas que je peine autant dans la vie. En fait, je crois que je me suis tellement habitué à ma vie de voleur que les vieilles habitudes sont revenues. Mais être chez elle, signifie que je lui donnerais une charge financière en plus et ça, je ne peux pas le supporter. Le ménage, s'occuper de sa maison, ceci ne compenserait jamais le poids que je pourrais devenir. J'essaie de composer avec mes émotions, en essayant de distinguer ce qui vient d'Eugene Richardson, et ce qui vient d'Eugene Fitzherbert.

- Je sais pas. Je... je suppose qu'on pourrait tenter quelque chose mais... J'aimerais au moins trouver un travail, dis-je un peu confus.

L'idée de rattraper le temps perdu me susurrait à l'oreille d'accepter ce marché, de laisser tomber un instant toute cette pression et de laisser la fille miracle tout gérer. En soi, j'ai toujours rêvé de ce moment où je pourrais me poser et la revoir, saine et sauve. J'ai besoin d'elle, je refuse son aide. Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ? Pourquoi Eugene Richardson persiste à me pourrir la vie ? Je me suis assis par terre. L'émotion est en train de me rendre fou.

- La vie ne nous a fait pas fait vivre des moments glorieux hein ?

J'ai un ton mélancolique, en repensant à la courte époque où j'avais enfin réussi à trouver une vie stable et honnête. Jusqu'à ce que Regina nous envoie son nuage violet. Moi qui avais toujours rêvé de voir mes parents, on ne peut nier que la Malédiction n'a rien arrangé. Plus jamais je ne rechercherais d'éventuels géniteurs. Jamais je ne le ferais pour la simple et bonne raison que de grandes attentes amènent souvent à une déception d'autant plus grande.

- Tu es parvenue à revoir tes parents ? Peut-être qu'il pourrait m'héberger ? Ou un ami, n'importe qui...

La Princesse et le Vagabond

Eliana & Eugène

Qui l'aurait cru ?

Eliana fronça un peu plus les sourcils. C’était bizarre non ? Quand on vous tendait la main, surtout dans leur situation à tous deux vu qu’ils se connaissaient plus que bien quand même ! Bref, on acceptait la main tendue non ? La jeune femme pouvait comprendre qu’il y ait un peu de fierté derrière, mais bizarrement, elle ne pensait pas que c’était le cas. Eugène semblait vraiment déterminé à vouloir réussir à remonter la pente tout seul. Une attitude louable, mais souvent mal récompensée : la vie, et surtout ses épreuves, ça se surmontait à plusieurs.

- Franchement, qu’est-ce qui t’empêche d’habiter chez moi le temps de te trouver un boulot ? Ensuite, on pourra toujours se dire que tu me rembourseras plus tard pour les jours où je t’aurais hébergé si ça te tracasse vraiment. Proposa-t-elle de mauvaise grâce. Même si personnellement ça ne me plait pas, je peux comprendre que tu aies besoin de sentir que ce n’est pas de la pitié…

Le voyant s’écrouler lentement au sol, Eliana suivit le mouvement, remettant au passage une mèche de ses cheveux châtains derrière son oreille. À genoux devant Eugène qui était affalé contre le mur, la jeune femme lui sourit doucement. C’était si vrai. Ils avaient beaucoup souffert tous les deux, dans cette vie comme dans l’autre.

- Ça nous rend plus fort dans un sens. On a pas si mal tourné non ? Ni dans cette vie, ni dans l’autre…

Ça s’était même plutôt bien fini pour eux dans le monde des contes. Plus que bien même. Raiponce s’était découvert une famille, pas si petite que ça quand on comptait ses cousines d’Arendelle. Eugène lui avait eu une famille par alliance, ils n’avaient jamais cherché à trouver ses parents à lui, même si la jeune femme aurait été plus que prête à l’aider. Elle l’était toujours d’ailleurs !

- Tu sais que ça devient super vexant de te voir refuser mon offre sans aucune raison ? Fit-elle remarquer en croisant les bras, légèrement boudeuse avant de soupirer. Non, je ne les ai pas retrouvés. Jusqu’à présent, j’ai toujours plus ou moins cru qu’il n’y avait que Gothel et moi ici. C’était stupide…

Peut-être que si elle les avait cherché un peu plus, elle aurait pu reconstruire sa famille. Peut-être. Mais peut-être aussi que si elle l’avait fait, elle n’aurait pas été celle qu’elle était aujourd’hui. De toute façon, un célèbre proverbe disait qu’avec des si, on mettrait Corona en bouteille…

- Et toi ? Tu crois que tes vrais parents sont dans ce monde ?

(c) princessecapricieuse

Elle ne comprends pas. Elle ne comprends pas que je ne souhaites aucunement être un boulet... Que ce soit pour elle, ou pour d'autres. Je pousse un léger soupir, l'air confus. Ce... n'est pas une question de pitié ou quelque chose dans ce genre. Raiponce a tellement travaillé ces dernières années que je ne voudrais pas risquer de tout gâcher en étant un poids financier. Mais je pense que l'on est dans un débat de sourd. Je ne lui en veux pas d'essayer de m'aider, elle l'a déjà fait par le passé. Littéralement. Elle s'assoit à mes côtés, ironisant, du moins je le pense, sur le fait que l'on soit devenu plus forts par les multiples épreuves. Pour l'instant, je n'arrive pas à relativiser autant qu'elle sur ma situation.

Je préfère ne pas penser à ce qu'il se serait passé si ma mère était restée en vie après la malédiction. Je crois que je l'aurais simplement fuit. Mais étant donné qu'elle n'est pas réelle, je pense tout simplement qu'elle est morte ou du moins ne veut pas me voir. Autant dire que ça me fait des soucis en moins. Je souris légèrement en la voyant bouder. Elle vient de réussir à me dégriser un peu.

- J'ai mes raisons je t'assure. Je pense juste que... on ne se comprend pas sur ce point. Et j'en suis désolé.

Elle m'explique qu'elle se croyait plus ou moins seule avec Gothel depuis la fin de la malédiction. Je ne lui en veux pas d'avoir pensé ça, après tout, l'erreur est humaine. Et surtout, on ne sait même pas comment elle marche précisément. Elle me demande alors si j'ai moi-même retrouvé mes parents et je lui réponds de suite :

- Je t'avoue que je n'y ai pas pensé. Je n'ai jamais connu mes parents, et... du moment que je t'avais toi, je ne voyais pas l'intérêt de les chercher.

Je fais une pause, en réfléchissant. A quoi pourrait-ils ressembler ? Et pourquoi m'avaient-ils laissé tomber ? Des questions futiles maintenant. Je n'ai pas spécialement besoin d'eux. Je me suis redressé sur mes deux jambes. Je me sens las, mais ça va légèrement mieux. J'entends des bruits de pas au loin. Je m'attends à voir un vigile, mais personne ne vient dans la salle. Je continue alors la conversation.

- Ils m'ont abandonné. Je ne vois pas en quoi ce serait intéressant de les retrouver. Enfin... je ne sais pas... Pourquoi est-ce qu'il faudrait se préoccuper des gens qui ont été absent pour toi ?

La Princesse et le Vagabond

Eliana & Eugène

Qui l'aurait cru ?

Mouais… Vraiment, Eliana ne savait pas comment prendre le refus d’Eugène. Peut-être qu’en fait, il préférait s’éloigner d’elle… Ou alors il n’avait pas envie de recommencer une vie à deux, comme celle qui avait été la leur dans le monde des contes. Ce qui pouvait s’entendre, après tout, ils s’étaient mariés très jeunes… Tiens, peut-être même que ça, il ne voulait plus en entendre parler. Et ce n’était pas elle qui le lui reprocherait, vu qu’elle ne voulait plus se dire qu’elle était mariée.

- Effectivement, nous sommes d’accord pour dire que nous ne sommes pas d’accord sur ce point.

Finalement, Ellie lui parla ensuite de son passé, notamment du fait que de nouveau, elle avait été élevée par Gothel dans cette vie. Lui apparemment, n’avait encore une fois pas eu de chances avec ses parents, si tant est qu’il y ait bien eu des parents cette fois et que ça n’était pas de faux souvenirs, même à ce niveau-là.

- Je comprends…[/b] Dit-elle doucement en lui souriant tendrement.

Elle-même aurait été trop curieuse et très angoissée aussi, mais Eliana imaginait qu’elle serait allée à la recherche de ses parents si elle avait su qu’ils existaient, pour savoir les raisons qui les avaient poussés à l’abandonner. Du moins si elle avait été dans la situation d’Eugène, ce qui n’avait pas été le cas.

- [b]Peut-être qu’ils avaient des raisons que tu n’imagines pas pour t’abandonner… Répliqua-t-elle doucement, sachant que c’était un sujet sensible. Mais pour le reste, je ne saurais même pas comment retrouver mes parents, ni même Pascal et Maximus. Par où commencer ? Je me vois mal aller voir tous les habitants de la ville pour leur demander s’ils sont les parents de Raiponce… Tu aurais une idée toi ?

Parce que là, elle nageait dans le brouillard le plus épais qui soit. Eliana avait quitté la ville bien trop rapidement et ne s’était pas intéressée à la façon dont les gens avaient trouvé leurs familles et amis, trop préoccupée à mettre le plus de distance entre elle et Gothel. Du coup aujourd’hui, elle ne savait pas comment agir.

(c) princessecapricieuse