« Pour réaliser une chose extraordinaire, commencez par la rêver.
Ensuite, réveillez-vous calmement et allez jusqu'au bout de votre rêve
sans jamais vous laisser décourager. » (Walt Disney)


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 By each crime and every kindness, we birth our future ∞ BALTHY

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Eulalie
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Eulalie

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"Qu'est-ce qu'elle me veut encore celle-là..."
"Coucou TortueMan, je t'ai manqué ?"


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"Je sais que j'ai une mauvaise réputation
mais de là à garder une distance de sécurité..
tu abuses, Emmet."





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By each crime and every kindness, we birth our future ∞ BALTHY _



________________________________________ 2019-10-25, 20:56


Oh my love, what have I done ?
oh my lover, what's on your mind ?


Les vertiges. La panique. Les nausées. La colère. Les tremblements. Le vide.

Ma tête me donnait l'impression d'être sur le point d'exploser tandis que mes doigts frôlaient les murs du couloir que j'empruntais, comme pour que je garde conscience de cet environnement qui m'entourait sans perdre pied. Je me sentais épiée, observée, traquée. Les décorations le long des murs, des crânes moqueurs aux araignées perchées sur des toiles trop réalistes, me donnaient l'impression d'être prêts à m'encercler au moindre faux mouvement. La lumière tamisée qui régnait dans tout l'immeuble m'avait quant à elle plu durant les premières heures des festivités, mais elle ne faisait à présent qu'intensifier mon sentiment oppressant d'angoisse. Les décorations le long des murs, des crânes moqueurs aux araignées perchées sur des toiles qui semblaient trop réalistes, me donnaient l'impression de m'observer et d'être prêts à m'encercler au moindre faux mouvement.

Je sursautais lorsqu'un garde, que je connaissais pourtant, me coupa dans mon avancée. Il sembla ravi de l'effet provoqué par son costume, son sourire en témoignait, mais je n’étais que panique personnifiée alors que je le dévisageais avec incompréhension et que son engouement se transformait en légère inquiétude.

« Bah alors petite ? Ça va bien ? On dirait que t’as vu un fantôme ! » s’amusa-t-il cependant, cette simple remarque me faisant déglutir péniblement. « Je savais pas que c’était hanté ici, Basile m’avait caché ça ! Il est où le revenant ? A l’étage ? Je veux trop voir ça ! »

« Non ! » m’exclamais-je trop précipitamment en empoignant fermement son bras avec une force incontrôlée pour empêcher toute avancée de sa part.

Gérard - puisque c’était son nom - était le plus imposant des gardes d’Olympe que je connaissais, mais cela ne l’empêcha pas d’esquisser une grimace à ce geste impulsif. Je relâchais ma prise immédiatement, consciente que mon comportement allait paraître suspect si je restais aussi tendue face à lui et ce contact me dérangeant soudainement tandis que mes doigts se trouvaient engourdis.

« J’ai… Ce n’est rien. Je ne suis pas très fan d’Halloween, c’est tout. Cette fête me perturbe. » mentis-je uniquement à moitié en affichant une moue indécise.

« Ah. Qu’est-ce que tu fais là alors ? »

Bonne question. me retins-je de répliquer dans un soupir, me contentant plutôt d’un haussement d’épaules que j’espérais assez nonchalant. Je venais masser nerveusement mon bras, me pinçant les lèvres en jetant un coup d’oeil à la foule qui s’était amassée dans cette salle.

« Je ne peux rien refuser à Basile, je suppose. »

« Ah, ce gars sait se montrer convaincant ! C’est ce que j’admire chez lui. » appuya Gérard avec un air presque rêveur. « Je pensais pas qu’il arriverait à faire venir autant de gens, encore moins des humains de Storybrooke ! C’est bien que les dieux soient pas là quand même, c’est moins guindée, on est plus cools, puis... Je veux pas manquer de respect à ton créateur, mais comme on dit, sans Anatole, la fête est plus folle ! »

Je ne pouvais qu'être d'accord, en quelque sorte. Je préférais ne même pas imaginer à quel point il m’aurait été difficile de rester impassible en présence du Titan, en effet. J’affichais un sourire approbateur peu convaincant à cette réplique et espérais couper court à cette conversation, non pas parce que je n’appréciais pas le garde, mais parce que j’avais d’autres priorités bien plus importantes à gérer. Rien que le penser faisait s’affoler mon rythme cardiaque et réveillait les frissons le long de ma peau. Peut-être aurait-il été plus judicieux que je m’éclipse sans rien dire, que je m’échappe, que je fuis. Cela aurait été lâche, aussi. Je n’étais pas dotée de ce trait de caractère… n’est-ce pas ? Je commençais à en douter moi-même.

« Tu veux boire un truc ? Leurs cocktails sont géants ! Je t’en ramène un, bouge pas d’ici ! »

Je n’eus pas le temps de lui intimer de ne rien en faire qu’il était déjà à l’autre bout de la pièce, près du bar tenu par un extra-terrestre aux allures humaines, et je sentis mon angoisse s’installer encore un peu plus. C’était ce que je souhaitais, qu’il me laisse, mais je ne savais plus comment agir. Je ne savais plus vers qui me tourner.

« Basile ? » tentais-je d’appeler avec une voix qui ne portait pas assez au dessus de la musique qui résonnait autour de moi, cherchant l'intéressé du regard sans parvenir à distinguer son costume coloré et pailleté à travers les monstres divers présents à cette festivité.

Je le maudissais de m’avoir incité à faire acte de présence aujourd’hui. Si je n’étais pas venue, rien de tout ça ne serait arrivé. Je haïssais cette soirée, cet endroit aussi. Mon ami m’avait intimé de « profiter », de cesser de me prendre la tête sans raison, et si il n’avait pas totalement tord… Je n’aurai pas dû l’écouter à ce point. J’avais bu bien assez de cocktails pour toute une vie. J’avais abaissé mes barrières. Et la suite n’avait été qu’un véritable cauchemar.

Je clignais des yeux, immobile jusque là, avant de laisser mes jambes me guider jusqu’au stand de karaoké d’où j’avais entendu la voix du garde que je cherchais s’élever. Mais mon soulagement se transforma bien vite en contrariété, mon agacement restant cependant futile face aux autres émotions qui m’envahissaient. Que faisait cette Holmes dans le coin ? Pourquoi l’aurait-il invité ? Elle devait s’être imposée d’elle-même, à l’évidence. Seulement, sa présence ne me dérangeait pas uniquement en raison de son lien de parenté avec Sherlock, mais parce que je n’étais pas dupe. Etait-elle dotée des mêmes capacités d’observation ? Bien que son frère ait déjà prouvé qu’il possédait quelques lacunes en tant que détective… Je ne pouvais pas prendre ce risque. Je ne devais pas m’approcher. Elle ne devait pas me voir.

Ma paranoïa ne s’estompait pas et je fis volte-face à une allure folle, ma tête heurtant le torse de Gérard qui était revenu vers moi sans que je ne m’en apercoive. Mes sens me faisaient défaut, mon esprit trop agité, trop occupé, trop troublé pour se concentrer sur ce qui se passait autour. Je devais sortir d’ici, prendre l’air, réfléchir, trouver un endroit où je serai capable de mettre les choses aux clairs, de réaliser que tout ça n’était qu’une hallucination. J’avais besoin d’être seule. Non. D’être guidée. J’étais plus perdue encore qu’à l’accoutumée.

« Tiens, on m’en a donné un bien rouge pour toi, ça colle bien à l’ambiance sanglante tout ça. » fit fut remarquer le garde en me mettant encore plus mal à l’aise sans le réaliser. « Il a un nom bizarre quand même, on m’a dit que c’était un Ras… »

« Je sais ce que c’est. Et je n’ai pas soif, merci. » l’interrompais-je brusquement en le contournant pour m’approcher d’un invité dont je ne connaissais ni le visage, ni le nom.

Ce n’était pas ce qui m’importait. Je ne cherchais pas un inconnu à qui me confier ou vers qui me tourner. J’avais besoin d’espace, d’un échappatoire, et il était tout trouvé grâce à lui.

« Je vous emprunte ça. » annonçais-je sans oser attraper le poignet de l'individu trop violemment et me contentant donc de décrocher le bracelet qui y était accroché avec toute la vivacité dont je pouvais être capable.

Je n’avais pas le choix, je devais m’adapter avec les moyens que je possédais. J’aurai préféré faire les choses autrement, sans avoir à m’adresser à qui que ce soit, mais je n’avais pas la chance d’être dotée du don de téléportation et faire le trajet par moi-même m’aurait demandé trop de Temps. Ma patience ne pouvait en supporter davantage.

« Qu’est-ce que tu f… »

Je n’entendis pas la fin de cette question. Machinalement, sans savoir comment l’objet fonctionnait, j’avais appuyé sur tous les boutons qui s’y présentaient une fois que je l’eus accroché aux côtés de mes brassards. Ca ne devait pas être compliqué. Ce que j’anticipais, en revanche, était l’arrivée. Et j’eus raison de m’en méfier.

C’était comme si tout l’air présent dans mes poumons venait d’être aspiré. Je suffoquais pendant ce qui me semblait être de longues secondes, dans l’obscurité, mon corps parcouru de spasmes que je ressentais sans qu’ils ne me fassent souffrir. Lorsque je perçus le sol sous mes pieds, il tangua et je ne pus que tomber sans que mes réflexes ne me permettent de me rattraper à quoi que ce soit. Les yeux écarquillés, je vis le parquet se rapprocher de mon visage et ne put que guider mes mains vers le sol pour ralentir ma chute.

Un grognement de frustration m’échappa instinctivement tandis que toute la tension de mon corps se relâchait instantanément, au point que la sensation était presque douloureuse. Je ne pris même pas la peine de me redresser dans l’immédiat, mes cheveux cachant mon visage tandis que mes yeux devenaient humides malgré moi. Ce n’était pas à cause d’une quelconque blessure dû à mon atterrissage bancal. Il s’agissait plutôt de la descente infernale de cette pression qui m’enserrait le coeur. Je la contrôlais comme je le pouvais, difficilement, prenant une grande inspiration qui irrita ma gorge plus qu’elle ne me permit de reprendre contenance.

Néanmoins, je pouvais remarquer que ma crainte s’était elle atténuée. La panique aussi s’effaçait doucement pour laisser place à une sérénité qu’un seul endroit, ou plutôt qu’une seule personne, était dans la capacité de me procurer. Un regard qui ne posait aucun jugement, une aura qui ne m’oppressait d’aucune façon. Cette constatation ne fit que me faire lâcher un sanglot où pointa le départ d’un rire sans joie. C’était absurde. Tout cela était trop absurde.

« Bonsoir, Balthazar. » marmonnais-je dans un murmure indistinct une fois l’instant de surprise passée, ressentant sa présence à proximité, non sans une certaine difficulté à prononcer son prénom sans embarras.

Je m'appuyais sur mes paumes pour me relever sans la moindre gêne quant à l’image que je pouvais donner. Après tout, je ne m’étais pas préparée à me présenter dans ce salon, n’ayant prit cette décision que quelques minutes à peine auparavant. Ce n’était peut-être pas un choix judicieux, mais j’étais à court d’idées. Et j’étais désespérée.

« Je ne te dérange pas ? » questionnais-je par habitude plus que par réelle préoccupation, me fichant bien qu’il ait prévu quoi que ce soit d’autre en cette soirée.

Tout en m’écartant du canapé qu’il occupait, je m’accrochais fébrilement aux pans de ma tenue d’amazone que je revêtais à présent régulièrement à bord du Hollandais et qui avait été le seul ‘costume’ que j’avais daigné porter pour me présenter à la fête de Basile. Après tout, pour le commun des mortels, cette armure était assez peu banale pour donner l’impression de n’être utilisée que comme accoutrement festif. J’aurai pourtant été vexée si quiconque en avait fait la remarque, mais mes préoccupations étaient tout autre à cet instant.

Je relevais la tête dans sa direction, ne pouvant supporter de le regarder plus de quelques secondes sans que les vertiges ne reprennent leur droit. J’avais réussi à l’éviter depuis le début de l’été. Même à ne pas trop m’interroger sur ce que pouvaient être ses occupations ou son quotidien avec Moustache. J’en étais venue à penser, après ces semaines et ces mois de recul, que je prenais le dessus sur tout ce qui le concernait, sur tout ce qui nous concernait. Je ne m’étais jamais autant trompée.

Je réalisais alors stupidement que je n’avais pas visité son appartement depuis des mois. C’était presque un exploit d’avoir passé quasiment une année entière sans mettre un pied ici. Et il était dommage de briser ce record pour le prétexte qui m’amenait, que la veille encore je n’aurai pu imaginer où soupçonner.

« J’ai… J’ai besoin… » commençais-je, incertaine quant à la manière dont je devais présenter les choses, ou bien même si je désirais réellement tout lui dire. « J’ai fais quelque chose de mal. »

Le ton de ma voix me paraissait brisé et je me pinçais les lèvres, incapable d’en dire davantage. Je ne pouvais lui expliquer ce qui s’était passé, je n’étais pas prête à l’accepter, pas prête à le mettre en mots. Les images revenaient me hanter par flash insupportables et je fermais mes yeux à m’en fendre les paupières, espérant qu’il dise quelque chose, qu’il fasse quoi que ce soit, qu’il agisse pour ne pas me laisser comme ça. Il était la raison pour laquelle je me trouvais là, dans cet état, à créer ce désordre et à vivre cet enfer, pourtant…

« Il faut que tu m’aides. »

Contrairement à mon habitude, je ne lui ordonnais rien. Je l’implorais, en réalité, avec cette voix faible et confuse. Si il refusait, je serai seule. Il était l’unique personne vers laquelle je pouvais, ou même voulais, me tourner. Je me savais incapable de m’en sortir sans lui, et cela ne faisait que rendre cette situation encore plus désastreuse.
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Balthazar Graves
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Balthazar Graves

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Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.


DEMAIN DES L'AUBE.


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________________________________________ 2019-11-08, 22:55


And I find it kinda funny, I find it kinda sad
The dreams in which I'm dying are the best I've ever had.


La vie est périssable. Les souvenirs sont immortels.
Cette réflexion était venue à l'esprit de Balthazar tandis qu'il observait la pluie tomber à travers la fenêtre de son salon. Il s'était découvert une morne passion pour cette activité. Qu'il s'agisse d'une averse ou d'une bruine, il appréciait de voir la tristesse du ciel pleurer sur le monde. Dans ces moments-là, il avait l'impression de mettre son cerveau en pause et de parvenir à accéder à un semblant de... paix. Ou plutôt de vide. C'était le mieux auquel il pouvait prétendre. Au prix d'heures entières de concentration, il était arrivé à bloquer le flot constant de ses souvenirs. Désormais, seules quelques bribes réussissaient à se frayer un chemin dans les méandres de son esprit, mais elles étaient aussitôt foudroyées sous la pluie battante. Le barbier avait appris à tuer ses souvenirs. Un par un.

Il souffrait beaucoup moins, ainsi. Certes, lorsqu'il pensait à Johanna, c'était toujours difficile. Depuis le mois dernier, il avait au moins fait l'effort de ne plus la suivre chaque nuit. Seulement quelques unes, qu'il cochait soigneusement sur le calendrier. Il tentait de mettre de la distance entre elle et lui. De toutes façons, il ne pouvait guère prétendre à autre chose. Il ne lui avait toujours pas adressé la parole et ne comptait pas le faire. Elle était mieux sans lui.

Il se concentra pour noyer cette pensée sous la pluie, parmi toutes les autres déjà mourantes sur le sol détrempé de la rue. Il faisait nuit, et des flaques de lumière éclairaient de temps à autre quelques passants déguisés. On avait déjà sonné plusieurs fois à sa porte, mais il n'avait pas répondu, ne s'était pas levé. Il restait dans le noir, chez lui, à contempler le monde en larmes. Il se souhaitait pas se rappeler de l'an dernier, de l'effort qu'il avait apporté à son costume d'Edward aux Mains d'Argent, ni de la soirée à laquelle il avait assisté... tout ceci pour elle. Quel imbécile il avait été. Qu'avait-il espéré ? Il avait rêvé d'une vie meilleure. Un échec. Rien ne bon ne pouvait lui arriver.

Il tressaillit alors qu'un flash de lumière envahit le salon un court instant. Il pivota vers l'intérieur de la pièce, sa main se crispant instinctivement sur la poche de son pantalon qui renfermait le rasoir. Et resta pétrifié sur son fauteuil.

Eulalie. Impossible de ne pas la reconnaître, même dans la pénombre presque totale de la pièce. Elle venait de se téléporter jusqu'à chez lui. Il fronça les sourcils, méfiant. Pourquoi, après tout ce temps ? Il perçut dans sa voix des intonations nerveuses, et le début d'un sanglot qu'elle cacha très mal. Il s'était passé quelque chose. Quelque chose de terrible pour qu'elle vienne à lui.

Il la regarda approcher, souffrant de la proximité qu'elle lui infligeait. Plus elle s'avançait vers la fenêtre, et plus la lumière des réverbères la dévoilaient à lui. Elle portait sa tenue d'amazone, qui ne laissaient en rien deviner ses courbes avantageuses. Balthazar se focalisa sur son visage, et planta un regard acéré dans le sien dès l'instant où la lumière extérieure le lui permit.

Elle réclamait son aide. C'était décidément plus grave que ce qu'il pensait. Ou alors, elle s'était trompée d'adresse, ce qui était peu probable.

"Tu as tué quelqu'un ?"
demanda-t-il, sarcastique.

Le silence qui accueillit ses paroles fut significatif. Le regard du barbier se fit interrogateur tandis qu'il la dévisageait, indécis et dérouté par cette terrible vérité.

Les yeux de la jeune femme étaient ceux d'un animal terrifié. Elle était au bord de la panique. Balthazar se leva d'un bond, plaça ses mains sur ses épaules et la guida jusqu'au fauteuil près de la fenêtre, de façon à la faire asseoir. C'était un bon début. Elle était en état de choc mais ça allait passer. Il se souvenait parfaitement de son premier meurtre. Pirelli avait passé un sale quart d'heure à rencontrer la bouilloire en fonte d'un peu trop près. Le barbier sentit un enthousiasme morbide monter en lui à mesure qu'il se rappelait. Il plia et déplia les doigts et lança d'un ton sec à Eulalie, afin de ne pas se laisser trop emporter par l'exaltation :

"Tu es sûre qu'il est mort ? Tu as vérifié ?"

Parfois, on pense qu'ils le sont mais ils ont seulement cessé de respirer pendant quelques minutes. C'était pour cette raison que Balthazar préférait trancher la gorge : net, précis, et garantie de mort immédiate. Fracasser le crâne de Pirelli n'avait été qu'un entraînement. Une petite erreur tactique. Mais cela lui avait ouvert la porte de l'homicide.

"Comment t'y es-tu pris ?"
s'enquit-il.

Il s'était accroupi devant elle, les mains jointes sous son menton, et la fixait avec une lueur malsaine pleine de curiosité. Elle avait toute son attention. Jamais il n'aurait pensé qu'elle commettrait cet acte impardonnable. Même si elle était née pour tuer ce Surt, elle portait trop de principes en elle pour mettre cette idée à exécution. Elle ne faisait qu'accroître son intérêt. De chenille, elle devenait papillon de nuit. La métamorphose était fascinante.

Il aurait souhaité l'interroger encore et encore, avant qu'elle ne le mène sur les lieux du crime -car il soupçonnait qu'elle soit venue le chercher dans cet unique but- mais l'arrivée d'une tierce personne coupa court à ses ambitions.

Il s'agissait d'un homme déguisé en patate géante, ou quelque chose qui y ressemblait.

"Eh !" fit-il. "Ca va pas de piquer le téléporteur de quelqu'un ?"

Il pointait Eulalie du doigt.

"T'as de la chance que je suis pas en service sinon j'aurais fait un rapport à la Grande Instance des Téléportations Abusives !"

Il se dandina jusqu'à eux et appuya sur le bracelet de l'amazone. Au même instant, il agrippa le bras de Balthazar qui eut un geste pour le repousser, mais une seconde trop tard.

Un flash aveuglant les emporta. L'instant d'après, ils se retrouvèrent au coeur d'une fête bruyante agrémentée de lumières agressives. L'endroit était bondé. Tout le monde était déguisé, mais le barbier remarqua que certains costumes paraissaient trop réalistes, comme cet alien pourvu d'antennes plus vraies que nature. Il se crispa en ayant un très mauvais pressentiment, et braqua un regard oblique en direction d'Eulalie. Qui avait-elle tué et où, exactement ? Il aurait dû commencer par ces questions. A présent qu'ils étaient entourés par une foule d'inconnus, l'interrogatoire devenait plus délicat.

Mister Patate tirait sur le bracelet d'Eulalie dans l'intention de le récupérer. Balthazar resta hors du litige, car il n'avait pas envie d'attirer l'attention sur lui et il se sentait si nerveux qu'il risquait de commettre un geste fatal.

Il détestait les fêtes, et d'autant plus ce genre de 'sauterie' endiablée vantant les mérites d'Halloween. Il exécrait ces gens qui encensaient les monstres et les démons une fois l'an en ignorant totalement ce qu'était le véritable Mal.

Il se contracta davantage en entendant deux personnes chanter en duo sur une petite scène improvisée, face à un écran de karaoké. L'un était un homme vêtu d'un costume à paillettes orange vif doté de cornes et d'une paire de lunettes roses en forme de coeur, l'autre ressemblait à une grande guimauve rose engoncée dans une jolie robe à crinoline. La jeune femme portait une perruque rose pâle dressée sur son crâne telle de la barbapapa. Tous deux interprétaient une chanson qui n'évoquait absolument rien au barbier.

"Don't go breaking my heart!"
"Don't go breaking my- Don't go breaking my-!"

Ils se répondaient tous deux avec un sens du rythme assez incroyable. Ils étaient flamboyants, autant par leurs déguisements que par leurs prouesses vocales. Le barbier était forcé de le reconnaître. Il avait l'oreille musicale - bien malgré lui.

Les deux comparses en étaient à la fin de la chanson et Guimauve accrocha brusquement le regard de Balthazar. Il fronça les sourcils, se demandant pour quelle raison elle avait jeté son dévolu sur lui. Elle descendit de scène et attrapa ses jupes avec la grâce d'une grande dame, puis se dirigea vers lui.

"Monsieur Graves, vous ici !" lui lança-t-elle d'un ton chaleureux qui le fit se méfier davantage.

Par-dessous le fond de teint, les paillettes dorées sur ses pommettes, ses faux cils et le blush à ses joues, il reconnut vaguement une jeune femme qui lui avait laissé un trait mauvais souvenir. La soeur de Holmes.

"Quel bon vent vous amène ?" demanda-t-elle avec un charmant sourire. "Certainement pas mon frère. Il n'est pas là. Je suis désolée de vous l'apprendre."

Elle arbora une expression attristée avant de tourner la tête vers Eulalie.

"Ils sont tellement mignons quand ils sont tous les deux."

Elle eut un sourire enthousiaste qu'elle perdit très vite en remarquant enfin que l'amazone était livide.

"Ca ne va pas ? Tu veux que Basile te masse ? Il est doué pour tout. Enfin... je n'ai pas encore vérifié toutes ses fonctionnalités, mais pour l'instant, il ne m'a pas déçue."

Son sourire devint plus espiègle alors qu'elle attrapait le Garde par le bras pour l'entraîner vers elle. Balthazar manqua de se prendre un coup d'aile du costume démesuré de Basile et la repoussa brusquement en la tordant légèrement, le visage sombre.

Un petit silence tomba entre eux, qu'Eurus Holmes rompit en demandant d'un ton amusé :

"Quelqu'un est mort ?"

Cependant, Balthazar remarqua le regard accru et sournois de la jeune femme se poser sur Eulalie. Se doutait-elle de quelque chose ? Distraitement, il se demanda le degré de peine de Sherlock si sa soeur venait à disparaître. L'idée était diablement tentante. Au cours d'une fête de ce genre, une tragédie est si vite arrivée.

Il fronça les sourcils en la voyant arracher une poignée de sa perruque duveteuse pour la porter à sa bouche. Elle mastiqua sans cesser d'observer l'amazone de son regard perçant, tout en tendant un petit bout de ce qui semblait être de la barbapapa capillaire à Basile l'Imbécile. Le barbier était partagé entre l'exaspération la plus totale et la curiosité de comprendre comment le coiffeur de la Holmes avait réussi à confectionner une perruque en sucre rose. Etait-ce de la magie ou était-ce à sa portée ? La passion pour son travail était la seule chose qui prenait le pas sur le reste -ainsi que le meurtre, bien évidemment.
acidbrain
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________________________________________ 2019-11-16, 19:20


You're lovin' on the murderer sitting next to you
You'll think, "How'd I get here, sitting next to you ?".


J’aurai préféré rester assise, dans le salon calme et familier du barbier, plutôt que de me retrouver de nouveau au milieu de cette foule à l’effervescence gênante. J’avais au moins réussi à me débarrasser du bracelet que j'avais subtilisé pour que son propriétaire cesse de geindre en s’accrochant à mon poignet, mais en échange je me retrouvais face cette femme qui m’inspirait autant d’exaspération que d’inquiétude, à cet instant.

Je ne la lâchais pas des yeux tandis qu’elle s’exprimait avec désinvolture, se montrant agaçante autant par ses gestes et sa proximité avec Basile que par ses paroles que je devinais loin d’être innocente. Son interrogation me fit serrer les dents, tandis que je m’interrogeais sur le but d’une telle question. Avait-elle déjà deviné le crime que j'avais commis ? Ou ne faisait-elle que me sonder en attendant que je me dénonce moi-même par des propos irréfléchis ? J’inspirais difficilement, mes muscles tendus endolorissant mon corps tout entier tandis que je me retournais vers Balthazar.

« Vous vous connaissez ? » préférais-je demander en feignant très mal le détachement, mon regard dégageant toute l'agitation qui m’animait tandis que mon apparence ne laissait pas de place au doute quant à mon trouble certain.

« Ma petite déesse connaît tout le monde ! » s’exclama alors Basile en passant son bras autour de l'épaule de la jeune femme en continuant de mâcher sa barbe à papa, alors que je frissonnais à cette proximité entre eux dont je n’avais pas connaissance.

J’étais d’un côté soulagée qu’il ne me prête pas grande attention, étant donné qu’il était si bien accompagné, mais je trouvais tout aussi vexant et blessant que la seule présence de la Holmes suffise à faire qu’il oublie que j’étais son amie depuis bien plus longtemps. Je l’étais, n’est-ce pas ? J’avais peut-être pris mes distances, mais ça ne voulait pas dire qu’il ne comptait pas pour moi, et j’espérais qu’il en était de même pour lui. Du moins…. Tant qu’il n’apprenait pas ce que j’avais fais. Si cela venait à se savoir, j’étais certaine que je perdrais tous mes proches en une fraction de seconde.

Ma tête se baissa à cette pensée qui m’affola de plus belle, m'imaginer les réactions d’Hyperion, de Thémis, de Monsieur Verne, de Michel-Ange, de Théo, et même d’Elliot, d’Aphrodite ou de Phobos qui ne manqueraient pas de se servir de cette erreur comme d’un prétexte pour m’anéantir. Je me pinçais les lèvres alors que mes mains se crispaient, la panique

« Je pensais pas que ça vous intéresserait cette petite fête M’sieur Graves, je suis désolé de pas vous avoir laissé d’invitation du coup j’avais pas envie de me prendre un vent… » avoua le garde, tout penaud en adressant un regard navré en direction du barbier. « Mais je suis content de vous voir ! Ça faisait longtemps ! On va porter un toast pour la peine ! »

A peine eut-il prononcer ses mots qu’un serveur alien s’approcha et j’eus un mouvement de recul face à son apparence dérangeante. Qui pourrait avoir l’idée de se déguiser en Clown pour des festivités ? Son nez rouge réveillait ma nausée tandis que, sans même m’en rendre compte, je m’étais à moitié dissimulée derrière Balthazar pendant que le garde offrait un verre à sa cavalière, puis deux autres tendus dans notre direction.

« Il est passé où ton pote le cowboy au fait ? T’étais pas avec lui tout à l’heure ? » m’interrogea bêtement Basile, me faisant écarquiller quelque peu les yeux tandis que je me mordais impulsivement l’intérieur des joues. « Comment il s’appelle déjà… No… Nolan ! Je l’aime bien, il est marrant, je crois. Enfin il est beau c’est déjà ça. Je vous préfère quand même gentil Monsieur, vous en faites pas, je suis un de vos plus grands fan vous savez ! »

Il s’embrouillait lui-même en parlant, me rappelant à quel point je devais avoir l'air idiote quand cela m’arrivait, et je sentais mes yeux commencer à me piquer à l’évocation de cette personne avec qui j'étais bien arrivée plus tôt. Mon coeur battait trop vite dans ma poitrine et menaçait d’exploser alors que je secouais ma tête, esquissant un sourire indécis qui ressemblait davantage à une grimace. Je ne savais par quel miracle je parvenais encore à tenir debout et à ne pas flancher.

« Non il a… il a été appelé et… »

« AhhhhhhhahhhhhhhhhahhhhHhhh !!!! » s’exclama une voix criarde, cette soudaine intervention me surprenant autant qu’elle me soulagea, alors que je sursautais malgré moi tandis qu'un flash venait m’aveugler l'espace de quelques secondes. « Balthazaaaaaaar Graaaaaaves ! Oh la la je vais hyperventiler c’est le plus beau jour de ma viiiiiiiie !!! »

Mes sourcils se froncèrent tandis que je tournais la tête pour dévisager l'inconnu qui venait de se joindre à nous, son expression radieuse illuminant son teint bleu et ses yeux rouges qui ne se posaient que sur le barbier. Il ne manqua pas de mitrailler l'homme de selfies avec sa paume, sans demander la moindre autorisation, nous tournant autour comme si nous étions des bêtes de foire. Et, au passage, il n'hésita pas à me repousser (in)volontairement pour avoir plus de place autour de son idole. Je ne remarquais qu'à ce moment de quelle façon il était costumée : une sorte de réplique de Sherlock Holmes, que je ne reconnus que grâce au chapeau reconnaissable entre mille du détective. Si ce n'est que celui-ci était orné du nom brodé de "Sherlazar".

« Vous êtes encore plus sinistre en vrai j'en suis tout excité ! Je peux avoir un autographe s'il vous plait ? » demanda-t-il tout d'abord poliment, avant de sortir un crayon de sa poche et de... commencer à baisser son pantalon devant tout le monde. « Je me suis fais tatouer votre rasoir sur la fesse droite, juste à côté ce sera parfait ! »

Ma première réaction, en temps normal, aurait été d'assommer cet imbécile pour qu'il nous laisse tranquille, mais j'étais trop déboussolée pour parvenir à faire quoi que ce soit.

« Ohhhhhh et…. mais… Noooon y’a Ruruuuuuus aussiiiiiii !!! » continua-t-il de vociférer en donnant réellement l’impression d’être sur le point de faire un malaise à cause de l’émotion. « Je vous aime tellement ! Je suis dans votre team si vous voulez épousez Apollon un jour, je vous préfère gravement à Cassie ! Enfin je la vois mieux avec Jules, elle le décoince bien… »

Son débit de parole me donnait des vertiges à nouveau et je me tournais vers Basile, complètement perdue dans ce récit alors que le garde riait à gorge déployée. Cette situation semblait l'amuser tandis qu’elle m’effarait au plus haut point et, ne sachant comme agir autrement, je reprenais ma place près de Balthazar et attrapais sa main si fort que je craignais de lui faire mal.

« On va y aller. C’était… sympa de vous voir. »
laissais-je échapper, indécise, tout en essayant de tirer le barbier à ma suite.

« Eh oh non ! Petite rouquine comment oses-tu, retourne dans ta chambre avec l’autre cowboy sexy et laisse ce pauvre Balthazar avec ceux qui le mérite vraiment ! » me lança le fan surexcité en me toisant de haut en bas, avec un dédain et un dégoût qui réveillait mes pulsions.

Si je restais une seconde de plus ici, j’allais encore agir d'une façon que je regretterais, je le savais.

« C’est qu'il est célèbre ton gars, ma grande. » prononça Basile sur le ton de la fatalité, un sourire au coin des lèvres alors que le fan furieux s’appliqua maintenant à retirer ses sous-vêtements. « C’est pour ça qu'il fallait venir en costume ! Là niveau discrétion on repassera, je vous jure, faut tout vous apprendre à vous les jeunes ! »

Il attrapa ma main et avant que je n'ai pu rétorquer quoi que ce soit, la grande salle bondée disparaissait. Malgré l'étonnement de ce changement de décor et d’atmosphère inattendu, je devais admettre être satisfaite d'avoir quitté le centre des festivités qui m’insupportait au plus haut point.

« Tadaaaaam ! » s’enthousiasma le garde en levant ses bras en l'air, ses ailes volumineuses bougeant dans son dos en venant cogner les portant qui se trouvaient derrière lui.

La pièce circulaire dans laquelle nous nous trouvions était semblable à un grand dressing, des rangées de vêtements accrochés à des cintres longeant le mur. Nous étions littéralement encerclés par une tonne de tissu aux couleurs variées, certains reconnaissables comme ceux des super-héros, d'autres bien plus mystérieux ou qui ne ressemblaient à rien. Il y avait même des combinaisons semblables aux pyjamas confortables et duveteux que je possédais.

« Je pense que c'est mieux pour vous que vous passiez incognito, gentil Monsieur, et vous avez du choix ici pour vous camoufler ! Bon par contre y'a pas de cabine donc... euh... bon y'a pas de caméra ici non plus, donc ça va. Et puis je pense pas que ça vous dérange finalement… » supposa-t-il en passant sa main dans sa nuque, ses joues rougissant à cette remarque qu'il faisait que je ne pris pas la peine de retenir. « Je vais retrouver ma petite déesse de la soirée en attendant que vous vous prépariez ! Et... prenez pas trop votre temps. Enfin faites vite quoi. Je veux dire... Protégez vous ! »

J'aurai été indignée par de telles insinuations, si mon esprit n'avait pas été habité par un tout autre tas d'interrogations plus préoccupantes. J'eus à peine le temps d'inspirer difficilement qu'il avait déjà disparu, nous abandonnant dans cette salle de costumes et de déguisements. Je tournais sur moi-même pour les observer distraitement, le calme soudain et la solitude qui nous était brièvement accordé ne suffisant pas à apaiser mon angoisse.

« C’est une perte de temps. » affirmais-je en secouant la tête, réalisant que je tenais toujours ses doigts serrés entre les miens et le relâchant immédiatement, sentant ma main douloureusement engourdie. « On a pas besoin de ça. On doit juste le retrouver et… le cacher ou faire quelque chose, non ? C’est ça qu’on doit faire, n’est-ce pas ? »

Je m’interrompais en faisant face au barbier, le scrutant comme si j’essayais de deviner le fil de ses pensées. Je ne me sentais pas capable de lui énoncer tout ce qui s’était produit pendant cette soirée, une sorte de sentiment de honte s’emparant de tout mon être à cette idée. Malgré cela, il était aussi le seul à qui exposer mes craintes, mon angoisse ou même mon crime, ne m’effrayait pas. Je devinais pourtant que l’image qu'il avait de moi devait déjà être en train de changer et cette perspective m’était insupportable. Qu’est-ce qu’il voyait, quand il me fixait ? Qu’est-ce qu'il s’imaginait ? Je me sentais minuscule, apeurée et dans une telle détresse que j’en étais en colère.

« Je ne suis pas un monstre. » estimais-je, incertaine cependant, mes membres se mettant à trembler sans que je n'arrive à me calmer. « Je n'ai rien planifié. Ce n'était pas de ma faute. Et je m'en veux, terriblement. Je suis coupable mais… pas vraiment. »

Je ne savais quoi penser soudainement, et mes yeux me piquaient à l'évocation de l’instant. Ou même à celle de la victime dont je n'arrivais pas à prononcer distinctement le nom. Rien que de l'entendre avait été douloureux. N'avait-il de toute façon pas déjà deviné son identité ? Il était intelligent et réfléchi, je n'avais pas besoin de prononcer l’évidence.

« C'était un accident. » me défendis-je en serrant mes bras l'un contre l’autre en me remémorant les interrogations qu’il avait exprimé et auxquelles je n'avais pas eu le temps de répondre. « Je ne voulais pas le tuer. Ce n'était pas ainsi que les choses devaient se passer. On était dans la chambre et… J’ai... »

Les larmes que j'avais retenu jusqu’ici menaçaient de se mettre à couler le long de mes joues, m’empêchant de pousuivre. Je les chassais d’un frottement furieux de ma paume, tournant le dos au barbier alors que je commençais à manquer de souffle.

« Je ne suis pas la seule impliquée. » affirmais-je alors sur le ton du reproche, désabusée et irritée. « C’est aussi de ta faute. Si tu n'avais pas... Si tu n'étais pas… »

Je ne comprenais pas ma propre réaction. Je ne voulais pas rentrer en conflit avec lui, pas maintenant, je ne cherchais pas à me le mettre à dos non plus ou à le rendre furieux, du moins je ne le pensais pas mais... Peut-être que c'était ce que je désirais. Qu'il me rejette comme il avait déjà pu le faire, qu’il me laisse seule à assumer mes responsabilités, qu'il me fasse prendre conscience de mes actes, qu’il soit l’être abject qu'il était toujours pour que je cesse de me raccrocher à lui comme une écervelée. L'accuser ne m’aidait en rien, loin de là.

« Ça aurait dû être toi, à sa place. Ça… ça aurait pu être toi. » marmonnais-je en me mettant à pleurer de plus belle, maudissant le reste de cocktail qui devait encore demeurer dans mon organisme de me ridiculiser et m'humilier de la sorte.

Mes nerfs étaient à vif et je craignais de ne jamais m'en remettre. Je l'aurai mérité. J’aurai mérité de subir les pires des sentences pour me punir du meurtre que j’avais commis. Mais à quel point étais-je dérangée et déséquilibrée, alors qu’après avoir mis fin aux jours d’un innocent, l’une des choses qui me chamboulait réellement le plus était l'idée que j'aurai par le passé tout aussi bien pu achever le barbier d’une façon aussi monstrueuse ? Je bloquais les sanglots dans ma gorge, pinçant ma bouche alors que je me dégoûtais plus que la raison ne me le permettait. Je n'étais pas un monstre, mais je n'en étais pas loin.

« Je… je suis désolée. » articulais-je indistinctement sans me retourner. « Je n’aurai pas dû venir te chercher, ça va t’attirer des ennuis. Tu devrais… Oublie tout ça. Je vais me débrouiller. »

C'était le mieux à faire, c’était en tout cas ce dont j’essayais de me persuader en sortant de cette pièce dans laquelle j’étouffais. J’aurai aussi pu me dénoncer si vraiment j’avais été dotée d'une bonne conscience. Je n'étais après tout qu’une enfant trop gâtée munie de capacités qui la dépassaient. Et maintenant, j’étais une meurtrière. Une enfant meurtrière déboussolée. Un véritable danger sur pieds pour tout ceux qui m'entouraient. Et ça me terrifiait.

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Balthazar Graves
« J'ai pas trouvé où on peut demander un rang personnalisé... ! »

Balthazar Graves

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Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.


DEMAIN DES L'AUBE.


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| Dans le monde des contes, je suis : : Mister T.

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________________________________________ 2019-11-30, 14:30


And I find it kinda funny, I find it kinda sad
The dreams in which I'm dying are the best I've ever had.


Elle était tellement belle entourée par les ténèbres, mais elle gâchait son potentiel en se donnant une dimension pathétique.

"Arrête de pleurnicher."
articula Balthazar d'un ton sec.

Il braqua un regard perçant sur elle. Une lueur redoutable et aliénée brillait au fond de ses pupilles. Il cherchait à la faire réagir. Il ne souhaitait pas qu'elle se lamente sur son triste sort.

"Tu as tué. Rien ne pourra changer ça."
poursuivit-il. "Ne dis pas que c'était un accident. Tu l'as voulu. Tu l'as cherché. Tu dois assumer."

Rien n'avait entaché sa détermination, ni cette fête costumée stupide, ni l'intervention du "fan", encore moins les interactions idiotes du Garde. A partir du moment où l'amazone lui avait avoué qu'elle avait commis un crime, seul comptait la raison pour laquelle elle l'avait appelé : faire disparaître le cadavre. Ce n'était pas sa partie favorite -il préférait l'instant où il donnait la mort- mais l'un n'allait pas sans l'autre. D'ailleurs, malgré les différends qu'il avait pu avoir avec Mrs. Lovett, jamais il ne serait parvenu à devenir un criminel aussi talentueux sans son assistance. C'était grâce à elle que les corps avaient disparu. Il avait donc une reconnaissance mesurée pour elle. Et il allait appliquer ses précieux conseils afin d'aider Eulalie.

Pour commencer, il sortit un mouchoir de sa poche et le lui tendit. Ce n'était pas par gentillesse -il eut l'ombre d'un sourire cynique à cette idée- mais bien pour essuyer les larmes de ses yeux et ainsi avoir une meilleure vision. Toute la suite dépendait d'elle.

"Conduis-moi là où il est. On a déjà perdu trop de temps."
grommela-t-il fermement.

Il jeta un coup d'oeil mauvais à tous les vêtements qui les entouraient. Hors de question qu'il se change. Les gens du coin avaient un sérieux problème, et il n'allait pas se conformer afin de se fondre dans la masse. Plutôt crever.

"Rappelle ton guignol."
fit-il avec une moue contrariée, car il était agacé de devoir le subir une fois de plus.

Mécontent de retrouver la fête bruyante et trop exubérante à son goût, il suivit discrètement Eulalie jusqu'à une pièce adjacente, un peu à l'écart, envahie par la pénombre. Les basses de la musique résonnaient en sourdine par intermittences, mais en dehors de cela, l'endroit baignait dans un calme étrange, presque surnaturel.

"Ca ne change rien pour moi."

Il avait murmuré ces paroles. Une fois les avoir prononcées, il tiqua. Qu'avait-il voulu dire ? Il l'ignorait. Quoi qu'il en soit, elles lui laissaient une drôle d'impression. Un goût amer dans la bouche.

"Tu seras toujours la même à mes yeux."
précisa-t-il dans un souffle réticent.

Et je serai sans doute le seul à te regarder de la même manière, quoi que tu fasses, ajouta-t-il mentalement avec une peine indéchiffrable. Peu importe les horreurs que tu peux commettre, j'ai fait bien pire.

"Tu ne perdras jamais ta lumière."

Il avait à peine articulé cette dernière phrase. L'avait-il seulement pensé ? Par moments, il ne savait plus où se situait la réalité et le monde lugubre de son esprit. Il vivait trop seul pour se fixer des limites.

Le barbier avait profité de l'obscurité ambiante pour révéler ce genre de choses. C'était plus facile quand on se devinait à peine. Peu à peu, ses yeux s'habituèrent à la pénombre. Il aperçut les reliefs de meubles étranges, ainsi que ceux d'un lit aux draps défaits. Sa mâchoire se contracta. Il comprit aisément les circonstances de la mort de Nolan. Jusqu'à présent, il l'avait seulement entrevu. Il avait vainement espéré que ça ne soit pas ce qu'il avait envisagé.

Balthazar inspira profondément et se composa une expression neutre, même si le sang battait à ses tempes. Il remarqua qu'un détail des plus importants manquait à la scène de crime : le corps. Des yeux, il chercha un interrupteur afin de clarifier la situation. L'amazone dut avoir la même idée car il y eut des tapements de mains, et la lumière du plafond l'éblouit brusquement. Il cligna des yeux et remarqua qu'Eulalie n'avait rien à voir là-dedans.

La fille Holmes était nonchalamment adossée contre une étagère, les mains jointes devant elle, signe qu'elle venait de taper des mains, toujours vêtue de sa robe rose à crinoline. Sa perruque en barbapapa penchait légèrement sur le côté gauche, mais elle n'en restait pas moins très élégante. Cependant, Balthazar était à mille lieues de lui faire un compliment. Il s'interrogeait uniquement sur le but de sa présence dans une telle pièce.

"Vous cherchez quelque chose ?" demanda-t-elle avec un sourire agaçant. "Ou peut-être quelqu'un, plutôt ?"

Le barbier resta parfaitement stoïque alors qu'il répliquait d'un ton glacé :

"Qu'en avez-vous fait ?"

Faussement indignée, elle posa une main contre sa poitrine parsemée de poudre scintillante.

"Comment osez-vous m'accuser, monsieur Graves ?"

"Vous êtes sur les lieux d'un crime." marmonna-t-il en braquant sur elle un regard acéré.

"Hum, je ne suis peut-être pas très bien renseignée à ce sujet, mais pour qu'il y ait scène de crime, il faut qu'il y ait un corps. Hors, ce dernier manque à l'appel."

Elle se détacha de l'étagère pour s'avancer vers eux d'un pas cadencé, comme si porter une crinoline était inné chez elle. Elle stoppa à moins d'un mètre d'eux, les observant tour à tour avec une expression neutre. Enfin, elle reprit la parole après avoir balayé le lit défait du regard :

"J'ai mené ma petite enquête, car j'ai trouvé étrange que Nolan ait disparu de la circulation alors qu'il était vissé à Eulalie toute la soirée. Sans compter que l'on peut lire comme dans un livre ouvert sur le visage de cette charmante amazone. Il faut travailler ton jeu d'actrice, si tu veux avoir une chance de t'en sortir dans ce monde." ajouta-t-elle à l'adresse de l'amazone. "Bref, il s'avère que la chambre est vide. Pas de trace de Nolan. Tu es sûre de l'avoir tué ?"

Elle posa des yeux pleins de curiosité sur Eulalie. Quant à Balthazar, il pivota vers elle dans un mouvement raide, et plongea un regard presque impitoyable sur elle. Si elle l'avait fait venir dans l'unique but qu'il puisse contempler le lit dans lequel ils avaient eu leurs ébats, il promettait de l'étrangler de ses propres mains. Même s'il mourrait avant d'y parvenir. En cet instant, il se sentait suffisamment enragé pour accomplir cette tâche impossible.
Puis, il réalisa qu'elle semblait bien trop éprouvée pour avoir joué la comédie. Comme l'avait soulignée la Holmes, la petite peste n'était pas une grande actrice.

"A moins que vous vous soyez emparée du corps afin de la faire chanter." déclara-t-il à l'adresse de la Holmes, mais sans cesser de fixer Eulalie pour autant.

Elle était suffisamment machiavélique pour accomplir un tel acte. Après tout, n'avait-elle pas enfermé Holmes et lui-même dans une maison abandonnée afin de "s'amuser" ?

Elle esquissa un sourire flatté, qu'elle perdit très vite en soupirant :

"J'aurais pu. Pour tout avouer, c'était mon but en venant ici. Mais je n'ai rien trouvé."

Elle afficha une moue déçue. Le regard de Balthazar sur Eulalie se fit d'autant plus fulminant, car il s'interrogeait : mentait-elle ? Ou était-ce la petite peste qui mentait ? Qui le manipulait, en fin de compte ?
acidbrain
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