« Pour réaliser une chose extraordinaire, commencez par la rêver. Ensuite, réveillez-vous calmement et allez jusqu'au bout de votre rêve sans jamais vous laisser décourager. » (Walt Disney)
Strangers can become Best Friends, just as easy as best friends can become strangers.
Depuis quelques semaines, Wilson avait réussi à instaurer une sorte de routine bien huilée à son quotidien en dehors de son travail au laboratoire. Si il avait passé plusieurs week-end enfermé dans son appartement à éviter sa voisine avec soin, pour qu'elle ne pose aucune question indiscrète concernant sa vie personnelle - qui se résumait au néant, ce dont il préférait ne pas parler, il s'était forcé à sortir à nouveau, ne serait-ce que pour faire quelques courses, voir d'autres personnes que ses habituels collègues et ne pas devenir un ermite.
Après l'annonce de la disparition d'Evelyn et de celle d'Iris, qui l'avait chamboulé et détruit plus qu'il n'aurait pu l'imaginer, et qui s'était fort heureusement révélée être un... "malentendu", d'une certaine façon, il avait éprouvé des difficultés à ne serait-ce que parler à d'autres individus. L'ancien robot était partagé entre l'envie de se construire une vie dans ce Storybrooke qui n'était pas le sien et sa crainte maladive de regretter cette chance d'existence qui lui était offerte. Les contradictions qui l'animaient étaient souvent insupportables et pesantes, presque destructrices, et prendre ses distances avec la famille Nichols avait été la seule solution viable qu'il avait trouvé. Même si cette décision le blessait, il parvenait à se convaincre que c'était la meilleure des options qui se présentait à lui. Il ne se faisait plus d'amis en dehors non plus, se contentant d'actes et de conversations polies sans chercher à entretenir de relations quelconques. Il se contentait de connaissances, d'habitudes, de cette fameuse "routine". Il n'avait ainsi pas réellement d'attaches. Rien qu'il ne redoutait de perdre ou de voir s'effondrer en un claquement de doigts.
"Bonjour, Josh." lança-t-il avec amabilité à l'homme assis contre le mur du centre commercial, à côté de l'entrée principal menant au supermarché.
Parmi ces genres de traditions de la vie courante, Wilson se rendait tous les samedis matins à ce magasin pour y faire ses achats, à l'heure même de l'ouverture. Il y avait moins de risques qu'il croise des visages connus en agissant si précocement et il y était plus tranquille avant que l'agitation du week-end ne vienne remplir les rayons. Et, à chaque fois qu'il s'y rendait, il y avait cet homme qui était là, lui aussi, constamment présent à la même place, aux mêmes horaires, dans les mêmes habits, avec la même mine fatiguée.
"Vous allez bien aujourd'hui ?"
Une discussion courtoise hebdomadaire se lança automatiquement et, sans qu'il n'en soit surpris, Wilson avait toujours le droit aux mêmes réponses. Josh prétendait aller pour le mieux, il lui racontait les rencontres qu'il avait fait les jours précédents, il lui parlait de ces gens qui avaient laissé tomber quelques pièces dans son chapeau et évoquait brièvement ceux qui avaient dérangé son sommeil dans le parking couvert en faisant preuve de peu d'amabilité. Le coeur de Wilson se serrait quand il s'agissait des mauvais traitements que certains habitants pouvaient infliger à cet homme sans domicile. Il ne comprenait pas ce qui pouvait attiser tant de haine injustifiée, ou d'amusement déplacé, alors que Josh n'avait rien pour lui et qu'il ne dérangeait pourtant personne, ne réclamant jamais rien à qui que ce soit et étant juste là, à sa place, comme si elle lui était réservée.
A de nombreuses reprises, Wilson lui avait ramené de quoi manger, et avec l'hiver qui approchait en ce mois de novembre, il lui avait même ramené des couvertures supplémentaires et de quoi se vêtir plus chaudement. Pourtant Josh refusait tout autre aide trop poussée, ne voulant pas se déplacer si le robot l'invitait à prendre un café chez lui ou à aller trouver une place dans un centre pour l'accueillir. Et cet homme était si aimable qu'il ne voulait pas s'imposer dans son existence qui, tout comme la sienne, semblait être faite d'habitudes et de rituels qu'il ne souhaitait pas changer.
Malgré tout, ce jour-là, alors qu'il repartait avec ses sacs remplis en direction de chez lui, Wilson ne pouvait s'empêcher de s'en vouloir de laisser un homme dans la rue sans rien faire de plus. Il préférait généralement rester discret, à l'écart, ne pas se mêler des affaires des autres qui ne le regardait pas. Mais ne serait-ce pas considéré comme de la non-assistance en personne en danger ? Et pouvait-il vraiment dormir sereinement en se remémorant Josh et en se demandant si il allait survivre aux mois qui arrivaient ? Les lèvres pincées, il laissa ses jambes le guider alors qu'elles décidaient de ne finalement pas prendre le chemin de chez lui. Il voulait simplement l'aider. Il n'était fait que de bonnes intentions. Et à défaut de trouver une quiétude dans sa propre vie, ou de s'autoriser le moindre bonheur, il pouvait toujours essayer de rendre le sourire à un autre... Non ?
"Bonjour." articula-t-il timidement face à la secrétaire de l'accueil devant lequel il se trouvait à présent, se raclant timidement la gorge tandis qu'il tenait toujours ses sacs en plastique dans ses mains. "Hum... J'aimerai prendre rendez-vous, s'il vous plaît."
Il ne s'était jamais rendu dans un tel lieu, que ce soit dans cette vie ou dans une autre. Il ne savait pas comment il devait procéder, ce n'était pas un sujet sur lequel il s'était renseigné. Wilson faisait toujours preuve d'organisation et planifiait ses journées d'une façon que certains considéreraient "maniaque", mais cette fois il avait agit sans trop... y réfléchir. Ce qui le perturbait, à vrai dire.
"Très bien. Il va me falloir votre nom, votre prénom, la raison de votre venue et je vais tenter de vous trouver un créneau d'ici... début de l'année prochaine ?"
Les yeux du robot s'écarquillèrent de surprise. La mine fatiguée de la secrétaire ne révélait en rien qu'elle était en train de lui faire une blague et cela le sidéra davantage. Les délais étaient si longs ? Vraiment ?
"C'est que... ce n'est pas pour moi. Et c'est plutôt urgent. Je ne peux pas voir quelqu'un aujourd'hui ?"
Il était incertain en posant cette question, désirant se faire le plus petit possible. Il n'aimait pas déranger, il avait même en horreur l'idée que sa présence puisse être contraignante, embêtante, énervante. Nerveusement, il se balançait d'un pied sur l'autre, ses deux sacs dans une main pour passer celle qui restait libre dans sa nuque. Il n'aurait jamais dû se présenter aussi abruptement. Il aurait dû passer un coup de fil, plutôt, n'est-ce pas ? Ou au moins ne pas se montrer trop exigeant. Certes il était encore tôt et peu de gens se presser à l'accueil, mais ça ne voulait pas dire qu'ils n'avaient pas déjà trop de travail, ici.
"Vous savez combien de fois j'entends ce discours par semaine ?" soupira la secrétaire, aussi lassée que navrée, en relevant ses yeux surmontés de lunettes dans sa direction. "Ce n'est pas contre vous, Monsieur, mais ce n'est pas à vous de juger de l'urgence des dossiers."
"Je sais, mais..."
"Le délai d'attente ne dépend ni de moi, ni des autres personnes qui travaillent ici et font leur possible pour venir en aide à ceux qui se trouvent dans le besoin dans cette ville. On pourrait penser qu'avec la magie, tout se règle plus vite, mais il faut croire que les sorciers et divins du coin ont d'autres priorités que de venir au secours de leur prochain !"
Elle était agacée et il pouvait le comprendre. Les lèvres pincées, Wilson se demanda si il était utile de préciser que lui avait bien fait partie de ces personnes que les divinités avaient accompagné - peut-être même un peu trop, quand il repensait aux stratagèmes dont avait usé Hera pour lui faire gagner en indépendance, le voyage en avion qu'il avait dû subir seul et qu'elle lui avait imposé lui restant en travers de la gorge. Et il se demanda si il aurait été pertinent de préciser à cette femme que, malgré les misères qui pouvaient arriver à certains, les dieux ne pouvaient parfois pas intervenir ou... ils avaient d'autres choses à gérer, comme tenter d'empêcher que ce monde finisse comme le sien. Le malaise était devenu palpable et la bouche du robot s'ouvrit sans qu'aucun mot ne parvienne à en sortir. Il en avait vu, des horreurs. Des gens perdus dans les rues, en pleine souffrance, des blessés de guerre, même, et il ne voulait pas que ça se reproduise ici. Il ne voulait pas revivre ça.
"Je suis... désolé." marmonna-t-il sans savoir où se mettre, se demandant à présent si venir ici était vraiment une bonne idée. "Je voulais juste..."
"Aider, je sais. C'est ce qu'on essaye tous de faire ici." le coupa la femme d'un ton compatissant et compréhensif malgré tout, en secouant légèrement sa tête. "Oh !"
Elle s'était légèrement redressé sur sa chaise roulante, offrant un sourire bien plus radieux à une personne qui devait se trouver dans son dos, puisqu'il ne la voyait pas.
"Monsieur Skyrunner, vous tombez très bien ! Est-ce que vous auriez un peu de temps libre aujourd'hui à accorder à Monsieur... Quel est votre nom, déjà ?"
Wilson était partagé. Entre l'étonnement que la secrétaire cherche malgré tout à lui apporter du soutien, en faisant une telle demande, et la panique naissante provoquée par l'entente de ce nom. Skyrunner... Il l'avait déjà entendu. On lui en avait déjà parlé. Et il ne s'était jamais retrouvé face à lui, pour des raisons qui lui étaient propres. En dehors d'Evelyn, il avait évité de fréquenter tout ceux qui avaient pu connaître... l'Autre Lui. C'était moins gênant, et moins compliqué aussi, de ne pas mélanger ces deux existences. Mais maintenant...
"Wallander. Wilson Wallander." lâcha-t-il dans un souffle, la gorge serrée et les joues rougies par l'embarras qui le submergeait, incapable de se retourner pour se présenter convenablement.
C'était peut-être le destin. Ou un hasard comme un autre. Il ne pouvait rester vigilant constamment, à esquiver les échos du passé de celui qu'il "remplaçait", à les fuir autant que possible pour ne faire de mal à personne. Parfois, il fallait faire face. C'était une leçon qu'il avait apprit malgré lui, et il ne s'agissait après tout que d'une épreuve à surmonter qu'il aurait dû affronter bien plus tôt.
(c) DΛNDELION
Jamie Skyrunner
« J'ai pas trouvé où on peut demander un rang personnalisé... ! »
| Avatar : Garrett Hedlund
✮
- Bon les gars ... Vous arrêtez maintenant avec vos histoires de mariage avec Ava ! Vous allez lui faire peur ...
- Okay okay Jayjay ! *se tourne vers Axel* Lançons l'opération les ninjas de l'amour !
- Maiiiis moi je veux être votre témoin !
✮
- Et là ... l'autre kassos ... qui veut me caser avec ma cliente ! Non mais c'est comme cette manie de prôner l'amour à tout va !
- Hahah toi aussi tu as eu affaire aux ninjas de l'amour ?
| Conte : La Planète au Trésor | Dans le monde des contes, je suis : : Jim Hawkins
It can happen so fast, or a little bit late. Timing is everything
La journée avait commencé sur les chapeaux de roue. Le dossier de Cody avait été accepté par le juge Rhodes, la famille de Roy avait débarqué sans prévenir pour une visite, Bethany avait raté son contrôle hebdomadaire à cause d’une gueule de bois qui l’avait poussé à dormir jusqu’à midi, dont Jamie l’avait tirer en l’appelant, le dossier Morgana était toujours en cours, et trois nouveaux dossiers devaient être enregistrer avant midi. Autant dire que Jamie avait eue très rapidement besoin d’un café, et d’un café bien noir. C’était tout de même fou, comme certaines journées pouvaient s’emballer à peine commencer, alors que d’autres traînaient en longueurs interminables ! Après un rapide briefing avec l’une de ses collègues sur un des nouveaux dossiers en salle de repos, Jamie en profita pour attraper l’un des croissants qu’avait apporté l’une des secrétaires, avant de filer dans son bureau, quelque chose lui murmurant qu’aujourd’hui, il n’aurait pas forcément de pause pour sortir chercher un sandwich.
Il allait repartir dans son bureau, le nez à moitié plongé dans son nouveau dossier quand il entendit la voix de leur secrétaire commune l’interpeller dans le couloir. Il fit aussitôt machine arrière, laissant sa tête dépasser par le chambranle. Lilah ne les dérangeait jamais sans avoir une bonne raison, et elle connaissait la patience quasi infinie de Jamie lorsqu’il était au travail. Raison pour laquelle il ne fut pas étonné de sa demander. Beaucoup plus cependant en entendant le nom de la personne qui demandait son aide.
-Wilson ? répéta-t-il, extrêmement surpris, en s’approchant.
La dernière fois qu’il avait vu Wilson… Cela remontait à loin. Qu’est-ce qui les avait séparer déjà ? Jamie n’en savait même plus rien. Le temps, probablement, la dépression pour lui. Il fallait avouer que pendant plus de deux ans, il n’avait pas exactement été présent pour ses proches. Pour être totalement honnête, il les avait même totalement abandonné. Il ne pouvait blâmer personne à sa place pour ça. Il avait abandonné, tout et tout le monde, et il avait même manqué d’en finir totalement. Et même après ça, même quand il s’était obligé à remonter la pente, il n’avait pas prit le soin de renouer le contact avec eux. Avec lui, avec Evelyn, avec Iris, ou Melody. Il avait déserté. Et n’avait jamais tenté de reprendre sa place.
Une légère angoisse dans le ventre, il s’approcha, contournant l’homme qui disait être Wilson… Et qui ne lui ressemblait absolument pas. Malgré lui, Jamie fronça les sourcils, réellement surpris. Qu était cet homme ? Ce n’était pas Wilson. Wilson était… Souriant, bouclés, toujours l’air perdu. Pas l’homme qui lui faisait face. Bon, certes, il y avait les boucles, ça il ne niait pas. Mais il y avait ce n’était pas son visage. Pas son corps. Pas… Son Wilson. Jamie ouvrit la bouche, avant de se reprendre.
-Pardon, oui, bien sûr, vous… Voulez bien me suivre dans mon bureau ? proposa-t-il, après une hésitation, lui faisait signe de le suivre malgré l’incompréhension.
Rapidement, il ouvrit le bras, comme pour lui dire de le devancer mais Wilson ne bougea pas, alors Jamie avança, le guidant rapidement vers son bureau, dont il ferma la porte, avant de déposer ses dossiers et son croissant, et de s’asseoir sur le rebord du meuble.
-Assieds-toi, je t’en prie, fit-il, en lui désignant le fauteuil, passant immédiatement au tutoiement sans même y penser.
Il eut l’air d’hésiter, avant de finalement le faire, déposer ses sachets près du fauteuil. Le silence retomba assez rapidement, et Jamie finit par secouer la tête.
-C’est… Bien toi, Wilson ? La dernière fois que je t’ai vu, tu étais… plus petit, conclut-il, un peu maladroitement, dans une tentative d’humour.
Cela ne fit pas rire son vis-à-vis, et Jamie croisa les bras sur sa poitrine, légèrement mal à l’aise.
-Excuse moi, euh… Tu veux m’expliquer ? demanda-t-il, légèrement moins jovial. Ou m’expliquer pourquoi tu es venu ici ? Tu me cherchais ou… T’as vraiment un problème ? Iris va bien ?
La honte lui rougit légèrement le visage, en prononçant son prénom. C’était comme si son passé le rattrapait et lui mettait une série de claque en plein visage. Pourquoi n’avait-il jamais tenté de les recontacter ? Même maintenant, même alors qu’il était enfin plus stable ?
-Je… suis désolé d’avoir disparut de vos vies, je sais même pas…. Je sais même pas exactement quand ça s’est fait. Je.. Je sais que ça excuse rien, mais parti sacrément en vrille y a un an. Et même avant, j’étais pas au mieux. Comme dit, ça excuse rien mais… Je suis désolé.
L’émotion lui serra légèrement la gorge en songeant à tout ce qu’ils avaient vécus, ensemble. Cela remontait à si loin, et pourtant, il avait l’impression que c’était si proche. Comment avait-il pu se perdre de vue après avoir traverser tout ça… Malgré lui, Jamie croisa un peu plus fort ses bras devant lui. Il avait le coeur qui résonnait dans ses oreilles.
-Pourquoi tu… Ressembles pas au Wilson que j’ai connu ? Les Dieux ont de nouveau merdé ?
Si la haine de Jamie envers les Dieux s’était apaisé avec le temps, il les considérait toujours comme des êtres capricieux et trop puissants pour le bien être des autres. Wilson et lui n’avaient été que des victimes collatérales de leur manigance, et vu le changement drastique qui semblait s’être opéré… Il y avait fort à parier que les dieux n’y étaient pas étranger. Pour ne pas dire responsable. Il voulut poser d’autres questions, mais le visage étrangement distant de Wilson l’en empêcha. Que lui était-il donc arriver ? Et qui était-il désormais ? Etrangement, Jamie était tout autant angoissé par le fait d’obtenir des réponses et de rester dans l’ignorance. Mais il avait besoin de savoir. Besoin de savoir qui était désormais Wilson. Ce par quoi il était passé. Pourquoi il était venu demander son aide. Et par-dessus tout, savoir si il pourrait l’aider réellement.
Wilson Wallander
« J'ai pas trouvé où on peut demander un rang personnalisé... ! »
| Avatar : George Blagden
| Conte : Wall-E | Dans le monde des contes, je suis : : Wall-E
Strangers can become Best Friends, just as easy as best friends can become strangers.
Le malaise, la gêne, la honte, telles étaient les émotions qui planaient au-dessus de la tête de l'ancien robot, dont le regard ne parvenait à accrocher celui de l'homme qui lui faisait face. Son ignorance concernant tout ce qui s'était produit, alors qu'il avait apprit ici et là par quelques divinités qui lui avaient fait un compte-rendu détaillé de l'existence de l'Autre, le lien qui les unissait, ne faisait qu'accroître l'étrangeté de la situation. Ce n'était pas seulement bizarre, à dire vrai, c'était presque cruel. Ce face à face inattendu et qu'il n'avait pas une seule fois penser à préparer était une nouvelle épreuve qu'il devait surmonter.
La gorge serrée, Wilson s'était contenté d'hochements de tête aux premières interrogations de son interlocuteur, ses doigts crispés sur ses sacs de course tandis qu'il tentait de faire abstraction de la surprise de l'assistant social. Evidemment qu'il comprenait que quelque chose n'était pas "normal", étant donné que s'ils partageaient le même nom, lui et l'Autre n'avaient ni les mêmes traits, ni la même posture, ni le même vécu. Ni le même lien. Il inspira longuement une fois entré dans le bureau alors qu'il avait eu du mal à se mettre en mouvement, ne parvenant pas à se résoudre immédiatement à lâcher ses sachets en plastique au moment où il s'installa sur sa chaise, raide et tendu au possible. Le tutoiement naturel avait serré sa poitrine d'une façon désagréable, et l'atmosphère toute entière lui semblait pesante. Il avait une bonne raison de se trouver ici, mais c'était comme si son cerveau s'était éteint, incapable de fonctionner correctement, pris de court par le scénario dans lequel il se retrouvait embarqué contre son gré.
L'évocation d'Iris ne fit que couper davantage son souffle, et la suite lui fit baisser la tête. Wilson était penaud, embarrassé, et il se mordait les lèvres dans un tic nerveux. Il percevait comme de la culpabilité émanant de l'homme, lui qui pourtant était certainement celui d'eux deux qui avait le moins à se reprocher. C'était donc pour ça que leurs chemins ne s'étaient pas croisés plus tôt ? A cause... de la vie, finalement. De ses aléas, des soucis, des problèmes. L'Autre n'avait pas eu un vécu aisé, non plus, n'est-ce pas ? Et il ne connaissait rien de celui-là, il n'avait fait que l'entendre. Ils ne partageaient pas les mêmes souvenirs. Les mêmes douleurs. Il n'était rien, pour ce Skyrunner. Et il ne le savait pas encore.
Devait-il véritablement être celui qui accueillait ses excuses si sincères, et celui qui devrait expliquer tout ce qui avait pu se passer ? Jamais il n'avait tenu ce rôle auparavant. Généralement, Apollon s'en chargeait, ou les choses se savaient déjà. Sa jambe tressautait, tapant le sol à intervalle régulier avec discrétion, faisant trembler tout son être. Et la dernière question lancée ne fit qu'agir comme un coup de poignard en plein coeur.
"Non..." répondit-il timidement, avant de secouer vivement sa tête. "Et oui... C'est compliqué."
Sa voix était enrouée sans qu'il ne sache véritablement pourquoi et il se racla la gorge, détournant son regard du meuble où était adossé Jamie, ses doigts venant frotter son front alors qu'il sentait cette chaleur insupportable traverser chacun de ses membres.
"Ce n'est pas de leur faute. Pas vraiment." poursuivit-il en marmonnant, à peine sûr d'être compréhensible tellement il peinait à articuler la moindre phrase correcte. "Je ne suis pas..."
Il inspira sans que ses poumons ne se remplissent pour autant, tout l'air restant bloqué dans sa gorge, formant une boule qui le fit esquisser une moue dérangée. Il se tortillait sur sa chaise, incapable de rester figé à présent, grimaçant lorsque les pieds métalliques frottèrent le sol dans un bruit grinçant.
"Pardon, je..." débuta-t-il, demeurant la tête baissée afin que ses cheveux cachent un peu plus son air égaré. "Je ne suis pas venu pour ça, je voulais juste... aider Josh..."
Il desserra ses mains, posant ses paumes contre ses genoux, ses articulations devenant douloureuses tant il était crispé. Et de nouveau, il inspira. Même cet acte naturel était difficile à gérer et il commença à se redresser, indécis.
"Je vais partir, ce n'est pas à moi de vou... de te raconter tout ça..." hésita le jeune homme, la bouche pincée, avant de se rasseoir dans un mouvement encore plus gauche et maladroit que les précédents. "Même si..."
Il fronça les sourcils, se demandant un instant si il était vraiment si mal placé que ça, pour être le porteur de l'annonce. Après tout, qui mieux que lui pourrait l'expliquer, alors qu'il vivait la situation inverse semblable ? Les habitants de cette ville avait perdu un être, et lui avait perdu un monde. Sa main passa cette fois dans ses cheveux, ses doigts s'y emmêlant distraitement avant qu'il ne la retire et ne se décide à poser son regard sur Jamie.
"C'est moi, qui suis désolé." murmura-t-il d'un ton troublé, ses battements de coeur s'accélérant jusqu'à le rendre fébrile. "J'aurai préféré que ça se passe autrement pour nous deux, afin de nous éviter cette entrevue qui n'est pas... idéale pour en parler, mais ça n'aurait pas rendu les choses plus simples alors... Je ne suis pas le Wilson que vous avez connu. Je viens d'un autre monde que le votre, semblable sur bien des points, en partie la présence des divinités même si les choses se sont passées différemment chez moi. Et cet endroit d'où je viens a été... éradiqué, je crois que c'est le terme approprié."
Il préférait reprendre cette façon plus respectueuse de s'adresser à celui qui était après tout un inconnu, trouvant qu'il était encore plus déplacé d'être familier avec lui avec ce qu'il lui balançait en pleine face. Il ne savait déjà pas comment le présenter, encore moins comment l'expliquer, il savait qu'il n'y avait aucun terme qui serait suffisant ni aucune tournure qui pourrait faciliter les choses. Le pauvre Skyrunner avait déjà du passer des mois à se torturer, s'en voulant de son absence, et lui culpabilisait à l'idée que l'annonce puisse lui faire avoir encore plus de remords. Il n'y pouvait rien. Ils n'y pouvaient rien, même.
"Je suis arrivé dans cette ville sans le vouloir et... Il s'est passé énormément de choses regrettables..." reprit-il, ses paupières s'abaissant de gêne. "Votre Wilson est... Il est décédé. Je suis vraiment désolé."
Ses yeux le piquaient tant il retenait ses émotions. Les mots peinaient à lui échapper et sa voix manquait de se briser à chaque syllabe. Il avait l'impression de parler d'un être cher, alors qu'il n'avait jamais rencontré cet homme disparu, évincé de tout plan d'existence à cause de sa propre arrivée dans cet univers, mais avec lequel il partageait presque une âme, puisque l'un ne pouvait vivre si l'autre était présent. C'était abominable. C'était ignoble. Mais c'était ainsi, et Wilson avait eu beaucoup de mal à l'accepter, il faisait simplement avec.
"Je suis navré d'être celui qui vous l'apprend." ajouta-t-il dans un murmure à peine audible, cassé, après un long moment de silence respectueux. "Il n'y a pas eu... d'annonce ou de cérémonie à proprement parlé, tout a été si vite et les proches... je ne sais pas, j'imagine que c'est arrivé trop soudainement, trop inexplicablement et ma présence n'a rien facilité..."
Il se mordait l'intérieur des joues pour retenir sa peine, déglutissant avec difficulté avant de se relever d'un mouvement lent et peu assuré.
"Je peux partir, si vous le souhaitez." proposa-t-il alors, plein d'appréhension et presque effacé.
Il redoutait plus que tout de déranger. Et étant donné les circonstances, il n'était pas certain que sa compagnie soit désirée. Il craignait qu'on le regarde de nouveau avec colère ou déception, mais sa peur d'être la source d'un quelconque désespoir s'était déjà réalisée, de toute façon. Cette journée était vraiment loin d'être aussi banale qu'à l'accoutumée.