« Pour réaliser une chose extraordinaire, commencez par la rêver. Ensuite, réveillez-vous calmement et allez jusqu'au bout de votre rêve sans jamais vous laisser décourager. » (Walt Disney)
It's quite a drop from the top. So how are you feeling down there ? It's a cold, cruel, harsh reality. Caught, stuck, here with your enemies !
Installé tranquillement à l’une des tables de la pâtisserie, Sirrus suivait attentivement les allers et venues des quelques serveuses qui travaillaient là ; elles n’étaient pas très nombreuses mais nul doute que Queenie les connaissait toutes de A à Z et avait une excellente raison de les employer ici. C’était bien la seule chose qui faisait que le Chafouin se permettait de flirter ouvertement mais n’était jamais allé au-delà de ses propres principes. Déjà parce qu’il ne passait jamais deux nuits avec la même femme et, ensuite, parce qu’il préférait ne pas se coltiner la colère de la pâtissière. Elle était rancunière et si d’ordinaire ça l’amusait, il n’avait actuellement pas le temps de gérer ce genre de crises. Il n’était pas venu ici pour titiller la patience de la jolie blonde, mais plutôt pour attendre quelqu’un avec qui il n’avait pas conversé depuis très longtemps. Trop, peut-être ?
Sa main pianota sur la table impeccable, son attitude décontractée contrastant avec l’acidité de son regard bleu qui furetait le moindre détail pour l’enregistrer dans son esprit. Savait-on jamais, tout était bon à conserver pour être utilisé plus tard… Ses oreilles vagabondaient dans les conversations alentours, passant du racontage de life passionné à la dernière aventure d’un yorkshire au parc de la ville, des péripéties d’une nuit sulfureuse à la débauche malheureuse d’emplois d’un type qui avait l’air de sortir d’une campagne profonde. Insignifiantes problématiques qui trouvaient des solution bien plus vite qu’il ne faut de temps pour le dire.
« Hmm… Excusez-moi ? » L’interpella une voix feminine. « C’était bien un café noir avec des roulés à la canelle, n’est-ce pas ? »
Sirrus tourna la tête pour tomber sur le visage souriant d’une blonde qui n’avait pas grand chose à voir avec la gérante de l’endroit – à part la couleur des cheveux, évidemment. Un coup d’œil à son badge lui rappela son prénom et il écarta la main pour l’inviter à poser son plateau sur la table. Un sourire carnassier se dessina sur ses traits.
Saoirse releva vivement la tête, ramenant le plateau devant elle en réfléchissant à toute allure. Elle se mordilla la lèvre inférieur dans un geste adorable mais qui n’allait pas vraiment la sortir de ce léger pétrin où elle venait de se fourrer… Respecter les commandes était très important et, outre le fait qu’elle risquait de s’endormir à tout bout de champ durant ses horaires de travail, elle n’aimait pas passer pour une idiote qui n’avait pas compris les demandes ! Fixant les roulés et la tasse de café, ses yeux vagabondèrent sur la main posée tranquillement à plat, le corps du Chafouin, son visage attreyant, puis la chaise où il était assis et…
Une autre chaise. De l’autre côté de la table. Vide.
« Vous attendez quelqu’un ! »
Sirrus ricana, amusé. Puis, face à son silence, il ajouta :
« Ce n’était visiblement pas une question. »
« Oh pardon ! Je veux dire… Vous aviez commandé pour deux, c’est ça ? » Il hocha la tête, la laissant continuer sa réflexion. « Doooonc… Il manque une tasse et une pâtisserie ! »
Elle leva l’index, fière d’elle et le chat hocha la tête. Saoirse sautilla sur place avant de déguerpir en direction des cuisines… Pour revenir à peine quelques secondes plus tard, l’air soucieuse. Sirrus ne manqua pas de s’en amuser intérieurement, hésitant très sincèrement à la tourmenter encore un peu pour le simple plaisir de la voir mariner et patauger. Saoirse ouvrit la bouche puis la referma, se plaquant le doigt sur les lèvres comme pour tenter de se rappeler seule de la commande… Elle inspira, sembla se souvenir, puis fronça encore les sourcils.
Sirrus fit tourner lentement la cuillère dans le mug de café en la regardant, un sourire aux lèvres et une nonchalance féline caractéristique. Ah, quelle fourberie que la mémoire ! Si seulement elle pouvait ramener une seconde tasse de café, ils auraient droit au plus beau scandale de la journée et celle-ci manquait cruellement d’amusement… Mais, malheureusement – ou pas – Saoirse sembla soudain avoir le fameux éclair de génie pour allumer la petite ampoule au-dessus de son crâne.
« Du thé ! C’était du thé ! Et une tarte… A la fraise ? »
Elle grimaça en attendant une validation… Qui ne vint pas. Chafouin se contenta de la regarder, amusé, et la jeune femme fini par s’éloigner rapidement pour se procurer les fameux mets sucrés. Cette petite altercation lui ayant permis de gagner quelques minutes, Sirrus goûta au café et tourna la tête en entendant tinter la petite porte d’accès à la pâtisserie. Bingo, voilà son invité ! Son sourire s’élargit malgré l’air un peu préoccupé de Jefferson et quand ce dernier le repéra, il attendit qu’il le rejoigne.
Ils auraient très bien pu se retrouver au salon de thé du Chapelier mais, étrangement, Sirrus avait choisi le Fantasia à la place. C’était un lieu un peu plus amusant et loin de l’univers familier de son ami… Puis l’entendre critiquer du thé valait son pesant d’or, surtout quand la gérante était très à cheval sur les saveurs et les pâtisseries servies ici.
« Ponctuel. » Fit remarquer Sirrus, après lui avoir serré la main. « Café ? »
Il désigna son mug mais la grimace de son vis-à-vis fut suffisante à maintenir son amusement. Saoirse ne tarda pas à revenir déposer une tasse de thé fumante entre eux – non sans avoir salué poliment Jefferson – puis elle fila prestement après avoir ajouté une cuillère sur la petite tartelette à la fraise. Sirrus l’observa s’éloigner sans s’en cacher, elle était plutôt mignonne il fallait avouer, mais il reporta rapidement son attention sur le chapelier.
Passé une nouvelle minute de silence, il finit par prendre la parole :
« Iracebeth m’a dit que tu l'avais vu. Tu as des choses à me raconter, Monsieur le Chapelier ? »
Ils ne s’étaient pas vu depuis vraiment trop longtemps. Dommage, la folie était pourtant contagieuse et le Chapelier était son meilleur élément dans le domaine.
black pumpkin
Jefferson T. Hatters
« J'ai pas trouvé où on peut demander un rang personnalisé... ! »
It's quite a drop from the top. So how are you feeling down there ? It's a cold, cruel, harsh reality. Caught, stuck, here with your enemies !
Un rictus apparu sur le visage de Sirrus tandis qu’il étudiait son ami. Guindé, précieux et précis lorsqu’il s’agissait de juger la qualité d’un thé, il ne se serait pas permis de l’interrompre dans un tel travail. S’il était insensible aux poisons et autres substances, le chat restait moins professionnel que le chapelier pour apprécier la valeur de ces breuvages jusque dans leurs détails. Chacun son domaine de prédilection et, à ce qu’il sache, il ne résidait pas continuellement à la table des buveurs de thé à Wonderland.
« Il ne faudrait pas qu’elle en vienne à te voler ta clientèle pour la qualité de son thé. » S’amusa-t-il, particulièrement serein. « Chacun son domaine de prédilection… Personnellement, je damnerai le monde pour son fraisier. »
Mais les roulés à la cannelle avaient eu sa préférence cette fois-ci. Volage personnage qui donnait et retirait son adoration au gré de ses envies et de ses besoins. En attrapant d’ailleurs un entre ses doigts, il l’écrasa légèrement pour apprécier le ronronnement de la pâte et en dévora une bouchée sans autre forme de procès. Puisque Jefferson avait l’air décidé à discuter, autant lui laisser la primeur du questionnaire tandis qu’il se remplissait le ventre de ces savoureuses pâtisseries amplement méritées.
S’il maintint une attitude désinvolte lors des premières accusations, il redressa un sourcil et cessa de manger lorsque Jefferson l’accusa tout bonnement de… Mensonge ? Diable non ! Filouterie, manigances et autres manipulations étaient la monnaie courante du chafouin mais jamais, ô grand jamais, il n’émettait de mensonges ! S’il y avait bien un principe pour lequel il était connu et respecté, c’était celui-là. Posant tout son regard sur son interlocuteur, il termina le gâteau et fut soudain des plus intéressé de la suite d’une telle diatribe. Que le Chapelier ose le traiter de menteur n’était pas anodin et s’ils n’étaient pas amis de longue date, voilà longtemps que Sirrus aurait rappelé quelques règles de respect et de bienséance à son adversaire.
Il porta une main vers son torse, feignant la blessure.
« Douter de la véracité de mes propos ? Je ne dis pourtant que l’humble vérité à qui est suffisamment sage pour l’écouter. Wine voulait des réponses, elle les a eu. »
Commenta-t-il, balayant d’un geste toute autres accusations de médisances et modifications de la réalité. S’il jouait avec, Sirrus ne pouvait indéfiniment la modeler. Wine le connaissait très bien, peut-être même plus que Jefferson, et il lui avait dit ce qu’il savait. Ou plutôt, ce qu’elle voulait savoir. La reine rouge, bien que sans couronne, gardait une dignité royale qui imposait des réponses à ses questions dans les plus brefs délais. Elle l’avait convoqué plus rapidement que ce qu’il aurait cru et il lui avait servi un bien agréable entretien sous couvert de secret. Chafouin adorait les secrets, les voir fourmiller entre eux sans jamais se croiser comme de petits rongeurs aveugles… Parfois certains se rejoignaient, d’autres fois ils avançaient inlassablement sans jamais rencontrer quelqu’un pour les ouvrir et en découvrir l’incroyable contenu.
Iracebeth était bien plus maligne que Jefferson. Mais ils n’avaient aucunement la même façon de penser et c’était ce qui les rendait incroyablement intéressants l’un et l’autre. Dommage que cette chère Reine Blanche ne soit pas là pour les écouter elle aussi, elle aurait sûrement une très agréable manière de voir les choses et de comparer les deux êtres incendiaires. Quoique, Mirana était bien trop gentille et respectueuse pour se permettre de porter un jugement à voix haute ! Heureusement qu’on lisait sur son visage comme dans un livre ouvert, ça facilitait grandement le travail du chat de Chester.
« La reine et sa cour ignoraient qu’Alice était ta fille. »
Déclara-t-il, tenant à éclaircir cette autre accusation.
« Avant qu’elle ne vienne trouver Absolom et renverser le cour du temps à Wonderland, personne ne savait qui elle était ni d’où elle venait. Mais les lapins sont bavards sous certaines conditions et peuvent répondre aux questions quand on sait lesquelles poser. »
Il haussa les épaules comme si apprendre cela avait été d’une évidente banalité. La connaissance, c’était le pouvoir dans leur monde sans-dessus-dessous. Et Sirrus possédait énormément de connaissances… Il ne prétendait pas tout connaître mais il en savait suffisamment pour ne jamais être complètement pris au dépourvu. Avoir une longueur d’avance, quelques coups précédents, était le propre des joueurs. Aux échecs comme dans la vraie vie, il fallait connaître son adversaire et prévoir ses attaques pour mieux les parer et le surprendre.
En présence de Jeff, l’idée était de ne pas se faire avoir mais de ne pas le flouer non plus. Toute vérité avait son prix et le chapelier en avait sans doute payé une grande partie par le passé… Voir sa précieuse épouse se faire assassiner et songer à son enfant mort alors qu’il n’en est rien, quelle cruelle rançon. Si Sirrus avait un cœur, il en aurait sans doute versé une larme. L’histoire l’avait cependant rendu triste et il accorda au moins cela à son vieil ami.
Il fronça les sourcils aux paroles du concerné et attendit encore un peu dans le silence.
« Qu’est-ce que tu es venu me demander, exactement, Jefferson ? » Demanda-t-il, pesant ses mots avec toute la précision dont il avait l’habitude. « Es-tu ici parce que tu veux savoir quelque chose sur Alice ? »
Sa vie ? Son passée ? Son présent ou son futur ? Cheshire n’était ni devin ni charlatan. L’annonce du miroir il y a un an de cela avait causé suffisamment de troubles dans l’esprit du chapelier et des wonderlandiens pour qu’il n’ai même pas à le faire. Lui s’était contenté d’observer le brouillard qui les entourait avec calme et astuce.
« Tu as déjà vu Nivens, tu as eu toutes les informations qu’il était en mesure de te fournir. Iracebeth t’as donné sa propre version des évènements. Crois-tu que j’en possède une troisième que j’aurais sciemment omis de te raconter lorsque tu es venu me voir pour me demander si tout ceci était vrai ? »
Il poussa un léger soupir de dédain à cette constatation mais ne quitta pas Jefferson des yeux. En avisant du mot qu’il lui agita devant les yeux, Sirrus consentit à détourner le regard pour s’y concentrer. Réfléchissant quelques instants, il appuya sa main contre sa joue et s’appuya dessus.
« Et pourquoi ne pas vous mettre dans le même ? » Rétorqua le Chafouin, d’un air amusé. « Tout le monde ment à Wonderland, sauf le Chat. Tu connais très bien ce dicton… C’est pour ça que tu es là ? Parce que tu espères trouver quelque chose qui t’apportera des réponses ? Mais que faire de réponses si les questions ne sont pas là ou si elles n’ont de sens que si on possède la bonne demande ? Il y a de quoi devenir… fou. »
Et lui adorait la folie. Cruellement. Viscéralement.
« Tu as les chemins devant toi et aucun panneau indicateur pour savoir dans quelle direction aller. Explique-moi ce que tu as fais et ce que tu viens chercher, peut-être que nous trouverons finalement quelque chose pour étayer cette discussion au lieu d’attendre que les réponses tombent du ciel. »
Proposa-t-il, posément. Il prit une inspiration, décalla l’assiette de roulés à la cannelle ainsi que sa tasse de café pour avoir le champ libre entre lui et Jefferson. Une table pour les séparer, rien de plus.
« Nivens a sauvé Alice malgré les ordres de la Reine Rouge et Alice est revenue à Wonderland des années plus tard. Voilà le lien entre vous deux. Aujourd’hui, le miroir t’as montré son visage. Il se peut donc qu’elle soit en vie quelque part, comme nous tous. Est-ce que c’est cette Alice que tu veux retrouver, ou bien est-ce que tu cherches celle qui est revenue à Wonderland et qui est, légitimement, ta propre fille ? »
Sirrus retrouva le regard du Chapelier.
« Qui du passé ou du présent as-tu envie de comprendre ? »
black pumpkin
Jefferson T. Hatters
« J'ai pas trouvé où on peut demander un rang personnalisé... ! »