Athéna écouta son amie lui raconter ses raisons. Au fond, la déesse la comprenait parfaitement. Quand on avait besoin de revanche, surtout à ce point-là, les conséquences n’étaient pas la priorité. Regina avait été focalisée sur le bonheur de celle qui lui avait fait perdre le sien et seul cela avait compté. C’était normal. La brune ne la jugeait pas, bien au contraire, elle comprenait sans doute bien mieux que certains. La vengeance, le besoin de mettre un terme à quelque chose, elle connaissait bien, même si elle, ça avait été pour tuer Zeus.

- Comme quoi, à chaque chose malheur est bon. Sourit-elle. De toute façon, la plupart des gens se sont habitués à cette nouvelle vie et ils préfèrent ce monde pour beaucoup de choses. Continua-t-elle.

Après tout, certains vivaient mal leur condition dans le monde des contes. Ici, les gens étaient égaux. En tout cas sur le papier c’était le cas. Athéna n’allait pas dire qu’en pratique c’était pareil, parce que ça aurait été franchement hypocrite. Elle ne s’aveuglait pas assez pour faire une chose pareille. Un sourire s’étira sur les lèvres de la guerrière avant qu’elle ne ricane.

- Ne t’amuse pas trop avec ça quand même. La prévint-elle avec un sourire. Je risquerais de ne plus venir si tu en abusais. Ajouta-t-elle. Eh bien… C’est une sensation en fait. Et suivant qui le dit, j’entends une voix, un peu étouffée.

En général, elle savait qui l’appelait. Mais parfois ça n’était pas le cas, comme avec Alexis la première fois. Ceci dit, avec Regina, puisqu’elles se connaissaient bien et qu’elles étaient amies, la voix serait sans doute bien claire. Un jour elle le saurait sûrement, parce qu’elle espérait bien que Regina ne serait pas assez fière pour refuser de l’aide d’une déesse si le besoin s’en faisait sentir.

Puis vinrent les sujets moins sympathiques. Notamment la révélation qu’Athéna était la cause du dôme qui avait manqué de briser la relation entre Alexis et Regina. Illustration parfaite de ce qu’elle avait pensé sur la vengeance et ses conséquences, puisqu’à l’époque, elle ne pensait qu’à son but et pas du tout au reste. Les vies détruites, les relations brisées… Cela avait été le dernier souci de la déesse qui de toute façon ne pouvait pas du tout encadrer les gens de Storybrooke à l’époque. Enfin… C’était toujours plus ou moins le cas aujourd’hui, mais pas au point que cela avait été 4 ans plus tôt.

- On en a fait des choses stupides toi et moi… Conclut-elle tout simplement.

Mais elles avaient finalement bien fini toutes les deux. Et c’était ça qui comptait, tout comme le fait que Regina tâchait de toujours s’améliorer pour ses enfants. C’était franchement admirable ce qu’elle faisait. Athéna était assez impressionnée par sa volonté et par ce que ses enfants la poussaient à faire. Et bien évidemment le sujet dériva sur les enfants. La guerrière n’en avait jamais eu, n’en avait jamais désiré. Elle confia à son amie qu’elle n’était même pas certaine d’avoir la fibre maternelle de toute façon. Mais cela ne semblait pas être une réponse appropriée puisque Regina la contredit bien vite tout en lui servant un hydromel maison.

- C’est pas mal. Tu devrais le faire vieillir un peu, il n’en sera que meilleur. Conseilla-t-elle. Peut-être… Mais avec tous les ennuis divins qu’on peut se taper, je ne suis pas certaine qu’avoir un enfant serait une bonne chose, au-delà de toute considération sur la fibre maternelle. Tu as bien vu Hope et Hadès… Embarqués dans des ennuis impossibles alors qu’elle était enceinte. On a pu s’en sortir, mais je ne sais pas si j’accepterais d’être aussi vulnérable…

Avoir un enfant, c’était ouvrir totalement son cœur. Plus ou moins se mettre à nu. Et ça… La déesse n’était pas du tout certaine d’être capable de réaliser une telle chose un jour. Elle se cachait depuis 5 millions d’années. Même si elle était moins cachée derrière son masque, elle l’était toujours encore largement.

Athéna regarda son amie se resservir en alcool. À ce rythme, si elle ne faisait pas attention, Regina n’allait sans doute pas tarder à finir alcoolique. Ceci dit, la déesse avait comme l’impression que l’amour que son amie portait à son mari et à ses enfants jouerait le rôle d’interrupteur : devenir alcoolique, ça serait leur faire du mal et il était clair aux yeux de la guerrière que ce n’était pas ce que l’adjointe au maire voudrait voir se réaliser.

- Ah le carrosse… M’en parle pas, je suis bien contente d’avoir vu les voitures émergées quand je vivais encore totalement parmi les mortels. Soupira-t-elle. C’est comme la mode du corset… Comme j’ai été ravie de la voir disparaître ! Ce monde a traversé beaucoup de changement, cela ne semble pas être le cas du monde des contes. C’est étrange d’ailleurs, à croire que vous êtes tous figés dans une histoire et une époque là-bas… Fit-elle remarquer. Fils d’un voleur et d’une souveraine, il devrait faire un bon chevalier vu son lieu de naissance. Sourit-elle.

En tout cas, il y avait de quoi rêver à ce futur-là ! Puis les deux femmes discutèrent d’un tout autre sujet, bien plus sérieux. Et Athéna donna à Regina le droit de l’appel, n’importe quand, si elle avait un souci : la guerrière se déplacerait. Toutefois, la déesse n’avait pas pu s’empêcher d’ajouter que si son amie en abusait, à force elle risquait de ne plus répondre, ce qui serait préjudiciable le jour où on aurait vraiment besoin d’elle…

- C’est beau de rêver. Répondit-elle avec un sourire narquois.

C’était sans doute vraie de toute façon, elle en viendrait sans doute à répondre à n’importe quel appel de Regina et ne mettrait jamais son avertissement en route. Mais bon, ça pouvait toujours être utile de faire croire qu’elle ne viendrait pas si on la dérangeait trop pour rien non ? Et pour continuer sur les sujets les plus délicats, elles évoquèrent leur passé à toutes les deux. Une chose était certaine, elles n’étaient pas des anges, loin de là. Et Athéna aurait été bien en peine de savoir laquelle avait été la pire. En fait, elle n’avait même pas envie de savoir en fait.

- Moi j’aurais plutôt dit que c’était le fait d’être l’adjointe d’Hadès qui te portait préjudice. Plaisanta-t-elle. Aucune idée. Peut-être que ta magie joue un peu le rôle de filtre. Ou alors tu as simplement une bonne résistance, ça arrive. Personnellement, je ne peux pas être bourrée, divinité oblige. Ajouta-t-elle avec un sourire en coin.

Et il fut question de maternité. C’était bien quelque chose qu’Athéna ne s’était jamais posée. Pourtant ça venait lui trotter dans la tête. Ce qui était parfaitement stupide. Sans homme et avec les temps qui couraient… C’était se donner une faiblesse de façon très stupide et pour une stratège, c’était limite une hérésie.

- On va dire ça oui. Acquiesça-t-elle. Non. Fit-elle après un instant de réflexion. Je ne te détestais pas, je trouvais juste des actions particulièrement stupides. À l’époque, je n’étais attirée que par le pouvoir et te voir le laisser à d’autres alors que tu avais tout fait pour contrôler la ville et les habitants… Je trouvais ça stupide. J’attendais mieux de la Méchante Reine je crois. Avoua-t-elle. Puis nous avons changé et je suis parvenue à comprendre qui était la Méchante Reine au fond. Et c’est devenu une amie chère. Conclut-elle avec un clin d’œil. Comment as-tu pris l’apparition des divins dans ta ville ? Demanda-t-elle ensuite, curieuse.

Elle n’avait jamais posé la question à Regina jusque-là, mais puisqu’elles se faisaient des confidences, c’était le moment où jamais.

Athéna écouta attentivement son amie. Elles étaient d’accord sur plusieurs points. Et la déesse comprenait parfaitement que l’ancienne souveraine puisse ne plus supporter les carrosses si elle devait repartir vivre un jour dans la Forêt Enchantée. La déesse avait bien compris que certains habitants de Storybrooke n’avaient eu de cesse que de chercher un moyen de repartir au début. Mais finalement, tout le monde semblait s’être habitué à cette nouvelle vie.

- Je peux comprendre… Même si ça n’est pas pareil pour nous puisqu’on a « grandi » avec toutes ces nouveautés. Fit-elle avant de se taire quand son amie parla de sa mère. En un sens, je t’envie un peu tout de même. À sa manière, ta mère a pris soin de toi. Ce n’était pas forcément la meilleure façon de faire, mais elle t’aimait. Moi je ne sais pas qui est ma mère, je ne sais pas si elle m’a aimé. Quant à mon père, n’en parlons pas. Ajouta-t-elle en levant les yeux au ciel.

Japet la tuerait sans hésitation s’ils étaient un jour face à face. Athéna n’avait jamais eu de doute quant à l’absence d’amour ou d’affection paternelle. Mais elle se posait énormément de questions sur sa mère depuis qu’elle avait appris qu’elle en avait une. Se ressemblaient-elles ? Sa mère l’aimait-elle ? Serait-elle fière d’elle ? Tant de questions… Dont elle n’aurait jamais les réponses selon toutes probabilités. Alors même qu’Hypérion pourrait sans doute lui répondre ou au moins lui donner le nom de sa mère… D’ailleurs, avoir conscience de ce fait là, ça ne l’aidait pas à pardonner au Titan.

- Les femmes et la mode… On a toujours été prête à se faire du mal pour paraître dans nos meilleurs atouts. Commenta-t-elle en haussant les épaules. Même si j’ai détesté l’époque où on était obligé de mettre des robes, on peut pas cacher efficacement une arme sous sa robe…

Sauf lorsque l’on était très ingénieuse et qu’on avait les moyens. Mais bon, de façon générale, ça restait tout de même très compliquer à mettre en place. Et Athéna avait eu les deux, la créativité et les moyens financiers. Sauf qu’à l’époque, les femmes portant des armes n’étaient pas nombreuses… Encore moins aujourd’hui ! La conversation dériva ensuite sur leur réaction à l’alcool. Et si pour la brune, c’était tout à fait normal de toujours être sobre, essence divine oblige, c’était moins le cas pour Regina et la guerrière en vint à faire quelques hypothèses, notamment en se demandant si la magie ne pouvait pas aider de façon instinctive son amie, comme le fait qu’elle soit une déesse l’aidait elle.

- Faut savoir, je suis bête ou j’ai raison ? Ce qui sous-entendrait que je suis intelligente au contraire… La taquina-t-elle avec un sourire. Ouais, ça c’est une chance. Avant je ne dormais pas non plus. Ni ne mangeais d’ailleurs. Les besoins physiques, ça ne nous concernaient pas vraiment. Avoua-t-elle. Nous avons toujours vécu avec des mortels. Depuis des milliers d’années c’est ainsi et nous avons toujours pris soin de cacher nos existences depuis la fin de l’Antiquité. Les temps ont évolué et nous aussi, en un sens, en nous mêlant encore plus aux mortels. Storybrooke est un lieu très attractif, je ne pense pas que tu t’en rendes compte, mais pour nous, il est comme un phare dans la nuit : on a envie d’y venir. Peut-être parce que c’est le point qui relie le monde des contes et le monde réel d’ailleurs… Conclut-elle, songeuse avant de se faire plus alerte et de regarder son amie. Bien sûr, dis-moi.

Malgré tout, bien qu’elle soit curieuse, la déesse se demandait ce que l’ancienne souveraine lui voulait exactement. Surtout sur un ton aussi sérieux tout d’un coup.

Oui, en plus du passé trouble, les deux brunes partageaient aussi le souci au niveau parental. La différence venait tout de même du fait que Regina savait que son père l’avait profondément aimé alors qu’Athéna elle avait un père qui cherchait à la tuer et qu’elle n’avait aucune idée de l’idée de sa mère. Ceci dit, au final, la déesse n’avait pas si mal tourné que ça non ? Alors peut-être que ça n’était pas si important que ça, même si la guerrière avait du mal à mettre cette histoire de filiation de côté depuis qu’elle avait appris qu’elle n’avait pas été créée mais qu’elle était bel et bien née… Une sacrée différence tout de même.

- Certaines personnes seront toujours à nos côtés, quoi qu’on devienne… Souffla doucement la déesse en serrant doucement la main de son amie.

Arès aurait pu être cette personne-là si elle lui en avait laissé la possibilité. Mais cela n’arriverait jamais à présent et la déesse n’était pas certaine qu’Hermès pourrait aller jusque-là par amour pour elle. Enfin, ce n’était pas une question sur laquelle la jeune femme voulait s’appesantir : elle ne comptait pas redevenir celle qu’elle avait été, même si elle savait parfaitement reprendre son rôle lorsqu’il le fallait.

- Il t’en aura fallu du temps. Taquina-t-elle son amie. Ce n’est pas comme si j’avais besoin de cacher des armes sur moi note bien, mais je préfère toujours en avoir, on ne savait jamais… Et c’est d’autant plus vrai à Storybrooke où tu peux être transportée dans un monde avec tes pouvoirs bloqués. Souligna-t-elle.

Peut-être n’aurait-elle pas dû venir sur ce sujet. Vu l’état de son amie, Athéna n’était pas sûre de ne pas l’avoir influencé sans le vouloir. Mais enfin, comment prendre une personne bourrée au sérieux quand elle vous demandait de vous former ? Regina se rendait-elle compte que ce ne serait pas un simple entraînement et que l’amie laisserait le pas à la formatrice qui pouvait être une sacrée peste sans en éprouver le moindre remords ?

- On verra… Finit-elle par dire. Ce n’est pas que je refuse totalement, mais je préfèrerais que tu me reposes la question quand tu seras sobre.

Et elles pourraient en parler bien plus en détails si Regina était sobre, histoire de ne pas tout répéter deux fois, parce qu’Athéna avait horreur de se répéter, tout simplement.

Parfois, Athéna comprenait un peu ce qui pouvait passer par la tête des habitants les plus déprimés de cette ville. Le retour de leurs souvenirs avait été assez brutal et ils avaient dû faire face à plusieurs choses en même temps. Et parmi ces choses se trouvaient le fait qu’ils se rendaient compte qu’ils n’étaient rien de plus que des personnages de roman dont on avait dicté toute la vie. Quand la déesse pensait à tout ce qui lui était arrivé, notamment le fait qu’on leur ait caché qu’ils avaient tous eux des parents et une enfance, la brune pouvait comprendre que les habitants puissent déprimer. Aussi comprenait-elle parfaitement la remarque de Regina.

- Certes. Mais au final tu as donné à ta vie le sens que tu voulais. Et il n’y a que ça qui compte.

Et Athéna le pensait vraiment, tant pour Regina que pour elle-même. Si les choses s’étaient passées comme prévues, les dieux auraient été exécutés dans leur enfance. La déesse ne comprenait toujours pas pourquoi on leur avait retiré le souvenir de la période qu’ils avaient passé dans la Grande Vallée, mais elle avait compris par contre que son père voulait la tuer depuis longtemps. Et elle parvenait même à imaginer que depuis qu’il avait eu une fille pour premier enfant, Japet ait voulu la faire disparaître sans le moindre remord.

La demande de Regina la sortit de ces pensées plutôt moroses. Son amie voulait apprendre à se battre, à ne pas dépendre de la magie. C’était un désir plus que légitime et Athéna comprenait que l’on puisse ressentir ce besoin. Ceci dit, son amie était bourrée et ce n’était pas une demande que l’on faisait en de pareilles circonstances. Ou que l’on acceptait dans de telles circonstances. Aussi répondit-elle plutôt à son amie qu’elle y réfléchirait et qu’elles en reparleraient. Regina comprendrait sans souci pourquoi la guerrière prenait de telles précautions.

- Ça marche. Ferme. Je te raccompagnerais chez toi.

Et ce fut ce qu’elle fit une fois que Regina eut fermé le bar. Il était hors de question de laisser une femme dans l’état de Regina rentrer toute seule. Athéna attendit donc dehors que son amie finisse ce qu’elle devait faire puis elle posa la main sur son épaule et elle les téléporta toutes les deux devant la maison de la barmaid, attendant jusqu’à ce que son amie soit rentrée à l’intérieur de son manoir. Et une fois que Regina fut à l’abri, la déesse fit demi-tour et rentra chez elle à pied.