« Pour réaliser une chose extraordinaire, commencez par la rêver.
Ensuite, réveillez-vous calmement et allez jusqu'au bout de votre rêve
sans jamais vous laisser décourager. » (Walt Disney)


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Balthazar Graves
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Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.


DEMAIN DES L'AUBE.


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________________________________________ 2018-04-04, 15:46


Very Bad Bromance
I want your love and I want your revenge
You and me could write a bad bromance.
(et heureusement que personne n'est là pour voir ça. O_o)


Une musique agaçante résonnait dans la tête de Balthazar. La guitare électrique lui vrillait le crâne à mesure que son propre coeur le rendait pratiquement sourd, bien qu'il batte à un rythme étonnamment ralenti. Il ouvrit un oeil vitreux mais ne vit pas grand-chose. Un homme et une femme chantaient en choeur :

Love
Love is strange
Lot of people
Take it for a game
Once you get it
You never want to quit, no no
After you've had it
You're in an awful fix


Il poussa un grognement. Cette chanson lui rappelait un film dégoulinant de mièvrerie qu'Eulalie l'avait forcé à regarder, et qu'il n'avait réussi à supporter qu'en coiffant l'amazone de façon presque compulsive.

Il se frotta les yeux et se redressa avec difficulté. Son corps lui semblait ankylosé. Son esprit embrumé ne parvenait pas à rassembler ses idées. Il avait un trou noir à la place du cerveau. Il tâtonna le drap qui le recouvrait, avant de le soulever. Il était nu en dessous. Imperturbable, il remit le drap correctement et tourna la tête vers la forme allongée et entièrement cachée par une couverture, juste à côté de lui. Se doutant qu'il s'agissait d'Eulalie, il se frotta de nouveau les yeux et passa une main dans ses cheveux ébouriffés. Bon sang, que s'était-il passé ? Pourquoi ne se souvenait-il de rien ? Impossible de se rappeler de quoi que ce soit.

Il promena sur la chambre un regard vitreux. Il ne reconnaissait rien du tout. Les cadres accrochés aux murs étaient de travers, la pièce sans dessus dessous. Des plumes jonchaient le sol, voletant dans l'air moite en raison de la fenêtre entrouverte. Des coussins avaient été éventré. Balthazar resta pétrifié quelques secondes en voyant son cher rasoir planté dans un oreiller, par terre. Se levant d'un bond, il alla le récupérer et le garda en main, nullement rassuré. Il cherchait d'où provenait l'agaçante musique. Nulle trace de chaîne ou d'enceinte, à moins qu'elle soit cachée sous tout le bazar ambiant, parmi les plumes, les cadavres de bouteille et les restes de choux à la crème.

Rêvait-il ou voyait-il vraiment une gondole glisser nonchalamment sur l'eau, à travers le rideau transparent qui ondulait devant la fenêtre entrouverte ? Balthazar cligna des yeux. Cette fois-ci, il fallait qu'il ait une explication.

Le rasoir toujours en main, il s'allongea sur le côté pour secouer la forme endormie. Brusquement, un doute le saisit. Il ne pouvait s'agir d'Eulalie puisqu'elle ne dormait pas, à moins qu'elle fasse semblant... Dans quel but ?

D'un geste sec, il envoya valser la couverture. Il resta tétanisé. En état de choc. Incapable d'émettre le moindre son. Il s'attendait à tout sauf à trouver Holmes là-dessous. Sur son front, il lut le mot "GENIE" écrit au feutre noir, en lettres tremblantes. Il aurait pu en rire si la situation n'était pas aussi inquiétante. Prudemment, il baissa les yeux sur le torse du détective. La couverture recouvrait encore le bas de son corps. Il crispa la mâchoire, tendu à l'extrême. A cet instant, Holmes ouvrit les yeux.

"Dites-moi que vous avez un pantalon." lança Balthazar d'un ton un peu trop agressif, mais qui pouvait étrangement sonner comme une supplique.

Par instinct -de protection ?- il ramena le drap sur lui pour cacher ce qui devait l'être, sans cesser de fixer le détective d'un oeil circonspect et incendiaire.

"Et une explication."

Un frisson parcourut son échine lorsqu'il entendit la fin de la chanson qui tournait toujours :

Balthazar?
Yes, Sherly.
How do you call your lover boy?
Come here, lover boy!
And if he doesn't answer?
Oh lover boy
And if he still doesn't answer?
I simply say Baby, oh baby
My sweet baby, you're the one

Baby, oh baby
My sweet baby, you're the one


Ce n'était pas possible. Il avait eu une hallucination auditive. Hélas, en croisant le regard de son acolyte, il sut qu'il n'avait pas rêvé. Les voix qu'ils venaient d'entendre n'étaient pas celles des chanteurs, mais les leurs, enregistrées par-dessus, et beaucoup trop guillerettes.

Balthazar manqua de se couper avec son rasoir lorsqu'il le replia, tant ses mains tremblaient. Il fut pris de haut-le-coeur et se cramponna au dossier du lit. Ce réveil, cette chambre, ce type à côté de lui... Ce n'était pas concevable. On lui faisait une très mauvaise plaisanterie. Le pire, c'était que le voile sur la précédente nuit ne voulait pas se lever. Il ne se rappelait de rien. DE RIEN.
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Sherlock Holmes
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________________________________________ 2018-04-04, 22:37

"- Hey Tony, c'est qui ces deux gros cons complètement saouls? Tu les connais?
- Pas du tout. Mais il paraît qu'ils connaissent le Dieu des Arts et de la Lumière..."






Mal de crâne.Musique entraînante dans la tête. Plus qu’entraînante. Toujours les yeux fermés, Sherlock se tourna dans les draps dans un élan de tendresse. Ainsi donc il avait enfin conclus avec Kida. Passant son bras autour de son cou, il expira de satisfaction. La bouche pâteuse, le mal de tempe prononcé, lui indiqua qu’il avait beaucoup trop bu. L’alcool était une drogue, une addiction. Ce n’était pas sa favorite, mais visiblement, hier soir il y avait succombé… Succombé… Ouvrant brusquement les yeux, son bras se fit repousser avec une force assez conséquente. Non, ce n’était pas possible. Il ne succombait que très rarement aux addictions jusqu’à éteindre et abîmer son précieux cerveau. Quelque chose clochait. Lentement, il ouvrit les yeux…
La vision de barbier qui le regardait avec un mélange de dégoût et d’horreur le figea sur place. Instinctivement, il porta sa main à sa carotide. Ouf, elle était bien en place. Frottant sa main contre son menton, il remarqua cependant un détail… Même en ayant le cerveau étriqué, il remarquait tous les détails. Son visage était rasé à la perfection. Alors que, de mémoire, il était sensé laisser une barbe naissante pour amadouer Kida. Un conseil d’Apollon lui même.
Immédiatement, et sans adresser la moindre parole à Balthazar, le détective quitta le lit, se rendant compte qu’il était entièrement nu. N’ayant aucun problème avec ce genre de chose, il mit les mains sur ses hanches, et fixa le barbier avec un regard sévère. Aïe. Ca faisait encore mal. Son cerveau était lent… Beaucoup trop lent… Il avait l’impression d’être quelqu’un de normal… Et être ainsi vulnérable face à son pire ennemi ne lui inspirait rien qui aille. Plissant des yeux, il se saisit brusquement des draps pour se couvrir ses merveilleux attributs. Il n’avait pas à montrer tous ses secrets à son pire ennemi. Plissant des yeux d’un air accusateur, il fixa Balthazar et déclara :

« Je n’ai ni l’un, ni l’autre Graves. D’ailleurs, tant que nous y sommes, je vous retourne la question. »


C’était vrai. Et lui ? Avait-il son pantalon ? Et en plus, ce devait être lui le responsable, c’était forcé. C’était extrêmement rare que Sherlock se laissa aller à ce point là à une drogue. Surtout que Mycroft n’était pas présent. D’habitude, quand il faisait ce genre de chose, il envoyait toujours un message à Mycroft pour le prévenir, et qu’il puisse venir le chercher. Mais là quelque chose clochait. S’activant sans prévenir, il commença à chercher ses affaires dans le cafarnaeum ambiant. Repoussant plusieurs plume, il remarqua que certaines étaient rousses. La majorité était d’un blanc nacré, mais une petite partie était rousse. Ne trouvant pas ses vêtements et bloquant sur ce détail, il remarqua qu’un espèce de poulet semblait cachait derrière un rideau. Apeuré et tremblant, il les fixait d’un œil mauvais. L’ignorant totalement, il enjamba un saxophone, une cocotte minute pleine de ratatouille, un cactus géant et un canapé renversé style Louise XV. Tirant les rideaux, il observa l’extérieur…

« Venise ?... »


L’esprit encore émoussé dû à l’alcool, il désigna Balthazar d’un geste accusateur de l’index. Surpris, il remarqua que sur son front, on pouvait y lire « BENJAMINO LE ROI DU VELO » dans une écriture totalement incertaine. Gardant contenance, il accusa :

« C’est certainement de votre faute si nous sommes ici ! A Venise ! »


Soudain, un partie de son merveilleux et brillant esprit se réactiva. Un souvenir émergea comme si il tombait du ciel et lui traversait le cerveau.


*** Plus tôt dans la soirée. ***


Venise. Venise… Venise…

Deux silhouettes complètement ivres traversaient les rues de Storybrooke. Bras dessus, bras dessous, il se soutenait l’un l’autre pour essayer d’aller droit. La brume était épaisse, et les lampadaires éclairaient faiblement les silhouettes des deux pires ennemis… Chantonnant à tu-tête en coeur, on pouvait entendre…

«Oh vous pouvez chercher loin voir et
revoir dans tout les coins,

Jamais bière n'aura si bon goût que celle que l'on trouve par chez nous !!!!

Jamais bière n'aura si bon goût que celle que l'on trouve par chez nous !!!!

Quelque soit votre chopine ou bien dans une bouteille divine quelque soit la taille de votre flacon !!!!

Elle doit venir de notre Dragon !!! »


Le plus grand des deux, se détacha et déclara d’un ton affirmé mais ivre :

« Oh putain mon Balthy, j’ai une super idée ! On va aller en Italie ! Oui oui oui… En Italie mon gars ! »


Tendant les bras vers le ciel, il ferma les yeux. Malgré le fait qu’il soit complètement saoul, il déclara d’un ton sévère et dur à la Gandalf :

«  APPARAÎT ! DIEU DES ARTS ET DE LA LUMIERE ! »


Quelques secondes passèrent. Balthazar gloussa. Il aimait tellement le martyriser, même ivre… C’est alors que le bruit caractéristique d’une téléportation divine ce fit entendre.
Apollon apparut, divin et splendide. Aussitôt le détective s’exclama :

« Apopo mon pote  téléporte nous à Venise ! Vénice ! On a jamais vu Venise tu te rends compte ! »


Se tournant vers Sherlock avec une allure fier, prêt à en découdre si jamais quelqu’un faisait du mal au détective, il se détendit en le voyant ainsi. S’avançant vers lui, Phoebus lui saisit le visage dans les doigts et le fixa d’un air sévère, puis tristement déçu.

« T’as abusé un petit peu mon Sherly non ? »


Vexé, on pouvait remarqué qu’il boudait légèrement.

« Vous avez tellement de la chance de pouvoir être saouls ! »


Son regard se fit profondément attristé, comme si il ne pouvait pas partager ce moment avec eux. Sherlock lui frappa sur le torse comme un homme ivre et confiant.

« T’inquiète ma cocotte, mon esprit te trouvera un remède ! »


Soupirant, il déclara :

« Profitez-en… Vraiment… Vous vous rendez pas compte… Je donnerai tout pour être bourré une fois dans ma vie… »


Puis, prenant chacun par un bras d’un air solennel, il dit :

« J’ai un appart là bas, je peux vous le prêter si vous voulez passer une soirée en tête à tête. »


Hochant la tête comme un enfant, Sherlock beugla :

« GERONIMO ! »


L’instant d’après, ils se retrouvèrent téléporter place Saint Marc, un trousseau de plusieurs clefs dans les mains, et l’adresse de l’appartement écrite sur l’avant bras. Manquant de vomir à cause de la téléportation, Sherlock arriva cependant à dire :

« Merci bro ! T’es un champion, champion ! »


Prêt à partir, le dieu finit tout de même par déclarer, assez fier de lui :

« Evitez de casser le lit, je l’ai changé y’a trois mois... »
il se marra et poursuivit :
« Je vous laisse les petits fous, mais hésitez pas à appeler Tonton Apollon si vous avez besoin de quoi que ce soit. »

Puis il disparut en un clin d’oeil. Sherlock se tourna alors vers la place Saint Marc en levant les bras au ciel comme un enfant :

« A NOUS LES PUTES, LA DROGUE ET VENISE MON BARBIER PREFERE !!! »


*** Maintenant. ***

Clignant des yeux, le Sherlock Holmes du présent se contenta de dire d’un air accusateur :

« C’est certainement de votre faute si nous sommes ici Graves. »







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________________________________________ 2018-04-11, 09:56


Voir Venise et... Mourir. O_o
I want your love and I want your revenge
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Balthazar détourna le regard, écoeuré par la vue panoramique que Holmes lui offrait. Il aurait aimé ne jamais le voir dans son plus simple appareil. En tous cas, il avait obtenu sa réponse : ils avaient passé la nuit dans le même lit et sans aucun vêtement. Un frisson de dégoût et d'effroi parcourut le barbier. Etant donné l'ampleur de sa migraine et le capharnaüm qui régnait dans la chambre, la soirée de la veille semblait loin d'avoir été reposante. Il essayait par tous les moyens de garder son calme, ce qui était loin d'être facile avec le détective qui se montrait aussi pédant qu'à l'accoutumée.

Il se massa les tempes et jeta un regard meurtrier au poulet qui avançait vers lui d'une démarche incertaine. Il fronça les sourcils en entendant les accusations infondées de Holmes. Ses insistances laissaient plutôt déduire qu'il était le véritable responsable. De toutes façons, Balthazar se savait innocent dans toute cette histoire : il ne faisait jamais rien de trop abracadabrant ni de grotesque. La question était de savoir ce qui avait motivé à orchestrer cette folie. Hélas, son cerveau lui paraissait encore trop engourdi.

"Vous m'avez drogué."

D'un geste sec, il attrapa le drap pour le passer autour de sa taille et se relever brusquement. La chambre se mit aussitôt à tanguer dangereusement et il préféra s'accorder encore quelques secondes, assis au bord du lit, l'air hagard. Puis, il secoua la tête et se leva de nouveau, plus lentement cette fois.

Il manqua de trébucher sur un chaise renversée et émit un léger grognement maussade. Il se planta devant la fenêtre entrouverte, observant à son tour le paysage.

"Venise..." maugréa-t-il. "Pourquoi j'irais à Venise ? Et surtout, pourquoi je vous y emmènerais ?"

Il coula vers le détective un regard oblique. Il n'aimait pas ce qui se rapportait aux voyages, car cela bousculait ses habitudes bien définies. Qui plus est, Venise était connue pour être la "ville des amoureux". Cette pensée arracha une moue révoltée à Balthazar.

"Vous m'avez drogué."
affirma-t-il d'un ton acerbe. "Vous devez vous trouver particulièrement malin, à l'heure qu'il est."

Quelque chose ne correspondait pas à ses accusations. Holmes paraissait nettement moins brillant et reluisant qu'à l'accoutumée. L'étincelle de folie sournoise qui brillait dans ses yeux -et qu'il faisait passer pour du génie- n'était pas présente, ce matin-là. Se pouvait-il qu'ils aient été tous deux victimes d'une tierce personne ? Le barbier chassa aussitôt cette pensée de son esprit bancal. Il préférait le croire coupable. C'était beaucoup plus facile de son point de vue.

Il chercha ses vêtements des yeux mais ne les trouva pas. Il faudrait sans doute procéder à une fouille minutieuse de la chambre pour mettre la main dessus. Pour le moment, ce fut un miroir qui attira son attention, accroché de travers sur un mur. Il s'en approcha, clignant des yeux vers son reflet qui lui renvoyait l'image d'un jeune homme blafard, aux cernes prononcées, mais surtout avec des mots écrits en noir sur le front :

OLEV UD IOR EL ONIMAJNEB


Il tenta de se concentrer pour lire, mais les lettres étant inversées, c'était peine perdue. Il se frotta énergiquement le front mais là encore, ce fut en vain. L'encre était tenace. Indélébile, peut-être ?

De rage, il pivota vers Holmes et se jeta à son cou dans l'intention de l'étrangler. C'était inouï à quel point sa patience atteignait vite ses limites, en certaines occasions. Il s'aperçut qu'il ne voulait même pas de réponses. Il ne voyait pas l'utilité de poser des questions. Tout ce qu'il souhaitait, c'était lui faire payer son amnésie et se venger de tous les mauvais traitements qu'il avait dû lui faire subir la nuit passée.

Il serra aussi fort que possible ses mains autour de la gorge du détective, les yeux injectés de sang alors que son drap avait depuis longtemps glissé de sa taille, dans son empressement. Il avait plaqué l'homme contre le mur, juste à côté de la fenêtre. Par cette dernière l'on pouvait entendre un gondolier passer en fredonnant "Vivo per lei". Ironie du sort : il croisa le regard de Balthazar et remarqua Holmes qu'il plaquait contre le mur dans une étreinte qu'un oeil extérieur aurait pu qualifier de passionnée, surtout étant donné leur nudité apparente.

"Vous êtes si adorabile tous les deux ! Ma que vous avez raison ! Venise c'est la ville dé l'amore ! Baciarti ! Embrassez-lui !"

Et puis quoi encore ?

"Va gondoler ailleurs." lança-t-il d'un ton rageur.

L'homme haussa les épaules et s'éloigna avec lenteur sur son embarcation tout en chantant cette fois "Vivo per lui". Tout du moins, Balthazar crut qu'il s'en était allé, mais bientôt, il fut de nouveau déconcentré dans son étranglement par le gondolier qui s'était arrêté à sa hauteur, juste au niveau de la fenêtre.

"Signore ? Yé souis désolé dé vous déranger, mais j'ai oune lettre stipoulant qué jé dois vénir vous chercher maintenant."

Il sortit un papier de son costume qu'il montra à Balthazar et ce dernier en lâcha Holmes pour s'en saisir. Il s'agissait de son écriture, passablement éméchée puisqu'elle penchait sérieusement d'un côté de la feuille. Ahuri, il lut mentalement:

Benjamino le roi du vélo offre une balade en gondole à Sherloroméo le génie !

C'était inconcevable. Il n'avait pas pu écrire une chose pareille ! Il chiffonna le papier avant que Holmes ait eu le temps de le lire et hésita à le faire avaler au gondolier qui continuait de les observer d'un oeil attendri.

"Jé vais vous laisser lé temps dé vous habiller ! Jé vais me garer plous loin ! Andiamo !"
dit-il après avoir baissé brièvement les yeux vers eux tout en haussant les sourcils d'un air aguicheur. "Prénez touut votre temps ! J'ai la 4G sour mon téléphone !"

Balthazar secoua rageusement la tête et se souvenant qu'il était nu, ramassa le drap pour s'en couvrir une nouvelle fois. Il s'aperçut alors qu'il n'avait plus son rasoir en main. Il devait être sacrément dans le cirage pour vouloir étrangler quelqu'un au lieu de l'égorger... Quelle substance avait-il donc ingéré la veille pour être dans un tel état ?

Ses yeux se braquèrent sur le coq qui marchait d'un pas raide. Un éclair argenté l'aveugla un bref instant : le volatile avait l'arme blanche entre son bec. Sans réfléchir, il se précipita sur lui mais se prit les pieds dans le drap, chutant au sol dans un concert de jurons. Il étendit le bras vers le poulet qui fut pris d'un sursaut paniqué. Dans un piaillement, il renversa la tête en arrière et... avala le rasoir.

Le barbier frappa du poing contre le sol, partagé entre une colère sans nom et un désespoir équivalent. Ce geste affola davantage le coq qui se mit à courir en tous sens à travers la chambre. Il avait sûrement un gosier extensible pour ne pas s'être étouffé avec l'arme. Balthazar se redressa un bond, releva le drap afin d'être plus libre de ses mouvements et se mit à courser le volatile, se heurtant à plusieurs objets épars sur le sol et à quelques meubles.

"Bloquez-le !" ordonna-t-il à Holmes quand il vit le poulet courir en zigzag vers lui.

Rien n'était moins sûr quant à la coopération du détective. Mais c'était le moins qu'il puisse faire étant donné la situation, non ?

Mû par son propre instinct, il plongea en avant et ses mains se refermèrent autour de la gorge du poulet qui battit désespérément des ailes. Il se redressa aussitôt, n'appréciant guère être aux pieds du détective, tout en gardant fermement la gorge du coq dans sa main. Il hésita à lui rompre le cou, mais n'était pas certain de pouvoir récupérer le rasoir, le cas échéant.

"Vous êtes supérieurement intelligent, non ? Alors, faites-le vomir." dit-il à Holmes d'un ton méprisant tout en agitant le pauvre volatile sous son nez.

Il ne supportait pas cette situation mais n'avait pas d'autre alternative. Les murs et le sol commencèrent de nouveau à tourner autour de lui et il tituba. Nouveau haut-le-coeur. Non, ce n'était pas lui qui devait vomir. Il serra les lèvres et déglutit, soutenant le regard de Holmes sans ciller. Le poulet poussait des piaillements étouffés en se tortillant dans tous les sens. Il avait envie de le jeter contre une paroi, mais ce n'était pas la meilleure façon de récupérer son rasoir non plus.

Il devait retrouver ses vêtements, mettre de l'ordre dans ses idées, se calmer... Une sonnerie lui vrilla le crâne. Un téléphone. Oubliant tout le reste, il se mit en quête de l'objet, farfouillant partout autour de lui à grands gestes énergiques tout en gardant le poulet en main qui finit par s'évanouir. Il souleva quantité de choses plus abracadabrantes les unes que les autres -du fer à repasser à toute une batterie de cuisine- et finalement trouva le combiné sous le tapis d'un jeu appelé Twister. Il décrocha et resta silencieux, préférant que l'interlocteur s'exprime le premier. Il y eut un silence et une voix féminine demanda :

"Signore Graves ?"

"Si." grogna-t-il. Puis il soupira et grommela un "Oui".

"Jé souis Giulia Mancini." dit-elle d'un ton guilleret avec un fort accent italien. "J'ai lé plaisir dé vous annoncer qu'oune place s'est libérée dans notre agenda. Vous pouvez célébrer votre mariage le 30 avril comme vous en aviez émis le souhait."

Comme un réflexe, Balthazar raccrocha. Puis, il resta pétrifié, fixant le mur en face de lui, muet et horrifié. Il sursauta en entendant le téléphone sonner de nouveau. Il appuya sur le bouton et l'amena contre son oreille d'une main fébrile.

"Nous avons été coupé." lança la femme d'un ton désinvolte. "Jé disais donc que votre cérémonie à la Basilique Saint-Marc a bien été enrégistrée. Nous aurons besoin d'un sécond acompte dès qué..."

Le barbier était incapable d'en supporter davantage. Il balança le téléphone à travers la pièce, allant même jusqu'à le défenestrer, manquant de peu le visage de Holmes. Le combiné acheva sa course dans le canal, dans un "Plouf !" évocateur.

"Mauvais numéro." marmonna Balthazar pour toute explication.

Plus que jamais nerveux, il se redressa tout en tenant son drap d'une main, promenant le poulet assommé de l'autre tout en faisant des va-et-vient. Il lui fallait des vêtements à tous prix pour quitter cet endroit. Et une arme blanche pour éventrer le poulet afin de récupérer son bien.
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________________________________________ 2018-04-11, 10:57

Che confusione ! Sarà perché ti amo!






Fixant toujours le canal, perdu dans ses pensées. Il grogna un peu plus quand il se rendit compte que ces dernières étaient complètement émoussées. Le barbier le rejoint et ils fixèrent tous deux le canal, le regard perdu. Ce qui se passa ensuite fut encore plus irréel que le fait de se retrouver au côté de Balthazar Graves dans cette galère monstre. Ce dernier se jeta à son cou avec démence pour tenter de l’étrangler. Surpris, il se laissa faire dans un premier. Puis, utilisant sa taille supérieure à celle du barbier, il se mit sur la pointe des pieds pour que l’étreinte ne soit pas fatale. Le fixant avec intensité, un sourire un coin se dessina sur le visage marqué du détective. Saisissant ses deux poignées, le détective déclara tout en forçant pour éviter qu’il ne l’étouffe.

« Alors nous y voilà déjà Graves. Je pensais que vous auriez tenter ça plus tôt… Mais cela ne m’étonne pas de vous… Un meurtrier. Si simple d’esprit... »


Leur étreinte amicalement dangereusement s’arrêta lorsqu’ils furent interrompu par un gondolier. Ce dernier insista pour confirmer qu’ils avaient pris rendez vous. Profitant du chaos, le détective se libéra définitivement de l’étreinte du barbier. Se massant le cou en grimaçant, un sourire dément se dessina sur ses lèvres. Ainsi donc il était prêt à aller jusqu’au bout… Ignorant totalement le gondolier, que Graves se chargea lui même de parfaitement rembarré, Sherlock fixa à nouveau ce dernier, le regard flou et dans le vide. Impossible de déduire quoi que ce soit. Avec ses capacités à son maximum, il aurait pu savoir si ce dernier était réellement un tueur en série, rien qu’en analysant sa poigne. Là, il avait juste était capable de se libérer… Rageant légèrement, il ignora totalement les prises du barbier pour récupérer son rasoir.
Humble avant tout, il se dirigea à grands pas vers la salle de bain. Attrapant les deux peignoirs, il remarqua qu’une forme immense était présente dans la baignoire. Couinant de plaisir, une famille de canard semblait barboter à leur aise. Refermant la porte avec soin pour ne pas les déranger, il envoya le peignoir à Graves avec force et sans aucune délicatesse. S’en habillant rapidement, il s’avança d’une démarche assurée vers le poulet. Le prenant des mains de Graves, il lui tordit le coup d’un coup sec. Il y eut un dernier couinement et le cou du coq pendit tristement dans les mains de détective.

« Il était condamné. »


Se saisissant d’un couteau de cuisine, il l’éventra sans aucune cérémonie. Observant le rasoir couvert de sang et de suc gastrique, il le photographia mentalement pour en garder le souvenir parfait. Malheureusement, sa mémoire photographique lui fit défaut. Jetant ce dernier sur le lit, Sherlock jeta les restes du poulet par la fenêtre. Il y eut un autre petit « Plouf » sonore qui avait suivi celui du téléphone. Celui là était cependant plus marqué et plus sinistre. S’essuyant les mains dans les draps, pas très fier de sa basse besogne cependant nécessaire pour abréger les souffrances de ce pauvre animal, il fixa le barbier d’un air interrogateur.

« Au vu de votre tête, je suppose qu’il ne s’agissait pas d’une bonne nouvelle. Je suis curieux de savoir ce qui vous met dans cet état. Vous êtes pire qu’à votre réveil. C’est pour dire. »


Voulant poursuivre l’interrogatoire, il fut interrompu par quelqu’un qui frappa à la porte. Aussitôt, un groom se présenta, droit comme un I. Se tournant vers Graves pour lui signaler de se cacher, le Groom déclara d’un ton solennel.

« Missieu Holmes ? Nous avons lé plaisir dé vous annoncé qué vos parents sont arrivés pour lé mariage. Dois-je leurs dire dé monter ? »


Sans plus attendre, Sherlock resta paralyser devant le groom. La seule solution était de mettre un terme à cette conversation cauchemardesque. Claquant la porte au nez du groom, il vit que le barbier souriait en coin.
« Très spirituel Graves. Sûrement une de vos idées. Je ne crois pas au Mariage. Même ivre et drogué. »

Avant que le barbier n’est pu lui répondre, un autre téléphone sonna. Le musique lui fit hausser un sourcil de stupeur. Traversant la pièce, les doigts encore collant de sang, il souleva un fauteuil avec force et rage, pour trouver l’origine de cette musique énervante. C’était son téléphone. La coque et la vitre était brisé, mais on pouvait quand même lire dessus « Maman ». Décrochant rapidement, pour expliquer la situation, il ne put en placer une.

« Sherlyyyyyyyy ! Tu réponds enfin ! Ton père et moi, nous sommes dans le Hall ! On nous a dit d’attendre, que tu n’étais pas prêt ! Je dois dire que j’ai été surprise quand tu m’as appelé hier soir ! Tu as enfin trouvé quelqu’un ! Nous avons d’abord pensé que c’était un peu précipité, mais tu as toujours été un sanguin hein ! Quoi qu’il en soit, nous avons annulé nos vacances en France et nous avons pris le premier avion pour assister à ça ! Mycroft devrait arrivé dans quelques heures aussi, il semblait ravi ! C’était étonnant d’ailleurs ! Bon, tu nous ouvres que je puisse enfin rencontrer mon gendre ? »


Le visage horrifié, Sherlock Holmes raccrocha immédiatement. Jetant le téléphone sur le lit à côté du rasoir, il se tourna vers Graves et annonça d’un ton cassant :

« J’espère que vous êtes fier de vous. Il n’y a qu’un seul responsable ici et c’est certainement vous. Tss. Benjamino le roi du vélo. Je vous laisse avec mes parents. Vous verrez, des gens charmants. J’ai à faire. »


Et sans avertir ni rajouter quoi que ce soit, il serra la ceinture de son peignoir et s’élança dans les eaux dans un grand plouf sonore. Le gondolier manqua de tomber sous l’effet de surprise ajouté à celui des vagues. Hors de question qu’il voit sa mère et son père. Il devait fuir, et le plus vite possible.




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________________________________________ 2018-04-14, 21:24


How I met your parents.
I want your love and I want your revenge
You and me could write a bad bromance.


Balthazar sentait une rage sourde l'envahir. Et pour cause : Holmes l'avait privé du plaisir d'éventrer le poulet lui-même. Il s'était mis en quête d'un objet tranchant mais le détective avait été plus prompt à en trouver un et à commettre l'acte qu'il convoitait. Avoir du sang sur les mains l'aurait aidé à sensiblement se calmer vis-à-vis de cette situation abracadabrante. Holmes en avait décidé tout autrement. Le barbier remarqua qu'il avait tué le coq avec un savoir-faire et un sang-froid redoutables, preuve qu'il avait lui aussi des choses à cacher. Avait-il déjà commis un meurtre auparavant ? Cette question laissa Balthazar pensif, alors que celui qu'il considérait jusqu'à présent comme un imbécile prenait une dimension nouvelle, presque intrigante. Il n'en était pas non plus curieux au point d'approfondir les recherches. Cet homme restait quelqu'un qu'il exécrait profondément.

Le chapitre du mariage fut de nouveau évoqué par le passage d'un groom annonçant la venue imminente des parents de Holmes. Le barbier en resta interdit quelques secondes, croyant à une plaisanterie supplémentaire. Il n'eut plus aucun doute lorsqu'il vit le visage du détective devenir livide après le coup de téléphone. Que lui avait-on dit ? Quelque chose de terrifiant, manifestement. Il resta de marbre alors que l'autre l'accusait de nouveau d'être à l'origine de toute cette déconvenue. Les paroles glissèrent sur lui sans l'effleurer alors qu'il roulait des yeux.

Benjamino le roi du vélo ?

Il se demanda pourquoi Holmes l'invectivait de cette façon, avant de passer une main sur son front griffonné. Quand son compagnon d'infortune se défenestra, il n'esquissa qu'un froncement de sourcils. Si seulement il s'écrasait sur le sol... Hélas, un "plouf !" l'avertit qu'il avait atterri dans le canal. Il ignorait sûrement à quel point les eaux de Venise étaient sales... Avec un peu de chance, cela nettoierait son mauvais caractère.

"Imbecile..." marmonna-t-il avec un accent italien instinctif tout en secouant lentement la tête.

Il commença par récupérer son rasoir ensanglanté sur le matelas, qu'il rangea dans la poche de son peignoir.

Au moins, à présent, il était seul. Il allait pouvoir beaucoup mieux réfléchir et rassembler les pièces de ce fichu puzzle. Il se saisit de la ceinture de son peignoir et la noua très serrée avant de se diriger à grands pas vers la salle de bains. Il se crispa en remarquant la famille de canards occupée à barboter joyeusement dans la baignoire. Un bref instant, il hésita à apaiser ses pulsions meurtrières en se vengeant sur eux. Cependant, il croisa son reflet dans le miroir et estima qu'il n'était pas à deux minutes. Il devait d'abord faire partir les graffitis sur son front. Il se pencha donc vers le lavabo couvert de dentifrice et fit couler l'eau pour frotter son visage en dessous. Il fut contraint de s'acharner à l'aide d'un gant de toilette à l'odeur douteuse pour faire partir la majeure partie des écritures. Hélas, une trainée noire demeura sur son front. Il grommela un juron et tourna le robinet d'un geste sec.

Il pivota vers les canards, bien décidé à se défouler, le poing refermé sur son rasoir dans sa poche, quand il entendit un bruit provenir de la chambre, juste à côté. Que se passait-il, encore ? Sherlock avait changé d'avis ? Il n'avait pas trouvé l'eau suffisamment bonne ?

Juste histoire de vérifier, Balthazar entrebâilla la porte et croisa le regard d'une femme entre deux âges, qui s'empressa de tapoter l'épaule de l'homme qui l'accompagnait et qui se retourna aussitôt en disant :

"On a trouvé l'un des deux !"

A contrecoeur, le barbier quitta la salle de bains pour s'avancer avec méfiance vers les deux inconnus, sa main serrant toujours le rasoir. Des spécimens humains, ce n'était pas mal du tout pour se défouler. C'était même mieux que de stupides canards. Et puis à Venise, ce serait sans doute plus facile de camoufler un meurtre qu'à Storybrooke avec tous les divins... Il en était arrivé là, sur le fil tranchant de ses pensées, quand il se rappela d'un détail pour le moins croustillant.

"Ses parents." articula-t-il en masquant difficilement une expression jubilatoire.

Holmes le laissait seul avec ses parents. Dans le semi-brouillard de son esprit, il trouvait lumineux de les tuer. Il était persuadé que nul ne remonterait la piste jusqu'à lui. O_o

La femme prit son expression réjouie pour elle et s'empressa de préciser :

"Oui, nous sommes les parents de Sherlock. Enchantée, je m'appelle Saoirse."

"Benedict." fit le père d'un ton sec.

Ils semblaient tous deux extrêmement embarrassés et promenaient un regard à la fois anxieux et circonspect sur la pièce sans dessus dessous. La mère serrait son sac à main contre elle comme si elle craignait qu'une bête sauvage ne surgisse et le lui arrache. Quant au père, il fixait le poulet éventré et la traînée de sang sur le matelas sans ciller.

"Où est Sherlock ?" demanda la femme d'un ton faussement désinvolte.

"Quelque chose ne colle pas." réalisa soudain Balthazar.

"Vous vous êtes disputés ?" s'enquit-elle, attristée.

"Ca expliquerait l'état de cet appartement." renchérit le père. "A moins qu'ils aient fait la fête toute la nuit pour enterrer leur vie de garçon ensemble. D'un côté, c'est plus pratique. Nous, on avait dû faire deux fêtes chacun de notre côté. Et tu n'as pas voulu que j'ai de stripteaseuse." dit-il à son épouse.

Le barbier leur fit signe de se taire d'un geste agacé de la main. Il avait besoin de réfléchir. La femme au téléphone lui avait dit que son mariage était prévu pour le 30 avril. Or, à moins que Holmes et lui aient dormi pendant des jours, la date butoire n'était pas encore arrivée. Y avait-il donc deux mariages au lieu d'un ? Pour quelle raison ? Et pourquoi devait-il y avoir un mariage ?

"Vos parents seront-ils présents ?"
demanda Saoirse sur le ton de la conversation, bien que sa voix soit incertaine, et que ses yeux ne sachent pas à quel endroit du peignoir s'attarder.

Pourquoi les gens se sentaient-ils obligés de parler ? Balthazar se retint de la faire taire définitivement. Il estimait qu'il devait d'abord attaquer l'homme, plus massif.

"Non." dit-il d'un ton cassant.

Un petit silence s'installa, seulement ponctué par les lointains roucoulements d'un gondolier.

"Peut-être désapprouvent-ils cette union ?" supposa-t-elle, contrite.

"Ils sont morts."

Le ton était sans appel. Pour Balthazar, c'était comme parler de la météo. Cela faisait si longtemps, de toutes façons.

"Que leur est-il arrivé ?" s'enquit la maman, épouvantée.

"Tuberculose." grommela-t-il avec un soupçon d'accablement involontaire. "Et mon père a eu... un accident."

L'intonation était si hésitante à la fin de la phrase qu'elle laissait sous-entendre autre chose, mais le jeune homme resta énigmatique.

"Pauvre petit." se lamenta la femme avec une moue compatissante.

Balthazar crispa la mâchoire. Il ne voulait pas de sa pitié. Elle coulait sur lui comme une bave visqueuse.

"Vous n'avez pas d'autre famille ?"
insista le père, suspicieux.

"J'ai eu une fille mais... je l'ai perdue."

Pourquoi racontait-il tout cela ? Assurément, il n'était pas dans son état normal. Il se massa le front alors qu'un violent mal de crâne l'assaillait de nouveau.

"Oui, c'était avant." déclara Benedict d'un ton entendu.

"Avant ?" s'étonna le barbier, indécis.

"Eh bien avant... avaaaaant..."

Visiblement, il était aussi stupide que son fils, même si ce dernier avait beaucoup plus d'éloquence. Il semblait embarrassé tandis que ses joues rosissaient.

"Avant... avaaant... Avant Sherlock !" acheva-t-il enfin comme si ces mots lui avaient coûté énormément.

Balthazar cligna des yeux sans comprendre. Puis, il saisit l'allusion. Oh. Il se cramponna à son rasoir, la mâchoire serrée et esquissa un rictus qui s'avéra être une grimace.

Son épouse tapota l'épaule de son mari, signifiant qu'elle le soutenait dans cette épreuve, puis risqua un sourire en demandant de nouveau :

"Où est Sherlock ?"

"Il a sauté par la fenêtre." répondit-il avec un calme désarmant. "Malheureusement, il va bien. Sauf s'il s'est étranglé avec l'eau des égouts."

A sa grande stupéfaction, la mère éclata de rire, croyant à une plaisanterie. Cependant, elle connaissait bien son fils car elle vérifia tout de même par la fenêtre.

"Il est déjà loin." commenta le père.

"Il a toujours été doué en tout."
dit-elle avec un mélange de fascination, de fierté et d'inquiétude. "Ca fait un moment que vous vous connai...?"

La phrase resta en suspens quand la femme s'aperçut que Balthazar ne se trouvait plus dans l'appartement. La porte d'entrée claqua. Le barbier avait enfin mis la main sur des vêtements décents -un pantalon trop long et large qui devait sans doute appartenir à Holmes- ainsi qu'une chemise tachée à maints endroits. Il s'en était vêtu rapidement, se moquant des parents du "génie", et était parti sans oublier son rasoir. Sa patience avait des limites. Il avait retrouvé suffisamment de jugeotte pour ne plus assassiner les parents d'un détective, mais il ne pouvait plus supporter leur présence. Il devait démêler toute cette histoire au plus vite et il ne parviendrait à rien en restant dans cet appartement. Une fois dans la rue, il avisa le gondolier qui lui avait parlé depuis la fenêtre. Il lui désigna la forme qui nageait toujours au loin, dans la frénésie la plus totale, en lui indiquant de le rejoindre.

"Votre pétit coupain, c'est oune sacré lascar !"

"On n'est pas..."

Balthazar se fit violence et se passa une main sur le visage tout en allant s'asseoir à l'arrière de la gondole. Le "conducteur" -si l'on pouvait l'appeler ainsi- connaissait un raccourci par un autre canal, ce qui leur permit d'arriver face à Holmes et d'empêcher sa progression. Le barbier se pencha vers lui, un rictus méprisant au coin des lèvres en le voyant si ridicule, trempé et dispensant une odeur nauséabonde. Les effluves de cette ville étaient particulièrement saisissantes.

"Tes parents te cherchent." dit-il d'un ton grinçant.

Autant le tutoyer, étant donné qu'il avait rencontré ses géniteurs. Ils commençaient à devenir bien trop proches. Cette constatation le fit froncer le nez encore plus que les mauvaises odeurs environnantes. Il se redressa quelque peu et s'appuyant contre le rebord de la gondole, il ajouta :

"La prochaine fois que tu me laisses seul avec eux, je les tue."

Oui, c'était une menace. Pourquoi s'en cacher ? Holmes l'accusait de tout en plus d'être un meurtrier. Le barbier était trop vitreux pour se soucier des précautions.

"De toutes façons, vu la rapidité avec laquelle tu fuis devant eux, tu n'as pas l'air d'y tenir."

"L'amore passion entré vous, c'est bellissimo ! En plus, vous êtes sous le Pont des Soupirs ! Faut vous réconchilier !" intervint le gondolier qui ne comprenait rien à rien.

Pris d'une pulsion subite, Balthazar se releva brusquement pour l'attraper par le col et le pousser dans l'eau. Le gondolier bascula et tomba dans un "Plouf !". Hélas, le barbier n'avait pas calculé la rame qui le heurta dans le dos et lui fit perdre l'équilibre, le faisant rejoindre Holmes dans l'onde nauséabonde.

Cette journée continuait comme elle avait commencé : très mal.
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________________________________________ 2018-04-18, 10:46

La mise est à 290 dollars.






Nageant un crawl parfaitement maîtrisé, Sherlock Holmes s’élança dans la canal, sans même se soucier de l’odeur. Avançant à un rythme régulier, il ne prit même pas le temps de répondre au Gondolier qui s’exclamait :

« Ma vous iriez plou vité si jé vous y condouisez ! »


Continuant de nager, imperturbable malgré les effluves nauséabondes, il avançait. Levant de temps en temps la tête pour respirer, il voyait que certains passants lui jetait un regard étrange. Imperturbable, le détective continua à nager. Malheureusement, même si il avait pu voir quelques plans de Venise, Sherlock ne la connaissait pas par coeur. Il l’a connaissait même bien moins que Londres. Aussi, il ne fut pas surpris de voir le gondolier et Balthazar déboucher devant lui à un croisement de canal. Nageant en position stationnaire, il se rendit compte que son peignoir avait disparu. C’était donc ça, la petite fraîcheur intercuissale. Haussant les sourcils, il ricana quand Balthazar lui parla de ses parents :

« Saches que j’ai peur de deux choses dans la vie. De me tromper, et de mes parents. Et tu pourrais être un peu plus aimable, ça changerait. »


Oui, il se tutoyait. Ca lui faisait bizarre, mais c’était naturel. Dans les galères, en général les gens avaient tendance à devenir plus proche. De là à aller Bruncher avec le barbier… La probabilité restait faible. Lorsque le gondolier et Balthazar furent à l’eau, Sherlock en profita pour se jeter sur ce dernier. En quelques passes rapides dans l’eau, il arriva à l’étouffer suffisamment pour le plonger dans l’inconscience. Tractant l’embarcation et l’homme inerte de l’autre bras, il nagea vers un coin sombre et à l’abri des regards. Ne se souciant pas si Balthazar suivait, il grimpa encore entièrement nu sur le bateau, et tira la masse inerte du gondolier. Prenant d’abord le pouls, il vérifia qu’il n’était pas mort. Puis, sans réserve, il lui ôta tous ses vêtements. Une minute plus tard, Sherlock était habillé en gondolier, et ce dernier était allongé dans le bateau, visage contre les planches. Le déposant sur un rebord d’une rue au niveau de l’eau, à l’abri des regards, il constata que Graves l’avait rejoins.

« Bien, au moins tu as la présence d’esprit d’avoir pris la rame. »


Dans un élan de générosité, il voulut l’aider à grimper dans le bateau. Mais il retira aussitôt sa main. C’était bien moins de le voir galérer. Après tout, ils n’étaient pas amis. Une fois que ce dernier fut assit, trempé en face de lui, Sherlock le fixa dans les yeux.

« Bien, il semblerait que nous soyons dans le même bateau toi et moi. Tu connais la théorie des deux ânes attachés par la même corde ? Deux tas d’avoines, l’un tire d’un côté, l’autre de l’autre. Mais ils n’arrivent pas à attraper l’avoine. Au final, ils décident d’abord de manger le premier tas à deux, puis le deuxième. C’est tout bénéf. Tu arrives à suivre, où l’odeur embrouille tes goûts si délicats ? »


C’était ironique et cassant. Décidément, ils partaient mal. Et Balthazar avait encore la rame dans les mains. Il savait qu’il n’hésiterait pas à s’en servir. Ca se voyait dans ses yeux. Mais avant qu’il ne put commettre un crime en toute impunité, quelque chose attira son attention. Plusieurs policiers commençaient à courir dans leur direction… Réfléchissant à toute allure, et sans alerter Balthazar qui était de dos, il se saisit d’un rebord et sauta hors du navire. Laissant le malheureux gondolier nu et à son sort, il s’élança dans les ruelles de Venise, en courant droit comme un I, ses bras s’agitant, formant un angle perpendiculaire. C’était sa façon de courir. C’était pas très gracieux, mais c’était plutôt efficace. Se rendant compte qu’ils arrivaient place Saint Marc, une idée lui vint. Se saisissant d’un sac de graine qu’un pakistanais avait pour faire grimper les pigeons sur les touristes, il le jeta de toute ses forces sur les forces de police qui commençaient à les rattraper.
Comme une armée bien formatée, les Pigeons s’envolèrent en formation de combat et fondirent sur les policiers. L’un d’eux manqua même Balthazar de très peu. Sans réfléchir, Sherlock poussa alors un portail, passa dans un petit tunnel obscur, et atterrit sur une place rectangulaire. Visiblement, les policiers avaient perdu leurs traces. Les mains sur les genoux, l’oreille aux aguets reprenant son souffle, Sherlock observa tout de même la belle architecture tout autour de lui.

« Le Palais des Doges. »


Puis, une fois assuré que personne d’autres ne viendrait les déranger, il se tourna vers Graves.

« Bien. Maintenant, il faut rentrer. Il faudra être discret. Il nous faut, de nouveaux vêtements, de l’argent, nos papiers d’identités, et un plan. Puisque selon tes dires, tu sembles être le plus brillant de nous deux Graves, je vous écoute. On verra si ton plan est supérieur aux trois que j’ai déjà confectionnés en gaspillant ma salive à te parler. »


Alors qu’il souriait, un souvenir revint dans son esprit à une vitesse fulgurante.

*** Quelques heures plus tôt, Casino de Venise. ***

Plusieurs hommes et femmes sont autour d’une table de Poker. Quelques personnes les observent sans rien dire. Face à face, Balthazar et Sherlock sont habillés pareil, sourcils plissés, lunettes noires et costumes Men In Black. La tension est à son comble… Mais alors qu’on pourrait penser qu’ils sont tous à fait sobre, la silhouette de Sherlock se plie en avant et déverse une multitude de jetons sur la table avec la maladresse de l’ivresse. En face, Balthazar pouffe de rire.

« Et je mise… Ben je sais pas, mais compte tiens, croupier, t’es payé pour ça... »


Le croupir fronce les sourcils. Visiblement, la comédie dure depuis quelques minutes déjà.

« Vous avez misé 290 dollars, Monsieur Beresford. »


Nouveaux petits rires pouffis de Balthazar et Sherlock.

« OK ! Ben va pour 290 dollars ! T’as vu ça mon coco ! On va devenir riche ma gueuuule ! »


Le croupier fronce les sourcils.

« Vous n’avez pas le droit de parler comme ça à un membre de la table, vous prenez un avertissement. »


Posant ses cartes face en caché Sherlock tend les bras vers le croupier, faussement gêné.

« Très Monsieur Le Grand Croupier Intergalactique Chef du Monde… Faites donc… Faites donc… »


Quelques tours de plus, la mise est à 5 000 dollars. Sherlock retourne avec une lenteur divine ses cartes. As, Roi. Quinte flush. La femme qui était en duel face à lui jette ses cartes et quitte la table, laissant apparaître une vieille paire de deux.

« Avec Sherly, on gagne à tous les coups au Poker ! Allez, on s’casse Sir Paddington ! »


Nouvelle image, brouillonne, de Balthazar et Sherlock avec une liasse de billet de 200 dollars dans les mains en train de se faire des calins pour fêter cette victoire dans le Casino.
Deuxième image, toujours des deux compères en train de cacher la liasse en pouffant de rire dans un église obscure…

*** Maintenant, le présent. ***


« Je sais au moins où on peut trouver de l’argent... »


Etrangement, une musique lui trottait encore dans la tête.




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________________________________________ 2018-04-28, 16:49


Never hate your enemies.
It affects your judgment.
Friendship is everything. Friendship is more than talent. It is more than the government. It is almost the equal of family.


Holmes venait-il véritablement de lui dévoiler deux de ses plus grandes peurs ? L'intelligence du détective était de renommée mondiale, pourtant Balthazar avait déjà été témoin de sa bêtise à de nombreuses reprises, qu'il n'avait jamais manqué de souligner, d'ailleurs. C'était bien trop jouissif de ridiculiser un prétendu "génie". Il hésitait donc entre deux alternatives. La première : Holmes lui avait menti au sujet de ses pires craintes. La seconde : il lui avait dit la vérité, ce qui était la pire des idioties. On ne se confie pas à un psychopathe. Ne lui apprenait-on donc rien à l'école de police ? Il aurait dû mieux faire ses devoirs. Dans tous les cas, il était bien naïf s'il pensait n'avoir que deux grandes peurs existentielles. L'homme se croit toujours bien trop solide, alors qu'il est si aisé de lui faire découvrir toutes sortes d'horreurs plus terrifiantes les unes que les autres. Peut-être que Holmes aurait l'honneur d'en apprendre plus sur lui-même un jour, si le barbier y trouvait un intérêt quelconque.

Il en était là de ses réflexions tandis qu'il barbotait dans l'eau nauséabonde de Venise. Une façon d'essayer de faire abstraction de la puanteur ambiante. Son nez délicat était agressé par la pestilence. Il imagina du musc ou de l'ambre pour amoindrir cette attaque olfactive. En vain.

Il entrouvrit la bouche, perplexe, en voyant Holmes étouffer le gondolier, et manqua de boire la tasse. Il fit la grimace et suivit le sombre fou qui tractait la gondole et le corps inerte à la seule force de ses bras. Le barbier n'aurait jamais pensé qu'il fut un tel athlète. Il les suivit à la nage jusqu'à un recoin sombre dans lequel le détective en profita pour déshabiller le gondolier et récupérer ses vêtements. Balthazar estimait qu'il perdait un peu trop fréquemment sa tenue. A l'instant où il se hissa dans la gondole, il plissa des yeux en direction de la main que lui tendait le détective. Main qu'il éloigna rapidement. C'était mieux ainsi. Il n'avait aucune envie de le toucher. Il se doutait qu'ils avaient eu plus que le quota la nuit précédente.

Le barbier s'assit dans la barque, ruisselant, le souffle court, la rame posée sur ses cuisses. Il accorda un bref regard à l'homme inconscient à ses pieds, avant de le relever vers Holmes, ridicule dans son costume de gondolier. Au moins, il avait trouvé une reconversion si jamais la police de Storybrooke s'apercevait à quel point il était incompétent.

"Tu aimes gaspiller ta salive à énoncer des évidences."
grommela-t-il en roulant des yeux.

Holmes continuait de se montrer condescendant ce qui, dans l'état actuel des choses, ne le rendait vraiment pas plus appréciable. Balthazar serra la rame dans ses mains, imaginant avec un plaisir malsain le morceau de bois fracasser le crâne du "génie". Des bruits de pas et des cris autoritaires prononcés en italien chassèrent ses noires idées. Se retournant, il remarqua plusieurs policiers qui accouraient. Merveilleux. Il ne manquait plus que ça.

"Pour l'instant, ce sont tes méfaits qui nous portent préjudice. Pas les miens." fit-il remarquer, dédaigneux.

Mais le détective avait déjà déguerpi. Le barbier laissa échapper un juron indigné et se leva d'un bond pour se précipiter hors de la gondole et courir à sa suite. Il avait laissé tomber la rame qui était bien trop lourde et le ralentissait. Holmes usa d'un stratège pour repousser la police ; il recruta une bande de pigeons. L'un d'entre eux manqua d'éborgner le barbier qui adressa un regard d'autant plus furibond à son acolyte. Ils poursuivirent leur course effrenée à travers la place Saint-Marc pour se retrouver dans un tunnel obscur, près du Palais des Doges. Ces différents lieux laissaient une impression de déjà-vu à Balthazar. Il sentait que le voile se levait peu à peu dans son cerveau engourdi. Il eut le souvenir flou et furtif d'un casino et d'une partie de cartes... Il se massa le front d'un geste fébrile, contrarié par l'odeur nauséabonde qu'il dégageait. Holmes ne faisait que brasser de l'air mais ses paroles n'avaient aucune consistance.

Balthazar s'éloigna de lui pour se diriger à grands pas vers l'église non loin. Il ne se trompait pas : il s'agissait de la Basilique Saint-Marc dont la femme avait parlé au téléphone. Il s'en souvenait parfaitement, bien que l'idée d'y pénétrer le fasse frémir. Il n'avait toujours pas toutes les pièces du puzzle et il redoutait la suite de l'engrenage. Malgré tout, il baissa la tête, le front en avant et s'y engagea, la mâchoire serrée.

Les pas de Holmes résonnaient à côté des siens, alors qu'ils avançaient ensemble dans l'allée centrale, vers l'autel. Remarquant le ridicule de la scène, le barbier poussa un soupir excédé et voulut s'éloigner par une allée latérale, mais une femme l'interpela alors.

"Signore Graves ! Quelle ponctoualité ! Jé né vous attendais pas si tôt !"

Il s'immobilisa net, car le sourire de la jeune femme qui approchait était trop lisse et commercial. Il aurait dû se méfier davantage, car il sentit bientôt quelque chose de pointu appuyer contre ses côtes, dans son dos.

"Pas de mouvement brusque." lui recommanda un homme derrière lui.

Du coin de l'oeil, il remarqua que Holmes avait lui aussi un gorille très près qui le menaçait avec une arme blanche. Il aperçut d'autres hommes en noir sortir des recoins sombres de la basilique pour s'avancer lentement mais sûrement vers eux. Ils avaient tous un profil inquiétant.

"Suivez-nous sans faire d'histoire." appuya l'homme de sa voix au fort accent italien.

La femme devant eux s'effaça pour saluer d'autres touristes afin de faire en sorte qu'ils ne soupçonnent rien de particulier. Malin.

Balthazar n'avait aucune envie d'avancer mais il jugea plus sage de coopérer pour le moment. Aussi il marcha dès qu'il sentit la lame se presser davantage contre ses côtes. Il croisa le regard de Holmes, lui faisant comprendre de ne rien faire de stupide. Il espérait qu'il écouterait, car il n'était que deux contre six. Le calcul était vite fait. De plus, il était curieux de savoir ce qu'on leur voulait. Une façon comme une autre de jeter un peu de lumière sur toute l'affaire Venise.

On les conduisit jusqu'à une porte latérale menant à la sacristie. A l'intérieur, un autre homme typé italien les attendait, en costume, avec un cure-dent coincé entre les lèvres. A en juger par son allure générale, il s'agissait du chef. Les malabars déposèrent leurs deux colis anglais entre une aube de prêtre dressée sur un porte-vêtement et une table contenant le vin sacré et les osties. Balthazar resta de marbre, très intrigué. Il frémit à peine lorsqu'il entendit le cliquetis caractérisque de plusieurs armes, et qu'il les vit braquées sur eux.

"Monsieur Cilenti est extrêmement contrarié." déclara l'homme qui parlait depuis le début. "Hier soir, Son fils Pepito a disparu, ainsi que deux millions de dollars."

Le barbier accueillit la nouvelle avec une vague de déception. C'était tout ? Voilà qui était loin d'être trépidant. Le chef -qui se contentait de jouer avec son cure-dent- claqua dans ses doigts et le malabar qui leur faisait face approcha d'un pas menaçant.

"Vous êtes les deux derniers à avoir vu Pepito. Nous avons des preuves filmées. Monsieur Cilenti est prêt à passer l'éponge sur les deux millions si vous ramenez son fils. Vous avez deux heures."

Balthazar plissa des yeux en s'apercevant que l'homme ne s'adressait qu'à lui, désormais. Tournant la tête, il ne parvint pas à cacher un léger trouble en constatant que les armes étaient dorénavant toutes pointées sur Holmes. Il émit un petit soupir, entre l'exaspération et l'amusement.

"Vous pensez vraiment m'obliger à quoi que ce soit en le menaçant lui ?" fit-il, alors qu'un rictus désabusé se dessinait sur ses lèvres.

"Joue pas au plus malin. On a les preuves en image que vous êtes très proches, tous les deux."
ricana l'homme. "Alors tu vas gentiment faire ce qu'on te dit, sinon ton mec va pourrir dans les eaux du canal."

Le barbier tressaillit, non pas en raison de ce chantage absurde mais bien parce qu'il redoutait le contenu de cette fameuse vidéo. Toute cette pression l'obligea à agir, et très vite. Il serra violemment le rasoir qu'il dissimulait dans sa manche. Le type en face n'était pas suffisamment près pour l'atteindre. S'il approchait, il éveillerait les soupçons. Il réfléchit très vite, posant sa main libre contre le porte-vêtement. Il se produisit alors un évènement étrange et inattendu : un léger cliquetis. L'instant d'après, le sol avait disparu sous ses pieds, se transformant en un escalier en colimaçon.

Les deux compères perdirent l'équilibre avant de dégringoler sous les yeux médusés des mafieux du coin.

"Qui a oublié de condamner le passage secret ?" demanda le chef d'une voix calme et nuancée.

Le barbier avait l'impression que chaque marche de l'escalier s'était imprimée de façon précise sur chacune de ses articulations, ainsi que dans son dos, réveillant les cicatrices. La chute avait été brutale et incroyablement douloureuse. Cependant, l'arrivée fut atténuée par le corps de Holmes. Balthazar venait de lui tomber dessus. Il se releva d'un bond, agacé par cette proximité involontaire. Il se massa le bas du dos et percevant du mouvement depuis l'escalier, il se pencha pour attraper le détective par le col et le forcer à se relever.

"Debout !" ordonna-t-il.

Les types descendaient déjà les marches à vive allure. Le barbier observa de tous côtés, ses yeux peinant à s'habituer à l'obscurité. Des catacombes.

"Je me rappelle de cet endroit." marmonna-t-il, son esprit embrouillé traversé par quelques bribes imprécises.

Sans attendre, il s'élança à travers le souterrain. L'air glacé passait au travers de ses vêtements trempés. Il frissonna mais continua de courir, talonné par Holmes. Arrivé dans une sorte de nouveau couloir, il sauta de côté, attendit que son compagnon d'infortune le rejoigne, et fit coulisser une plaque en pierre pour obstruer le passage juste avant que leurs ennemis ne les rattrape.

Après quoi, il pivota vers Holmes, le souffle court.

"On a énervé la mafia locale. Bravo." lança-t-il, réprobateur.

Il jeta un regard mauvais au détective puis le posa, désabusé, sur quelques squelettes étendus dans des casiers poussiéreux. En tous cas, cet aperçu de Venise lui convenait beaucoup mieux que tout ce qu'il avait pu voir jusqu'à présent. Les cadavres en décomposition, c'était un sujet qui lui parlait.
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________________________________________ 2018-05-01, 19:04


J'abattrai alors le bras d'une terrible colère D'une vengeance furieuse et effrayante Sur les hordes impies qui pourchassent et réduisent à néant les brebis de Dieu. Et tu connaîtras pourquoi mon nom est l'Éternel quand sur toi S'abattra la vengeance du Tout-Puissant.






La douleur avait envahi les moindre endroit de son corps. Sentant chaque endroit dans une douleur fulgurante, ce fut le simple mot « debout » qui le redressa. Sonné, il avait obéi à l’ordre sans faire la moindre histoire. Se massant le bras gauche en particulier, il observa son corps et le tatonna de part en part. Rien n’était brisé. Cependant, la chute avait un peu changé Sherlock Holmes. Plus de sourire cynique, plus d’ironie, plus de remarques cassantes. A la place, il fixa Balthazar dans les yeux. N’étant qu’à quelques centimètres de lui, Sherlock n’avait qu’une envie, le frapper. Le toisant de toute sa hauteur, le détective répondit d’un ton glacial.

« On a énervé la mafia locale Graves ? Depuis le début de notre aventure, tu n’utilises que la deuxième personne pour chaque méfait qui s’offre à nous. Je suppose que cette fois-ci, si utilises la troisième personne et à sa forme impersonnelle, le responsable, c’est toi. »


Pas le moment de faire une leçon de grammaire, mais la déduction était facile. Observant les environs sans un mot, ses yeux se posèrent sur la cage où le premier corps était entreposé. Il ne restait que les os, et quelques morceaux de tissus, très usés. Le corps devait daté de l’époque où les ennemis des Doges étaient envoyé ici pour purger leurs peines. Peut être même qu’il s’agissait d’un Temps bien plus ancien, car en règle générale, en Italie, les prisonniers étaient exécutés rapidement. Avançant dans les ténèbres, il sortit un briquet à gaz d’aspect ancien, qu’il alluma sous le nez du barbier. Leurs visages n’étaient qu’à quelques centimètres l’un de l’autre, et on pouvait y lire des deux côtés une haine sans nom.

« Il nous reste approximativement 75 minutes avant que je manque de gaz, si on compte la réserve de ma poche intérieure. On va commencer par faire simple. Oui, nous sommes venus ici. Mais maintenant, je compte sur tonbrillant esprit de génie, pour visualiser la carte parfaite des souterrains de Florence. Oh, c’est vrai. Ta petite cervelle n’en ait pas capable. »


Avançant dans les catacombes d’un pas sur et rapide, il s’arrêta devant une porte en bois d’aspect ancienne et pourrie de par en par.

« Oh c’est vrai. J’oubliais.»


A nouveau face à Graves, Sherlock Holmes plaça son briquet proche de ses mèches brunes. Sur son visage, on pouvait y lire une colère calme et froide.

« La prochaine fois que tu essaies de m’étrangler, Graves, je te tue. »


Ce n’était pas un « je te tue » amical. Il était sincère, profond, cassant, meurtrier et lourd de menace. Donnant un coup de pied dans la porte cette dernière céda. Sherlock dut se baisser à plusieurs reprises. Sur les parois des crânes étaient visibles. Ils étaient certainement sous la fosse commune de l’ancien cimetière attenant à la basilique. Avançant à rythme soutenu, le silence macabre ne rassura pas le moins du monde le détective. Mais une chose était sûr, c’était que Graves avait au moins réussi à ralentir leurs poursuivants.
Plusieurs flashs passèrent dans l’esprit du détective. L’image d’une bande, courant dans les catacombes en poursuivant deux individus. Ils étaient tous vêtus d’une longue robe à capuche, certaines noires, d’autres rouges. Portant sa main à sa tempe, la vision s’arrêta. Qui était cette bande ? Et pourquoi poursuivaient-ils ses deux hommes…
Mais la réponse ne tarda pas à se présenter. Alors que le tunnel était de plus en plus étroit, une lueur apparut au bout de ce dernier. Avançant à pas de loup, Sherlock s’avança.
Le tunnel qu’ils avaient suivi donné sur une meurtrière surélevé. Il n’y avait de la place que pour une personne, mais étant donné le fait qu’ils soient tous les deux très maigres, il se retrouvèrent collés l’un à l’autre. Cette position très intime le rendait mal à l’aise. Il pouvait sentir le souffle du barbier dans son coup. C’était étouffant. Caché par les ténèbres et la pénombre, Sherlock se risqua à jeter un coup d’oeil. Ce qu’il vit en bas lui raviva la mémoire.
La crypte était circulaire, et une multitude de meurtières étaient visibles, à des hauteurs différentes. Ils se trouvaient dans l’une d’elle, à une hauteur moyenne et qui ne leur feraient aucun dégâts si ils se risquaient à sauter. Plusieurs flambeaux étaient sur les murs, donnant un aspect macabre au lieu. Mais le plus malsain n’était pas là. Une multitude de personne (environ une cinquantaine) étaient vêtu de capes de velours à long capuchon. Au centre de la pièce, un autel ancien trônait. Derrière ce dernier, une silhouette à la cape différente des autres était visible. Cette dernière étaient bleue nuit, avec des tâches de sang caillées. Le fait qu’elle ne soit pas lavé devait d’ailleurs avoir un sens. Sur l’autel, la silhouette d’une jeune femme, bâillonnée et entièrement nue fixait son bourreau avec une lueur de peur indéfinissable dans le regard. L’homme parlait en latin. L’avantage de Sherlock, c’était qu’il connaissait cette langue mieux que l’italien. Aussi, il prit le soin de traduire au barbier les propos de l’homme. Une dague étincelante était dans sa main gauche, et il tenait dans sa main droite un livre noir.

« Toi Satan, tout puissant Archange déçu… Accepte ce sacrifice, en guise de pardon. Que par ce sang, ta Toute-Puissante colère s’abattent sur les deux hérétiques qui se sont amusés à souiller ton lieu de culte si sacré... »


Fronçant les sourcils, Sherlock observa un des murs du fond. Sur ce dernier, on pouvait y lire deux messages, écrits à la bombe à peinture rouge. Le premier portait son écriture, le deuxième, qu’il ne connaissait pas avait une écriture soignée, penchée et précise. C’était sûrement celle de Graves. Les messages disaient la chose suivante :

« Satan n’est qu’un chien à la solde d’Apollon, le seul vrai Dieu-Vivant et Ultime de ce monde ! »

« Eulalie, je t’aime ! Satan, je t’emm***e de tout mon coeur ! »


Tournant son visage vers Graves, on pouvait y lire une légère inquiétude.

« Je crois qu’ils parlent de nous. Bien, on dirait bien que nous sommes pris en sandwitch. Une idée brillante à soumettre? »





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Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.


DEMAIN DES L'AUBE.


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________________________________________ 2018-05-03, 15:31


Je suis contre les détectives...
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Des catacombes, une odeur humide de moisi, et Holmes en gondolier. On aurait presque pu songer qu'il s'agissait du début d'une histoire drôle. En tous cas, cette plaisanterie n'amusait pas du tout Balthazar. En revanche, la menace du détective sonna comme une bouttade à ses oreilles. Elle ne fut sur lui qu'une caresse à laquelle il répondit par un regard provocateur. Depuis quand se prenait-il pour un criminel ?

N'inversons pas les rôles, assassin du dimanche. pensa-t-il alors qu'il braquait ses yeux perçants sur lui.

Il se souvenait encore de quelle façon experte il avait éventré le poulet avec le couteau pour en extraire le rasoir. Peut-être avait-il un passé plus intéressant qu'il ne le laissait paraître ? Ou s'agissait-il seulement de ses aptitudes en médecine ? En tous cas, cet homme éveillait son intérêt de seconde en seconde. Qui l'aurait cru ?

Imperturbable, il emboîta le pas à Holmes à travers la sombre cavité des souterrains. L'atmosphère glaciale sentait fortement la pierre, l'humidité et les os. Balthazar promena un regard intrigué sur les crânes disposés le long des parois. Leurs orbites vides semblaient le happer et le suivre tandis qu'il s'éloignait. C'était fascinant. Cela lui rappelait le travail de son défunt père, dans le monde des contes. Il finit par détourner les yeux en apercevant une lueur au bout du tunnel ; ce dernier devenait d'ailleurs de plus en plus exigu.

Holmes s'y engagea et le barbier le suivit, peu désireux de rester en arrière. Si le détective faisait une découverte intéressante, il ne voulait pas être le laissé pour compte. Il se faufila dans la mince ouverture, se retrouvant tout contre Holmes. Bientôt, ils furent presque coincés, serrés l'un contre l'autre dans le mince espace procuré par la meurtrière. Il se rendit très vite compte que cette position, loin d'être confortable, était de surcroit très étrange.

Il détourna les yeux de Holmes et plaqua une main sur ses cheveux bouclés qui lui cachait la vue. Il aperçut alors une vaste crypte éclairée par de nombreux flambeaux le long des parois, ainsi qu'une cinquantaine de personnes vêtues de robes, la tête encapuchonnée. Bien, après la mafia, la secte. Auraient-il droit à un autre cliché ou s'agissait-il du dernier ?

Des couinements désespérés émanaient de l'autel central sur lequel était attaché une jeune femme nue. Elle s'apprêtait à être sacrifiée par l'homme juste à côté d'elle. Inutile de parler latin pour comprendre l'essentiel. Cette scène était suffisamment éloquente. Balthazar tiqua en entendant Holmes traduire la langue morte à voix basse. Encore une manière de faire son intéressant. Le poussant en avant -ce qui plaqua davantage son acolyte contre la paroi- il se hissa un peu plus contre lui afin de mieux voir la crypte dans sa globalité. Les graffitis sur le mur du fond le firent instinctivement crisper les poings sur les épaules de Holmes. Il entendit à peine les paroles du détective. Rien de plus qu'un écho lointain.

« Eulalie, je t’aime ! Satan, je t’emm***e de tout mon coeur ! »

Qui avait bien pu écrire ça ? Il reconnaissait son écriture, mais il ne pouvait croire qu'il avait réellement pu tracer ces mots. Il devait être dans un état lamentable pour en arriver à de telles extrémités...

"Faut tout faire soi-même."
grommela-t-il en gesticulant et poussant Holmes pour s'extraire de l'interstice.

Il chuta deux mètres plus bas dans un bruit sourd, parvenant de justesse à atterrir sur ses pieds. Il grimaça en sentant des chevilles protester. Le bruit n'avait pas éveillé les soupçons des adorateurs de Satan qui étaient visiblement suspendus aux lèvres de leur chef s'exprimant toujours en latin d'une voix forte et profonde. Le barbier fit signe à Holmes de le rejoindre. Avait-il peur ? Cette idée fit apparaître un léger rictus sur son visage pâle. Il se faufila entre les colonnes qui soutenaient la crypte, épousant les ombres pour se rendre jusqu'au mur couvert de leurs messages. Songeur, il posa la main sur la peinture rouge formant la lettre "E" d'Eulalie.

"C'est faux." marmonna-t-il, le front penché en avant, la mâchoire contractée.

Il trouvait très pertinent de préciser cette information à Holmes. Il cherchait à démentir les propos d'un pauvre fou imbibé d'alcool. C'était d'une importance capitale à ses yeux. Il craignait que le détective ne découvre... l'une de ses faiblesses.

"Sono lì! SONO LI!" s'écria un type encapuchonné.

La nouvelle se répandit bientôt dans le club des capuches. Là encore, nul besoin de parler italien pour comprendre qu'ils étaient repérés. Lentement, Balthazar se détourna des inscriptions sur le mur pour faire face à leurs ennemis. Discrètement, il effleura la lame de son rasoir du bout du pouce. Son arme était toujours cachée dans sa manche trop longue. Merci aux vêtements de Holmes d'être trop grands pour lui.

Les adorateurs de Satan formèrent une ligne bien nette devant eux. Le barbier sentait avec un vif plaisir le regard perplexe du détective peser sur lui. Oui, il les avait livrés, mais il était en possession d'une information qui venait de lui revenir en mémoire.

"Portali a me !" ordonna le chef d'un ton grandiloquent.

Aussitôt, quelques capuches se détachèrent du rang serré pour attraper les deux hommes par le bras et les mener jusqu'à l'autel. La fille s'était évanouie.

"Vous osez révénir ichi après avoir blachphémer notre chaint chanctouaire !"
s'écria le chef avec un accent italien si prononcé que le barbier plissa des yeux pour se concentrer.

Un petit silence s'installa. Le chef poursuivit, levant son poignard vers le plafond :

"Vous avez chouillé notre archange Chatan avec vos mots hérétiques ! Le chang doit être verché pour apaiser la colère de notre démon !"

Balthazar se contentait de le fixer, attendant patiemment qu'il termine son pénible discours. Ce comportement impassible dérouta le chef qui enleva sa capuche pour ajouter, en aparté :

"Ch'est normalement à che moment qué vous mé souppliez de vous lécher la vie sauve. Cha ne peut pas fonctionner chi vous êtes volontaires."

Les yeux du barbier brillaient d'un éclat étrange. Il les baissa en direction de l'autel.

"Le sacrifice a déjà été commis. Nous nous en sommes chargés cette nuit."
déclara-t-il d'un ton faussement désinvolte. "Vérifiez dans votre réserve de biscuits."

La veille, Holmes et lui avaient trouvé l'endroit où les adorateurs de Satan entreposaient leur collation, entre deux prières. L'autel servait aussi de garde-manger. Indécis et méfiant, le chef claqua des doigts et aussitôt, deux capuches s'empressèrent de détacher la femme évanouie pour la jeter par terre sans ménagement pendant que quatre autres soulevaient le couvercle de l'autel. A l'intérieur, comme dans un cercueil, était allongé le cadavre d'un homme, sur un matelas de boite à biscuits de différentes marques. Entre ses mains pieusement croisées contre son torse était placé un paquet de...

"Pepito." acheva Balthazar, avant de jeter un coup d'oeil à Holmes.

Ils avaient retrouvé le fils du Parrain du coin. Cependant, ils allaient avoir quelques difficultés à le ramener sain et sauf auprès de son père.

Il se souvenait qu'ils s'étaient amusés à cacher le corps dans le garde-manger des adorateurs de Satan, après avoir souillé leur mur de prière.

"Chet homme est déjà mort." commenta le chef en se grattant la barbe du bout de son poignard. "Cha né peut pas compter comme chacrifice ritouel. En plous, vous avez blachphémer mes biscouits !"

"BESTEMMIA !" scandèrent les adorateurs d'un ton passionné, tel un choeur d'église.

"Nous allons apaiser la colère de Chatan avec le chang dou blachphémateuuuur !"
lança le chef tout en pointant le poignard vers Holmes. "Après cha chera votre tour !" ajouta-t-il en adressant un sourire jaune au barbier.

Deux types à capuche maintenaient fermement chacun des bras du détective, l'empêchant de bouger malgré ses tentatives. Le chef ne prit pas la peine de le faire attacher sur l'autel. Il semblait plutôt pressé d'apaiser la rancoeur de son démon.

Balthazar s'aperçut que la pression qu'on exerçait sur son bras était moindre. Sans doute que la ferveur du sacrifice plongeait son ennemi dans un état second, trop focalisé sur son acolyte. Rapidement, il se déroba à la prise de l'homme encapuchonné et lui envoya son coude en plein visage. Il se précipita ensuite vers le chef et à l'instant où il levait son poignard vers Holmes, il lui offrit l'ouverture nécessaire dont il rêvait. Il y eut un éclair argenté, suivi par un jet de sang époustouflant. Le liquide chaud et écarlate éclaboussa son visage et celui de Holmes, juste derrière lui, alors que le chef avait lâché son poignard pour plaquer ses mains contre sa gorge rouge. Il adressa un regard interrogateur à Balthazar qui sentit un frémissement délicieux parcourir son échine. Comme il aimait cet étonnement qu'il lisait dans leurs yeux, à cet instant-là ! Ce moment où la vie les quittait, cette dernière pensée... Alors, c'est toi qui m'as tué ? Toi...?

L'homme s'affaissa au sol avec une lenteur exquise, dans le silence glaçant de la crypte. Le barbier le regarda de haut, alors que le sang gouttait au bout de son rasoir qu'il tenait dans le prolongement de son corps.

"Blasphème réparé." lança-t-il à ses sbires d'un ton étrangement placide. "Satan est apaisé. Rentrez chez vous."

Le sang avait été versé. C'était tout ce qui comptait, après tout. Il espérait que cela allait calmer cette bande d'imbéciles.

Il sentait le regard de Holmes peser dans son dos. L'adrénaline dispensait une agréable sensation de sérénité dans tout son corps. Nul n'allait regretter cet homme au sol. Il méritait de mourir.
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________________________________________ 2018-05-09, 17:37

Assassini ! Assassini !






« Balthazar non ! »


Le sang gicla et vola à travers les airs dans un silence macabre. Dans un gargouillement étrange, l’homme s’écroula et sembla tomber avec une lenteur extrême. Sentant que la pression de ses deux geôliers étaient moindre, le détective se dégagea brusquement. Poussant le barbier sans cérémonie, il s’accroupit aux pieds de l’homme. Il avait déjà perdu énormément de sang. Plissant les yeux, comme si il était en train de se concentrer, Sherlock estima les chances de survie de l’homme. C’était peine perdue, à peine eut-il le temps de s’accroupir que l’homme était déjà mort en réalité. Fermant les yeux de la victime, Sherlock observa l’entaille. Elle était parfaite. C’était d’une beauté macabre sans nom. Ce n’était pas l’oeuvre d’un simple meurtrier qui venait de tuer pour la première fois. Non. Il avait vu pu voir le sang froid de Graves, et également admirer le geste parfait. Se redressant de toute sa taille, ses yeux se portèrent encore sur l’homme un dernier instant.
Sherlock l’avait vu de ses propres yeux. Il en avait même la preuve matérielle. Balthazar Graves était bien celui qu’il pensait être.
Pivotant sur lui même, son regard embrasa la salle dans un air calculateur. Tous étaient en train de les garder. Personne n’avait eu dans l’esprit que leur Grand Maître pouvait mourir. Personne ne semblait même penser qu’il était mortel. Ils étaient tous paralysés, ne sachant plus que faire. C’était comme si la secte était en train se détruire de l’intérieur. Il n’y avait plus de tête, plus de cerveau. Sherlock pouvait voir sous certaines capuches la tristesse. Chez d’autres, la haine, mais sur la plupart, du soulagement. Avec une violence inouïe, Sherlock se saisit brutalement de Balthazar par le col et l’attira à lui. Son nez n’était qu’à quelques centimètres du siens. Une colère infinie brillait dans les yeux du détective. Graves, quand à lui, semblait tout à fait normal. On pouvait cependant lire la passion dans ses yeux. Celles que l’on devait ressentir après un acte impulsif et incontrôlable. Le serrant un peu plus contre lui, Sherlock déclara d’un ton cassant.

« Assassin. »


C’était un mot simple. Mais il en disait beaucoup. Il aurait pu se contenter de dire « meurtrier » ou « malade mental ». Mais ce n’était pas le cas. Balthazar Graves était un assassin. Ni plus, ni moins.
Le relâchant avec hargne en le projetant en arrière il s’avança de plusieurs pas pour lui marcher dessus métaphoriquement.

« C’était une erreur de venir ici ce soir. »


Le fixant avec une hardeur sans nom, Sherlock poursuivit.

« Il ne méritait pas de mourir. Personne ne mérite la mort. Et tu n’es personne pour l’offrir ainsi. »


On y était. Sherlock venait d’avouer implicitement une de ses plus grandes craintes. C’était pour ça, qu’il était devenu détective. Il avait une peur bleue de la mort. Et il détestait ceux qui la donnait aux autres prématurément. Après la mort, il y avait quoi, en fin de compte ? Rien. C’était une évidence cartésienne. Ses yeux se portèrent ensuite sur la secte. Quand plus personnes n’est aux commandes… C’est le Chaos.
Parlant en italiens de manière dynamique et énervé, une dispute éclata dans les rangs des membres restant de la secte. Bientôt, plusieurs couteaux sortirent également de sous les capes, et les comptes commencèrent à se régler dans la confusion la plus totale. Certains s’entretués, d’autres prenaient simplement la fuite. Tendant son doigt menaçant vers Graves, Sherlock déclara :

« On terminera ça plus tard. Mais crois-moi, j’en resterai pas là. »


Et, sans prévenir, il s’engagea avec les fuyards. Ramassant la cape d’un macabé, il s’en enveloppa. Marchant comme si il glissait dans les catacombes, il prit à gauche, puis à droite trois fois. Enfin, après plusieurs minutes de marche, où il ne se retourna même pas pour voir si Graves le suivait, Sherlock poussa une porte poussiéreuse. On pouvait voir la lumière dans les interstices. Jetant la cape à la sortie du tunnel, il poussa la porte avec force. Quelque chose bloquait sa sortie. Forçant de tout son poids, quelque chose céda derrière la porte, et il tomba en avant. La lumière commença à l’aveugler, mais une fois habitué, il put constater où est ce qu’il venait de tomber à plat ventre…
Se relevant, il s’appuya contre une vitrine, où était entreposé une guitare au nom de « Jimmy Hendrix ». Les clients du Hard Rock coffee les observèrent, figés. Sans réfléchir, Sherlock prit une pull à capuche à sa taille et en jeta un à Graves avant de sortir dans le chaos le plus total.

« Souvenirs. Tu as du sang sur tes vêtements. »







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