tu rêves encore

Il y avait une chose qu’Arthur exigeait absolument. Lui qui se fichait d’habitude de ce que les gens faisaient, là-dessus, il était intransigeant, et ne laissait passer aucune faute là-dessus. Le silence dans son aquarium. Il ne rigolait pas là-dessus, que ce soit enfants, ou plus âgés, n’importe qui, il ne permettait à personne de déranger la quiétude de l’aquarium. Son ton autoritaire gagnait généralement le respect lorsqu’il faisait taire quelqu’un qui parlait bien trop fort.

Il y avait deux publics face à cela : ceux qui appréciaient l’endroit pour le silence qu’on y trouvait toujours, incluant là des personnes que l’ancien poulpe voyait parfois régulièrement, des hommes ou femmes d’affaires qui voulaient se détendre, certaines personnes qui revenaient du sport pour se poser un instant dans un univers calme avant de rentrer, toute une poignée de personnes qui reconnaissaient l’efficacité d’Arthur pour imposer le calme (bien qu’Arthur se fichait bien de leur bien-être, il ne faisait ça que pour lui et les poissons).

Mais de l’autre côté, il y avait également ceux qui fuyaient l’endroit, outrés de se faire taire par quelqu’un. Ca ne plairait surement pas à Lily de savoir ça, mais grand bien leur faisait à ces gens s’ils ne pouvaient pas assimiler les notions de respect dans un tel endroit. Ils se taisaient dans les bibliothèques alors que les livres s’en contre-fichaient du silence ou du bruit, alors pourquoi serait-ce si dur de la boucler ici ?

Parmi les réguliers qui venaient toujours à l’aquarium, si bien qu’Arthur connaissait leur visage et leurs habitudes, il y avait une jeune femme bien bavarde, remplie d’un trop (vraiment trop) plein de joie et d’un brin de folie qui épuisaient l’ancien poulpe : c’était trop dur de la reprendre, elle parlait encore et encore, en plaçait toujours une, s’égarait dans des discours sans queue ni tête avec des réflexions étranges sur le quotidien des poissons ou sur un monde pas moins bizarre qui n'intéressait pas du tout Arthur.

Elle n’était pas méchante. Juste épuisante, et bien bruyante.

White, soupira-t-il lorsqu’elle arriva.

tu rêves encore

Arthur avait soupiré en voyant la jeune femme arriver en sautillant avec son hyperactivité habituelle. Il inspira un bon coup, conscient qu'elle était gentille, juste épuisante. Il poussa le chariot de nourriture devant l'aquarium des poulpes, en montant sur la petite échelle sur le côté, réservée au personnel (lui, donc), avec une imposante boite qu'il posa sur le haut du bassin, pendant qu'elle parlait. Ce qu'elle avait d'agréable, c'était au moins son affection pour l'endroit. Elle le trouvait magnifique, et elle avait raison. Arthur connaissait très peu d'endroits aussi beaux qu'ici.

Bonjour, fit-il doucement tout en ouvrant la trappe du bassin, avant d'ouvrir la boite qui était un mélange de crabes et de coquillages, afin d'en laisser tomber une importante quantité proportionnelle au grandiose appétit des octopodes. Merci, prit-il le temps de répondre à la jeune femme. Il n'était pas du genre à s'exprimer beaucoup, même avec ses proches, ses remerciements étaient toujours banals et pouvaient paraître froids de temps à autres.

Il descendit de l'échelle après avoir refermé le compartiment, pour le ranger dans le chariot. Il regarda un instant l'intérieur du bassin, dans lequel les poulpes, qui avaient faims, connaissant l'heure de leurs repas, bougeaient vers les coquillages et crustacés qui tombaient lentement dans l'eau. N'ayant pas envie que December brise cet instant, il parla le premier, d'une voix calme, comme le reste de cet endroit.

Il y a de nombreux êtres marins qui sont étonnement très intelligents, commença-t-il d'une faible voix, doucement. Les poulpes en font parti. Ils sont capables d'ouvrir les coquillages, ou d'enlever les carapaces des crabes pour en manger le contenu. Certains ont essayé de mettre de la nourriture dans une boite puzzle, que les poulpes ont réussi à ouvrir. Les regarder manger, c'est regarder un exploit de la nature.

Arthur reprit son chariot, conscient d'être suivi par l'énergique December. Les yeux encore rivés vers les poulpes et leur danse alimentaire, ils marchèrent un peu plus loin dans l'établissement jusqu'au grand aquarium. Cet endroit lui faisait penser à celui qui se trouvait dans l'établissement dans lequel il a été dans l'ancien monde. Un lieu qu'il n'appréciait pas particulièrement, à part pour les souvenirs qu'il tenait de Dory. Il avait donc obtenu de Lily de pouvoir construire ce même grand aquarium, qui était ici depuis déjà quelques bons mois.

C'était bien sûr ici qu'il y avait besoin de plus d'entretien, et donc de plus de temps. Mais cet écosystème savait répondre naturellement aux besoins de 95% des êtres qui s'y trouvaient, si bien qu'il n'y avait besoin que de peu d'interventions du responsable d'aquarium pour y mettre de la nourriture. Il en fit alors le tour, sur la rampe qui tournaient autour de la salle pour monter jusqu'en haut, afin d'atteindre le haut.