C’était même plus que trop tôt, actuellement, de chercher un quelconque prénom pour quelqu’un qui n’existait pas encore. En soit, si, notre fille existait déjà un peu pour nous deux. Anya me le montrait chaque jour et préparait sa venue comme celle du Saint-Esprit mais… J’avais encore clairement des difficultés à l’accepter de mon côté. Déjà parce que je ne partageais pas la même euphorie qu’elle – Anya la gérait visiblement bien toute seule – et qu’il ne s’agissait pas pour moi d’un sujet sur lequel on pouvait s’amuser ou plaisanter. Un enfant, ça représentait tout un tas de choses et pas seulement une idée comme ça. Mon poste à la mairie me permettait d’augmenter la fin du mois et son travail à domicile d’autant plus, mais était-ce suffisant ? Est-ce que tout… serait suffisant ?

« D'accord. On s'occupe d'abord du berceau et on reparlera du prénom plus tard. » Je poussai un soupir soulagé, satisfait qu’elle se décide de rendre les armes aussi rapidement pour une fois. Même si elle tendait à nouveau vers un sujet effrayant, elle avait la présence d’esprit de ne pas garder le doigt appuyé là où ça faisait mal. Je l’observai remettre un peu d’ordre dans le désordre organisé qui régnait dans la pièce, puis lui adressai un sourire compatissant quand elle revint vers moi. Appréciant son contact, je posai mes mains autour de ses joues et déposai un baiser sur son nez en trompette. « On reparlera de plusieurs choses plus tard… » Complétai-je simplement avant qu’elle ne reprenne la parole.

« J'imagine que c'est toi qui va monter le berceau, n'est-ce pas ? » Je haussai un sourcil. Etait-elle allée voir à l’extérieur à ce point, ou bien… « Je suppose que c'est trop fatiguant pour quelqu'un dans mon état. Et tu sais quoi ? Ça me va. » Je souris à sa remarque enfantine et narquoise. Ça lui allait. Forcément que ça lui allait, puisqu’elle n’avait pas à travailler du bois ou même s’embêter à y penser. Même si cela incluait qu’elle n’aurait pas exactement son mot à dire pour la forme finale… Mais qu’elle se rassure, mon imagination n’était pas aussi débordante que la sienne et j’étais resté dans les thèmes classiques du genre. Néophyte approuvé, mieux valait ne pas se lancer dans des extravagances qui ne nous correspondaient pas. « La déco c'est plus amusant. Les câlins aussi. » Elle marquait un point.

Je haussai un sourcil intrigué avant de pousser un soupir amusé. Anya était incorrigible, même si ses hormones avaient finies par la laisser de plus en plus tranquille au fil des mois. J’avais appris que la fin de grossesse et l’accouchement diminuaient considérablement la libido du couple de parents pour qu’ils se concentrent sur leur progéniture… Je devais en constater directement les effets sur la femme que je tenais désormais entre mes bras. Posant mon menton sur ses cheveux roux encore mouillés, je la gardai un moment contre moi au cœur de cette pièce qui aurait, dans quelques mois, tous les signes de vie nécessaires à l’accueil d’un bébé.

« Tu n’es jamais fatiguée ? » Hasardai-je en venant embrasser ces lèvres rougies, un brin moqueur. « On va d’abord s’assurer que ce ventre est rempli avant… De passer à d’autres choses sérieuses. » Je l’embrassai une nouvelle fois avant d’être coupé par Hoover et deux autres compagnons qui jappèrent à notre intention. Je me tournai vers eux, adressant un regard entendu à Anastasia, avant de garder sa main dans la mienne pour rejoindre la cuisine de la maison. Une nouvelle soirée débutait. Puis d’autres jours suivraient, encore. Et encore. Jusqu’à ce que, doucement, tout commence à basculer.

- FIN DU TOPIC -